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Cours d’agriculture (Rozier)/FEU

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Hôtel Serpente (Tome quatrièmep. 544-550).


FEU, Physique.


Plan du travail sur le mot Feu.


§. I. Nature du Feu ; systèmes sur son origine.

§. II. Propriétés & effets du Feu.

§. III, Manière de produire & d’entretenir le Feu.

§. IV. Feu central.

§. V. Feux follets.


§. I. Nature du Feu ; systèmes sur son origine.


I. Il est peu de principes dans le système du monde, aussi généralement répandu, & dont la nature soit aussi peu connue, que le feu ; le physicien, le chimiste & le philosophe qui étudient les êtres en grand, l’ayant considéré sous différens rapports, ont expliqué différemment & sa nature & son origine. Se retrouvant dans tous les corps, tantôt il semble en faire une partie constituante, tantôt il n’y paroit qu’agrégé & comme accessoire : dans d’autres, comme dans les substances inflammables, il semble en être le principe, cherchant perpétuellement à agir & à se développer ; tandis que dans quelques uns, comme la lumière, on diroit qu’il est sans énergie, & qu’il attend l’impression d’un mouvement particulier pour annoncer sa présence. Ces différens effets considérés isolément, ont dû faire naître nécessairement une foule de systèmes sur la nature de cet élément.

On peut les réduire à trois principaux. Le premier regarde le feu comme un élément propre, simple de sa nature, existant dans tous les corps, interposé entre leurs molécules, & attendant pour paroître que l’on vienne à briser les entraves qui le retiennent. Ainsi dans la pierre que l’on frappe avec le briquet, le choc fait sortir le feu qui étoit logé dans son intérieur. Ce système est le plus ancien & le plus commun.

Le second nie l’existence du feu proprement dit, & ne le regarde que comme l’effet d’un certain degré de mouvement imprimé aux molécules de la matière. Dans l’exemple de la pierre à fusil ; il n’y a point de feu ni dans la pierre ni dans l’acier ; mais le choc occasionne dans l’un & dans l’autre ce degré de mouvement nécessaire pour que les molécules de la matière s’embrâsent & passent à l’état de feu. Ce système ingénieux, & dont le développement peut être poussé très-loin, a trouvé un grand nombre de partisans. Le système qui enseigne que le feu n’est qu’une modification de la lumière, qui subit un mouvement plus rapide que son mouvement ordinaire, & qui communiquant ces excès de mouvement aux molécules de la matière qu’elle pénètre, produit le feu, rentre nécessairement dans le précédent.

Le troisième enfin, considérant le feu, non comme un élément, mais comme un mixte, lui donne pour base le phlogistique & l’air pur ou déphlogistiqué. (Voyez le mot Air) Pour entendre ce système si bien développé par M. Scheele, dans son Traité chimique de l’air & du feu, il faut considérer avec lui le phlogistique comme un élément, un principe parfaitement simple, qui par son affinité ou sa tendance à se combiner, peut passer ou être transmis d’un corps à un autre. Ce passage entraîne des changemens considérables dans le corps qui le reçoit, ou qui en est dépouillé. Le phlogistique pur & isolé n’est ni la lumière ni la chaleur ; mais par son union avec l’air pur, que ce chimiste suédois nomme air du feu, comme étant le seul propre à son existence, le phlogistique forme la matière de la lumière & de la chaleur, en raison des proportions dans lesquelles il se trouve : cet élément a une telle tendance à la combinaison, qu’on ne peut jamais l’obtenir seul, car il n’abandonne point un corps, quelque foiblement qu’il y adhère, S’il n’en trouve pas un autre avec lequel il puisse être en contact immédiat.

Nous n’entrerons pas dans de, plus grands détails sur cet ingénieux système, qu’un très-grand nombre d’expériences semblent confirmer, & nous renvoyons à l’ouvrage cité, où il est entièrement développé ; il nous suffira de considérer le feu comme un mixte composé du phlogistique, ou principe inflammable élémentaire & de l’air pur ou déphlogistiqué. Ces notions pourront nous conduire facilement à l’explication des différens phénomènes que le feu, c’est-à-dire, que ces deux principes réunis & mis en action nous offrent tous les jours. Ces phénomènes consistent dans ses propriétés, dans ses effets, & les moyens de le produire & de l’entretenir ; nous allons les parcourir rapidement, & nous terminerons tout ce que nous avons à dire sur le feu par l’explication de ces apparences lumineuses connues sous le nom de feux follets.


S. II. Propriétés & effets de Feu.


Puisque le feu, d’après ce que nous venons de dire, est un mixte, un agrégat de matière, il doit avoir plusieurs propriétés de la matière ; mais comme il semble n’exister qu’au moment de cette réunion, il est, très-difficile de les saisir. Son étendue se connoît par l’espace qu’il occupe dans la plupart des corps dans lesquels ils se développe ; & elle paroit d’une maniére sensible dans la dilatation qu’éprouvent alors les solides comme les liquides.

Sa divisibilité se manifeste par la tendance qu’il a à se distribuer dans toutes les substances qui sont en contact avec lui. Il agit comme les fluides, en cherchant, pour ainsi dire, à se mettre toujours en équilibre.

Nous ne dirons rien de son impénétrabilité & de son élasticité.

Pour ce qui regarde sa pesanteur, il est certain qu’il en a une, & que son action augmente celle de certains corps sur lesquels il agit ; c’est ainsi que cent livres de plomb calciné, fournissent cent dix livres de minium, & que presque tous les métaux calcinés augmentent de poids. Non-seulement le feu est fluide, mais il paroît, jusqu’à un certain point, cause de la fluidité des autres corps ; car la plupart des substances qu’il a attaquées vivement, sont, ou réduites en cendres, ou fondues, & dans cet état elles coulent comme les fluides : tels sont les métaux fondus.

Sous quelque point de vue que l’on considère le feu, son action se communique d’une substance à une autre, & dans les trois systèmes la raison en est la même. Si l’on approche un corps enflammé d’un corps inflammable, ce dernier parviendra bientôt à l’état du premier, & tous deux brûleront, parce que le corps enflammé se communiquant à celui qui l’avoisine, s’y distribue uniformément, agit insensiblement sur toutes ses parties, les divise, les sépare, les fond, les calcine, ou les volatilise, suivant leur nature. Voici comment on peut concevoir cette action du feu. La matière ignée, en se répandant entre les pores d’un corps, ou en s’y développant tend à écarter leurs parties, & à les séparer les unes des autres, comme l’eau tend à écarter les parties d’une éponge qu’elle pénètre. Ainsi, dès que le feu se met en possession d’un mixte quelconque, ses parties se dilatent aussi-tôt, & occupent une plus grande place. Ce premier effet, la dilatation, a lieu dans tous les corps, plus sensiblement cependant dans les fluides que dans les solides ; c’est une vérité constante, & dont nous nous appercevons tous les jours. Cette dilatation est un premier degré de séparation, & facilite de plus en plus l’action du feu : si les parties du corps se divisent en molécules si tenues qu’elles pèsent moins que l’air qui les environne, alors elles s’élèveront avec le feu & se volatiliseront ; si elles sont plus pesantes & fixes, alors elles se contenteront de se détacher les unes des autres, & prendront une forme pulvérulente, telles sont les cendres, dernier résidu ordinaire de presque toutes les substances qui ont été enflammées. Non-seulement les fluides se volatilisent à un certain degré de feu, mais ils entraînent encore avec eux les parties les plus légères des corps qui y sont plongés, & cela par gradation. Comme toutes les parties qui entrent dans la composition des solides n’ont point entr’elles la même cohérence, les moins fixes se séparent les premières, à un degré de feu qui ne suffit pas pour détacher les autres & les volatiliser ; on y parvient cependant en graduant la chaleur, c’est-à-dire, en augmentant le feu depuis le degré le plus doux, qui suffit pour séparer les parties les plus volatiles, jusqu’au degré le plus fort, qui est nécessaire pour élever celles qui sont les plus tenaces & les plus fixes : c’est un moyen que la chimie & les arts emploient pour analyser les mixtes, & séparer leur principes ; cette opération est connue sous le nom de distillation. (Voyez Alambic, Distillation)


§. III. Manière de produire & d’entretenir le Feu.


Tous les corps qui se rencontrent dans la nature, semblent recéler dans leurs veines la matière ignée, qui n’attend que l’instant, une circonstance favorable pour se développer : Boerhaave est parvenu à tirer des étincelles de la glace même. Mais quelles sont les causes les plus propres à forcer la matière du feu de se développer & de se manifestez dehors ? Un ébranlement violent dans les parties insensibles des mixtes peut produire cette effet, & cet ébranlement peut naître ou d’un frottement rapide, ou de chocs redoublés, ou de l’effort que quantité de substances sont pour se pénétrer les unes & les autres.

Toutes les fois que deux corps frottent rapidement l’un sur l’autre, il en résulte un ébranlement qui se transmet aux parties insensibles de ces corps, & met à découvert d’abord en partie le principe du feu qu’elles recéloient ; si cette action est portée un peu plus loin, il en résulte une chaleur qui augmente à proportion que le frottement est plus considérable ; lorsqu’il est parvenu à son dernier terme, que le phlogistique ou le feu élémentaire a une communication immédiate avec l’air pur, celui qui est absolument nécessaire à l’existence apparente du feu, alors il y a une ignition, les parties du corps ébranlées s’embrasent & le corps se consume. Frottez rapidement un morceau de bois sec sur une planche, les deux surfaces s’échaufferont, se roussiront, & il en sortira une fumée qui n’est que l’humidité du bois, que le feu qui commence à se produire fait volatiliser ; enfin le bois s’enflammera. Les chocs redoublés produisent des effets à peu près semblables entre les corps solides. Le briquet tire des étincelles d’un caillou qu’il frappe, & ces étincelles sont si vives, que le morceau d’acier enlevé par la pierre, éprouve une chaleur assez grande pour le mettre en fusion, comme on le voit facilement par les petits grains métalliques que l’on retrouve sur un morceau de papier au-dessus duquel on a battu le briquet. Lorsque deux fluides qui contiennent en très grande abondance le principe inflammable se pénètrent, il arrive presque toujours que cette pénétration est accompagnée de chaleur & quelquefois d’inflammation ; d’après ce principe, on est parvenu à enflammer presque toutes les huiles, ces corps inflammables par excellence, en y versant des acides convenables & très-concentrés.

Le feu agissant dans un corps, & le consumant insensiblement, finit par s’éteindre lorsque tout ce qui pouvoit l’entretenir est totalement dissipé ; pour l’entretenir donc, il faut, pour ainsi dire, lui fournir un aliment, une nourriture propre qui fournisse à sa subsistance, & à la continuation de son action. Son premier aliment & son aliment absolument nécessaire, est l’air pur ou déphlogistiqué, (voyez le mot Air) sans lequel le phlogistique qui se développe pendant la combustion, seroit sans énergie & sans action ; ensuite les matières inflammables, qui ne le sont que parce qu’elles contiennent très-abondamment le principe du feu. Toutes celles, au contraire, qui sont imprégnées d’air fixe ou méphitique, ne peuvent brûler, ou du moins brûlent très-difficilement, parce que l’air fixe qui s’échappe à chaque instant des pores du corps exposé au feu, s’oppose à sa propagation, à son développement, & détruit toute son action. (Voyez le mot Air Fixe)

Telles sont, en général, les notions les plus claires & les plus certaines que nous ayions sur la nature du feu & sur ses propriétés & sur ses effets. Le grand rôle qu’il joue dans la nature, dépend cependant beaucoup plus de son état de chaleur, que de celui de feu, d’ignition : dans le premier, il est le principe de la vie, & dans le second le ministre de la mort. Pour le bien connoître sous ce rapport, il faut consulter tout ce que nous en avons dit au mot Chaleur, auquel nous renvoyons.

§. IV. Du Feu central.

Plusieurs auteurs modernes pour rendre raison de la différence qui se trouvoit entre les degrés de chaleur & ceux du froid durant l’année, avoient été obligés d’avoir recours à l’existence d’un feu central, d’un feu placé au centre de la terre, dont les émanations perpétuelles du centre à la circonférence l’entretenoient dans une douce chaleur durant les rigueurs de l’hiver. Nous avons fait voir au mot Chaleur, Sect. 2, §. 3, combien cette supposition étoit peu fondée : nous ne nous y arriérons pas davantage.


§. V. Des Feux follets.


Avant que de terminer cet article, nous allons donner l’explication de ces apparences lumineuses que l’on voit souvent dans les campagnes, sur-tout au-dessus des lieux où se trouvent des amas de substances animales & végétales en décomposition, comme les cimetières, les voiries, &c., & que l’on désigne sous le nom de feux follets.

L’ignorance qui règne impérieusement dans les campagnes, a fait, de ces apparences, des monstres, des êtres réels, auxquels on a attribué non-seulement des propriétés physiques, mais encore des vouloirs, des desseins, des déterminations morales. Il n’y a pas de sorte d’absurdités que l’on n’entende raconter dans le fond des campagnes sur l’article du feu follet : nous sommes contrains d’en rapporter ici quelques-unes des principales, parce qu’elles tiennent à des phénomènes physiques, dont l’explication est intéressante, & doit dissiper les préjugés qui maîtrisent les esprits foibles, non-seulement des paysans & du peuple, mais souvent de certaines personnes qui, par état & par éducation, devroient rougir de s’abandonner à des erreurs aussi ridicules.

Le feu follet entre, dit-on, dans les écuries, les étables, panse les chevaux, saigne les vaches, & tord le col aux valets d’écurie qui sont négligens ; il se promène toute la nuit dans les cimetières, sous les gibets, dans les voiries… Le feu follet court dans les chemins, & surtout dans les prairies après les voyageurs, ou, marchant devant eux, il les égare & les fait tomber dans des précipices… Le feu follet, enfin, paroît sur les vieilles tours, au haut des clochers, sous différentes formes, & annonce les orages & les tempêtes.

Tout cela est très-vrai : il paroît souvent de petites flammes foibles & bleuâtres, tantôt sur les animaux que l’on panse, tantôt dans les cimetières, dans les endroits marécageux, & sur le haut des clochers & des vieilles tours. Le peuple ne se trompe donc pas sur ce qu’il voit : son erreur n’existe que dans l’interprétation qu’il y donne. Le feu follet n’est, suivant lui, qu’un esprit, qu’un être animé, souvent serviable, rarement malfaisant, & qui ne le devient que pour punir la négligence que l’on apporte à remplir ses obligations. La tradition antique des ames qui, après la mort, venoient autour des tombeaux redemander des secours qui avoient été oubliés ou négligés ; cette tradition, dis-je, perpétuée d’âge en âge, s’est emparée de tous les esprits & de tous les cœurs qui connoissent le prix de la piété & de la religion envers les morts. Ces flammes que l’on voit voltiger çà & là sur les lieux où l’on a déposé les corps morts, sont devenues des ames qui semblent nous reprocher nos injustices. Avant la religion chrétienne, ces ames n’avoient pu passer la barque fatale de Caron, faute de salaire, ou parce que leurs corps gissoient sans sépulture : depuis la religion chrétienne, ces flammes sont des ames condamnées au supplice éternel, qui vont rôder par-tout, & qui, étant excommuniées, conservent toute leur malice, & ne reviennent du séjour des morts que pour tourmenter les vivans.

Quelquefois il paroît une petite flamme ou une lumière sur la tête des enfans, sur les cheveux des hommes, sur la crinière des chevaux, &c. Le peuple, à qui il étoit impossible d’en deviner la cause, saisi de crainte & de respect, a attribué tout de suite le sujet de sa terreur à un esprit familier qui annonçoit sa protection & sa présence, en venant partager nos soins.

Le voyageur, non moins crédule, & souvent plus craintif encore, arrivé dans un lieu écarté & marécageux, au commencement d’une nuit qui suit un beau jour où le soleil brûlant a lancé tous ses rayons, voit voltiger sur ces bas-fonds de petites flammes qui, obéissant aux moindres impressions de l’air, vont, viennent, avancent, reculent, s’élèvent & retombent avec l’air qui les porte. Frappé de cette apparence, s’il recule, s’il fuit, le vide qu’il forme derrière lui se remplit, la masse d’air environnante s’y précipite, & entraîne avec elle la flamme lumineuse qui, suivant ce courant, semble le poursuivre. Affecte-t-il, au contraire, un courage, une intrépidité présomptueuse ; va-t-il au devant du feu follet ? la masse d’air qu’il pousse, qu’il chasse devant lui, emporte avec elle la flamme, qui paroît par-là marcher en avant, & le guider. Le hasard fait-il que le voyageur s’égare & se précipite dans quelques bas-fonds ou lieux marécageux, en suivant ces apparences lumineuses ? le hasard qui, pour le peuple crédule, est un être réel & puissant, se convertit ici en génie malfaisant, & le feu follet est un mauvais esprit qui trompe le malheureux voyageur, l’égare, l’attire dans des endroits dangereux, & se moque ensuite de son erreur.

Le nautonier, aussi superstitieux lorsqu’il voit le danger éminent, & une tempête affreuse menacer sa tête, apperçoit-il des flammes, des aigrettes lumineuses à l’extrémité de ses mâts, se croit protégé immédiatement par les Dieux, & reprend toute sa confiance, tandis que le paysan, témoin du même phénomène au-dessus de son clocher, ou des tours d’un vieux château abandonné, s’imagine voir le diable qui vient ravager ses récoltes, & détruire toutes ses espérances.

Rien cependant n’est plus naturel que toutes ces apparences lumineuses, & elles dépendent de deux causes principales, le dégagement & la déflagration de l’air inflammable, & la présence d’une surabondance du fluide électrique.

I. Feux follets produits par le dégagement de l’air inflammable. Au mot Air inflammable, nous avons vu que la nature en produisoit une très grande quantité dans les endroits où les substances animales & végétales entroient en putréfaction, & se décomposoient : la fermentation qu’elles éprouvent dans ces momens dégage tout l’air inflammable qui étoit renfermé dans leur substance ; ou ce qui est encore peut-être plus exact, cette fermentation produit de l’air inflammable, en modifiant le phlogistique ou le principe du feu avec quelques substances aériformes. Cet air inflammable, tantôt par sa pesanteur, reste adhérent au fond limoneux dans lequel les plantes en putréfaction l’ont produit, tantôt par des circonstances particulières, il s’en détache & s’élève dans l’atmosphère : il est plus léger que l’air ordinaire ; il devroit donc s’élever dans les hautes régions. Si nous le voyons rasant presque toujours la surface de la terre, cela vient de ce qu’il se trouve uni à des parties huileuses & grasses qui s’exhalent avec lui. Telle est la cause des feux follets qui voltigent çà & là dans les bas-fonds, les lieux marécageux, au-dessus des eaux croupissantes, & le long de certaines rivières. Les substances animales, seules en putréfaction, produisent le même effet, & par le même mécanisme : il n’est donc pas étonnant d’apercevoir, sur-tout dans les grandes chaleurs, des feux follets sur les cimetières, les voiries & autour des fourches patibulaires. Cet air inflammable peut s’enflammer de deux manières, & par le frottement qu’il éprouve en s’élevant dans un air échauffé, & par l’électricité de l’atmosphère.

II. Feux follets produits par l’électricité. Toutes ces flammes légères que l’on voit sur les chevaux dont on peigne la crinière ou que l’on étrille, sur les bestiaux que l’on panse, sur la tête des enfans, sur les cheveux des hommes ; ces étincelles pétulantes qui se détachent quelque fois des bas & des chemises que l’on quitte, ne sont autre chose que des produits de l’électricité animale ; (voyez ce que nous en avons dit au mot Électricité) il en est de même de ces aigrettes lumineuses, que dans les temps d’orage on apperçoit au-dessus des clochers, des vieilles tours, des mâts de navires, &c. Ces corps sont terminés ordinairement par des angles saillans, des pointes, &c. qui soutirant l’électricité atmosphérique très-abondante dans ces momens, s’en chargent eux-mêmes d’une certaine quantité qui annonce sa présence par une aigrette lumineuse. (Voyez Électricité naturelle)

Que les phénomènes de la nature sont quelquefois simples aux yeux du philosophe, tandis que le peuple n’en connoissant pas l’origine, n’y voit qu’un sujet de crainte & d’effroi ! M. M.

Feu. (Jeter son) On dit qu’une cuve jette son feu, lorsqu’elle est dans la plus violente tourmente de la fermentation. (Voyez ces mots) On dit qu’un arbre jette son feu, lorsqu’il commence à pousser vigoureusement, & que son action se ralentissant bientôt après, il ne pousse plus que de chétives branches. Lorsque son action se soutient, il faut tailler long, lorsque le moment est venu y afin de le rendre sage, de le mater ; mais dans les tailles suivantes, il faut le raccourcir suivant la règle.