Cours d’agriculture (Rozier)/SEL

La bibliothèque libre.
Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 168-169).
◄  SEIME
SÉLÉNITE  ►


SEL, dénomination générale assignée à toute substance saline. Le caractère des sels est d’être solubles dans l’eau, d’exciter une saveur sur la langue, chacun suivant leur qualité. Ils contiennent tous de l’eau & de la terre. On distingue les sels en fixes & en volatils. Les fixes sont les plus terreux ; les volatils se dissipent & se subliment dans l’air. Il y a des sels volatils acides & des sels volatils alcalis. Tous les sels sont divisés en trois grandes classes ; savoir, celle des acides, des alcalis & des neutres. On ne reviendra pas sur les deux premiers. Leurs articles sont faits. Ainsi, consultez ces mots. On distingue encore ces sels les uns des autres par la forme qu’ils affectent en se cristallisant. Les acieds crystallisent en aiguilles, les alcalis par feuillets ; les neutres en cubes & en rhombe. On entend par un sel neutre le résultat de la réunion d’un sel acide avec un alcali. Ce nouveau sel, si la saturation est exacte, acquiert de nouvelles propriétés, & différentes des deux autres. Il devient purgatif. Le sel marin, par exemple, est un sel neutre, qui n’est pas corrosif ; mais si on sépare son acide de son alcali, & de sa base terreuse, il devient corrosif, & dissout l’or. Tous les acides, en général, tirés des végétaux, impriment sur la langue une sensation piquante, accompagnée de fraîcheurs, & ce sont les plus foibles. Les acides que l’on applique sur les couleurs bleues & violettes, les changent en rouge ; les alcalis, au contraire, les verdissent. On ne doit pas s’attendre de trouver ici des détails sur l’article Sel. Il fournit a lui seul le traité le plus étendu de toute la chimie. Si on désire de plus grands renseignemens, on peut consulter le Traité des Sels, publié par l’immortel Sthal, supérieurement traduit de l’allemand, & imprimé à Paris, 1771, chez Vincent, libraire ; le Dictionnaire de Chimie de Macquer, où cet article est bien présenté ; le Dictionnaire encyclopédique, &c.

Enfin le temps est venu où, sous un roi bienfaisant, le peuple & l’habitant de la campagne ne paieront plus 13 à 14 sols la livre du sel. Il est donc possible, aujourd’hui d’en donner aux troupeaux & au bétail. L’avidité de ces animaux pour le sel, démontre le besoin qu’ils en ont. Mêlé avec le son, le fourrage & le grain qui constituent leur nourriture, ils ne seront plus sujets aux maladies de putridité qui en font périr un grand nombre. On doit cependant faire quelque attention, si l’on se sert du sel gemme. On appelle ainsi le sel marin tout formé, que l’on trouve en très-grande masse dans la terre, par exemple à Wïelliska en Pologne, à Cardonne en Espagne, & où l’on exploite la saline à-peu près de la même manière que l’on travaille les mines métalliques, par des galeries, des puits, sur-tout dans le premier endroit ; car dans le second on y abat le sel comme les pierres d’un rocher. Les mines sont à découvert. Cc sel est en général beaucoup plus actif & plus corrosif : il convient donc d’en donner beaucoup moins que du sel qu’on retire des salines établies sur les bords de la mer des côtes de France. C’est le sel le plus doux, le moins âcre & le moins corrosif que l’on connoisse encore, & même le meilleur pour les salaisons des viandes & des poissons. À présent que le sel n’est plus qu’a un sol la livre, il convient, outre le sel que l’on donnera de temps à autre aux bestiaux & aux troupeaux, de suspendre dans les étables & dans les écuries, de petits sacs de toile fort serrée, remplis de sel. Le bétail ne tardera pas à les lécher, & chacun à son tour profitera de l’avantage ; c’est le moyen le plus sûr de l’entretenir en bonne chair, & sur-tout de le préserver des maladies qui naissent de l’humidité des saisons ou des lieux.

Les sels forment des engrais excellens pour les terres, s’ils sont employés avec prudence. (Consultez les articles Arrosement, Amendement.)