Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/381-390

La bibliothèque libre.
Fascicules du tome 1
pages 361 à 370

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 381 à 390

pages 391 à 400



ANTHOXA. Gasp. Bauhin. Espèce d’aconit ; sa tige est haute d’un pied & demi, anguleuse, ferme, garnie de beaucoup de feuilles rondes, découpées en lanières & ressemblantes au pied d’alouette, d’un goût amer. Ses fleurs naissent au haut de sa tige en manière d’épi ; chacune d’elles représente une tête couverte d’un heaume de couleur de jaune pâle. Sa racine est composée de deux navettes de la figure des olives, de couleur brune ou jaunâtre, blanches en dedans, d’un goût amer. Cette plante croît sur les montagnes, comme les Alpes. Sa racine est bonne contre la rage & la morsure des bêtes venimeuses, & est le contrepoison du napel ou de l’aconit.

ANTHRACITE. s. f. ou SCHISTUS. s. m. Pierre facile à couper. C’est une espèce de talc, de couleur safranée & luisante, dont les veines imitent le peigne.

ANTHRACOSE. s. f. Anthracosis. Terme de Médecine, & d’Oculiste. Maladie de l’œil. C’est un ulcère dans l’œil, qui est corrosif & couvert d’écailles, avec une enflure générale, principalement des parties qui sont autour de l’œil. Ce mot est grec, ἀνθράϰωσις, & signifie Une inflammation en forme de charbon : ἄνθραξ, signifie charbon.

ANTHRAX. s. m. Terme de Médecine. Anthrax, carbo, carbunculus, pruna. C’est une tumeur entourée de plusieurs boutons ardens, & fort aigres, qui cause des douleurs fort aiguës ; & quand il s’étend, il brûle les chairs, & les fait tomber par morceaux quand il est pourri, & laisse un ulcère après soi, comme si elles avoient été brûlées avec un fer. Harris d’après Blanchard.

☞ ANTHROPOGRAPHIE. s. f. En Anatomie, description de l’homme : mot composé du grec ἄνθρωπος, homme, & γράφω, j’écris.

ANTHROPOLOGIE. s. f. Discours sur l’homme ou sur le corps humain, terme d’Anatomie composé d’ἄνθρωπος, homme, & de λόγος, discours. La science qui nous conduit à la connoissance de l’homme, s’appelle Anthropologie. Dionis. L’Anthropologie prise en général a deux parties, dont l’une traite de l’âme de l’homme, & l’autre de son corps.

Anthropologie. Anthropologia. Terme de Théologie, qui se dit de la manière de parler de la sainte Ecriture, lorsqu’elle parle de Dieu comme des hommes, en lui attribuant des yeux, des mains, &c. des sentimens de douleur, de compassion, &c. Ainsi c’est une figure par laquelle l’Ecriture sainte attribue à Dieu des actions & des affections humaines : tout cela par Anthropologie, & marque seulement l’effet, ou la chose que Dieu fait, comme s’il avoit les sentimens qu’ont les hommes, ou un corps comme les hommes. L’Anthropologie est nécessaire en parlant de Dieu, pour faire comprendre au peuple bien des choses qu’il ne comprendroit point sans cela.

Ce mot est grec, composé d’ἄνθρωπος, homme, & de λόγος, discours.

ANTHROPOMANTIE. s. f. Anthropomantia. C’est une espèce de divination ; elle se fait par l’inspection des entrailles d’un enfant ou d’un homme mort. Ce mot vient d’ἄνθρωπος, homme, & de μαντεια, divination.

ANTHROPOMORPHITE. s. m. & f. Qui attribue à Dieu une forme humaine. Anthropomorphita. Nom d’anciens hérétiques, qui par une trop grande simplicité, prenant à la lettre tout ce qui est dit de Dieu dans l’Ecriture sainte, lui attribuoient de véritables membres, des bras, des mains ; & ils prétendoient être fondés sur un grand nombre de passages de l’Ecriture ; & entr’autres sur celui du commencement de la Genèse, où il est dit, que Dieu fit l’homme à son image. S. Epiphane réfute au long ces Sectaires, qui étoient la plupart des Moines ignorans, dans l’hérésie des Audiens, dont le chef étoit un certain Audius.

C’est de leur erreur que leur venoit leur nom, qui est grec, formé d’ἄνθρωπος, homme, & de μόρφη, forme. Voyez S. Epiphane, Hæres. 70, & S. Aug. Hær. 50. Cette hérésie étoit si grossière, qu’elle ne dura pas long-temps ; cependant au dixième siècle il parut encore quelques Anthropomorphites.

ANTHROPOPATHIE. s. f. Figure, ou expression, discours par lequel on attribue à Dieu ce qui ne convient qu’à l’homme. L’Anthropopathie est à peu-près la même chose que l’Anthropologie. Cependant, à proprement parler, elle en devroit différer, comme l’espèce du genre ; ensorte qu’Anthropologie se dit de tout discours dans lequel on attribue à Dieu ce qui convient à l’homme, soit sentimens, soit parties du corps, &c. Et que l’Anthropopathie se dit seulement des passions, sensations ou sentimens humains attribués à Dieu ; mais dans l’usage on confond ces deux mots qu’on devroit distinguer.

Anthropopathie vient du grec ἄνθρωπος, homme, & de πάθος, sentiment, passion.

ANTHROPOPHAGE. adj. de t. g. & f. Qui mange les hommes, qui vit de chair humaine. Peuple Anthropophage. Il est aussi substantif. Anthropophagus. Quelques-uns font remonter l’origine des Anthropophages jusqu’au déluge, & attribuent aux Géans le premier exemple de la barbare coutume de se repaître de chair humaine. On prétend que la terre de Chanaan même étoit habitée par des hommes de taille gigantesque, & d’un naturel si farouche, que les cadavres humains étoient leur nourriture ordinaire. Les Historiens parlent des Scythes & des Sauromates qui faisoient de ces horribles repas. Voyez Pline, Liv. IV. c. 12. Le même Auteur trouve encore des Anthropophages dans l’Ethiopie ; & Juvénal fait un effroyable récit de la voracité de certains peuples d’Egypte, qui, à la manière des tigres, déchiroient entre leurs dents des corps encore tout fumans. Tite-Live rapporte qu’Annibal faisoit manger de la chair humaine à ses soldats, pour les rendre plus fiers & plus intrepides dans le combat. La partie australe de l’Afrique est la demeure la plus fameuse des Anthropophages. Il y en a eu dans la Cafrerie & dans le Zanguebar. Vesputius raconte qu’il a vu ces hommes nus aussi-bien que les femmes, manger indifféremment la chair les uns des autres ; le fils rongeant avidement le cadavre du pere, & tirant gloire d’avoir dévoré un plus grand nombre d’hommes. Les Caraïbes, & les Cannibales de l’Amérique, ont encore surpassé les autres en férocité. On en a vû qui arrachoient de jeunes enfans du sein de leurs meres, parce qu’ils trouvoient cette chair tendre & nouvelle & beaucoup plus ragoûtante. Petit. Les Missionnaires vont prêcher l’Evangile jusque chez les Anthropophages. Apparemment que la nature a pétri les nations anthropophages de la même pâte, dont elle a formé les tigres & les lions. S. Evr.

☞ Ce mot n’est qu’une épithète qui marque la barbarie de ces peuples, & non pas le nom d’aucune nation particulière, quoiqu’on l’ait donné à quelques-unes, faute de savoir le véritable.

Dans les premiers siècles de l’Eglise, les Païens accusoient les Chrétiens d’être Anthropophages, comme il paroît par Tatien, par Tertullien dans son Apologétique, chap. 7, & par Salvien, de provid. Liv. IV. Ils disoient que dans leurs mystères les Chrétiens tuoient un enfant, puis le mangeoient. Cette calomnie étoit fondée sur ce qu’ils avoient oui dire du sacrifice de l’Eucharistie & de la Communion : preuve évidente que dans ces temps si voisins des Apôtres, l’Eglise enseignoit sur cela ce que l’Eglise Romaine enseigne encore aujourd’hui.

Ce mot est grec, & vient de φάγω, je mange, & d’ἄνθρωπος, homme.

ANTHROPOPHAGIE. s. f. Anthropophagia. L’action de manger de la chair humaine. Les Médecins ont cru ridiculement trouver le principe de l’anthropophagie dans une humeur noire & âcre, laquelle résidant dans les tuniques du ventricule, produit cette voracité ; & ils apportent plusieurs exemples de cette faim inhumaine. S. Evr. M. Petit a agité la question, si l’anthropophagie est contre la nature.

ANTHROPOSOMATOLOGIE. s. f. Terme d’Anatomie, composé des mots grecs ἄνθρωπος, homme, σῶμα, corps, & λόγος, traité. Traité du corps de l’homme, description du corps humain, ou de sa structure.

On voit par l’origine de tous ces mots, que pour écrire correctement, il faut toujours y mettre un h.

ANTHYLLIS. s. m. Plante. Anthyllis. Il y en a de deux sortes : l’une ressemble à la lentille, & l’autre à l’ive muscate. Elles sont propres à consolider les plaies.

ANTHYPNOTIQUES. adj. Terme de Médecine. Anthypnoticus. Remède ou médicament qu’on emploie contre un sommeil excessif, ou non-naturel. D’ἀντὶ, contre, & ὕπνος sommeil.

☞ Il est aussi substantif. Anthypnotiques. Anthypnotica. Il fait usage des anthypnotiques.

ANTHYPOCHONDRIAQUE. f. & adj. pl. Voyez Antihypochondriaque.

ANTHYSTÉRIQUE. s. & adj. Voyez Anti-Hystérique.

ANTI. Cette espèce de préposition se trouve dans plusieurs mots françois en deux significations différentes ; car elle signifie quelquefois ce qui est avant, & pour lors elle vient du latin antè, avant, & désigne l’antériorité de temps, comme dans antidate ; ou l’antériorité de lieu, comme dans anti-chambre, ce qui est avant la chambre. Quelquefois elle signifie ce qui est contraire, opposé, & pour lors elle vient du grec ἀντὶ, contrà, contre, comme antipode, celui qui a les pieds opposés aux nôtres. Cette préposition anti souffre élision dans le même mot, lorsqu’elle est suivie d’une voyelle. Ainsi on dit antarchique en françois comme en grec, pour anti-archique, & antarctique, pour anti-arctique.

Outre les mots formés de cette préposition, qui sont dans un usage commun, on en peut également former de nouveaux au besoin. Ainsi dans la querelle pour les Anciens & les Modernes, on a dit :

Tout le trouble poétique
Dans Paris s’en va cesser ;
Perrault l’Antipindarique
Et Despréaux l’Homérique
Consentent de s’embrasser.

Les anti, parmi les gens de lettres, sont les écrits faits pour répondre à quelqu’un, & qui portent souvent le nom d’anti, avec le nom de ceux auxquels ils répondent. Voyez les Anti de M. Baillet, & l’Anti-Baillet de M. Ménage. On a fait aussi Anti-Menagiana. César le Dictateur avoit fait des livres pour répondre à ce que Caton lui reprochoit, & il les avoit intitulés Anti-Catones. Cicéron, Juvénal, &c. en ont parlé. Vivès assure qu’il a vû les Anti-Catons dans une ancienne Bibliothèque. Beaucoup d’autres livres, sur-tout depuis le rétablissement des lettres, ont porté pour titre, anti, dans les controverses, tant sur les matières de Religion, que sur celles de pure littérature.

ANTIADE. s. f. Antias. Terme d’Anatomie. Voyez Amygdale. C’est la même chose.

ANTIADIAPHORISTE. s. m. & f Antiadiaphorista. Qui est contraire ou opposé aux Adiaphoristes. Ce mot est composé de ἀντὶ, contre, & d’ἀδιάφορος, indifférent. On donna ce nom dans le XVIe siècle aux Luthériens rigides, qui désapprouvoient la juridiction épiscopale, & les cérémonies de l’Eglise, & qui étoient opposés aux Luthériens mitigés, nommés Adiaphoristes.

ANTIAPOPLECTIQUES. s. m. pl. Terme de Médecine. Antiapoplectica, orum. Remèdes contre l’apoplexie. Tels sont l’eau de mélisse composée, l’eau impériale, le vin émétique, l’esprit volatil de vipères, le sel ammoniac, &c. Ἀντὶ, en grec, signifie contre. Il se joint à plusieurs noms de remèdes, pour exprimer leur vertu spécifique. Ce mot est aussi adjectif. Remède, médicament antiapoplectique.

ANTIARTHRITIQUES. s. m. pl. Remèdes contre la goutte. D’ἀντὶ, & ἀρθρίτος, la goutte. Il est aussi adjectif. Remède, médicament antiarthritique.

ANTIASTHMATIQUES. s. m. pl. Remèdes contre l’asthme. Tels sont les fleurs de soufre, celles de benjoin, le soufre lavé, le baume de soufre anisé, la véronique en tisane, l’hydromel, le sirop de nicotiane, &c. Ce mot est aussi adjectif. Col. de Villars.

ANTIBACCHIQUE. adj. & s. m. Prononcez Antibacquique. Antibacchius. Terme de Poësie latine. Ce n’est pas un vers, comme dit M. Harris, mais un pied de trois syllabes, les deux premières longues & la troisième brève, comme cantare, virtute : il est ainsi nommé, parce qu’il est contraire au Bacchique, dont la première est brève & les deux autres longues, egestas. Hephestion l’appelle Palimbacchius, Victorien au contraire dit, que l’antibacchique est composé d’une brève & deux longues, comme lacunas ; l’on voit qu’il appelle Antibacchius ce que les autres appellent Bacchius. Port-R. La méthode de Port-Royal écrit Bacquique & Antibacquique, au lieu de Bacchique & Antibacchique, suivant en cela la prononciation françoise, & méprisant l’analogie de la racine d’où ce mot est tiré.

ANTIBES. Ville maritime de France. Antipolis. Elle est sur la côte de Provence. Antibes est fortifiée & a une bonne citadelle, & un port fort sûr. Elle est aux confins du comté de Nice. Cette ville est à 24°, 39′, 18″ de longitude, & 43° 34’, 12″ de latitude. De la Hire. Table Astr.

☞ Le nom françois est corrompu du grec Antipolis, qui est celui que les anciens Marseillois, Colonie Grecque, donnerent à cette ville dont ils furent les fondateurs.

☞ ANTIPOLIS. Ville située à l’opposite d’une autre. Cette autre est Nice que les mêmes peuples fonderent aussi.

ANTI-CABINET. s. m. Grande pièce entre le salon & le cabinet, appelée communément Salle d’assemblée. Antecedens conclave.

ANTICACHECTIQUES. s. m. pl. Remèdes qui corrigent la cachexie. D’ἀντὶ, contre, & de ϰαχεξία, la cachexie. Il est aussi adjectif. Remède ou médicament anticachectique.

ANTICAUCASE. Anticaucasus. Montagne de Séleucie, dont parle Strabon, ainsi appelée d’ἀντὶ, contre, & Caucasus, Caucase, nom d’une montagne fameuse au nord du Pont-Euxin, comme qui diroit, opposé au Caucase.

ANTICAUSOTIQUE. adj. Terme de Médecine. Epithète des remèdes contre le causus, ou fiévre ardente. D’ἀντὶ, & de ϰαῦσος, une fiévre ardente. Il est aussi substantif. Faire usage des anticausotiques.

ANTICHAMBRE. s. f. Chambre qui est auparavant la chambre du maître, ou la principale chambre d’un appartement, où s’arrêtent les domestiques de ceux qui le viennent voir. Procœton. Dans un hôtel cette pièce mene à une deuxième Antichambre ou Salle d’assemblée, où les personnes au-dessus du commun attendent le maître. On l’a laissé attendre une heure dans l’antichambre avant que de parler au maître.

ANTICHRÈSE. s. f. Terme de Droit. Convention par laquelle celui qui emprunte de l’argent, donne en gage un héritage à son créancier, à la charge qu’il en jouisse, & que les fruits lui appartiennent pour l’intérêt de son argent jusqu’à ce qu’il en soit payé. Antichresis. Cette paction étoit permise par le Droit Romain, qui ne défend pas les usures. Cette espèce de contrat s’appeloit autrefois Mort-gage en France, à la différence du simple engagement, qui n’emportoit point gain des fruits, & qui à cause de cela s’appeloit vif-gage. Selon Du Moulin, dans son Traité des usures, l’antichrèse est prohibée en France, excepté en quelques provinces, où ces contrats pignoratifs sont regardés comme des contrats de vente a faculté perpétuelle de rachat. En 1164, Alexandre III défendit aux Clercs dans un Concile de Tours de prêter à usure, & ordonna que les fruits des héritages donnés en antichrése seroient imputés sur le principal. Six ans après le même Pape, fit une decrétale, par laquelle il étendit aux Laïcs la défense portée par le Concile de Tours, ainsi l’antichrése fut défendue à toutes sortes de personnes. Voyez Loiseau, de la distinction des usures, & Du Moulin, Traité des usures, quest. 35.

ANTICHRÉTIEN, ENNE. adj. m. & f. Opposé à la doctrine du Christianisme. Antichristianus, Christianæ doctrinæ adversarius. L’Apocalypse ne parle point d’une Eglise Chrétienne corrompue, ni d’un empire spirituel anti-chrétien, dont S. Jean annonçoit la ruine. Boss. Les Protestans accusent l’Eglise Catholique d’être devenue antichrétienne. Ils se tourmentent beaucoup & fort inutilement pour trouver le commencement de cet empire antichrétien, que les uns fixent en un temps, & les autres en un autre. Joseph Méde & Jurieu se sont sur-tout fort occupés de ces extravagantes rêveries. Voyez M. Bossuet, Variat. Liv. XIII. Pourquoi différer jusqu’à saint Léon le commencement de cet empire antichrétien ? Montrez-moi que du temps de ce saint Pape on ait plus fait pour les Saints ? &c. Bossuet. Mais, dit-on, la principale raison pourquoi Dieu ne veut pas compter la naissance de l’antichristianisme dès les années 360, 393, & 430, encore que la nouvelle idolâtrie, que l’on veut être le caractère de l’antichristianisme y fût établie, c’est qu’il y avoit un quatrième caractère de la naissance de cet empire antichrétien, qui n’étoit pas encore arrivé… Doctrine admirable, &c. Id. Pourquoi demeurer en si beau chemin ? Osez dire ce que vous pensez. Commencez par saint Basile & par saint Grégoire de Nazianze le regne de l’idolâtrie antichrétienne, & les blasphèmes de la bête contre l’Eternel, & contre tout ce qui habite dans le Ciel. Tournez en blasphèmes contre Dieu & contre ses Saints, ce qu’on a dit dès-lors de la gloire que Dieu donnoit à ses serviteurs dans son Eglise. Saint Basile n’est pas meilleur que saint Léon, ni l’Eglise plus privilégiée à la fin du quatrième siècle, que 50 ans après dans le milieu du cinquième. Mais je vois la réponse que vous me faites dans votre cœur : c’est qu’à commencer par saint Basile, tout seroit fini il y a long-temps ; & démenti par l’événement, vous ne pourriez plus amuser les peuples d’une vaine attente. Id.

ANTICHRISTIANISME. s. m. La doctrine, le regne de l’Antechrist. Religion contraire au Christianisme. Antichristianismus, Adversùs christianam Religionem rebellio. L’Antichristianisme doit être une apostasie, une abjuration de l’Eglise Chrétienne. Voyez Antichrétien. Ces mots viennent d’ἀντὶ, contra, & Christianismus.

ANTICHTHONE. s. m. & f Antichthones. Terme de Géographie. Qui habite une terre opposée à celle qu’habite un autre. Ce mot est grec, formé de ἀντὶ, contre, & de χθών, terre. Nous entendons aujourd’hui par Antichthone la même chose que par Antipodes ; c’est-à dire, ceux qui habitent la partie de la terre qui nous est diamétralement opposée. Les Anciens donnoient à ce nom un autre sens. Pomponius Mêla parle des Antichthones, Liv. I. c. i, mais il n’entend pas par-là les deux hémisphères supérieur & inférieur, puisqu’on ne connoissoit pas l’inférieur de son temps, comme l’a remarqué Vossius ; mais seulement les deux parties septentrionale & méridionale de notre hémisphère, qui sont séparées par la zone torride ; ensorte que les peuples que Pomponius Méla nomme Antichthones, sont ceux que les Géographes nomment communément Périœciens.

Il faut écrire Antichthone, & non pas Antichtone.

☞ ANTICIPANT. adj. Terme de Médecine. On appelle accès anticipant, celui qui vient avant le temps auquel a commencé le précédent. Prœcurrens.

ANTICIPATION. s. m. Action par laquelle on anticipe. ☞ Action de prévenir, d’agir avant le temps, de prendre les devans, ou dans une affaire, ou avec une personne. Anticipatio. Je me servirai contre lui de la voie d’anticipation. J’ai plusieurs moyens d’anticipation. Anticipation en termes de Chancellerie, se dit des lettres qu’on fait sceller afin de faire assigner un appelant pour faire juger un appel par lui interjeté, quand il est négligent de le relever. ☞ Dans les procédures qui sont faites en conséquence ; l’intimé s’appelle anticipant, & l’appelant anticipé.

Anticipation, signifie aussi, usurpation faite sur les biens ou sur les droits d’autrui. Usurpatio, Occupatio rei alienæ. C’est une anticipation sur mes droits, sur ma terre. Acad. Fr.

Anticipation, est aussi une figure de Rhétorique, par laquelle l’Orateur réfute par avance les choses qui lui peuvent être objectées. Quintilien l’appelle anthypophora.

Par Anticipation. Façon de parler adverb. Par avance. In antecessum. Il s’en est emparé par anticipation. Acad. Fr.

ANTICIPER. v. a. Faire une chose avant le temps, prévenir, dévancer. Il ne se dit que du temps, & par ellipse, des choses dont on prévient le temps. Anticipare, prævenire. Cette dette n’étoit pas encore échue, il a anticipé le payement. Il a anticipé le jour, le moment.

Anticiper, signifie aussi, empiéter, usurper. Invadere, occupare rem alienam. Mon voisin anticipe sur mon héritage. Vous anticipez sur les fonctions de ma charge. Anticiper sur les droits d’autrui. Le Mait. En ce sens il est neutre.

Anticiper, en termes de Palais, c’est faire assigner devant un Juge supérieur, un appelant qui a interjeté un appel, & qui néglige de relever son appel. Provocatori, ou provocationi antevertere.

ANTICIPÉ, ÉE. part. On dit en termes de Palais, l’anticipant, & l’anticipé, comme on dit l’appelant & l’intimé. Ante occupans, ante occupatus. Voyez Anticipation.

Anticipé, Ée. adj. Qui vient avant le temps. Anticipatus. Il n’y a point de peuple qui n’ait une connoissance de Dieu anticipée, & même sans étude. L’espérance est une joie anticipée. M. Scud. ☞ On dit de même douleur anticipée, en parlant de celle qu’on ressent dans la vue d’un mal qui n’est pas encore arrivé.

Tourville en sa témérité
N’a que ce qu’il a mérité
Par sa valeur anticipée.
Qu’espéroit-il, de bonne foi,
La victoire étant occupée
Devant Namur auprès du Roi ?

ANTICŒUR. s. m. Maladie de cheval. C’est une tumeur qui se forme à sa poitrine vis-à-vis du cœur. On l’appelle aussi avant-cœur.

ANTI-CONSTITUTIONNAIRE. adj. & s. Mot en usage pour signifier quelqu’un qui est opposé à la Bulle, ou Constitution Unigenitus. Voyez Janséniste.

ANTI-CONVULSIONISTE. adj. & s. Celui qui dans le parti janséniste est contraire aux convulsions, que d’autres admettent comme surnaturelles. Celui qui prétend qu’il n’y a rien que de naturel, ou même que de la fourberie, ou qui prétend qu’elles sont des opérations du Démon. Anticonvulsionista. Voyez Convulsion, Convulsioniste & le mot Paris.

ANTICOSTI, ou ANTISCOTI. Île qu’on nomme aussi l’île de l’Assomption. Anticosta, Antiscotia, Assumptionis Insula. Elle est dans le golfe de Saint-Laurent, en la nouvelle France, entre l’ile de Terre-Neuve, & la côte du Canada propre. Voyez Île de l’Assomption.

ANTICOUR. s. f. Première cour, qui est suivie d’une autre. Areæ vestibulum. Prior area. Dans les belles maisons de campagne il y a des anticours. On dit ordinairement avant-cour.

ANTICYRE. Anticyra. Île où il croissoit d’excellent hellébore. Anticyre étoit dans le golfe appelé autrefois Maliacus, aujourd’hui Golfe de Zeïton. Comme l’hellébore est propre à purger le cerveau, on disoit proverbialement d’un homme dont la tête n’étoit pas bien réglée, qu’il devoit faire un voyage à Anticyre. Naviget Anticyram. Voyez Horace, Liv. II. Sat. III, v. 72, & 164. Ovide, De Pouto, Liv. IV, v. 53. Perse, Sat. IV, v. 16. Le Géographe Etienne dit, que l’Anticyre célèbre pour son hellébore est une ville, mais c’est une île de l’Archipel, entre celle de Négrepont, & les côtes de Thessalie. Voyez Pline, Liv. XXV, ch. 5. Et Horace & Ovide que j’ai cités ne peuvent guère s’entendre que d’une île.

Il y a cependant eu une ville de Phocide, nommée Anticyre, dans le golfe de Corinthe, à 10 milles de Celphe, au 48e. degré 4 minutes de longitude, & 39e. degré 5 minutes de latitude. Pline en parle, Liv. IV, ch. 3, mais ce n’est point cette ville qui fut célébre par l’hellébore qu’elle produisoit.

☞ ANTIDACTYLE. s. m. Nom donné par quelques-uns à un dactyle renversé, à un pied composé de deux brèves suivies d’une longue. Populum est un antidactyle.

ANTIDATE. s. f. Date fausse, & antérieure à la vraie date d’un acte. Date qui précède le temps auquel l’acte est passé. Dies antiquior perperàm adscriptus. L’antidate est un crime moins considérable dans les actes sous signature privée, que dans les contrats passés par-devant Notaires. Les antidates sont importantes dans les contrats, parce qu’elles emportent la priorité d’hypothèque. Ce mot antidate vient de ces deux mots latins, antè data. Men. ou du grec ἀντὶ, contre, & du latin, data : contre-date.

ANTIDATER. v. a. Mettre une date antérieure. Dater d’un jour qui précède celui où l’on passe quelque acte. Diem antiquiorem falsò scribere. Antidater une procuration.

ANTIDATÉ, ÉE. part. Daté faussement & antérieurement. Falsâ diei adscriptione munitus, signatus. Cette pièce est antidatée.

Ce mot vient d’anti, & de date, qui vient de dare.

ANTIDÉMONIAQUE. adj. & s. m. f. Antidæmoniacus. Qui negat esse Dæmones. Hérétique, ou impie, qui nie l’existence des Démons, ou qu’il y ait des Démons. Voyez Sanderus.

ANTIDIAPHORISTE. s. m. & f. Voyez Antidiaphoriste. C’est la même chose dans l’usage, parce qu’on retranche l’a pour rendre la prononciation plus douce ; mais dans la vérité, & à la rigueur, c’est tout le contraire. Car antiadiaphoriste, signifie, qui est opposé aux indifférens. Et antidiaphoriste, celui qui est opposé à ceux qui veulent de la différence. Dans un ouvrage dogmatique & d’érudition, je ne voudrois jamais dire qu’antiadiaphoriste, laissant l’autre tout au plus pour la conversation ; s’il est vrai cependant qu’on le dise, comme quelques Dictionnaires le marquent.

ANTIDICOMARIANITES. Anciens hérétiques qui prétendoient que la Sainte Vierge avoit eu plusieurs enfans de S. Joseph, & qu’elle n’étoit pas demeurée Vierge. S. Epiphane a parlé fort au long de ces hérétiques qui vivoient de son temps, hæres. 78. Il rapporte l’histoire de S. Joseph, & il explique en même temps ce qu’on doit entendre dans le nouveau Testament par les Freres de Notre Seigneur ; & comme il a quelques sentimens là-dessus qui méritent d’être éclaircis, il faut consulter S. Jérôme contre Jovinien, & le Cardinal Baronius dans l’Apparat de ses annales. Les Antidicomarianites étoient disciples d’Helvidius, & de Jovinien, qui parurent à peu près en même temps à Rome vers la fin du IVe siècle. Voyez Baronius & Sponde à l’an 382. M. Godeau a dit Antidicomarianistes.

ANTIDORE. s. m. Antidorum. Terme de Liturgie. L’antidore, chez les Grecs, est un pain que l’on bénit, & qu’on distribue au lieu de l’Eucharistie à ceux qui n’ont pas pû communier pour quelques raisons particulières. L’antidore est le pain, dont on coupe un morceau pour le consacrer.

Ce mot vient de ἀντὶ, pro, loco, vice, au lieu, à la place, & de δῶρον, donum, don. Cette étymologie marque que l’antidore se donne au lieu de l’Eucharistie, qui est le don par excellence.

ANTIDOTAIRE. s. m. Terme de Médecine. Antidotarium. C’est un nom que plusieurs Médecins ont mis pour titre aux recueils qu’ils ont fait d’un grand nombre de remèdes composés, & qui ont été inventés par de célèbres Médecins. Les Apothicaires tiennent beaucoup de ces compositions toutes prêtes dans leurs boutiques, pour les employer, lorsque les Médecins les leur ordonnent. Il y a l’Antidotaire de Wecker, de Du Renou, & c’est ce qu’on appelle autrement, dispenfaire.

☞ ANTIDOTE. s. m. Terme de Médecine. Contrepoison. remède qu’on prend pour se garantir de l’effet du poison, & généralement pour détruire le venin des maladies, qui provient d’une autre cause que de la piqûre des animaux venimeux, comme de la contagion de l’air, de la corruption des humeurs. Antidotus, antidotum. Cet antidote fortifie le cœur, & le défend contre le venin & l’air infecté. En ce sens il signifie la même que alexipharmaque, & alexitère. Ce terme se dit aussi de quelques compositions molles, faites de diverses poudres, de pulpes, de liqueurs de sucre, de miel, réduites en une consistance épaisse. On les appelle indifféremment, confections, électuaires mous, opiates, ou antidotes. Certaine femme dans Ausone, voulant empoisonner son mari, lui donna tant de différentes drogues pour l’empoisonner plus sûrement, qu’en se servant d’antidote les unes aux autres, elles le sauverent. Mascur.

Ces mots viennent de ἀντὶ, contre, & de δίδωμαι, qui signifie, je donne. Antidote, ce qu’on donne contre le poison, soit pour remède, soit pour préservatif.

ANTIDOTER. v.a. Mêler, assaisonner d’antidotes. Aspergere, condire, miscere. Ce mot est forgé en style burlesque & familier.

ANTIDOTÉ, ÉE. part. & adj. Le célèbre Rousseau a dit en parlant d’Horace :

Des sots Auteurs berne les vers ineptes ;
Nous instruisant par gracieux préceptes,
Et par sermons de joie antidotés.

Ce sont des discours égayés, mêlés, assaisonnés de propos agréables. Amænitate, gaudio, hilaritate, leporibus conditi.

ANTIDYSSENTERIQUES. s. m. p. Remèdes contre la dyssenterie. Tels sont l’ipécacuanha, la rhubarbe, le rapontic, le corail préparé, le succin, le bol d’Arménie, la terre sigillée, la terre douce de vitriol, le ris, la gelée de corne de cerf, la teinture de roses de Provins, la grande consoude, la conserve de cynorrohodon, le sirop magistral, cartharrique, astringent, le laudanum, le diascordium, le diacode, le sirop de karabé. Col. de Villars. ☞ Il est aussi adj. Médicament, remède antidyssenterique.

ANTIE. adj. m. & f. Ce mot n’est plus usité, il signifioit ancien, ancienne.

Li communs de Paris, celle cité antie.
Sont ordonné chacun en sa Conetablie. R. de S.

ANTIENNE. s. f. Paroles qui dans le service de l’Eglise se chantent alternativement par deux chœurs. Antiphon, Carmen incentivum. Ce mot s’est dit d’abord tant des Pseaumes que des Hymnes. S. Ignace, disciple des Apôtres, a été selon Socrate, le premier auteur de cette manière de chanter chez les Grecs ; & S. Ambroise chez les Latins. Théodoret l’attribue à Diodore & à Flavien. Elle passa en France du temps de S. Grégoire, & se perfectionna sous Charle Magne. Amalarius Fortunatus a écrit de l’ordre des Antiennes, De Antiphonarum ordine. Maintenant ce mot se prend en une plus étroite signification, & se dit de quelques traits tirés des Pseaumes, ou de l’Ecriture, qui conviennent au mystère de la Fête qu’on célèbre. Dans les Fêtes doubles on les répète devant & après les Pseaumes, dans les simples on les dit seulement après, selon les différens Bréviaires.

On appelle aussi Antienne, ce qu’on chante à l’introïte, aux invitatoires, aux processions. On le dit aussi des motets que plusieurs choristes viennent chanter alternativement à la messe, & à vêpres, avant l’évangile, ou l’hymne.

Ce mot vient de ἀντίφωνα, qui signifie, chant alternatif.

Antienne, se dit aussi d’une petite prière qui se fait à Dieu, ou aux Saints, qui précède une oraison. Les aveugles gagnent leur vie en disant l’Antienne & l’Oraison du Saint dont on fait la Fête chaque jour.

☞ On dit figurément annoncer une bonne, une mauvaise antienne à quelqu’un ; pour dire, une bonne, une mauvaise nouvelle. Expression du style familier.

ANTIÉPILEPTIQUES. s. m. pl. Remèdes contre l’épilepsie. Tels sont le gui de chêne, celui de coudrier, la racine de la grande valériane sauvage, le pied d’élan, le crâne humain, le cinnabre naturel, artificiel, celui d’antimoine, &c. Col de Villars.

☞ Ce mot est aussi adjectif. Remède, médicament antiépileptique ; dont on se sert contre l’épilepsie.

ANTIFÉBRILES. s. m. pl. Epithète des remèdes propres contre la fièvre. Il est aussi adjectif. Remède, médicament antifébrile.

ANTIFELLO. Petite ville de l’Anatolie, ou Asie mineure. Antiphellus. Elle est entre les villes de Patera & de Goranto, sur la côte.

ANTIFFE. s. f. Terme d’Argot, qui est un langage particulier que se font les gueux ou les voleurs. Et sur le grand trimard aller battre l’antiffe : c’est-à-dire, battre l’estrade sur le grand chemin. Poëme de Cartouche.

ANTIGÉOMÈTRE. s. m. On donne ce nom à ceux qui ont mal parlé des Mathématiques en général, & de la Géométrie en particulier, ou qui ont soutenu qu’elles avoient des défauts, & que leurs principes pouvoient être attaqués. MM. Huet, Agrippa, La Mothe le Vayer, & en dernier lieu M. Cartaut passent pour Antigéomètres.

ANTIGOA. Île de la mer du nord, dans l’Amérique. Antigoa. C’est une des Antilles, située entre la Barbade, la Guadaloupe & la Désirée.

ANTIGOCA. Ville de la Turquie d’Europe. Antigonia. Elle est en Macédoine, au nord-ouest de Salonique. Pinet prétend qu’on la nomme aujourd’hui Céjogna.

ANTIGONIE. s. f. C’est le nom de plusieurs villes, l’une en Epire, l’autre en Macédoine, une troisième en Arcadie, une quatrième en Bithynie, & une cinquième en Syrie, proche d’Antioche.

ANTIGONIES. s. f. pl. Est le nom d’une fête instituée à l’honneur d’Antigonus ; Plutarque, qui nous l’apprend, ne nous dit point en l’honneur duquel des Antigonus elle se célébroit.

ANTIGORIUM. s. m. On appelle ainsi l’azur, ou gros émail, dont se servent les Faïanciers pour peindre leur faïance.

☞ ANTIHECTIQUE. adj. Terme de Médecine. Remède ou médicament qu’on emploie contre la fièvre hectique. Il est aussi substantif. Faire usage des antihectiques, tels que la pulmonaire, le cétérach, le rossolis, les fleurs de Tussilage, le ris, les jujubes, les dattes, les figues, les raisins de Corinthe, la gelée de corne de cerf, &c.

ANTI-HECTIQUE de la Poterie. C’est une préparation chimique qui se fait ainsi : on prend de l’antimoine deux parties, de la limaille de fer une partie, du nitre, du tartre blanc, chacun une partie & demie ; on rougit la limaille de fer dans un creuset qui soit seulement plein du quart, & cela à feu violent, puis on met l’antimoine, & on fond le tout ; lorsqu’il est clair, on jette dedans une cuillerée du mélange de nitre & de tartre ; on couvre le creuset, & les fumées étant cessées, on en met encore autant, faisant comme la première fois, & continuant ainsi jusqu’à ce qu’on ait mis tout le mélange. Puis on donne grand feu : étant en bon flux, on jette dans le cornet selon l’art ; si le régule n’est pas étoilé, on refond, & on le purifie avec du nitre & du tartre. On le rend étoilé du premier coup, si au lieu du nitre & du tartre, on se sert de cendres gravelées. Ensuite on prend deux onces de ce régule, quatre onces d’étain d’Angleterre, & on les fond ; étant fondus on les jette dans le cornet, puis on les met en poudre : on y ajoute trois fois autant de nitre très-pur ; qu’on fulmine par cueillerées selon l’art, laissant passer les fumées à chaque projection, & lorsqu’il sera fondu, on le laisse trois heures en fonte sur un feu modéré, de crainte que la matière ne retourne en régule. Après ces trois heures on la jette dans un mortier de marbre, puis on la pulvérise, & on l’édulcore avec de l’eau chaude ; on filtre, & on sèche la poudre ; on y joint son double poids de nitre : on fulmine comme ci-dessus ; ce qui se réitère encore une fois ; puis on édulcore, & on sèche. La dose est depuis un demi scrupule jusqu’à un. Si l’on ne met que trois onces d’étain, & un gros d’or, le remède sera beaucoup plus efficace.

Ce remède a été nommé Anti-hectique, parce que si l’on en prend seize grains, un scrupule de sel ammoniac ; qu’on les mêle & qu’on les donne dans du sirop de lierre terrestre, c’est un puissant remède contre la fièvre hectique. On partage cette dose en deux, on en prend une le matin, & l’autre le soit, & l’on continue.

ANTIHYDROPIQUES. s. m. pl. & adj. Remèdes contre l’hydropisie. Tels sont le jalap & sa résine, le méchoacan, le gomme gutte, le suc d’iris, le vin d’alkekenge, l’élatérium, les cloportes, l’esprit de sel, &c. Col. De Villars. ☞ Il est aussi adjectif. Remède, médicament antihydropique.

ANTIHYPOCHONDRIAQUES. s. m. pl. On dit aussi anthypochondriaques. Remèdes contre la maladie hypochondriaque. Tels sont l’élébore noir, la scolopendre, l’hépatique, les capillaires, le safran de Mars apéritif, le tartre vitriolé, l’extrait panchimagogue, les fleurs de sel ammoniac chalybées, le sel sédatif, &c. Col. de Villars. D’ἀντὶ, contre, & ὑποχόνδρια, les hypochondres. ☞ Il est aussi adjectif. Remède, médicament antihypochondriaque ; c’est-à-dire, dont on se sert contre la mélancolie hypochondriaque.

ANTIHYSTÉRIQUES. s. m. pl. Remèdes contre la passion hystérique & contre les vapeurs. On les appelle aussi Hystériques, sans y joindre la préposition ἀντὶ. Tels sont le castoreum, le camphre, l’assa fœtida, l’huile de succin, &c. On dit aussi anthystériques. D’ἀντὶ, contre, & ὑστερα, utérus. Il est aussi adjectif. Remède antihystériques.

ANTIJOACHIMITES. L’Archevêque d’Aqueruse étoit le chef des Antijoachimites, & il poursuivoit impitoyablement les Joachimites. Vie de l’Abbé Joachim. Les Antijoachimites avoient beau décrier la mémoire du célèbre Abbé, elle se soutenoit toujours avec honneur.

ANTILEPSE. s. f. Voyez Prolepse. C’est la même chose.

ANTILIBAN. s. m. Antilibanus. Montagne de Syrie, ou de Phénicie, ainsi appelée de la particule grecque ἀντὶ, contre, & du nom du Liban, montagne fameuse de Syrie, parce qu’elle est à l’opposite du Liban. L’Antiliban est au midi, & le Liban au septentrion. Entre deux s’étend une grande plaine, qu’on nomme Abellinas, à ce que dit Postel, autrefois Siria Cœle. Ces montagnes commencent à la mer méditerranée, & s’étendent en long vers l’orient. L’Antiliban est fort étendu, & il a plusieurs vallées très-fertiles. Il est habité presque tout par les Druses. Pline, Liv. V. ch. 20, le fait égal au Liban. Dans l’Ecriture on appelle l’un & l’autre Liban ; mais quand on les distingue, le Liban retient son nom, & l’Antiliban s’appelle Hermon.

ANTILLES. C’est un nom qu’on donne aux petites îles de l’Archipel de l’Amérique, à cause qu’elles sont au-devant de Cuba, Jamaïca, & autres grandes îles voisines. Antillæ. Ainsi elles sont dans la mer du Nord, placées entre les deux Amériques, méridionale & septentrionale. On les appelle aussi, les îles Caraïbes, ou Caribes, & Caribanes, ou Cannibales, du nom de leurs anciens habitans : quelques-uns même les nomment Camercanes. On les distingue en deux parties. Celles qui regardent le levant, & qui s’étendent du septentrion au midi, s’appellent Îles de Barlovento, ou Îles du vent. Et celles qui regardent l’Amérique méridionale, & s’étendent du levant au couchant, Îles de Sottovento, Îles qui sont sous le vent. Christophe Colomb les découvrit en 1493. Les Européens n’ont commencé à s’y établir qu’en 1625. Le P. du Tertre, Jacobin, a fait une fort belle Histoire des Antilles en trois volumes in-4o. Il en parut une à Rotterdam en 1658, accompagnée d’un vocabulaire Caraïbe par Lonvillers de Poincy. Voyez encore Acosta, Hist. des Ind. Liv. III. ch. 15. Linschot, Amer. ch. 4. Rochefort, Hist. Natur. des Antilles, & Baudrand.

ANTILOGARITHME. s. m. Terme de Mathématique. Antilogarithmus. C’est le complément du logarithme, d’un sinus, d’une tangente, ou d’une sécante, ou la différence de ce logarithme à 90 degrés.

ANTILOGIE. s. f. Contradiction dans un discours entre deux mots, ou deux passages d’un Auteur. Antilogia, contradictio, refragatio. Tirinus a fait un grand indice des antilogies apparentes de la Bible, des passages qui semblent se contredire, & qu’il a conciliés & expliqués dans les Commentaires qu’il a faits sur la Bible. Un Maltois de l’Oratoire d’Italie, nommé Dominique Magrius, en a aussi donné un, où il ne fait que rapporter ce qui se trouve dans les principaux Commentateurs. Le Conciliator de R. Manasse Ben-Israël est encore quelque chose de semblable. Ce mot vient d’ἀντιλογία, contradiction.

☞ ANTILOPE. s. m. Même chose que Gazelle. Voyez ce mot.

ANTILUTHERIEN, ENNE. s. m. & f. & adj. Antilutherianus, Antilutheranus. On donne ce nom à tous les Protestans, qui s’étant séparés de l’Eglise avec Luther, ou à son exemple, ont abandonné ses opinions, & ont fait des sectes différentes. Ainsi les Zuingliens, les Calvinistes, les Anabaptistes, les Anglicans, sont Antiluthériens. On pourroit le dire aussi adjectif. Une doctrine Antiluthérienne, les dogmes Antiluthériens. Les sectes Antiluthériennes.

ANTI-MAZARINIQUE. adj. Qui est écrit contre le Cardinal Mazarin. On n’a rien imprimé à Paris depuis quatre mois, de meilleur que le Courrier du temps : ce sont huit cahiers Anti-mazariniques qui sont fort bons. Guy Patin.

ANTIMÉLANCOLIQUES. s. m. pl. Remèdes contre la mélancolie & l’atrabile : tels sont l’extrait panchimagogue, les sels apéritifs, &c. Il est aussi adjectif. Médicament, remède anti-mélancolique.

ANTIMENSE. s. f. Antimensia, orum. pl. Antimense est une espèce de nappe qui tient lieu d’un autel consacré. Le P. Goar, dans ses notes sur l’Euchologe des Grecs, dit que l’Eglise grecque ayant peu d’Eglises consacrées, & les autels consacrés ne pouvant pas facilement être transportés dans ces pays-là, depuis plusieurs siècles, l’Eglise grecque a ordonné qu’au lieu d’autels consacrés on se serviroit de certaines étoffes, ou linges consacrés qu’on étend comme des nappes d’autel.

Le mot d’Antimense vient, selon quelques-uns, de μένσος, qui veut dire, un panier, une corbeille en grec ; & en Italien un mets préparé. Selon d’autres ce mot est dérivé de deux autres dont il est composé, ἀντὶ, pro, vice, au lieu, & mensa, table ; ainsi antimense est la même chose que nappe, qui tient lieu de table. Il est parlé des antimenses dans le Droit. Balsamon, sur le septième canon du septième concile, demande s’il est permis à un Evêque, comme à un Prêtre, de célébrer la Messe dans une chapelle, où, parce qu’elle n’est pas consacrée, on se sert d’antimenses. Il répond que non, parce qu’un Evêque aviliroit sa dignité s’il célébroit dans un lieu où il n’y a point de trône, & qui n’est point consacré. Voyez l’Euchologe des Grecs où l’on trouve les cérémonies & les prières de la consécration des antimenses. Voyez aussi les notes du P. Goar sur l’Euchologe ; M. Du Cange, &c.

Antimense, est aussi un autel sur lequel on ne dit point la Messe, & qui est couvert de l’Antimense, parce qu’on doit mettre dessus des choses sacrées, sous lesquelles on mettroit dans l’Eglise d’Occident un corporal.

☞ ANTIMÉTATHESE, ANTIMÉTABOLE, & ANTIMETALEPSE. s. f. Antimetathesis, Antimetabole, & Antimetalepsis. Termes synonymes. Figure de Rhétorique qui consiste à répéter les mêmes mots, mais dans un autre sens. Par exemple, non ut edam vivo, sed edo ut vivam. Je ne vis pas pour manger, mais je mange pour vivre. Dict. de Boudot.

ANTIMILO. Île de l’Archipel. Antimelos. Elle est un peu au septentrion de celle de Milo, ce qui lui a donné son nom. Ἀντὶ, contre, vis-à-vis, & Milo. Elle s’appeloit autrefois Antimelos, & celle qui est à l’opposite, s’appeloit Melos.

ANTIMOINE. s. m. C’est un demi métal, un minéral qui approche de la nature des métaux, & que quelques uns croient en contenir tous les principes, parce qu’il se trouve près des mines des uns & des autres, & sur-tout dans celles d’argent, & de plomb ; & souvent il a sa mine propre. On l’appelle aussi Marchesite de plomb ; & les Chimistes le nomment le Loup, ou le Saturne des Philosophes, parce qu’il dévore les autres métaux quand on les fond ensemble, & qu’il les consume tous à la réserve de l’or. On l’appelle aussi Prothée, à cause de la diversité des couleurs qu’il prend par le moyen du feu. On le tient composé d’un double soufre minéral, l’un métallique approchant de la pureté & de la couleur de celui de l’or, & l’autre terrestre & combustible, semblable presque au soufre commun ; d’un mercure fuligineux & mal digéré, participant de la nature du plomb, & d’un peu de sel terrestre. Il est de couleur noire, & rempli de longues aiguilles brillantes. Le meilleur vient de Hongrie ; il est d’un rouge obscur, & a ses veines plus longues & plus luisantes. Il est fragile comme le verre, & tient le milieu entre les métaux & les pierres, parce qu’il se fond comme le métal ; mais il n’est pas ductile, non plus que les pierres. Il y en a un mâle, qui est plus sabloneux ; & un autre femelle, qui est plus pesant, plus brillant & plus friable. On le mêle avec d’autres métaux pour faire des miroirs, parce qu’il les rend plus polis. On le mêle aussi pour faire des cloches, parce qu’il rend leur son plus clair. On le mêle aussi à l’étain pour le rendre plus dur, plus blanc & plus sonnant ; & enfin au plomb dans les fontes des caractères d’Imprimerie, pour les rendre plus durs & plus unis. Il aide généralement à la fusion des autres métaux, & sur-tout à celle des boulets de canon. On a cru qu’il renfermoit une médecine universelle ; car c’est en effet celui qui fournit le plus de remèdes, & pour un plus grand nombre de maladies. Les Latins l’appellent stibium, & les Grecs στίμμι.

L’Antimoine cru, qui est celui qu’on nous apporte, n’est pas tel qu’il vient de la mine. Il a été fondu, & mis en pain de forme pyramidale. Il est employé dans les décoctions sudorifiques, lorsqu’on veut chasser les mauvaises humeurs par transpiration. On s’en sert dans les maladies vénériennes, dans les maux des yeux, & dans les plaies & les ulcères, pour les mondifier & les cicatriser.

L’Antimoine préparé, est celui qui a passé par les mains des Artistes, & qui possede des qualités différentes, suivant la maniere différente dont il a été préparé.

Le verre d’antimoine, est de l’antimoine broyé, cuit & calciné par un feu violent dans un pot de terre, jusqu’à ce qu’il ne jette plus de fumée ; ce qui est une marque que tout son soufre est évaporé. On le réduit en verre dans le fourneau à vent, & alors il est fort diaphane, rouge & brillant, & de couleur d’hyacinthe. Le verre d’antimoine est le plus violent de tous les vomitifs qui se tirent de l’antimoine.

Le régule d’antimoine est le culot, ou ce qu’on trouve au fond & au-dessous dans le creuset, où il y a de l’antimoine, après qu’il a été fondu avec des matières capables de séparer les parties pures d’avec les impures. Pour le faire, on prend de l’antimoine pulvérisé avec du tartre cru & du salpêtre rafiné, que l’on mêle exactement, & que l’on jette ensuite par cuillerées dans un creuset rougi au feu sur des charbons. Il se fait chaque fois une détonation semblable à celle de la poudre à canon. On en fait des balles purgatives qui servent toujours, & qui ressortent sans qu’il paroisse qu’il y ait eu presque rien de diminué de leur grosseur & vertu ; desorte qu’on les appelle Pilules perpétuelles. On en fait aussi des gobelets, où laissant reposer quelques temps des liqueurs, elles deviennent vomitives. C’est avec le régule, ou le verre d’antimoine, qu’on fait du vin émétique ; si on les pulvérise l’un ou l’autre, & qu’on les mette tremper dans du vin blanc.

La fleur d’antimoine, c’est de l’antimoine en poudre sublimé dans un aludel, dont les parties volatiles s’attachent à ses pots en projetant peu à peu la poudre. C’est aussi un puissant vomitif.

Le beurre d’antimoine est une liqueur blanche & gommeuse, qu’on nomme autrement, liqueur glaciale d’antimoine, qui se fait avec du régule d’antimoine & du sublimé corrosif. Cette liqueur se coagule en forme de glace dans le récipient, & est fort caustique, desorte qu’on ne l’emploie qu’à l’extérieur pour arrêter la gangrène, guérir la carie des os, des cancers, des fistules, &c. Si en voulant faire le beurre d’antimoine on se sert d’antimoine cru, & qu’après avoir tiré le beurre, on augmente peu à peu le feu, jusqu’à ce que la cornue rougisse, on retire encore le cinnabre d’antimoine, qui n’est autre chose qu’un mélange du mercure, du sublimé & du soufre de l’antimoine. Mais si on emploie le régule, après avoir tiré le beurre d’antimoine, on retire un mercure coulant, & point de cinnabre.

La poudre d’algaroth, ou émétique, se fait avec ce beurre d’antimoine précipité & lavé plusieurs fois. Le bézoard minéral se fait avec le beurre d’antimoine dissous par trois fois dans l’esprit de nitre, & ensuite calciné. Il reste une poudre blanche qui est sudorifique.

Le foie ou le safran d’antimoine se fait de parties égales d’antimoine & de nitre réduits en poudre, mêlés exactement & mis dans un mortier de fer, couvert d’une tuile, à laquelle on a laissé une ouverture. On introduit par cette ouverture un charbon de feu, qu’on retire ensuite. La matière s’enflamme, & il se fait une détonation, laquelle étant passée & le mortier refroidi, on trouve au fond du mortier une partie luisante, qu’on appelle foie d’antimoine ou safran des métaux, à cause de sa couleur. En latin hepar antimonii, ou crocus metallorum. On en fait du vin émétique, qui est celui dont on se sert ordinairement, des poudres, du sirop, & du tartre, qui sont aussi émétiques.

L’antimoine diaphorétique est une préparation d’antimoine, qui approche de la précédente, avec cette différence, qu’au lieu que dans le foie d’antimoine on met parties égales de nitre & d’antimoine, on en met dans celle-ci une d’antimoine & trois de nitre. Par ce moyen sa qualité purgative & vomitive se change en diaphorétique.

L’huile d’antimoine est de l’antimoine pilé & mêlé ; mis en digestion dans un vase plein de fort vinaigre sous du fumier pendant plusieurs jours ; & après cette opération plusieurs fois réitérée, le vinaigre qu’on distile donne une liqueur sanguine, qu’on appelle huile d’antimoine, & qui colore l’argent en or.

La chaux d’antimoine s’appelle quelquefois céruse, à cause de son extrême blancheur. Ce n’est que l’antimoine diaphorétique.

Le soufre doré d’antimoine se fait avec des scories qui se rencontrent au-dessus du régule en le faisant bouillir dans de l’eau, & en précipitant ce qui a été dissous par le vinaigre qu’on y jette.

Avant le douzième siècle, l’antimoine n’étoit connu que pour entrer dans la composition du fard : mais en ce temps là un Moine, nommé Basile Valentin, ayant trouvé le secret de préparer ce minerai, & d’amortir les qualités redoutables de son soufre, fit un livre intitulé : Currus antimonii triumphalis, où il soutint que c’étoit un remède pour toutes sortes de maux. Mais tous ses éloges confirmés par l’expérience n’empêcherent pas que pendant 300 ans l’antimoine ne fût négligé. Au commencement du dernier siècle, Paracelse le remit en vogue : mais on en condamna l’usage par Arrêt du Parlement de l’an 1566 ; & un Médecin, nommé Besnier, y ayant contrevenu en 1609, il fut exclus de la faculté. Le mauvais usage que l’on en avoit fait en l’appliquant mal-à-propos, le faisoit regarder comme un poison. Plusieurs savans hommes murmurerent contre cette défense, & le firent valoir par d’heureuses expériences. Ainsi malgré les invectives de quelques médecins entêtés, l’antimoine fut reçu par autorité publique au nombre des remèdes purgatifs en 1637, & en l’an 1650, on cassa l’Arrêt de 1566. La faculté le fit mettre au rang des remèdes purgatifs dans l’Antidotaire imprimé par son ordre en 1637, suivant l’opinion de Matthiole. Et enfin elle a fait donner un Arrêt du 29 Mars 1668, qui a donné permission aux Docteurs de Médecine de s’en servir, avec défenses aux autres personnes de l’employer que par leur avis. M. Patin n’a rien oublié pour décrier l’antimoine, & il regne dans ses lettres un déchaînement prodigieux contre ce remède. Il avoit dressé un gros registre de ceux que les Médecins avoient tués par-là ; il le nommoit le Martyrologe de l’antimoine. Voyez sur l’antimoine les Transactions Philosophiques, Tom. II. pag. 555 & suiv.

Il y a une préparation d’antimoine, appelée la Poudre des Chartreux. Voyez Poudre ou Chartreux. Il en est parlé dans l’Histoire de l’Académie, 1720. pag. 50, & dans les Mémoires de la même année, p. 417. On l’appelle aussi, Kermès minéral. Voyez Kermès.

Ce mot d’antimoine vient, selon quelques-uns, de ce qu’un Moine Allemand (c’est ce même Valentin) qui cherchoit la Pierre philosophale, ayant jeté aux pourceaux de l’antimoine dont il se servoit pour avancer la fonte des métaux, reconnut que les pourceaux qui en avoient mangé, après avoir été purgés très-violemment, en étoient devenus bien plus gras : ce qui lui fit penser qu’en purgeant de la même sorte ses confrères, ils s’en porteroient beaucoup mieux. Mais cet essai lui réussit si mal, qu’ils en moururent tous. Cela fut cause qu’on appela ce minéral Antimoine, comme qui diroit contraire aux Moines. Cette étymologie vient d’un vieux manuscrit d’Allemagne qui est dans la Bibliothèque de M. Moreau, Médecin du Roi, cité par M. Perrault, dans son Livre du Rabat-joie de l’antimoine. M. Huet croit qu’il vient du nom grec στίμμι, auquel les Arabes ont ajouté leur article al.

☞ ANTIMONARCHIQUE. adj. & s. de t. g. Qui est opposé à la Monarchie, au gouvernement Monarchique. Il est peu usité.

☞ ANTIMONIAL, ALE. adj. Terme de Médecine, qui désigne ce qui a rapport à l’antimoine. Préparation antimoniale, remèdes antimoniaux, c’est à-dire, dont l’antimoine est la base ou le principal ingrédient. M. Harris, dans sa Dissertation sur la peste, préfère, pour la guérison de cette maladie, les vomitifs les plus doux, tels que le vitriol blanc, & l’ipécacuanha aux émétiques antimoniaux, que leur violence excessive lui rend suspects en pareil cas. Journ. des Sav. 1722. p. 42. Des corpuscules antimoniaux. Lorin.

ANTINATIONAL, ALE. adj. Certains François qui ont un vernis d’humeur antinationale, trouverent à redire à l’apostrophe où M. Fléchier déplore la mort funeste de M. de Turenne. Idée des Oraisons funèbres.

ANTINÉPHRITIQUES. s. m. pl. Remèdes contre les maladies des reins, la colique néphritique, la pierre, la gravelle. Tels sont la térébenthine, le baume blanc d’Orient, celui du Pérou, de Canada : la réglisse, le pareirabrava, les semences de lithospermum, &c. D’ἀντὶ contre, & de νεφρῖτις, la douleur des reins. Il est aussi adjectif. Remède antinéphritique.

ANTINOME. s. m. & f. Nom de secte en Angleterre. Antinomus, a. Parmi ce grand nombre de sectes de l’Angleterre, que l’on ne sauroit plus nommer qu’à légions, les uns ont pris le nom d’Antinomes, ou contraires à la loi, & les autres d’Antiscripturaires, ou contraires à l’Ecriture. Pélisson.

Ce mot vient du grec ἀντὶ, contre, & νόμος, loi.

ANTINOMIE. s. f. Contradiction réelle ou apparente entre deux lois. Antinomia, Contrarietas. L’embarras des Jurisconsultes est de concilier les antinomies.

Antinomie, se prend quelquefois pour opposition à toute loi, comme on le voit par l’art. Suivant.

Ce mot vient d’ἀντὶ, contrà, & de νόμος, lex, loi.

ANTINOMIEN, ENNE. s. m. & f. Antinomus. Nom de secte du XVIe siècle, parmi les Protestans. Les Antinomiens ne disoient pas que les bonnes œuvres fussent pernicieuses ou inutiles, mais ils soutenoient que l’homme n’y étoit point obligé, dit Sanderus, Hær. 188, & qu’il n’y a point de loi ni de précepte de pratiquer les bonnes œuvres qui sont dans la loi divine. C’est de-là que vient le nom, qui signifie, contraire à la loi, ennemi de la loi. Ἀντὶ, contre, νόμος, loi.

ANTINOUS. s. m. Nom d’un homme qui a été mis au nombre des Dieux. L’Empereur Adrien en fit pendant sa vie l’objet de ses infâmes amours, & après sa mort il n’épargna rien pour le déifier. Temples, fêtes, jeux, oracles, tout fut mis en usage pour consacrer & éterniser le culte de ce nouveau Dieu. On mit sa statue dans tous les colléges, on frappa quantité de médailles à sa gloire, enfin on en vint jusqu’à l’adoration.

Antinoüs. s. m. C’est le nom d’une constellation septentrionale. Elle est près de l’Aigle.

ANTIO. Voyez Anzo.

ANTIOCHE. Antiochia. Nom de plusieurs villes. Etienne en marque jusqu’à dix, & d’autres douze ; Eustache quatorze. Appion dit que le seul Séleucus Nicanor donna le nom de son pere Antiochus à seize villes ; car ce nom est venu à toutes ces villes du nom de quelque Antiochus, comme nous l’allons voir. Ortélius prétend en avoir trouvé encore davantage.

Antioche, surnommée la Grande, est la plus fameuse ; elle fut bâtie par Séleucus I, roi de Syrie, après la bataille d’Ipsus, vers l’an 500 avant Jésus-Christ : il lui donna le nom d’Antiochus son pere. S. Jean Chrisostôme & Dion louent beaucoup Antioche. Ammien Marcellin l’appelle la capitale de l’Orient. L’ère d’Antioche est fameuse dans la chronologie, Æra Antiochena. Evagrius & d’autres la suivent ; elle commence, selon quelques Auteurs, la dernière année de l’Olympiade 182, de Rome 705, 49 ans avant Jésus-Christ. D’autres distinguent trois ères d’Antioche, qu’ils prétendent qu’elle a marquées sur ces médailles. La première, qui est la même que celle des Grecs ou des Séleucides, commence 312 ans avant Jésus-Christ ; ils y rapportent une médaille qui a d’un côté une tête de Jupiter, & de l’autre un Jupiter assis, avec ces mots, ΑΝΤΙΟΧΕΩΝ ΜΗΤΡΟΠΟΛΕΩΣ ΗΚΣ. Antiochensium Metropoleos anno 228. C’est la seule médaille qu’ils produisent, pour prouver qu’Antioche a suivi cette ère ; mais d’autres la croient frappée en des temps bien postérieurs. La seconde ère d’Antioche, selon l’Auteur dont je parle, commence à l’année de la bataille de Pharsale ; & la troisième depuis la bataille d’Actium, lorsqu’après la mort d’Antoine, Auguste eut le gouvernement des provinces de l’Orient. C’est à Antioche que les disciples de Jésus-Christ commencerent à s’appeler Chrétiens. Antioche a été le premier siége de l’Apôtre Saint Pierre, & a titre de Patriarchat, que les conciles de Nicée, d’Ephèse & de Calcédoine lui ont conservé. Les Chrétiens croisés se rendirent maîtres d’Antioche en 1098, & elle fut la capitale de la principauté d’Antioche, qui subsista jusqu’en 1208, que le Sultan d’Egypte reprit cette ville : elle s’appelle aujourd’hui Antachia, par corruption de son ancien nom. Elle est à 12 lieues de la mer, au 68 degré 10 minutes de longitude, & au 36 degré 20 minutes de latitude, sur l’Oronte. Pour distinguer cette ville des autres qu’il y avoit du même nom en Syrie, on l’appelloit Antiochia Epidaphnes, Ἀντιοχια ἐπὶ Δάφνης, selon Pline, Liv. V, ch. 21, & sur les médailles, & entre autres sur une du cabinet du Roi, ΑΝΤΙΟΧΙΩΝ ΤΩΝ ΠΡΟΣ ΔΑΦΝΗΝ ; c’est-à-dire, Antioche située proche du Daphné ; cependant un nouveau Critique a prétendu que cette Antioche proche du Daphné n’est point la ville même d’Antioche, mais un fauxbourg d’Antioche. Mais Pline est formel sur cela, Liv. V, Ch. XX, Deinde Promontorium Syriæ Antiochiæ ; intus ipsa Antiochia libera, Epidaphnes cognominata, Oronte amne dividitur. Voilà Antioche elle-même, surnommée Epidaphnes ; & c’est assurément Antioche même, au milieu de laquelle passoit l’Oronte ; ce n’étoit pas seulement un de ses fauxbourgs que ce fleuve divisoit en deux. De plus, le lieu appelé Daphné n’étoit pas un lieu voisin du fauxbourg d’Antioche, c’étoit le Fauxbourg même d’Antioche, comme nous le pourrons dire en son lieu. Quand Séleucus eut bâti Antioche, il y transporta les habitans d’Antigonie, bâtie peu de temps auparavant par Antigonus ; c’est ce qui a fait dire à quelques Auteurs, qu’Antioche avoit été commencée par Antigonus, & achevée par Séleucus.

Il ne faut pas toujours traduire en notre langue le mot latin Antiochia, quand il s’agit de la Syrie, par le nom d’Antioche, ville dont nous venons de parler. La province dont cette ville étoit capitale, s’appeloit aussi Antiochia, ou Syria Antiochia. Voyez Méla, Liv. II, 12. Pline V, 12. Il est vrai qu’on lit dans les éditions ordinaires de Pline, au Liv. V, Ch. 20. Syriæ Antiochenæ ; mais à l’endroit que j’ai cité, Liv. V, 12, on lit absolument & simplement Antiochia dans toutes les éditions ; dans les endroits même où il y a Antiochena dans les éditions, les anciens manuscrits ont Antiochia ; ainsi Saumaise a eu tort de se rétracter, & d’accuser Pline & Méla d’une erreur grossière. C’est lui-même qui s’est trompé sur Solin, page 890, comme le montre Vossius dans ses Observations sur le Chapitre XI du Livre I de Méla.

Antioche. Ville épiscopale de Mésopotamie, bâtie encore par Séleucus I, & appelée du nom de son pere. Elle s’appeloit autrement Nisibe.

Antioche. Ville d’Asie mineure, capitale de Pisidie, à 92 milles d’Ephèse, à 61 degrés, 20 minutes de longitude, & 39 degrés, 36 minutes de latitude. Les Turcs l’appellent aujourd’hui Versaegeli. Nos cartes cependant la distinguent de Versaegeli, & l’en éloignent de vingt lieues à l’Occident. Elle a eu un Archevêque soumis au Patriarchat de Constantinople.

Antioche de Cilicie, sur les confins de la Pisidie & de la Pamphilie, à 62 degrés, 30 minutes de longitude, & 38 degrés, 30 minutes de latitude ; aujourd’hui Antiocheta, petite Antioche. Elle a un Evêque suffragant de Séleucie. On la nomme quelquefois Antioche sur le Tragus, fleuve qui l’arrosoit.

Il y a encore une Antioche dans la Margiane, bâtie par Aléxandre, & nommée d’abord Aléxandrie. Elle fut ruinée par les barbares. Antiochus fils de Séleucus la rétablit, & l’appella Antioche, Antiochia. Pline, Livre V, Chapitre 16. Il ne dit point si c’est Antiochus, fils de Séleucus Nicanor, ou Antiochus III, fils de Séleucus Callinicus. De nouvelles cartes l’appellent Indion.

Une autre Antioche étoit proche du mont Taurus, ville épiscopale de Commagène, qui retient encore son nom, si l’on en croit Bellon ; sa longitude est 68 degrés, 40 minutes, & sa latitude 50 degrés, 10 minutes.

Une autre étoit sur le Méandre dans la Carie, ayant un Evêque suffragant de Stauropolis. Les Turcs la nomment Tachiali. Strabon, Liv, XIII, Bellon, Liv. I, C. 105. Il y a une médaille de Gordien dont le revers a pour inscription ΑΝΤΙΟΧΕΙΩΝ ΜΕΑΝΔΡΟΣ, Vaillant, p. 149, une autre de Trajan Dèce, ib. p. 180. Nous trouvons encore sur des médailles ΑΝΤΙΟΧΕΙΩΝ ΤΩΝ ΠΡΟΣ ΚΑΛΛΙΡΟΗΝ, Antioche proche de Callirhoé. C’est Edesse en Arabie, qui, comme Pline, nous l’apprend, Liv. XVII, Ch. 24, fut appelée anciennement Antioche. Cette médaille est citée par M. Vaillant, dans son Histoire des Rois de Syrie, p. 199. Etienne l’appelle ἐπὶ της Καλλιρόης λίμνης, sur le lac de Callirhoé, & c’est la huitième qu’il compte de ce nom ; ou plutôt c’est la fontaine minérale dont parle Josephe, Antiq. Jud. Liv. XVII, Chapitre VIII, & où Hérode alla prendre les bains quelque temps avant sa mort.

On trouve encore sur les médailles ΑΝΤΙΟΧΕΩΝ ΤΩΝ ΕΝ ΠΤΟΛΕΜΑΙΔΙ, Les Antiochiens qui sont à Ptolémaïde ; c’est Ptolémaïde même à qui Antiochus IV, surnommé Epiphanes & Dieu, donna son nom, comme il offrit à ceux de Jérusalem de le leur donner, dans le second Liv. des Machab. C. IV, v. 9. Voyez la médaille rapportée par M. Vaillant, Hist. des Rois de Syrie, p. 200.

On trouve encore sur une médaille de Septime Sévère ΑΝΤΙΟΧΕΩΝ ΠΡΟΣ ΕΥΦΡΑΤΗΝ. Voyez M. Tristan, T. II, & M. Vaillant, médailles grecques des Empereurs, p. 80. Pline parle aussi d’une Antioche sur l’Euphrate, Liv. V, Ch. XXIV. Quelques Auteurs soupçonnent que c’est Aradus ; mais Aradus étoit éloignée de l’Euphrate.

On trouve aussi dans M. Auréle, dans Luce Vère, & dans Commode, ΑΝΤΙΟ. ΤΩ ΠΡ. ΙΝ & ΑΝΤΙΟΧ. ΠΡΟΣ ΙΠ ; c’est-à-dire, Ἀντοχίον τὴν πρὸς Ἵππων, Antioche proche d’Hippus. Hippus est une montagne de Bithynie dans Pline, Liv. V, Chapitre 33. M. Vaillant, dans ses médailles grecques des Empereurs, met néanmoins cette Antioche dans la Cœlésyrie. Enfin, dans M. Auréle ΑΝΤΙΟΚΕΙΑ ΙΕΡΟΣ ΚΑΙ ΑΚΥΛΟΣ ΠΡΟΣ ΣΑΡΟΝ, Antioche sur le Sare ; c’est, dit M. Vaillant, p. 49, un fleuve de Cilicie. Pline met aussi un Sarus dans la Cappadoce, Liv. VI, Ch. 3.

Il y a aussi une Antioche dans l’Amérique méridionale, dans le royaume de Papaya, à 15 lieues de S. Foy, à 12 lieues à l’occident du fleuve Cauca, 60 lieues au nord de Papaya, & à 50 de Carthagène.

ANTIOCHETTA. Ville de l’Anatolie, ou Asie mineure. Antiochia super Tragum, Antiochia parva. Elle est sur la côte méridionale, vis-à-vis l’île de Chypre. Antiochetta est un diminutif d’antiochia, Antioche.

ANTIOCHIEN, ENNE. s. m. & f. Habitant, citoyen d’Antioche. Antiochenus, a, um. Les Traducteurs de Genève & ceux de Louvain se sont servi de ce mot : mais nos derniers Traducteurs, Mons, Bouhours, Sacy, ne l’emploient point. Ils disent citoyen d’Antioche, habitant d’Antioche, prosélyte d’Antioche. Ainsi il doit passer pour n’être point, ou n’être plus en usage.

ANTIOPIA. Ville ancienne de la Terre-Sainte, nommée dans l’Ecriture Asor. Voyez Asor.

ANTIPACHSU. Petite île de la mer de Grèce. Antipaxus, c’est-à-dire, vis-à-vis Pachsu. En effet, elle est sur la côte de l’Epire, près de l’île de Paxu, entre Corfa & Céphalonie.

ANTIPAPE. s. m. Concurrent du Pape, chef de parti, qui a fait schisme dans l’Eglise Catholique, pour se mettre à la place de celui qui est légitimement élû. Pseudo-Pontifex, Pontifex non legitimus. Les Antipapes sont cause de grands scandales dans l’Eglise. On compte 28 Antipapes. Novatien dans le troisième siècle fut le premier ; & Amédée, Duc de Savoye, dans le XV siècle a été le dernier sous le nom de Félix V.

ANTIPARALLÈLE. adj. m. & f. Terme de Géométrie, qui se dit des bases d’un angle qui en a deux, lesquelles ne sont pas parallèles entre elles. Antiparallelus, a, um. Lorsqu’un même angle a deux bases, qui n’étant point parallèles, forment avec ses côtés des angles égaux, l’un d’un côté, l’autre de l’autre, telles bases sont dites antiparallèles ; & ces bases peuvent être antiparallèles, suivant trois dispositions. Duc de Bourg. Elém. de Géom. L. VII. Les bases d’un tel angle sont antiparallèles, ou en se croisant ou en se touchant par une de leurs extrémités, ou en ne se touchant point, mais étant séparées l’une de l’autre. Les bases antiparallèles donnent des côtés de leurs angles réciproques aux côtés partiaux qu’elles forment. Voyez l’ouvrage cité.

ANTIPARALYTIQUES. s. m. pl. Remèdes contre la paralysie. Tels sont l’onguent de styrax, le martiatum avec l’huile distillée de romarin, l’esprit de vin camphré, les émétiques, les sudorifiques, &c. Il est aussi adj.

☞ ANTIPARASTASE. s. f. Antiparastasis. Figure de Rhétorique, qui consiste en ce que l’accusé apporte des raisons pour prouver qu’il devroit plutôt être loué que blâmé, s’il étoit vrai qu’il eût fait ce qu’on lui oppose. Boudot. Dict.

ANTIPAROS. Île de l’Archipel. Antiparoa. Cette île est ainsi appelée, parce qu’elle est vis-à-vis de l’île de Paros. Il y a dans l’Antiparos une des plus belles grottes du monde, qui est toute revêtue de congélations admirables. Du bas de cette grotte s’élèvent sur une espèce de crête des piliers de marbres cylindriques, dont le plus haut à plus de six pieds sur un pied de diamètre : il est arondi à sa pointe, & presque d’égale épaisseur. On en voit quelques petits qui sont comme des cornes naissantes ; & assez près de-là il en reste la moitié d’un, qui a été cassé en travers, & qui représente allez bien le tronc d’un arbre coupé. Voyez Tournef. Acad. 1702. Mém. p. 219, qui prétend que ce sont des pierres qui se sont ainsi formées par végétation.

ANTIPASTE. s. m. Terme de Prosodie. C’est un pied compose de deux autres pieds ; savoir d’un ïambe & d’un chorée : aussi l’antipaste est composé de deux longues entre deux brèves, comme le mot secundare.

ANTIPATHES. s. m. Espèce de corail, dont parle Dioscoride. Il est dit qu’il est noir & fait en manière d’arbre, mais plus branchu, & ayant les mêmes propriétés que le corail. Dict. des Arts.

ANTIPATHIE. s. f. Inimitié naturelle, qualités contraires qui se rencontrent dans certains corps, ensorte qu’ils semblent se fuir réciproquement. Antipathia, Repugnantia, Odium. On remarque cette antipathie entre la vigne & l’ormeau : il n’y a point de plus grande antipathie que celle qui est entre la salamandre & la tortue. Ce mot est composé des mots grecs ἀντὶ, contre, & πάθος, passion.

Antipathie, se dit aussi d’un sentiment naturel d’opposition que les hommes ont les uns pour les autres, sans sujet ou par des causes secrètes & inconnues. Cet homme ne m’a jamais rien fait, cependant j’ai une antipathie insuportable pour lui. C’est quelque chose d’étrange que l’antipathie & l’aversion naturelle que certaines personnes ont les unes pour les autres : on se hait sans savoir pourquoi. S. Evr.

Antipathie, haine, aversion, répugnance. Le mot d’haine s’applique plus ordinairement aux personnes. Les mots d’aversion & d’antipathie conviennent à tout également. On ne se sert de celui de répugnance qu’à l’égard des actions, c’est à-dire, lorsqu’il s’agit de faire quelque chose.

☞ La haine est plus volontaire, & paroît jeter ses racines dans la passion ou dans le ressentiment d’un cœur irrité.

☞ L’aversion & l’antipathie paroissent avoir leur source dans le tempéramment ou dans le goût naturel. Mais l’aversion a des causes plus connues : l’antipathie en a de plus secrètes. La répugnance est moins durable ; c’est un sentiment passager causé par la peine ou par le dégoût de ce qu’on est obligé de faire. Syn. Fr.

☞ On a de la haine pour le vice, de l’aversion pour ce qui est nuisible, de l’antipathie pour ce qui porte au crime, & de la répugnance pour les fausses démarches, ou pour ce qui peut donner atteinte à la réputation.

☞ Rien ne dépend moins de nous que l’antipathie : tout ce que nous pouvons faire, c’est de la dissimuler. Elle fait qu’on ne peut souffrir certaines gens, & nous en rend la compagnie fatigante.

☞ La différence du tempérament, la singularité de l’humeur, & le je ne sais quoi d’un air qui déplaît, produisent l’antipathie : elle dure jusqu’à ce que les ressorts secrets du sang & de la nature ayent fait un assez grand changement dans le goût, pour qu’il soit universel ou entièrement soumis à la raison.

Antipathie, se dit fig. de l’aversion & de la répugnance que l’on a pour quelque chose. Avoir de l’antipathie pour la musique.

Antipathie, terme de Peinture, qui désigne l’opposition qui se trouve entre certaines couleurs, Voyez Ennemi, terme de Peinture.

☞ ANTIPATHIQUE. adj. de t. g. Opposé, contraire, qui vient de l’antipathie. Repugnans, contrarius. Esprits antipathiques. Ces deux personnes ont des humeurs antipathiques. Qualités antipathiques, couleurs antipathiques.

ANTIPATRIDE. Ville de la Palestine. Antipatris. Elle est sur la côte, au nord de Joppé ou Jafa. Elle étoit à 16 milles au midi de Césarée. Voyez Joséphe, au seizième Livre des Antiquités Judaïques, Ch. 5 & L. I de la guerre des Juifs, Ch. 4. Elle se nommoit d’abord Chabazzaba ou Chapharbaza. Hérode la bâtit l’an 4705 de la période Julienne, dix ans avant la naissance de Jésus-Christ & la nomma Antipatride en l’honneur d’Antipater son pere. Du temps de S. Jérôme ce n’étoit qu’un bourg nommé Arsus ou Assur.

ANTIPÉRISTALTIQUE. adj. Terme de Médecine, qui se dit d’un mouvement des boyaux. Le mouvement péristaltique des intestins se fait par la contraction de leurs fibres du haut en bas, comme le mouvement antipéristaltique arrive par leur contraction de bas en haut. Dionis.

Ce mot grec, composé d’ἀντὶ, contre, περὶ autour, & σταλτιϰός, qui signifie, ce qui a la force de comprimer, de στέλλω, dans le sens de comprimer. Ce mouvement est contraire au péristaltique, c’est-à-dire, à celui qui comprime les boyaux, non pas que l’antipéristaltique ne les comprime, mais il se fait d’une manière différente.

ANTIPÉRISTASE. s. f. Terme Didactique. Action de deux qualités contraires, dont l’une par son opposition excite la vigueur de l’autre. Le froid, le chaud, le sec, l’humide. Antiperistasis. La moyenne région de l’air est froide en été, & les foudres s’y forment par antipéristase, par le combat du froid & du chaud. C’est par antipéristase que la chaux s’allume en y jetant de l’eau. Les Philosophes modernes se moquent de l’antipéristase & de tous les effets qu’on lui attribue.

Ce mot vient du grec ἀντιπερισταμαι, qui signifie undique, circumobsisto.

ANTIPESTILENTIEL, ELLE. adj. m. & f. qui est contraire à la peste, qui prévient ou guérit la peste. Alexilocmus, a, um. Le Pere Maurice de Toulon, Capucin, dans son Capucin charitable, & le Pere André-François de Tournon, dans l’abrégé qu’il a fait de ce livre en 1710, traitent de la composition du parfum antipestilentiel, & de la manière de s’en servir pour purifier les maisons. Journ. des S. 1724. p. 120.

☞ ANTIPHLOGISTIQUES. s. m. pl. Terme de Médecine, par lequel on désigne les remèdes propres à diminuer l’effervescence du sang, causée par sa disposition inflammatoire. Voyez Phlogistique.

☞ il est aussi adj. Remède antiphlohistique.

ANTIPHONE. s. m. Antiphonum. Terme de Liturgie. L’Antiphone, dans l’office de l’Eglise grecque, consiste en plusieurs versets d’un Pseaume, à chacun desquels on répond par une antienne. Ce mot vient d’ἀντὶ, & de ϕωνὴ. Voyez l’Eucologe, avec les notes du P. Goar, & l’Ordre de l’office des Grecs, au second tome des actes des Saints du mois de Juin.

ANTIPHONIER. s. m. ou ANTIPHONAIRE. Antiphonarium, ou Antiphonarius. Livre qui a pris son nom du mot grec ἀντιφωνη, Antienne. C’est un grand livre où tout l’office de l’Eglise avec les antiennes, est noté, à l’exception des messes qui sont dans un autre livre que l’on appelle Graduel, & où on trouve tout ce qui règle le chant des matines, des laudes, & des autres heures. Ce livre se met sur le grand pulpitre, ou lutrin, & est écrit en gros caractères avec les notes du plein-chant. Saint Grégoire le Grand en fut l’Auteur, comme dit Jean le Diacre en sa vie. Du temps de Jean le Diacre, 300 ans après S. Grégoire, on gardoit encore à saint Jean de Latran l’original de son Antiphonier. Id.

ANTIPHRASE. s. f. Terme de Grammaire. Contre vérité, figure ironique, par laquelle en disant une chose on entend tout le contraire. Anciphrasis. Ce mot vient d’ἀντὶ, & φράσις, qui vient de φραζω, je parle.

C’est une erreur allez commune de faire consister l’antiphrase dans un seul mot, comme quand on dit que le mot de Parque est une antiphrase, parce que les Parques n’épargnent personne. Parcæ, quia nemini parcunt. S. Jérôme, dans son épître à Riparius contre Vigilance, dit que l’on doit plutôt appeler Dormitantius par une antiphrase, que Vigilantius, parce qu’il s’opposoit aux veilles que les Chrétiens faisoient sur les tombeaux des Martyrs. Sanctius, dans sa Minerve, p. 431, condamne cette antiphrase, qui ne tombe que sur un mot, parce que phrasis ne signifie pas un seul mot, mais une partie d’un discours, orationem aut loquendi modum. Ce n’est pas que ce savant Grammairien nie absolument qu’il y ait de véritables antiphrases ; mais il prétend que l’antiphrase est une espèce d’ironie, lorsqu’on exprime par une négative ce qui a dû être exprimé affirmativement : Antiphrafis est ironiæ quædam forma, cum dicimus negando id quod debuit affirmari : comme quand on dit, il ne me déplaît pas, il ne dispute pas mal, au lieu de, il me plaît, il dispute bien. ☞ Sanctius auroit encore mieux fait de ne pas supposer que l’antiphrase doit être exprimée par une négative. Car si en voyant une femme laide, je dis, voila une jolie femme. Si en montrant un fripon, je dis, voila un honnête homme ; ce sont de vraies antiphrases, ou contre-vérités. On doit donc placer l’antiphrase entre les figures qui regardent les sentences & non entre celles qui regardent les mots, non inter figuras verborum, sed sententiarum. Cela étant, Erasme ne parle pas en bon Grammairien, quand il donne pour exemple de ces antiphrases, dans sa remarque sur la lettre de S. Jérôme, le mot de bellum, guerre, parce que la guerre n’a rien de beau, bellum, quod nihil habeat belli.

ANTIPHTHISIQUES. s. m. pl. Terme de Médecine. Remèdes contre la phtisie. D’ἀντὶ, contre, & φθίσις, la phthisie, ou consomption. Il est aussi adjectif. Remède antiphthisique.

☞ ANTIPHISIQUE. adj. de t. g. Terme qui signifie dans le sens propre & littéral, ce qui est contre nature. Alienus, abhorens à naturâ. Du grec ἀντὶ, contre, & φύσις, nature. Amour antiphysique. Voyez les Epigrammes de Rousseau.

ANTIPODAGRIQUES. s. m. pl. Terme de Médecine. Remède contre la goutte, principalement contre la podagre, d’où ils ont pris leur nom. Tels sont le chamædrys, le lait, la teinture d’antimoine, l’urine appliquée extérieurement, le baume anodyn de Batéus, &c. Il est aussi adjectif. Remède antipodagrique.

ANTIPODAL. adj. m. Qui est antipode. Le méridien antipodal. Anonyme, dans les Mém. de Trév.

ANTIPODE. s. m. Terme relatif, qui se dit des habitans de la terre, diamétralement opposés les uns aux autres. Antipodes, qui adversa nobis urgent vestigia. Ils sont sous des cercles parallèles, également éloignés de l’équateur, & sous différentes moitiés du même méridien. Ils sont de part & d’autres en pareille situation ; ils ont le même degré de froid & de chaleur ; la même longueur de jours & de nuits : mais ils ont en même temps toutes choses directement contraires, parce qu’ils sont séparés du diamètre entier de la terre. ☞ Desorte que, pendant qu’un lieu a l’été, les antipodes ont l’hiver ; & quand il compte midi, les antipodes comptent minuit. Plusieurs Anciens, & entre autres Lactance & S. Augustin, se sont mocqués de ceux qui croyoient les antipodes. Si l’on en croit Aventin, Boniface, Archevêque de Mayence, & Légat du Pape Zacharie, déclara hérétique l’Evêque Virgilius, pour avoir soutenu qu’il y avoit des antipodes. Mais on ne convient pas entièrement de ce fait. Quelques-uns rapportent cette histoire d’une autre manière. S. Augustin ne pouvoit comprendre que des hommes ou des arbres fussent pendans en l’air, comme il concevoit qu’ils devoient être sous l’autre hémisphère.

Ce fut Platon, qui le premier eut quelque idée des antipodes. Comme il concevoit la terre d’une figure ronde, il comprit aussi qu’il falloit qu’il y eût des antipodes, & en imagina le nom. Quelques-uns ont cru que l’Amérique n’ayant point été inconnue à ce Philosophe, qui l’a décrite sous le nom d’Atlantide dans son Timée, il lui avoit été aisé de conclure qu’il y avoit des antipodes. Mais d’autres soutiennent que ce qu’il dit de l’Atlantide est une fable. Quoi qu’il en soit, on ne peut plus douter qu’il n’y ait des antipodes. Sébastien Cano en 1519, jusqu’en 1522 ; François Drack Anglois en 1580, & Obvier de Nord Hollandois en 1601, & plusieurs François depuis quelques années ont fait le tour du monde. Les observations & les