Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/391-400

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Fascicules du tome 2
pages 381 à 390

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 391 à 400

pages 401 à 410


reins. Ce qu’elle a de plus particulier, c’est qu’on prétend que si on use de cette semence, la pierre diminue dans la vessie, lorsqu’elle est encore molle ; & qu’elle peut être diminuée par quelque médicament.

CHACRIL. s. m. Arbre de l’Amérique, que quelques Auteurs ont donné pour une septième espèce de Quinquina, & dont l’écorce a en effet plusieurs propriétés semblables à celles de ce fébrifuge. Hist. de l’Acad. des Sc. 1742, p. 168. voyez Cascarille.

CHACUN, CHACUNE. Pronom distributif. ☞ sans pluriel, qui sert à déterminer les personnes ou les choses. Chaque personne, chaque chose. Quisquis, quæque. Chacun juge comme il lui plaît. La justice est une volonté ferme & constante de rendre à chacun ce qui lui appartient. Par la loi de la nature, chacun est indépendant, & maître absolu de soi-même. On ne se pousse, & on ne s’agrandit dans le monde que pour augmenter l’idée que chacun se forme de soi-même dans son propre esprit. Nic. Il y avoit plusieurs Dames, & chacune avoit sa parure.

☞ On le dit quelquefois collectivement. Chacun en raisonne, en cause. Chacun vous blâme, pour dire tout le monde.

Chacun est suivi de son, sa, ses, quand il n’y a point de pluriel dont il doive faire la distribution. Dieu récompensera chacun selon ses œuvres. Maintenir chacun dans ses droits.

☞ Quand il y a un pluriel, dont chacun doit faire la distribution, on met leur, ou son, sa, ses, suivant la place qu’occupe chacun avant ou après le régime du verbe. Dans le premier cas où chacun précède le régime du verbe, on dit, ils payèrent chacun leur écot. Dans le second, où il est placé après le régime on dit, les hommes ont des passions différentes, & ils voient les objets chacun selon sa passion.

☞ Quand le verbe n’a point de régime on emploie indifféremment leur ou son, sa, ses. Ils vinrent chacun avec leurs gens, ou avec ses gens.

☞ Les Vocabulistes avertissent qu’on ne dit point un chacun, & ils ont raison : mais ils ajoutent que cette locution est autorisée par le Dict. de Trévoux, & cela n’est pas vrai. Il y avoit dans la dernière édition un chacun, tout chacun, cette expression est basse. On apportoit ces deux vers de Marot.

Sous ce tombeau gît Françoise de Foix,
De qui tout bien tout chacun souloit dire.

☞ De bonne foi, dire qu’une locution est basse, est-ce l’autoriser ? il faudroit être censeur plus équitable.

Ménage dérive ce mot de quisque unus, & écrit chasqu’un.

On dit proverbialement, à chacun le sien n’est pas trop ; pour dire, qu’il est juste qu’on rende à chacun ce qui lui appartient.

Chacun (un) Pronom. Unusquisque. voyez Chacun.

CHACUNIÈRE. s. f. Vieux mot qui signifie, maison, logis, lieu particulier de chacun. Mon père faisoit insérer dans le registre des négoces de son ménage, toutes les survénances de quelque remarque, & jour par jour les mémoires de l’histoire de sa maison très-plaisante à voir, quand le temps commence à en effacer la souvenance, & très-à-propos pour nous ôter souvent de peine… usage ancien que je trouve bon à rafraîchir chacun en sa chacunière, & me trouve un sot d’y avoir failly. Montaigne. En sa chacunière, c’est-à-dire, chez soi. Ainsi chacun s’en va en sa chacunière, dit Rabelais.

CHADEC. s. m. C’est une des quatre sortes d’oranges qui se trouvent dans les Îles Françoises de l’Amérique. C’est une espèce de gros limon, dont la fleur est bien nourrie & fort odorante. On met des fleurs de chadec dans la citronelle ou eau des Barbades, pour la rendre plus agréable. Hist. nat. du cacao & du sucre.

☞ CHADET. Terme de Conchyliologie. Coquillage d’un brun violet, du genre des buccins. Il se trouve à la Jamaïque, dans l’Île des Barbades, & en Afrique vers le Sénegal.

CHADOUIN. s. m. Nom d’homme. Haduinus, Chadoënus, Chaduindus, Harduinus, Hadwimus, Clodoënus. S. Chadoin, que plusieurs appellent S. Hardouin & d’autres S. Audouin, vint, selon quelques Auteurs, d’Irlande en France au VIIe siècle, & fut élû Evêque du Mans en 623.

CHAER, v. n. Vieux mot. Tomber. On a dit aussi chaoir & chair.

CHAFAUDIER. s. m. On nomme ainsi sur les vaisseaux bretons qui vont à la pêche de la morue & qui la font sécher, ceux de l’équipage qui dressent les échafauds sur lesquels on met sécher le poisson.

CHAFÉ ou CHAFFÉ. s. f. Terme d’Amidonnier. Ceux qui font l’amidon avec du froment en grain, appellent la chaffe, l’écorce ou son du grain qui reste dans leurs sacs, lorsqu’avec de l’eau ils en ont exprimé toute la fleur du froment.

CHAFERCONNÉES. s. f. pl. Toiles peintes qui se fabriquent dans les Etats du Grand Mogol. On les tire par Surate. Elles sont défendues en France.

CHAFFOURER. v. a. Vieux mot. Défigurer, barbouiller, grifonner. Corgrave & M. le Duchat, note 9, sur le troisième chap. du premier livre de Rabelais. Le Roi Henri III étant peint à genoux priant Dieu auprès de la Reine sa femme, au cloître des Jacobins, ils lui barbouillèrent & chaffourèrent tout le visage… Journal du règne de Henri III sur le mois de Juin 1589. C’est, disoit Roger, ce méchant diable aux enfers qui nous avoit ainsi chaffourés. Qu’au diable soit donné le vilain. Nouvelles des régions de la Lune, p. 271 du pr. tome de la Sat. Men. in-8o.

☞ CHAFFOUREUR. s. m. Dans Rabelais, griffonneur. Chaffoureur de parchemin, qui remplit le parchemin.

CHAFFRE. s. m. Nom d’homme. Thofredus, Thietfridus. S. Chaffre, fils de Leufroy, Gouverneur d’Orange, & neveu d’Eude, premier Abbé de Cormery en Vélay, se fit Moine dans ce Monastère, dont il fut Abbé après Eude son oncle, & dans lequel il mourut en 728 des blessures qu’il reçut des Sarrasins, qui y firent une course.

Le Monstier S. Chaffre, c’est ce Monastère de Cormery en Vélai, qui fut fondé depuis par Louis le Débonnaire, & qui prit le nom de S. Chaffre son second Abbé.

Ce nom s’est formé du latin Theofredus par corruption. Quelques-uns disent Thifroy & Théofroy. Baillet.

CHAFOUIN. adj. injurieux. Qui est maigre, ou de mauvaise mine. Qui specie, formâ est mâcilentâ aut parum liberali, macer, macilentus. Il ne se dit guère que du visage & de la taille. On dit aussi mine chafouine, air chafouin. Il est du style familier.

Chafouin, se prend aussi quelquefois substantivement. C’est un petit chafouin. C’est une petite chafouine.

☞ CHAGNY. Petite ville de France en Bourgogne, sur une petite rivière à trois lieues de Châlons, & à deux de Beaune.

CHAGRES. Port de l’Isthme de l’Amérique, sur la côte de la mer du nord, & à une journée de Porto-Bello, du côté de Panama. C’est dans cet endroit que la fameuse rivière de Chagres se communique à la mer du nord. Le fort est baigné par la mer, la garnison est considérable. Il y a beaucoup de Caïmans dans la rivière de Chabres aussi-bien qu’à la côte de S. Domingue. Elle a des courans rapides. C’est par cette rivière que l’on transporte à Porto-Bello tous les millions qui viennent de Terre-ferme. Le Pilote nous dit que depuis Chagres où est son embouchure jusqu’à Creuse il y a 18 lieues, mais par la mesure que nous en avons faite, nous n’en trouvons que 14. Il se trompe de beaucoup, parce que nous prenons la lieue marine de 20 au degré, & lui une lieue commune de 25 au degré. La rivière de Chagres est bordée d’arbres fort hauts & toufus, qui donnent de l’ombre, de sorte que l’on fait les trois quarts du chemin à couvert du Soleil. Il y a une infinité d’espèces d’animaux, de tigres, de singes, de léopards : on y voit un très-grand nombre de perroquets & d’autres oiseaux en quantité, blancs, rouges, bleus, verts, bruns & noirs, & quelques-uns ont toutes ces couleurs ensemble, qui forment un magnifique plumage. Rien n’est plus charmant que cette rivière.

☞ CHAGRIN. s. m. Inquiétude de l’esprit qui vient du mécontentement & des tracasseries de la vie, & dont l’humeur se ressent. Syn. Fr. La tristesse est ordinairement causée par les grandes afflictions. Le goût des plaisirs en est émoussé. La mélancolie est l’effet du tempérament. Les idées sombres y dominent, & en éloignent celles qui sont réjouissantes. L’esprit devient inquiet dans le chagrin, lorsqu’il n’a pas assez de force pour le surmonter. Le cœur est accablé dans la tristesse, lorsque par un excès de sensibilité il s’en laisse entièrement saisir. Le sang s’altere dans la mélancolie, lorsqu’on n’a pas soin de se procurer des divertissemens & des dissipations.

Ce chagrin philosophe est un peu trop sauvage. Mol.

Mais peut-être qu’aussi trop prompte à m’affliger,
J’observe de trop près un chagrin passager. Rac.

Chagrin signifie aussi quelquefois aigreur, dépit ou mauvaise humeur. Disputer sans chagrin. Acad. Fr. Pourquoi témoigner un chagrin bisarre contre les fautes d’autrui qui ne nous regardent point ? Dans la vieillesse nous imputons aux objets les défauts qui viennent purement de notre chagrin. S. Ev. N’affectez point un air austère pour paroître sage ; cela ressemble trop au chagrin. Boil. Il est souvent arrivé que l’envie & l’orgueil ont été les principaux ressorts qui ont fait remuer les Auteurs, & ensuite ils ont voulu faire parler leur chagrin pour un zèle nécessaire à la défense de la vérité.

☞ Il est aussi adjectif dans ces deux acceptions. Il est si chagrin depuis la mort de son ami, qu’on ne le reconnoît plus. Un esprit chagrin & mélancolique se forme d’ordinaire des idées tristes & affreuses de ses devoirs, & se prescrit un genre de vie austère & farouche. Flech. Il y a des esprits chagrins contre toutes les vertus. S. Ev. Un esprit né chagrin plaît par son chagrin même. Boil. Les faux dévots se figurent que le zèle de la religion les autorise à agir avec une humeur chagrine, contre tout ce qui n’est pas conforme à leurs idées. De Vill. On soupçonne d’ordinaire que les airs chagrins d’un Censeur proviennent d’une secrète envie qui ne peut souffrir le mérite des autres. Bell.

Quelques-uns dérivent ce mot de aigrir, parce qu’il cause quelque aigreur ou amertume dans l’esprit ; & en quelques lieux on dit encore aigrin, pour dire chagrin.

Chagrin, est aussi un certain cuir grainé, fait de peau de cheval, d’âne ou de mulet, dont le meilleur se prépare en la ville de Tauris. Pellis equina, asinaria, malina granis sinapi præparata. Il se fait seulement du derrière de la bête, & celui de l’âne est le plus beau grain. C’est avec des grains de moutarde qu’on presse dessus, qu’on y fait paroître ce beau grain qui le fait estimer. Il y a aussi un poisson nommé chagrin, qui a le cuir fort dur, dont on fait le premier & le vrai chagrin, parce qu’en effet cet animal a la peau toute couverte de petits grains si rudes & si durs, qu’on en peut limer & polir le bois. Borel dit que c’est un chat marin : de sorte qu’il semble que ce soit le grain de chat. Pellis squama. D’autres disent que chagrin est le nom que les Turcs donnent au poisson, dont la peau préparée est ce que nous appelons en France chagrin. ☞ Quelques-uns font venir ce mot du mot arabe sagri, qui signifie âne.

Chagrin, est aussi une sorte d’étoffe légère de soie, dont on se fait des habits.

CHAGRINANT, ANTE. adj. Qui donne du chagrin. Qui, qua, quod mærorem, molestiam, ægritudinem parit. Ce coup de malheur est fort chagrinant. Un sot qui parle toujours, est un homme fort chagrinant.

CHAGRINÉ, ÉE. adj. Qui ressemble à du chagrin, qui est inégal & raboteux comme du chagrin. Asper, scaber, scabrosus, a, um. L’Alcyonium durum ne paroît autre chose qu’une éponge renfermée naturellement dans une coque assez dure, dont le dehors est blanchâtre, & paroît comme chagriné. Cette plante se trouve attachée aux rochers dans le fond de la mer autour des Îles d’Yeres & de celles de Marseille. Tournefort, Acad. des Sc. 1700. Mem. p. 33. La peau de cet animal est chagrinée. Demours.

☞ On le dit en Botanique des fruits & des feuilles. Fruit chagriné, feuille chagrinée, lorsque leurs surfaces sont couvertes de petites éminences ou petits points saillans, comme les éminences qu’on appelle chagrin.

CHAGRINEMENT. adv. Avec chagrin. Ce mot n’est guère en usage, & ceux qui s’en sont servis n’ont pu lui donner cours. M. le Févre, en parlant de la cadence des vers, & du tour vif & brillant de la poësie, répond chagrinement que cette structure artificielle de paroles ne mérite pas tant d’applaudissemens, & qu’après tout elle coute trop de méditation à l’esprit, & ne vaut pas la peine de l’acheter si cher. Hist. des Ouv. des Sc. Oct. 1697. Je passe la vie à Paris chagrinement quelquefois, & quelquefois en espérance & en amusemens ; car pour de plaisirs je n’en ai plus : j’ai le cœur empoisonné d’une impression mélancolique que ma mauvaise fortune y a faite, & mes plus doux momens ne vont qu’à n’être pas fort triste. Mad. de Sevigné.

Le Comte d’Englesac, dit la Sylvie de Molière, m’évitoit avec soin, & cette cruauté me désespéroit. J’y rêvois un jour chagrinement dans le jardin du Luxembourg. Me de Villedieu, T. VII, p. 208.

CHAGRINER, v. a. Donner du chagrin, de l’inquiétude, de l’humeur. Molestiam, ægritudinem parere, afferre ; molestiâ afficere. Les afflictions secrètes chagrinent plus que les autres. Les déserts & la solitude chagrinent ceux qui sont vains, parce qu’ils ne leur parlent point d’eux-mêmes. Nicole.

☞ Il est aussi récip. Cet homme se chagrine de tout. Il ne faut pas se chagriner.

CHAHBAN. Voyez CHABAN.

CHAHUANT. Voyez CHAT-HUANT.

☞ CHAIAPA. Petite ville de la Turquie en Europe, dans la Morée, au Belvédère, sur le golfe de Zonchio. Baudrand croit que c’étoit anciennement Leprium.

CHAIAR s. m. Espèce de melon d’Egypte qui ne sent que l’eau, dont le goût est désagréable. Ses feuilles & ses tiges sont peu différentes des nôtres ; mais la semence est bien plus rafraichissante : le fruit est plus ovale & plus épais au milieu.

☞ CHAIDEUR. s. m. Nom que l’on donne dans les mines aux ouvriers qui pilent la mine à bras. Encyc.

CHAIE. s. f. Belandre dont on se sert dans les canaux de Flandre.

☞ CHAIER. s. m. Petite monnoie d’argent qui a court en Perse, valant environ quatre sous sept deniers de France.

☞ CHAILLOT. Autrefois village de France, aux environs de Paris ; mais érigé depuis quelque temps en fauxbourg de cette ville. On l’appelle aussi le fauxbourg de la Conférence. Il est situé au couchant du Louvre & des Thuileries, sur un coteau, à la vue de Paris.

CHAINE. s. f. Suite de plusieurs anneaux engagés les uns dans les autres. Il y a de grosses chaînes : il y en a de petites, de courtes, de longues : il y en en a d’or, d’argent, de cuivre, de saison : elles sont ordinairement de fer. Catena. Les ports, les rivières, les rues se ferment avec des chaînes de fer. On tend les chaînes dans les séditions. Les armes de Navarre sont des chaînes d’or en champ de gueules. On dit que l’origine de ces armes vient de ce que les Rois d’Espagne ligués contre les Maures, ayant remporté en 1212 une célèbre victoire sur ces Infidèles, dans la distribution du butin, le magnifique pavillon de Miralmumin échut au Roi de Navarre, qui en avoit rompu les chaînes. Le principal ornement des hommes autorisés & puissans parmi les Gaulois, étoient des chaînes d’or qu’ils portoient en toutes occasions, & même dans les combats, pour être plus facilement discernés d’avec la simple soldatesque. Chorier, Hist. de Dauph. L. III, p. 130.

Ce mot vient de catena. Nicot. Tripault le dérive du grec σχοῖνος, qui signifie juncus, parce qu’on faisoit, dit-il, les chaînes de jonc avant l’usage du fer : ce qui n’a aucune apparence, à cause que le fer est très-ancien.

Catena, une chaîne, vient du celtique chaden. Pezron.

Chaîne, signifie aussi les liens de fer avec lesquels on attache les criminels, les captifs, les galériens. Catena, compede, vincula. On a pris ce scélérat, & on l’a chargé de chaînes. Les Romains ont fait porter leurs chaînes à plusieurs Princes. Ce criminel devoit être pendu, on s’est contenté de le mettre à la chaîne, c’est-à-dire, aux galères.

On appelle aussi absolument chaîne, une troupe de galériens attachés ensemble. Damnati ad triremes. La chaîne va partir pour Marseille.

Chaîne, se dit aussi des ornemens faits en forme de petites chaînes, soit d’or ou d’argent, ou de pierreries. Catena aurea pretiosis lapillis distincta. Cette Princesse a une belle chaîne de diamans & le crochet d’une montre.

☞ On appelle Huissier à la chaîne, un Huissier du Conseil du Roi, parce qu’il porte au cou une chaîne d’or où est la médaille du Roi. Apparitor torquatus.

Chaîne, s’est dit aussi du présent, de la paraguante, que stipulent les femmes, quand elles vendent quelque office de leur mari, ou quelque terre au-delà du prix convenu ou quand on oblige la femme de consentir à la vente faite par le mari. C’est ce qu’on appelle en d’autres rencontres pot-de-vin. Pretii accessio, ad pretium accessio, summæ corollarium.

Chaîne, se dit figurément des engagemens, des liaisons ou des attachemens de l’esprit ; de la servitude, & de l’esclavage où l’on est réduit, soit par les passions, soit par une puissance supérieure. Vincula, nexus, compedes. Les amans se plaignent qu’ils languissent dans les chaînes : ils disent qu’ils veulent briser leurs chaînes. Un bienfait est une chaîne délicate, qui lie notre cœur. Abad. Les Anglois n’ont jamais porté de chaînes plus pesantes que celles dont Cromwel les chargea. Abad. On dit qu’un pécheur est dans les chaînes de la mort & du péché, en parlant des engagemens qu’il a dans le vice. L’opinion où étoient les Stoïciens que toutes choses sont gouvernées par une fatalité immuable, faisoit qu’ils se soumettoient comme des esclaves attachés à leur chaîne. Les Ecclésiastiques, aussi-bien que le reste des hommes, tiennent au monde par mille chaînes. Les chaînes du mariage, quelque honorables qu’elles soient, portent avec elles un attachement nécessaire, dont les nœuds semblent ravir la gloire d’aimer. Le peuple se forge d’ordinaire à soi-même ses propres chaînes ; une partie prête les mains à subjuguer l’autre. Ben. Les applaudissemens qu’il reçoit sont autant d’engagemens qui le lient d’une chaîne honorable. Rac. Les hommes sont tous liés entr’eux par une chaîne, qui est le besoin qu’ils ont les uns des autres. Nic. Il faut faire de grands efforts pour rompre cette chaîne de fer qui nous lie au monde & à nos desirs. Port-R. L’homme ne s’est pas plutôt affranchi d’un vice qui le tyrannisoit, que l’autre le reprend, & le remet à la chaîne. Flech. Il y a plus de constance à user sa chaîne, qu’à la rompre. Mont.

L’Ambition, l’amour, l’avarice ou la haine,
Tiennent comme un forçat son esprit à la chaîne. Boil.

Chaîne se dit aussi des choses qui viennent à la suite les unes des autres, qui en attirent d’autres après elles. Une chaîne d’affaires, une chaîne continuelle de malheurs. Catena, labores. L’expression latine est heureuse : mais il vaut mieux dire, enchaînement de travaux, soins continuels, malheurs qui se succèdent les uns aux autres, que chaîne de travaux, de malheurs.

On appelle aussi chaîne, à peu près dans le même sens, une collection de tous les Auteurs qui ont travaillé sur quelques-uns des livres de l’Ecriture. Paul Comitolus a fait la chaîne des Auteurs qui ont travaillé sur Job. Balthazar Corder a fait la chaîne des 65 Peres Grecs sur saint Luc. Il a fait aussi la chaîne des Peres Grecs sur saint Jean. Augustin Marlorat a composé une chaîne de vingt Auteurs Protestans, qui ont écrit sur les Evangiles. Il y a une chaîne de Pères sur la Genese dans la bibliothèque de l’Empereur. Il y en a une en arabe & en caractères syriaques sur tout le Pentateuque, dans la bibliothèque Bodléïenne. On a appelé ainsi ces ouvrages, parce que les divers Auteurs s’y trouvent comme enchaînés les uns aux autres sur un même sujet.

Chaîne de charrue, terme de laboureur & de Charron. C’est ce qui tient le timon de la charrue, avec le paumillon, par le moyen d’un gros anneau de fer dans lequel on passe ce timon, & qu’on arrête avec un instrument de fer qu’on appelle une chappe, Liger : ou en quelques endroits une cheville, parce qu’en effet c’est une cheville de fer. J’ai rompu ma chaîne, en cassant ma terre. On avance ou on recule la chaîne, on l’arrête avec la cheville ou la huppe, à un trou plus haut ou plus bas, selon que l’on veut que le soc enfonce plus ou moins dans la terre.

Chaîne de charrette, est une chaîne longue de dix-huit à vingt piés, dont les anneaux sont beaucoup plus petits, & plus forts que ceux de la précédente. Les Charretiers s’en servent, au moins dans plusieurs vignobles, pour attacher & tenir ferme les tonneaux de vin, ou les tines de vendanges qu’ils charrient, en la bridant ou la serrant avec un levier. Liger.

Chaîne, en termes d’Architecture, est une jambe, ou une grande rangée de pierres de taille mises l’une sur l’autre, pour fortifier un mur de moilon, de brique ou de plâtre, pour soutenir des poutres, &c. Secti lapidis pila tignaria, ou moles erecta, orthostates. On a fait marché avec ce Maçon, qu’il mettroit des chaînes sous poutre. Ce mur de clôture a des chaînes de pierres de trois toises en trois toises. On appelle chaîne d’encoignure, celle qui est au coin d’un pavillon. On appelle encore chaîne de liaison, certains bossages ou refends, posés en manière de carreaux d’espace en espace, dans les murs, aux encoignures d’un bâtiment, pour le cantonner : ils sont en façon de carreaux & de boutisses. Les chaînes ne sont quelquefois que de moilon, de cailloux maçonnés à chaux & à sable, lorsque les murs sont de matière moins forte & moins solide.

On appelle aussi chaîne de bronze, ou de fer, une espèce de barrière faite de plusieurs chaînes attachées à des bornes, espacées également, qui sert au-devant des places, des Palais, pour en empêcher l’entrée. Catena ærea, ferrea.

Chaîne de fer, est une assemblage de plusieurs barres de fer, liées bout-à-bout par clavettes & crochets, qui, étant mises dans l’épaisseur des murs des bâtimens neufs, servent à les entretenir. On en met aussi autour des vieux, pour les retenir quand ils menacent ruine.

Chaîne. Terme d’Horlogerie. Celle qui sert à la fusée est faite de petits maillons à peu près ovales. L’outil qui les fait, coupe & perce chaque maillon d’un coup de marteau.

Chaîne de vergue. On appelle ainsi sur mer certaines chaînes de fer qu’on tient dans la hune du vaisseau, & dont on se sert dans le combat à tenir les vergues, lorsqu’il arrive que le canon coupe les manœuvres qui les tiennent.

Chaîne de port, est une chaîne qu’on tend devant les ports pour en fermer l’entrée. Quand la bouche en est grande, la chaîne porte sur des piles d’espace.

Il y a aussi des chaînes dans les villes pour fermer les rues, & en empêcher le passage, pour le barricader dans des émeutes populaires. C’est en 1356, sous le Roi Jean, dans la révolte des Parisiens contre le Dauphin, que les Bourgeois, pour se mettre en sureté, commencèrent à mettre & à tendre des chaînes dans les rues de Paris. P. Dan, T. I, p. 568.

En termes de Géographie, on appelle chaîne de montagnes, une grande suite de montagnes attachées l’une à l’autre. Continui montes. L’Appennin est une chaîne de montagnes qui divise toute l’Italie. La chaîne des Alpes tient depuis la mer Méditerranée jusqu’au Pont-Euxin.

Chaîne, en termes d’Arpentage, se dit aussi d’une certaine mesure composée de plusieurs morceaux de fil de laiton, ou de fer, qui sert à arpenter, & qui a de gros anneaux au bout, où l’Arpenteur fiche ses flèches. Un Arpenteur a toujours un compagnon qui porte sa chaîne. Chez les Auteurs, la chaîne est la même chose que la perche, la verge & la corde, que les Latins ont appelée funis, corda, catena, & decempeda ; mais elle est fort différente selon les lieux.

Chaîne, dans le commerce, se dit aussi d’une certaine mesure faite d’une chaîne de fer divisée en parties égales, & qui sert pour différentes sortes de marchandises. Elle est différente suivant les différens pays. Le bois de compte à Paris, se mesure à la chaîne. Voyez Bois.

Chaîne, se dit aussi des fils étendus en long sur le métier d’un Tisserant ou d’un Tissutier, à travers desquels on passe la trame portée par la navette pour faire de la toile, du ruban, & toute sorte d’étoffe. Catella. La chaîne fait la longueur de l’étoffe, & la trame sa largeur.

Chaîne d’avaloire. Terme de Charretier. C’est ainsi qu’on appelle la chaîne qui est accrochée au limon.

Chaîne. (la) Contredanse.

CHAÎNEAU. Voyez Cheneau.

ChaÎneau, (l’Inconnue) est une espèce de poire.

CHAÎNETIER. s. m. Ouvrier qui fait & qui vend des agraffes, & toutes sortes de petites chaînes, pour pendre les clefs, pour attacher des chiens & plusieurs autres instrumens ; souricières, hameçons, &c. Catellarum opifex.

CHAÎNETTE. s. f. Petite chaîne. Catella. On fait des montres avec une chaînette, au lieu de corde.

On appelle aussi chaînette, la partie d’un harnois de chevaux de carrosse qui sert à les faire reculer, & qui consiste en des bandes de cuir cousues les unes sur les autres, qui sont passées dans un rond de cuir au bout du timon. C’est un terme de Bourrelier.

Chaînette, se dit aussi chez les Eperonniers de deux petites chaînes placées dans le bas d’un mors pour empêcher les branches de s’écarter l’une de l’autre.

Chaînette, se dit aussi, en termes de Broderie, d’un ornement qui se fait au métier ou à l’aiguille sur l’étoffe ou sur la toile. C’est une sorte de lacs continue.

Chaînette, est aussi un terme de Rubanier qui signifie un petit tissu de soie, qui court sur toute la tête de la frange. Catella bombycina.

CHAÎNON. s. m. L’un des anneaux ou des boucles qui composent une chaîne. Catenæ annulus. Il faut raccommoder un chaînon rompu à cette chaîne.

☞ Les Vitriers appellent chaînons, des vitres dont presque toutes les pièces paroissent liées comme les anneaux d’une chaîne.

☞ CHAINOUQUAS. Peuple d’Afrique dans la Cafrerie, séparé des Coronas à l’occident par des montagnes. Ils ont d’autres Cafres à l’orient & au midi, les terres du Roi de Bixi au nord.

CHAINS. adv. Ce mot veut dire céans. Il est hors d’usage.

CHAINSE. s. f. Vieux mot. Jupe de femme. Gloss. des Poës. du Roi de Nav.

CHAIR. s. f. Partie de l’animal, molle & sanguine, qui fait la liaison & la composition de la plupart des parties du corps. Caro. Chair dure, tendre, molle, grasse, maigre, savoureuse, succulente, insipide, &c. Les Médecins distinguoient quatre sortes de chairs : la chair proprement dite, qui est une partie sanguine & chaude, telle que celle des muscles & des gencives : la chair des entrailles, que quelques-uns appellent parenchyme, amas, ou affusion de sang : la chair propre à chaque partie, qui en fait la liaison & la composition ; & la chair glanduleuse, comme le pancréas. Les modernes ne donnent le nom de chair qu’aux muscles, qu’ils appellent simplement des chairs après Hippocrate. Ils le donnent aussi quelquefois aux glandes, qu’ils nomment chairs glanduleuses, pour les distinguer des chairs proprement dites, qui sont les muscles. Pour les parenchymes, & les chairs propres à chaque partie, ils ont découvert que c’étoit tout autre chose que ce que les Anciens pensoient. Les poumons ne sont qu’un amas de vésicules membraneuses, dans lesquelles l’air est reçu. Le cœur est un véritable muscle composé des mêmes parties que les autres. Le foie est un assemblage de glandes, où la bile se sépare, & de petits conduits où elle est reçue. La rate est un amas de vésicules remplies de sang, & les reins sont, comme le foie, un assemblage de glandes qui séparent l’urine, & de petits tuyaux par où elle est portée dans l’entonnoir, & de là dans la vessie par le moyen des uretères. La langue est un autre muscle composé de fibres charnues. L’hydropisie qu’on appelle anarsacha se fait des eaux qui sont enfermées entre cuir & chair. Nicot croit que ce mot vient de l’hébreu scheer, qui signifie la même chose.

On dit qu’une personne est en chair, qu’elle est bien en chair, quand elle est grasse & en bon point, Caro sana, opima, pinguis. On le dit aussi des chevaux.

En termes de Fauconnerie, on dit, remettre en chair un oiseau maigre. Cet oiseau est bien à la chair, pour dire qu’il chasse bien.

On appelle chair morte, la chair cangrenée, mortifiée, pourrie, ou qui sort des escarres des plaies, laquelle n’a point de sentiment. Caro putrida, vitiata, corrupta. Chair vive, la chair saine & qui a sentiment.

On dit qu’un homme a bonne chair, quand étant blessé en quelque endroit, la chair se reprend facilement : mauvaise chair, quand il survient toujours quelque humeur maligne qui empêche qu’elle ne se referme.

On dit qu’un homme est encore en chair & en os, pour dire, qu’il est encore plein de vie. Jesus-Christ apparut à ses Disciples en chair & en os, c’est-à-dire, réellement, & corporellement, & non point en spectre ni en esprit. On dit aussi des corps des Saints, qui par miracle ont été conservés entiers, qu’on les voit encore tous entiers en chair & en os.

Chair, (Bouillon de) en termes de Manège, est une superfluité ou excrescence de chair qui vient à la fourchette des chevaux, ou à côté, qui les fait boiter. Carnis tumor.

Chair, signifie aussi la peau & le teint. Cutis. Cette femme a la chair douce, unie, blanche comme du satin. Cette autre a la chair d’oison ; pour dire, rude, épaisse & grenue. ☞ Ainsi quand on dit : voilà une belle chair, & voilà de belle viande : on dit deux choses bien différentes. La première de ces expressions peut être l’éloge d’une jolie femme ; & l’autre est celle d’un bon morceau de bœuf ou de veau non cuit. Encyc.

Chair carrée (la) de la plante du pied. Voyez l’Accessoire du long extenseur des orteilles.

Chair, se dit généralement des animaux qui servent d’aliment à l’homme. Chair de bœuf, de mouton. Chair bouillie, rôtie. Chair fraîche, qui est nouvellement tuée. Caro recens. Chair salée. Chair qu’on sale pour la conserver long-temps, telle que celle dont on charge les vaisseaux dans les voyages de long cours. Caro salsa. Chair de boucherie, est la grosse viande, bœuf, mouton & veau. Caro bubula, vervecina, vitulina. Les Antropophages se repaissent de chair humaine.

Le Roi Jean, par son édit du 30 Janvier 1350 ordonna aux Bouchers de ne vendre que des chairs bonnes & loyales, leur défendit de les garder après être tuées plus de deux jours en hiver, & un jour & demi en été, & d’en vendre aucune sursemée. Une ordonnance du Prévôt de Paris du 24e Septembre 1517 défend que la même personne soit Boucher & Tavernier, & aux Taverniers de tuer des bestiaux chez eux, pour en vendre les chairs ; parce que ne les débitant que cuites, il y a beaucoup de défauts que l’on ne pourroit reconnoître. Un arrêt du Parlement de Toulouse du 26 Mars 1525 défend aux Bouchers de vendre des chairs morveuses & infectées. Le Parlement de Paris par un arrêt du 29 Mars 1551, porte que les Bouchers seront tenus de fournir les Boucheries chacun jour de chairs saines, nettes, & non corrompues, dûement visitées, selon les arrêts. Par sentence du Châtelet du 20 Juillet 1559 après avoir oui les Jurés Bouchers, qui dirent qu’il n’étoit pas bon de vendre la chair le même jour qu’elle est tuée, mais le lendemain ; il est fait défense aux Bouchers d’exposer en vente les chairs chaudes, à peine de confiscation & d’amende. Voyez M. de la Marre, Traité de la Police, Liv. IV, Titre V, ch. I, où il y a encore d’autres Sentences & Arrêts.

Chair considerée comme aliment, se dit particulièrement des animaux terrestres & des oiseaux. C’est pour cela qu’on dit qu’on ne mange point de chair en Carême.

Chair blanche ; c’est celle des chapons, des poulardes, des dindons & autres, dont la chair est véritablement blanche. Chair noire, celle des lièvres, des bécasses & autres, dont la chair est toujours brune.

Chair, se dit aussi des poissons. Caro piscium. Le brochet a la chair plus ferme que le barbeau ; les truites saumonées ont la chair rouge.

Chair, se dit aussi de la substance des fruits. Ce melon a la chair rouge, a une belle chair. Caro peponum. La chair d’une prune, d’une cerise. On dit, une chair beurrée & fondante, quand la chair se fond aussitôt dans la bouche. Chair cassante, se dit des poires qui sont fermes sans être dures : chair pâteuse, &c. Une chair fine, une chair grossière, farineuse, une chair tendre. Liger. Une chair coriace & dure, se dit de certaines poires qui n’ont aucune finesse, ni délicatesse, & qu’on a de la peine à avaler ; telles sont le catillac, les double fleur, les fontarabie, les parmein, &c. La Quint. Une chair farineuse, se dit de certaines poires qui sont mauvaises & désagréables au goût. Id. Une chair aigre. Id. Théophraste donne aussi aux plantes leur propre chair alentour de leurs filamens.

☞ Le mot de chair a un rapport à la composition physique de l’animal que n’a pas celui de viande : mais le mot de viande porte avec lui une idée de nourriture que n’a pas celui de chair. Ainsi l’on dit que le poisson & les légumes sont viande Carême, & que la perdrix a la chair courte & tendre.

☞ Il faut encore remarquer que le mot de viande se prend dans un sens plus général & plus abstrait que le mot de chair. La chair de poulet, de perdrix, de bécasse, &c. sont des viandes ; mais on ne dit pas la viande de poules, &c. toute viande se mange, toute chair ne se mange pas. Tout cela se trouve renfermé dans l’idée que M. l’Abbé Girard donne de ces deux mots.

Mortifier la chair, c’est à l’égard des opérations de Chirurgie, l’endormir, l’engourdir pour diminuer le sentiment de douleur quand on coupe quelque membre. Carnem sopire. A l’égard des alimens, c’est garder la chair quelque temps avant que de la manger, pour la faire trouver plus tendre. Carnem teneram facere, reddere. Et à l’égard de la morale ; c’est affliger son corps par plusieurs austérités, comme jeûnes, haires, disciplines, &c. In corpus, in carnem sævire, inflictis ultrò doloribus, carnem, corpus affligere.

Chair, dans l’Ecriture-Sainte, se dit de l’union qui est entre le mari & la femme. Le mari & la femme sont deux dans une même chair. Erunt duo in carne una.

☞ On le dit encore de l’homme & de tous les animaux vivans. Toute chair est arrivée en ma présence.

Chair, se dit en Théologie, en parlant des mystères de l’Incarnation & de l’Eucharistie, & de la Résurrection.

☞ Le verbe s’est fait chair. Verbum caro factum est, c’est-à-dire. J. C. a pris un corps humain dans le sein de la Vierge.

☞ L’Eglise Catholique croit que le pain est réellement changé en la chair de J. C. dans le Sacrement de l’Eucharistie. On mange réellement la chair de J. C. dans la sainte communion. La Résurrection de la chair est un article de foi que nous devons croire.

Chair, en style d’Ecriture-Sainte & en morale, signifie aussi concupiscence.

C’est un commandement de la Loi, Œuvre de chair ne desireras qu’en mariage seulement. S. François se plongeoit dans la neige pour dompter les rébellions de la chair. Bail. La virginité est un martyre perpétuel qui combat contre les aiguillons de la chair. La chair est un cheval fougueux, qu’il faut dompter par la tempérance & par le travail. S. Evr.

Cette chair que nous avons à combattre, est une chair souillée de mille désordres, une chair de péché… La chair du Fils de Dieu n’avoit rien de tout cela ; c’étoit une chair sainte & sanctifiante, une chair sans tache toute pure, une chair pleinement soumise à l’esprit, c’étoit la chair d’un Dieu, Bourdal. Exh. II, p. 92, 93. Ce que S. Paul appelle les œuvres de la chair, (Galat. V) sont les débauches, les impudicités, les querelles, les dissensions, les envies. Id. p. 92. Le même Apôtre appelle prudence de la chair, les ruses de la concupiscence & de l’amour-propre. Les désirs de la chair. On dit aussi au même sens crucifier sa chair, c’est une expression de S. Paul, Gal. V, 25. Les engagemens de la chair sont un obstacle invincible à la grâce du baptême. Bouh. Xav. Liv. III.

Vous êtes donc bien tendre à la tentation ;
Et la chair sur vos sens fait grande impression. Mol.

Chair, se dit encore figurément, en style d’écriture, pour désigner l’humanité & les foiblesses qui l’accompagnent, l’homme terrestre & animal, attaché aux sens, sujet aux passions & aux foiblesses de la nature, par opposition à l’homme spirituel éclairé par la foi. La terreur d’un traitement inhumain ébranle la chair. Patru. Nous portons par-tout avec nous un cœur de chair. Id. La constance des Evêques les élevoit au-dessus des infirmités de la chair, & les faisoit triompher de sa foiblesse. Herman. Jesus-Christ dit à S. Pierre, l’esprit est prompt & la chair est foible. Les gens du monde ne raisonnent que suivant la prudence de la chair. L’esprit nous élève ; mais le poids de la chair nous abbaisse. Nicol. Il n’y eut point dans son esprit de foiblesse à ménager ; la chair & le sang n’amollirent point son courage. Fl. Il se mêle d’ordinaire quelque chaleur aveugle de la chair & du sang, à l’ardeur du zèle. Id. Pour les esprits de chair & de sang il faut des preuves grossières, parce que rien ne les frappe que ce qui fait impression sur leurs sens. Maleb. Une religion qui a foulé aux pieds la chair & le sang qui lui résistoient, ne peut s’être établie que par une suite de miracles.

☞ On appelle couleur de chair, un blanc mêlé d’un peu de rouge, une certaine couleur rouge pâle, qui approche de la couleur de la chair de l’homme. Color expressam ad vivum carnem referens.

☞ En peinture on dit, bien de chair, en parlant des parties nues d’une figure simplement destinée ; pour en exprimer le tendre & la mollesse : & en parlant du coloris d’un bras, d’une cuisse ou de quelqu’autre partie, considerée en particulier, on dit que cette partie est d’une belle chair, ou de belle chair, pour dire que la couleur en imite très-bien la couleur naturelle de la chair. Voyez au mot Carnation la différence qui se trouve entre ces deux mots.

Chair, en termes de Tanneurs, Corroyeurs, &c. signifie le côté de la peau qui touchoit à la chair de l’animal quand il étoit vivant. L’autre côté s’appelle fleur. Donner une façon de chair, c’est la préparer, la travailler du côté de la chair.

Chair, se dit proverbialement en ces phrases, rire entre cuir & chair ; pour dire, intérieurement, & sans qu’il en paroisse rien au-dehors. On dit aussi, que la chair nourrit la chair ; pour dire, que les meilleurs alimens sont les viandes. On dit aussi, jeune chair & vieux poisson ; pour dire, qu’il faut manger certains animaux quand ils sont jeunes, & les poissons quand ils sont vieux.

Le vin nouveau fait animer
Plus l’esprit que vieille boisson,
Et puis l’on n’oit bien estimer
Que jeune chair & vieux poisson. Marot

On dit que la chair la plus près des os est la plus tendre. On dit au contraire, qu’il n’y a point de belle chair près des os ; pour dire qu’une personne maigre n’est jamais belle. On dit aussi d’un homme caché, dont on ne connoît point ni les mœurs, ni le génie, ni la profession, ou qui n’est bon à rien, qu’on ne sait s’il est chair ou poisson. On dit aussi à ceux qui veulent maltraiter quelqu’un, ou le faite trop travailler, prenez garde, il est de chair & d’os comme vous. On dit d’une personne fort grosse, & sans esprit, que c’est une pièce de chair, que ce n’est qu’une grosse masse de chair. On appelle, chère de Commissaire, chair & poisson, un repas où il y a des services gras & maigres. On appelle vendeurs de chair humaine, ce qu’on appelle aussi Racoleurs. Voyez ce mot. On le dit aussi de ceux qui font commerce de prostituer des femmes. On dit d’un homme assassiné & blessé de plusieurs plaies qu’on l’a haché menu comme chair à pâté.

Ce mot vient du latin caro, du grec κρέας.

On a dit Car, puis Char, Les Chars salées dans Joinville. Il se conserve encore dans Charogne. Ensuite adoucissant la prononciation, on a dit Cher, que l’on a écrit Chair pour éviter de le confondre avec Cher, carus.

Chair-à-dame. s. f. La Chair-à-Dame est une espèce de poire que la Quintinie dit être des mauvaises, & se manger au mois d’Août.

CHAIRCUITIER. Voyez Charcuitier.

☞ CHAIRE. s. f. Ce mot est synonime de siège, Cathedra. Mais on ne le dit au propre que dans les phrases suivantes.

Chaire, se dit en parlant du siège qu’un Evêque a dans son Eglise Cathédrale au haut du Chœur. Sedes Pontificia. L’Evêque étant dans sa chaire donna la bénédiction au peuple.

Ce mot vient de Καθέδρα, qui vient du grec καθίζομαι, sedeo.

☞ C’est du mot cathedra, chaire, siège éminent que tous les Evêques sont en droit d’avoir dans l’Eglise principale au haut du Chœur, que ces Eglises sont appelées Cathédrales.

Chaire, signifie aussi, le lieu éminent d’où un Prédicateur annonce la parole de Dieu au peuple. Suggestus, suggestum. C’est encore le lieu d’où les Régens, & les Protesseurs enseignent les Sciences à leurs écoliers. C’est ordinairement un siège élevé de menuiserie. Cathedra, pulpitum, suggestus, suggestum. Dans cet article & le suivant on dit chaire plutôt que chaise. Vaug.

Avoir la chaire d’une Cathédrale, d’une Paroisse c’est être nommé pour y prêcher. On m’a donné la chaire de Notre-Dame. Ce Prédicateur a eu toutes les bonnes chaires de Paris. Le P. Rapin & M. l’Abbé de Bretteville ont fait des Traités & Réflexions sur l’éloquence de la chaire ; c’est-à-dire sur l’éloquence qui convient à un Prédicateur. Nous avons de M. de Fénelon des Dialogues sur l’éloquence en général, & sur celle de la Chaire en particulier. Il y a aussi les maximes sur le ministère de la chaire par le P. Guèchiès. Eloquentia sacra. Tel monte en chaire sans autre talent, ni vocation, que le besoin d’un bénéfice. La Bruy. La chaire ne demande pas la dernière exactitude, & les Prédicateurs ont leurs licences aussi-bien que les Poëtes. Bouh. Le mot de Fortune doit être banni de la chaire, parce que cela sent trop la fable & le Paganisme. Id.

Je ne t’arrête plus, va prêcher, monte en chaire ;
Sans relâche au péché va déclarer la guerre. Vill.

Chaire au figuré, se dit du siège Apostolique. Sedes Apostolica. On dit en ce sens la chaire Apostolique. Le Pape est assis dans la chaire de S. Pierre.

La chaire de S. Pierre à Rome. La chaire de S. Pierre à Antioche. On appelle ainsi les Fêtes qui se font en l’honneur des translations des sièges de l’Eglise par S. Pierre. Cathedra Sancti Petri. Voyez les Notes de M. Châtelain sur la chaire de S. Pierre à Rome, Martyr. 18 Janv. Il y remarque que dans l’ancien Rit Gallican, qui dura jusqu’au IXe siècle cette fête se célébroit en France, & étoit même une fête particulière de France, ce qui peut passer pour une preuve de l’attachement particulier de l’ancienne Eglise de France pour le S. Siège. Voyez aussi les Notes du même Auteur sur la chaire de S. Pierre à Antioche, où il remarque que les plus anciens Martyrologes ont ces deux fêtes ; celle de Rome le 18 de Janvier, qui est le premier jour que puisse arriver la Septuagésime ; & celle d’Antioche le 22 de Février, qui est le plus tard que la Septuagésime puisse se rencontrer. C’est pourquoi quelques Ritualistes ont nommé ces fêtes les Clefs de la Septuagésime. La dernière a été aussi nommée S. Pierre du Festin, dit Beleth, parce qu’elle fut établie pour abolir la coutume qu’avoient les Payens d’apporter à manger sur les tombeaux de leurs parens vers la fin de Février, & qu’elle avoit été établie pour honorer le Pontificat de S. Pierre, soit d’Antioche, soit de Rome.

Chaire, se dit encore figurément de la prédication, du droit qu’on a d’enseigner dans une chaire, & du talent qu’on a pour y réussir. Eloquentia Christiana. La profonde érudition a trop de sécheresse pour la chaire, où il faut de la pompe & des figures. Bayl. La facilité de parler est un des principaux talens pour la chaire. Le P. d’Orl. Cet homme a de grandes qualités pour la chaire ; pour la prédication ; posséder le talent de la chaire.

Avec moins de talens vingt Abbés ont prêché.
Que la chaire a porté jusques à L’Evêché. Vill.

Chaire, se dit encore figurement de la fonction d’un Professeur public. Le Grand-Aumônier nommoit autrefois aux chaires des Professeurs Royaux. C’est aujourd’hui le Roi qui les donne.

☞ Quelques chaires sont mises au concours, à la dispute, pour dire qu’on les donne à celui qui en est jugé le plus digne.

CHAIRE CURULE. Voyez Chaise.

☞ CHAISE. s. f. Siège qui a un dos contre lequel on peut s’appuyer, & quelquefois des bras. Sella, cathedra. Chaise de paille. Chaise à bras. Alors on dit ordinairement fauteuil. Les femmes qui prétendent à la Principauté, croient avoit remporté une grande victoire quand elles n’ont présenté qu’une chaise à dos à une femme de qualité qui les aura visitées, tandis qu’elles ont été assises dans une chaise à bras. Cail.

Une chaise de commodité, c’est une chaise dont le dossier se hausse & s’abaisse par le moyen d’une crémaillère, & sur laquelle on peut dormir commodément. Sella percommoda, supina in delicias cathedra.

Chaises, dans les chœurs de certaines Eglises, ce sont des sièges de menuiserie, qu’on appelle aussi formes, plus communément stalles, où les Ecclésiastiques se placent pendant l’office. Subsellium.

Les hautes chaises sont les sièges du rang d’en-haut où sont placés les Chanoines qui sont dans les Ordres. Les basses, sont les sièges du rang d’en-bas, où sont placés les autres Chanoines & les Officiers du chœur. Majora & minora, Summa & ima subsellia.

Chaise percée, mieux que chaise tout court. C’est ainsi qu’on appelle une chaise dans laquelle on fait des nécessités naturelles. Sella familiarica. Aller à la chaise percée. Chez le Roi on l’appelle chaise d’affaires.

Chaise percée à Rome, sur laquelle on élève le Pape nouvellement élu. Les Protestans ont fait sur cette cérémonie plusieurs plaisanteries aussi froides que dénuées de vraisemblance. Ils en ont attribué l’origine à l’aventure de la prétendue Papesse Jeanne & à la nécessité de prendre des précautions à l’avenir pour s’assurer du sexe. Boile & Blondel, tous deux Protestans, ont suffisamment démontré l’absurdité de ce conte à leurs confrères. Quant à cet usage, il y en a une raison mystérieuse rapportée par le P. Mabillon. C’est dit-il, pour appliquer au nouveau Pape, posé sur cette chaise, ces paroles de l’Ecriture, que Dieu tire le pauvre de la poussière & de l’ordure, suscitans à terrâ inopem & de stercore erigens pauperem, &c. afin de lui faire sentir le néant des grandeurs.

Chaise de Régent ou de Prédicateur. Voyez Chaire. On ne dit plus aujourd’hui chaise en ce sens.

Chaise curule, étoit un siège d’ivoire qu’on plaçoit sur un char, & sur lequel étoient assis les premiers Magistrats de Rome, & ceux à qui on décernoit les honneurs du triomphe, comme les Consuls, les Censeurs, les Préteurs, les Ediles qu’on appeloit Curules. Sella curulis. Sur les médailles, la chaise curule marque la Magistrature à laquelle étoit attaché le privilège de s’y asseoir.

Chaise, signifie aussi une voiture pour aller assis & à couvert tant dans la ville qu’à la campagne. Sella gestatoria.

☞ On appelle chaise, chaise porteurs, un siège fermé & couvert dans lequel on se fait porter par deux hommes avec des bricoles sur leurs épaules. A Versailles il y a des chaises de places, des chaises à porteurs. Plusieurs particuliers ont aussi leurs chaises. Chaise à porteurs, porteurs de chaises. Où sont mes porteurs ?

☞ On appelle aussi chaise une voiture légère, traînée par un cheval, quelquefois deux. On le dit aussi d’une voiture pour une ou pour deux personnes. Monter dans sa chaise. Descendre de chaise, Chaise de poste. Chaise roulante.

Chaise, en termes de Charpenterie, se dit de quatre pièces de bois sur lesquelles est assise la cage d’un moulin à vent, & sur lesquelles elle tourne par le moyen de sa queue. On appelle aussi chaise d’un clocher, l’assemblage de charpenterie sur lequel est assise ou posée la cage d’un clocher.

On dit aussi chaise de roue. C’est sur quoi la roue des Couteliers est posée.

Chaise, en termes de Fiefs, se dit en partage de Fief noble, de quatre arpens de terre qui sont autour d’un château hors les fossés, qui appartiennent à l’ainé par préciput : ce qu’on appelle à Paris, le vol du chapon. Natalium prærogativus fundus, prærogativum prædium. Voyez la Coutume de Tours.

On dit proverbialement, quand on voir un ignorant assis dans une chaise, que ce sont les Armoiries de Bourges, une âne dans une chaise. Les Diversités curieuses ont voulu deviner l’origine de ce proverbe. On y lit que César s’étant rendu maître de Bourges, il y établit Gouverneur un Officier Romain appelé Asinius Pollio : la ville fut ensuite assiégée par les Gaulois ; tandis que le Gouverneur étoit malade : comme la ville alloit être emportée dans un assaut que les Gaulois donnèrent, Assurus le fit porter en chaise pour animer ses troupes par sa présence, ce qui lui réussit ; le bruit s’étant répandu qu’Asinius s’étoit fait porter en chaise. Asinius in cathedra. Les Romains reprirent de nouvelles forces, & chasserent les Gaulois : dans la suite d’Asinius in cathedrâ on a fait asinus in cathedra.

CHAISE-DIEU. Casa Dei. La Chaise-Dieu est une petite ville de France dans la basse Auvergne, & du Diocèse de Clermont, sur la Senoire. L’Abbaye de la Chaise-Dieu de l’Ordre de S. Benoît fut fondée au milieu du onzième siècle.

CHAISNE. Voyez Chaîneau.

CHAISNEAU, ou CHESNEAU. Voyez Chaîneau.

CHAISNETTE. Voyez Chaînette.
CHAISNETIER. Chaînetier.
CHAISNON. Chaînon.

CHA-JUS. Vieux mot. Ici-bas Voyez Jus.

CHAL. s. m. Vieux mot, qui veut dire, Chevalier, Eques. De Chal on a formé Sénéchal, comme qui diroit senior Eques ; c’est le sentiment de Borel. §er

☞ CHALABRE. Petite ville de France, au pays de Foix, Diocèse de Mirepoix, sur la rivière de Lers.

☞ CHALADE. Abbaye de France, Ordre de Ciseaux, Diocèse de Verdun, frontières de Lorraine & de Champagne.

☞ CHALAMONT. Petite ville de France dans la Principauté de Dombes, sur les confins.

☞ CHALANÇON. Petite ville de France, au bas Languedoc, Diocèse de Viviers.

CHALAND. s. m. Bateau plat, de moyenne grandeur, dont on le sert pour amener à Paris les marchandises qui descendent par la rivière. Cymba. On appelle bateaux Marnois, ceux qui sont construits vers la source de la Marne ; la forme des Marnois est plus courte, mais plus large. Chaland se dit plus particulièrement des bateaux de la Loire qui sont fort légers, & qui vont à la voile, qui ne sont bâtis que de planches encouturées l’une sur l’autre, jointes à des pièces de liûres qui n’ont ni plats-bords, ni matières, pour les tenir fermes. Ce sont ceux qui viennent par le canal de Briare. Il y en a de douze toises de long, de dix pieds de large, quatre pieds de hauteur de bord.

Ce mot, selon Borel, vient du grec κᾶλον, qui signifie lignum. Mais selon Du Cange, il vient du grec χηλάνδιον, qui étoit une espèce de petite Galère qui alloit à rames. Ugurio dit qu’on l’a appelée celandria, quia currit velociter in ὕδρῳ, c’est-à-dire, aqua. On l’a appelée dans la basse latinité, chelandium, chelandrium, chelindrus & salandra.

CHALAND. ANDE. s. f. Celui ou celle qui a coutume d’acheter à une boutique chez un même Marchand. Apud eumdem emtor assiduus. Adventor. Le plus grand secret du commerce, c’est de savoir bien entretenir les chalands. Le marchand a ses chalands, l’Ouvrier a ses pratiques.

☞ On le prend quelquefois simplement pour acheteur. Un nouveau chaland. Attirer les chalands.

Nicot croit que ce mot vient du grec καλῶ, voco, parce que les Marchands ont coutume d’appeler leurs chalands.

Chaland, se dit au figuré & par raillerie, pour signifier celui ou celle qui va souvent en de certains lieux, pour se divertir d’une manière qui tient un peu du libertinage. Ses sœurs n’étoient pas alors en âge de lui donner des chalands ; toutes maintenant sont grandes, & en la fleur de leur jeunesse. Patru.

On appelle pain chaland, le gros pain que les Boulangers de la ville fournissent aux bourgeois leurs chalands, à la différence de celui qu’apportent les Boulangers de dehors pour vendre au premier venu. Ce pain est fait d’une pâte forte, qu’on pétrit avec les pieds. Il est blanc, haut de mie & gros de croûte. Il n’y a guère que les pauvres gens de Paris & des fauxbourgs qui mangent du pain chaland. Panis secundarius. D’autres croient qu’on appelle ce pain chaland, à cause qu’il venoit par des bateaux nommés chalands, comme il en vient encore de Corbeil, de Ville-neuve-saint-Georges, &c. En ce sens chaland est adjectif.

CHALANDISE. s. f. Concours de personnes qui vont acheter dans une même boutique, & ont habitude d’acheter chez le même marchand. Assiduorum emptorum conciliatio, concursus. Depuis que ce Marchand m’a trompé, je lui ai ôté ma chalandise. Ce qui lui a attiré tant de chalandise, c’est qu’il vend de bonnes étoffes. Ce mot est vieux, & n’est plus guère d’usage.

☞ CHALAOUR. Ville de l’Indoustan, sur la route de Surate à Agra, entre Amandabad & Agra.

☞ CHALARONNE. Rivière de France. Calarona. Quelques-uns l’appellent Chalarine. Elle a sa source au grand étang de Joyeu, passe à Villars, à Chatelar, à Châtillon, & se perd dans la Saône auprès de Toissey.

CHALASIE. s. f. Terme d’Oculiste. Maladie de l’œil, relâchement des fibres de la cornée. Chalasis. Les bords externes de la cornée & de l’iris s’entretouchent dans leurs extrémités ; mais dans la maladie appelée Chalasie, ces deux membranes ne s’entretouchent point, le cercle de la cornée étant plus rehaussé, en sorte qu’on peut entrevoir le jour aux bords mêmes où la cornée se joint à l’iris. La vue est presque détruite, & cet accident est accompagné de la maladie oculaire que les Grecs nomment Hippos, qui est une palpitation ou un trémoussement de l’iris. Woolhouse.

CHALASTIQUE. adj. (Remede) Epithète que l’on donne à des remèdes, qui ont la propriété de ramollir & de relâcher les parties, lorsqu’elles sont tendues jusqu’à causer de la douleur : tels sont la graisse, le beurre, l’œsipe, &c. ☞ On prononce Calastiques. Cet adj. peut se prendre substantivement, faire usage des chalastiques.

Ce mot vient du grec χαλαῶ, j’amollis.

CHALAZOPHYLACÈS. Voyez Calazzophylaces.

CHALCEDOINE. (Prononcez Calcédoine) plusieurs même l’écrivent ainsi. Chalcédon, Tite-Live dit Chalcedonia. Ancienne ville de Bythinie, vis-à-vis de Byzance, aujourd’hui Constantinople, sur la côte orientale du Bosphore. Chalcédoine fut bâtie, selon quelques-uns, par les Mégariens, dix-huit ans, dit M. de Fleury, après la fondation de Byzance ; mais il se trompe, c’est dix-sept ans avant Byzance, c’est-à-dire, l’an de Rome 80, &, comme il ajoûte, la 2e année de la 26e Olympiade. D’autres disent que ce ne fut que 148 ans après Rome, & par conséquent 51 ans après Byzance ; mais cela ne s’accorde point avec ce que l’on rapporte, que l’Oracle l’appelle la ville des Aveugles, parce que les Fondateurs n’avoient pas choisi la belle situation qui étoit vis-à-vis d’eux, & où depuis fut bâti Byzance. Car si Byzance eût déjà été bâti, comment pouvoient-ils choisir cette situation ? Chalcédoine fut dans la suite une ville Archiépiscopale. Le IVe Concile général s’appelle le Concile de Chalcédoine, parce qu’il y fut tenu en 451. Ce Concile, composé de 630 Evêques, auquel présidoient les Légats du Pape Saint Léon, Paschasinus, Lucentius & Boniface, condamna Eutychès & Dioscore. Le P. Lucchésini, Jésuite Italien, a écrit l’histoire de ce Concile.

Chalcédoine s’appela d’abord Procéraste, Procerastis, ensuite Compuse, Compusa, ou, comme lit Pintianus, Colpoésse, Colpoasse. Quelques modernes l’appellent Caceline, Cacelina ; & d’autres disent que c’est Scutari ; mais ils se trompent. Les Turcs la nomment Caltirieu. Voyez Ortelius, Petr. Gillius De Bosph. Thr. L. III, c. 10, le Voyage de Constantinople de Grelot, & l’Itinéraire de Busbeq.

Chalcédoine, selon Denys le Géographe, étoit située sur une rivière de même nom ; & selon Arrien & Ménippe, c’est de ce fleuve qu’elle prit son nom. Le même Arrien dit que le fleuve fut ainsi nommé de Chalcédon fils de Saturne, & que ce sont les Doriens, qui y ayant conduit une colonie, donnèrent à la ville le nom du fleuve. D’autres disent qu’elle tira son nom d’un fils du Devin Chalcas ; & d’autres de Chalcide, ville d’Eubée, qui y envoya une colonie.

CHALCEDOINE. s. f. (Quelques-uns disent Charcédoine) est une espèce d’agathe-onix, d’une couleur tirant sur le jaune, ou sur le bleu, qui est propre à être gravée. Chalcedonius lapis. C’est aussi l’agathe blanche des Anciens. On en trouve aussi des noirâtres, mais l’azurée est orientale, & la meilleure de toutes.

☞ Cesalpin veut que la Chalcédoine soit l’onix blanche : mais ce n’est ni l’une ni l’autre. La Chalcédoine se distingue par une eau bleue, & l’orientale est de couleur de chair. Cette pierre est de peu de valeur, étant extrêmement neigeuse.

☞ Belon dit qu’elle est si commune parmi les Turcs, qu’elle leur sert à battre le blé. C’est une exagération.

CHALCEDOINEUX, EUSE. adj. Terme de Jouallier, qui se dit d’un défaut qui se trouve en plusieurs pierres précieuses, quand en les tournant on apperçoit quelques marques ou taches blanches, comme celles de la chalcédoine, Chalcedonius. C’est une épithète qu’on donne particulièrement aux rubis & grenats, quand il s’y trouve quelque couleur de lait mêlée qui diminue beaucoup leur prix. On chève les grenats & rubis pour leur ôter la chalcédoine.

CHALCEDONIEN, ENNE. adj. Chalcedonius, a. Qui est de Chalcédoine, qui appartient à la Chalcédoine. Prononcez Calcédonien. L’Océan Chalcédonien. On appeloit ainsi autrefois la partie de la mer qui étoit vis-à-vis & à la hauteur de Chalcédoine.

CHALCÉES. Voyez Chalcies.

CHALCIDE. (Prononcez Calcide.) Chalcis, ville de Syrie, située près du Liban. Elle donnoit son nom à une région ou Province dont elle étoit capitale, & que l’on nomme aussi Chalcidice.

CHALCIDICE. Pays de Syrie, qui prenoit son nom de Chalcide, qui en étoit la capitale. Chalaodice. Ce pays étoit au pied du Liban du côté du midi. C’étoit un petit État dont nous connoissons au moins quelques-uns des Souverains, qui sont Ptolémée, fils de Mennée ; Philippion son fils & son successeur ; Lysanias, frère de celui-ci, & autre fils de Ptolémée. Agrippa I la demanda à l’Empereur Claude, à titre de Royaume, pour Hérode son frère. Il fut refusé. Après la mort d’Hérode, fils d’Aristobule, l’an 48 de Jesus-Christ, le même Empereur la donna, avec titre de Royaume, à Agrippa II. Quatre ans après Claude la lui ôta. Je trouve néanmoins dans Josephe, De Bello Jud. lib. VII, c. VIII, § 1, qu’Hérode, fils d’Aristobule, fut Roi de Chalcide ou de la Chalcidice, & que son fils Aristobule lui succéda.

CHALCIDIQUE. s. m. (Prononcez Calcidique.) Salle grande & superbe. Chalcidicum. Festus l’appelle Chalcedonium, mais peut-être est-ce une faute. Vitruve, liv. V, ch. 1 ; Ausone, Hygin, à la Fable 184 ; Arnobe, liv. III & liv. IV, disent Chalcidicum. Les Chalcidiques étoient de grandes & magnifiques salles qu’on ajoutoit aux palais, comme on l’a fait encore en des siècles postérieurs, ainsi qu’il paroît par les grandes salles des palais de Paris, de Vannes & de Bourges. Si le terrain que vous avez pour bâtir est trop long, dit Vitruve, vous bâtirez au bout un chalcidique. Je voudrois bien, dit Arnobe, voir vos Dieux & vos Déesses pêle-mêle dans vos grands chalcidiques, & dans ces palais du Ciel. On écrit, dit-il ailleurs, que vos Dieux font leurs festins dans de grandes salles à manger qui sont aux Cieux, & dans des chalcidiques tous d’or.

Festus dit que cette espèce de bâtiment avoit pris son nom de la ville de Chalcis, mais il ne dit point pourquoi Philandre dit que c’étoit un édifice dans lequel la Cour des Monnoies avoit son tribunal ; & qu’il avoit pris son nom de χαλκὸς, airain, matière de la monnoie, & de δίκη, justice ; mais cela est faux, il auroit l’accent sur l’antépénultième, & non pas sur la dernière. D’autres le dérivent de deux mots grecs, χαλκὸς, bronze, airain, & οἴκος, maison ; & ils disent qu’on frapoit la monnoie dans ces maisons-là, qui étoient ce que nous appellerions Hôtels de la Monnoie. Mais que deviendroit l’o de οἴκος ? Comment l’accent seroit-il sur la dernière ? Comment la pénultième seroit-elle brève ? Pour former un nom de χαλκὸς & de οἴκος, il faut dire χαλκιοικος, Calciœcus, & comme on l’a dit effectivement pour Minerve, dont c’est-là une des épithètes, ΑΘΗΝΗ ΧΑΛΚΙΟΙΚΩΣ.

Il y a eu une contrée de Macédoine, une de Syrie, & une de Perse, qui portoient le nom de Chalcidique. En ce sens, il est féminin.

CHALCIES, ou CHALCÉES. s. f. pl. terme de Mythologie. Fêtes célébrées par les Athéniens, en mémoire de ce que l’art de mettre le cuivre en œuvre avoit été trouvé à Athènes. Ce mot vient du grec χαλκὸς, Cuivre, airain.

CHALCIŒCIES. s. f. pl. Fêtes de Lacédémone, où les jeunes gens venoient tout armés pour sacrifier à Minerve Chalciœcos.

CHALCIS. Chalcis. Nom qu’a porté l’Eubée, & qu’elle avoit pris de sa capitale, qui le portoit aussi, de même qu’une ville de Syrie. On dit que la Chalcis d’Eubée fut ainsi appelée, parce que c’est le premier endroit où l’on ait trouvé de l’airain, χαλκὸς, en grec.

Les Anciens nommoient cette ville Chalcis, comme Combé, fille d’Alopus, à qui l’on donne ce surnom, parce qu’en cette ville d’Eubée elle avoit inventé la première fabrique des armes d’airain. En ce temps-là elle étoit si considérable, que la querelle qu’eurent ses Habitans avec les Erythréens leurs voisins, partagea tous les peuples de la Grèce : ils prirent les armes pour les uns ou pour les autres ; & une de leurs colonies sous la conduite de Teuclès fut suffisante pour peupler l’île de Naxos. Du Loir, pag. 299.

CHALCITIS. s. m. Espèce de minéral qui est rouge comme le cuivre, friable & non dur, ayant des veines jaunes & luisantes au-dedans. Chalcitis. Il a le goût du vitriol : il se fond au feu, lorsqu’on le met seul dans un creuset, & se dissout aisément dans les liqueurs aqueuses. Il y a deux autres mineraux appelés Misy & Sory, qui sont fort semblables au chalcitis. Toute leur différence ne consiste que dans la tenuité ou grossièreté de leur substance. Ils se trouvent tous trois dans les mines de cuivre, & même ils se changent avec le temps l’un en l’autre. Le sory a les parties les plus grossières ; le chalcitis vient après, & ensuite le misy, dont les parties sont les plus tenues. Le misy se forme sur le chalcitis, comme le verdet sur le cuivre ; c’en est proprement la rouillure. Le chalcitis se forme de la même manière sur le sory. On trouve ces trois sortes de minéraux en Allemagne. Le chalcitis est un des ingrédiens de la thériaque : on a coutume de lui substituer le vitriol calciné. Ces trois minéraux sont caustiques & escarrotiques ; c’est pourquoi on ne les donne point intérieurement. Par la même raison bien des gens voudroient qu’on retranchât le chalcitis de la thériaque.

CHALCOGRAPHE. s. m. Cælator, scalptor. ☞ Prononcez Calcographe, suivant l’éthymologie, Graveur en airain ; mais on le dit généralement de tous Graveurs sur métaux. Melan, Edelinck, Nanteuil, &c. étoient de fameux Chalcographes. Le P. Lelong dit que Rémi Capitain avoit fait graver plusieurs portraits par Jacques Debie, célèbre Chalcographe. On lit dans le Dictionnaire de Moreri que Callot fut un des plus habiles Calcographes de son temps, & Jacques Debie lui-même prend le titre de Chalcographe à la tête de ses vrais portraits des Rois de France tirés de leurs monumens, & de ses familles illustres de la France par les monumens des Médailles. Ce mot vient de χαλκὸς, airain, cuivre, & γράφω, je grave.

☞ CHALCOPYRITE. Espèce de Pyrite où il se trouve des parties cuivreuses.

CHALDAÏQUE. adj. m. & f. La langue chaldaïque. Chaldaïca lingua. On dit aussi substantivement le chaldaïque, en sous-entendant le langage. La Paraphrase chaldaïque, qu’on appelle en langage de Rabbin, le Targum, Paraphrasis chaldaica. Paraphraste chaldaïque, c’est l’Auteur d’une paraphrase chaldaïque. Il y a dans la Polyglotte d’Angleterre trois paraphrases chaldaïques ; celles d’Onkelos, une de Jonathan fils d’Uziel, & celle de Jérusalem. On attribue aussi à Jonathan celle qui est sur les Livres que les Juifs nomment Prophètes. Voyez sur les Paraphrases chaldaïques Walton, dans son XIIe Prolégomene, & l’Histoire critique de l’Anc. Testament, Liv. II, ch. 18.

Ximénès entreprit de faire travailler à une nouvelle édition de la Bible, qui contînt pour l’Ancien Testament, le Texte hébreu, la Vulgate, la Version grecque des Septante traduite en latin, & la Paraphrase chaldaïque, avec une Version latine. Fléch.

Chaldaïque. (Période) Voyez Période.

CHALDÉE. Chaldæa. Ancienne province de l’Asie, qui occupoit la partie de la Mésopotamie la plus basse & la plus proche du continent du Tigre & de l’Euphrate, & qui s’étendoit encore au midi jusqu’au détroit Persique, entre les déserts de l’Arabie au couchant, & le Tigre à l’orient. La capitale de la Chaldée étoit Babylone ; de-là vient que la partie méridionale de cette province, au-dessous de la Mésopotamie, ou même la Chaldée toute entière, est souvent appelée Babylone. On l’appelle aujourd’hui Yerak Arabi. Voyez les étymologies du mot Chaldéen. Dans le texte original de l’Ecriture, le pays n’a point d’autre nom que celui du peuple, comme beaucoup d’autres.

Quelques-uns voudroient retrancher l’h des mots Chaldée, & Chaldéen, en faveur de la prononciation.

CHALDÉEN. s. m. Se dit des personnes & du langage. Chaldæus. Le chaldéen, les Chaldéens.

Chaldéen. (Missel) Titre du Missel des Maronites, qui est en langue chaldaïque ou syriaque, & qui a été imprimée in-folio à Rome, en cette langue, l’an 1592. Ce Missel contient douze Messes ou Liturgies, sous les noms de saint Jacques, de saint Pierre, de saint Jean, des saints Apôtres, &c. Voyez les Remarques sur le chapitre vingt-quatre du Voyage du P. Jérôme Dandini au mont Liban.

Chaldéen, enne. s. m. & f. Peuple habitant la Chaldée. Chaldæus. En hébreu ou en chaldéen, les Chaldéens sont appelés Chasdens, כשדאין כשדים. Philon, dans ses Gloses ou Interprétations des noms hébreux, interprète ce mot μαντεις, ἤ μάγος, ἢ ὣς δαιμόνες, c’est-à-dire, selon l’interprétation de Saint Jérôme, Ut dæmones vel feroces, ou plutôt Devins, ou Mages, ou comme Démons. Ce Père suit encore ailleurs le sentiment de Philon, & dit que personne ne doute que ChaUeen signifie Dimon, Cela supposé, il est clair que Philon & Saint Jérôme ont cru que ce nom hébreu étoit compose d’un כ, marque de similitude, ou de ressemblance, & de schedim, qui signifie Démons, & vient de שלד, schalad, ravager ; & le ש ou s, s’est changé en l, comme le d dans Ulysse. Mais il est bien plus probable que ces Peuples ont été ainsi appelés de כשד, Cased, ou Chesed, dont il est parlé, Gen. XXII. Dans ces premiers temps, toutes les Nations portoient le nom de leur Fondateur. Saint Jérome est de ce sentiment dans ses Questions hébraïques, & Bochart. Dans ce sentiment, il faut dire que, quand l’Ecriture se sert du mot Chaldéen avant le temps de Chesed, fils de Nachor, c’est une anticipation, ou prolepse. On pourroit dire aussi que ce nom leur venoit peut-être de quelqu’autre Chesed, plus ancien que le fils de Nachor. D’autres croient que ce nom vient de celui d’Arphaxad, père des Chaldéens, comme le dit Josephe, Antiq. Jud. Liv. I, ch. 7, que ce nom, dis-je, en vient par apocope, c’est-à-dire, en retranchant le commencement alpha, reste en hébreu כשד ; d’où confondant le כ, ou c, & ש, ou s, en un ξ, ou x, les Grecs ont fait Ἀρφαξὰδ, Arphaxad. Ce sentiment est de tous le plus vraisemblable.

Les Chaldéens passoient dans l’Antiquité pour les inventeurs de l’Astronomie, & ils étoient fort adonnés non-seulement à cette science, mais encore à l’Astrologie, à la Devination, &c. C’est pour cela que Chaldéen, dans l’Ecriture & dans les Auteurs profanes, est la même chose que Mathématicien, Astrologue, diseur de bonne aventure, faiseur d’horoscope, magicien, comme on le peut voir, dans Daniel, II, 2, 4, 5, 10, IV, 7, V, 7, 11 ; dans Cicéron, De Divin. lib. I, n. 2, 31, & lib. II, n. 42, 87, & Lib. II, n. 42, 87, & Lib. I. Tuscul. quæst. n. 95. Strabon, Liv. VI ; Aulu-Gelle, Liv. I, ch. 9, & Liv. XIV, ch. 1 ; Suétone, dans Vitellius, ch. 14 ; Saint Jérôme, sur Daniel, ch. 11 ; Juven. Sat. X, vers. 94.

Chaldéen, avec l’article défini, signifie la langue chaldaïque, que parloient les Chaldéens. Chaldaica lingua. Le chaldéen est un dialecte de l’hébreu. Un Auteur qui écrivoit, il y a quelques années en Hollande, une Dissertation sur ces Médailles (Samaritaines), s’est imaginé y trouver du chaldéen. P. Souc. Dissert. sur les Médailles Hébr. Il signifie aussi quelquefois le Paraphraste Chaldaïque ; c’est-à-dire, Onkelos, quand on parle du Pentateuque ; & Jonathan, s’il s’agit des autres Livres de l’Ecriture : car pour Jonathan sur le Pentateuque & le Paraphraste de Jérusalem, il ne faut point les appeler simplement & absolument le chaldéen. Le chaldéen paroït à plusieurs Chrétiens & Juifs convertis fournir des preuves de la distinction des personnes en Dieu, & marquer la seconde par le mot ממדא, verbe.

Chaldéen, enne, est aussi adj. Chaldaïque, qui appartient aux Chaldéens, ou à la Chaldée. Chaldæus, Chaldaicus. Strabon rapporte qu’il y avoit deux Sectes parmi les Philosophes Chaldéens ; les Orchènes, & les Borsippènes. La langue chaldéenne.

☞ CHALDRON. Mesure d’Angleterre. Voyez Chaudron.

CHALEMÉE. Vieux s. f. Flûte, chalumeau. Tibia, calamus.

CHALEMEL. s. m. Calamus. Ce mot s’est dit autrefois pour chalumeau, comme ormel & mantel pour ormeau & manteau. De chalemel on en fait chalemeler, pour dire, jouer de la flûte, du chalumeau ; ce verbe n’est plus en usage.

CHALEMELER. v. a. Vieux mot. Faire danser au son de la flûte.

Et tint un frestel de rosiaux,
Si chalemoit les danziaux.

CHALEMELLE. s. f. Vieux mot. Flûte, chalumeau. Tibia, calamus.

CHALEMIE. f. 1. Flûte champêtre, chalumeau, espèce de musette. C’est plus proprement ce qu’on appelle cornemuse. Pastoritius calamus. La chalemie est différente de la cornemuse, en ce qu’elle n’a point de bourdon. Ce mot n’est en usage que dans le burlesque.

Ains est couru voir la solennité,
Et a souné sa flûte & chalemie
Tout à ton loz, honneur & dignité. Marot.

☞ CHALENTON. Ville de France, en Auvergne, selon quelques Atlas. Ville imaginaire.

CHALET. s. m. C’est ainsi que les Suisses nomment certains bâtimens bas, qui se trouvent répandus dans les montagnes de Griers, uniquement destinés à faire des fromages.

CHALEUR. s. f. ☞ On peut considérer la chaleur comme l’effet que produit en nous un corps chaud, & sous ce point de vue c’est une perception, une modification de notre ame occasionnée par l’action du corps qu’on appelle chaud, qui ne peut avoir rien en lui de semblable à cette sensation de l’ame. Ou bien comme une qualité qui constitue le corps chaud, & qui le rend propre à exciter dans nos organes la sensation de chaleur. Calor.

☞ On peut définir la chaleur, un sentiment qui résulte de l’action & du mouvement des petits atomes de feu qui agissent sur les corps, & qui entrent dans leurs pores. Quand nous sentons la chaleur du feu, c’est que nous sentons de petits atomes de feu qui se détachent, & qui viennent fraper nos sens : & elle est d’autant plus violente, que ces corpuscules sont en plus grand nombre, & plus agités. Si l’on expose au feu, un vase rempli d’eau, vous verrez cette eau s’échauffer & bouillir, aussitôt qu’un grand nombre de particules ignées aura communiqué à ses globules sensibles & insensibles le mouvement dont elles sont animées. On fait fondre les métaux les plus durs, en les plongeant dans quelqu’une de ces liqueurs où le feu se trouve en grande abondance, telles que sont l’eau forte, l’eau régale. Quand on veut communiquer de la chaleur aux corps solides les plus froids, on n’a qu’à les jetter dans le feu. Bientôt leurs pores seront remplis de particules ignées. Une infinité d’expériences de cette nature donne lieu aux Physiciens de conclure que l’on doit regarder le feu comme la vraie cause de la chaleur.

☞ Ce feu est répandu également partout, & il existe en égale quantité, dans toutes les parties de l’espace ; mais il est caché & imperceptible, & ne se découvre que par les effets qu’il produit ; effets qui dépendent de certaines circonstances qui concourent ensemble, dont la première, & la plus essentielle, est que ce feu également répandu partout, soit amassé & réduit dans un plus petit espace. On a cru que les grandes chaleurs de la zone torride la rendoient inhabitable. Æstus. Les pointes & les imaginations de Séneque sentent un peu la chaleur d’Afrique. S. Evr. La chaleur du Soleil aux jours les plus froids de l’hiver est égale à celle des jours les plus chauds de l’été : Ce qu’on a prouvé avec le miroir de la Bibliothèque Royale ; parce qu’il fait aussi-bien en hiver qu’en été cet effet surprenant, de vitrifier les pierres & les briques en peu de temps.

La chaleur du Soleil en été est assez forte pour échaufer une barre de fer de six pieds de longueur, & la rendre plus longue qu’elle n’étoit en hiver, ayant été exposée à la gelée, de deux tiers de ligne.