Discours sur la première décade de Tite-Live/Livre troisième/Chapitre 47

La bibliothèque libre.
Livre troisième
Traduction par Jean Vincent Périès.
Discours sur la première décade de Tite-Live, Texte établi par Ch. LouandreCharpentier (p. 568-569).


CHAPITRE XLVII.


Un bon citoyen doit, par amour pour la patrie, oublier ses injures particulières.


Le consul Manlius dirigeait la guerre contre les Samnites, et fut blessé dans le combat qu’il leur livra. Son armée se trouvant, par cet accident, exposée à de grands dangers, le sénat jugea nécessaire d’y envoyer, comme dictateur, Papirius Cursor, afin de suppléer à l’absence forcée du consul. Comme il était indispensable que le dictateur fût nommé par Fabius, qui se trouvait en Toscane avec son armée, et que l’on connaissait son inimitié contre Papirius, les sénateurs, qui craignaient qu’il n’y voulût pas consentir, lui envoyèrent deux députés pour le supplier de déposer tout sentiment de haine particulière et de le nommer pour le salut de l’État. Fabius, touché de l’amour de la patrie, se rendit à cette prière, quoique son silence et plusieurs autres indices témoignassent assez combien cette nomination lui était pénible.

Voilà l’exemple sur lequel devraient se régler tous ceux qui ambitionnent la réputation de citoyen vertueux.