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Henri Cornélis Agrippa/Lettre XXXIII

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XXXIII
Un ami à Agrippa.

Bâle, 1524.

Vous avez, si vous tenez à moi, quelque chose à réclamer de notre commun ami Michel ; il ne vous a pas remis ma lettre, ou, si vous m’avez répondu, il ne m’a pas envoyé votre réponse. Et cependant l’aumônier de la Duchesse et plusieurs autres m’avaient promis de la façon la plus formelle de me faire passer une lettre à la prochaine foire de Bâle, foire maintenant terminée. Je ne puis assez m’étonner qu’il n’en ait rien été. Si vous parvenez à savoir quelle est la cause de ce manque de parole, faites-le-moi savoir et ayez soin d’adresser votre lettre à la demeure de Jean Spirers, citoyen de Baie. J’espérais aller vous voir mais, comme je n’ai rien reçu, je ne suis pas venu. Je vous envoie la lettre du curé de Sainte-Croix si vous ne pouvez la lire il faudra avoir recours à un nouvel Œdipe. Je vous en envoie une autre dont la suscription vous indiquera assez à qui vous devez la remettre. Faites pour le mieux ce qu’on vous demande, comme c’est votre habitude de le faire pour tout ce que vous demandent vos amis. Prenez cette affaire à cœur, vous dis-je, je vous en supplie encore une fois au nom de notre amitié. Du reste, celui qui vous a remis cette lettre est le Pylade du Seigneur Jean Froben[1], le roi sans contredit des graveurs sur l’airain. Ce dernier me demande de vous prier, et moi-même je vous en prie au nom de l’utilité publique, de laisser là toute autre occupation, pour fouiller avec soin toute la Bibliothèque du D. Saint-Jean de Lyon, ou une autre encore, s’il y en a de plus anciennes voyez si vous y trouverez quelques exemplaires de l’histoire de Pline, surtout pour les derniers livres. Tout ce que vous trouverez, vous pourrez le confier à ce messager. Si l’on réclame un garant, il le trouvera. Si j’étais là, je me porterais caution volontiers pour rendre service à Froben. Faites en sorte que je ne paraisse pas avoir tort de placer ma confiance dans votre amitié. Du reste, pour que vous n’aillez pas croire que vous avez tout à fait perdu votre temps, j’ai traité avec lui pour l’impression de votre ouvrage contre le Père Dominicain et même pour celle de tous vos ouvrages. Froben m’a répondu que, dès qu’il les aura entre les mains, il fera tout son possible pour qu’on ne puisse, à ce sujet, l’accuser ni de quelque négligence ni de quelque lenteur. Adieu. Mille choses de ma part à votre très illustre compagne.

Bâle, le lendemain de la Saint-Martin 1524.

  1. Célèbre imprimeur de Bâle, qui confia à Érasme la correction de ses belles éditions.