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Kiel et Tanger/Préface/05

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Nouvelle Librairie Nationale (p. lxvii-lxxx).

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le déclin de l’expérience poincaré


L’examen attentif des tendances politiques les plus récentes semble montrer que l’apogée de la nouvelle République nationale et conservatrice a été touché de janvier 1912 à janvier 1913, par le Cabinet Poincaré. Combien fut rapide la décroissance !

On pouvait le prévoir d’après les difficultés rencontrées fin 1911, d’après la forte résistance que devaient opposer à un effort très honorable tout d’abord sa matière même, — puis les partis, — ensuite les hommes, — et, plus que tout, la suggestion pervertissante et corruptrice du système républicain.

Un matériel agité par trente ans d’anarchie est un instrument peu maniable et un pauvre soutien. Dès septembre 1911, neuf jours après la revue navale de M. Delcassé, l’organe officieux du monde maritime anglais[1] nous dissuadait de concevoir trop d’illusions sur le nombre des unités mises en ligne ; on en avait compté plus de cent : avions-nous, en réalité, plus d’une douzaine de bateaux utiles ? Vingt et un jours plus tard, d’autres amis anglais purent s’écrier : Quelle malheureuse marine ! L’explosion de la Liberté aggravait le deuil national de vingt sortes de doutes sur la qualité de la force ainsi déployée. On mit en cause qui l’on put : les chefs, les équipages, la main de l’étranger insuffisamment surveillée ; on s’arrêta aux poudres. Cette discussion ne faisait que de commencer quand la flotte italienne, au 29 septembre, prit le large et gagna les bords de Tripoli, comme pour avertir des différences qu’il faut faire entre l’usage rationnel d’une flotte et ses vaines ostentations. L’enthousiasme militaire ne fut pas moins fécond en surprises désagréables : en particulier, l’aéronautique, si bien partie, servie par une corporation de héros, a déçu le peuple français, d’abord si confiant dans la nouvelle arme. Il en a gardé le cœur gros[2].

Son désenchantement n’a pas été moins vif, lorsque, sur un plan bien inférieur, il s’est aperçu que les retraites militaires se développaient dans Paris de manière à entrer en conflits réguliers et comme désirés avec la jeunesse ouvrière des Syndicats. Était-ce un coup de police ? Ou l’effet du gouvernement des partis dont la tradition naturelle, la pente nécessaire, étaient d’extraire du réveil national une recrudescence d’esprit diviseur ? Il faut bien que les partis s’accroissent en démocratie, et ils vivent de ce qu’ils trouvent. De toute façon, une intrigue invisible d’émissaires secrets travaillait à exciter les uns, à provoquer les autres, pour rendre aux Français la vie en commun insupportable, impossible l’activité en commun. L’opinion démocratique, même saine, est sommaire et brutale. D’elle-même, elle s’offre aux tentations de l’ennemi, faute d’y pouvoir prendre garde ou de vouloir y résister. Comment resterait-elle maîtresse de son mouvement ? Comment marcherait-elle sans être conduite et traînée ?

Pour conduire ou traîner, il eût fallu des hommes. Cette question du personnel, si elle n’est pas la plus haute de toutes, reste bien l’une des plus graves.

Suivant une habitude que l’on doit nous connaître et qui se vérifie dans ces pages mêmes, je n’incriminerai ni les intentions ni les volontés et, plutôt que de former des jugements d’ordre moral sur les décisions des personnes, j’aime mieux supposer des vues droites à tout acte normal, fût-il malheureux. Quant aux œuvres d’une utilité patriotique certaine, il déplairait beaucoup de les expliquer par des sentiments inférieurs : à tout homme de nationalité française, et de passé plus ou moins net, mais ayant montré quelque activité depuis Agadir, nous avons toujours accordé plus que l’estime et même plus que la gratitude. Pourtant, une question préalable se pose à propos des artisans de la réaction poincariste : à leur insu peut-être, est-ce qu’ils n’ont pas toujours un peu craint de trop réussir ? d’aller trop loin dans les directions purement patriotiques ? de trop céder à ce que le vocabulaire de leur jeunesse appelait réaction ? et, moyennant ces mots en l’air, ne leur inspirait-on pas avec trop de facilité la crainte de leur ombre ? les moyens utiles et nécessaires, les seuls, ne leur causaient-ils pas une aversion spontanée dont il faut tenir compte ? Ils devaient être aussi bien gênés par quelques-unes de leurs amitiés. Il n’est pas très facile de diriger le patriotisme français quand on est flanqué, à droite, de Reinach, à gauche, du traître Dreyfus.

Dès qu’un gouvernement ainsi formé règle plus ou moins honorablement quelque question nationale, il est placé dans l’alternative de deux malheurs : ou s’exposer, s’il persévère, à succomber à bref délai ; ou, pour ne pas périr, dépenser le crédit moral que lui vaut sa bonne attitude à commettre des infamies qui rassurent les pires éléments du « pays légal », du monde républicain orthodoxe. Il lui faut toujours rechercher la moyenne entre la trahison et le salut public : c’est là sa véritable Proportionnelle. Et cette proportion, cet équilibre aussi invraisemblable qu’introuvable qu’il lui faut concevoir entre la vie et la mort de la France, représente un état d’esprit plus dangereux que tous les maux qui en sont le signe ou l’effet. Cette maladie qui consiste à trouver sage de penser premièrement à nous arranger de toutes nos plaies ne cédera qu’à un remède radical. Les expédients héroïques, fussent-ils insensés, sauveraient tout d’abord du comble de l’insanité : de la fausse sagesse.

C’est ainsi que M. Poincaré, président du Conseil, se vit sollicité, attiré, entraîné au dîner Mascuraud et, peu de mois plus tard, dans l’exercice d’une fonction supérieure, à l’inauguration du buste de Ranc. Ranc signifie pourtant l’insurrection en 1871 et la destruction de l’armée en 1897-99. Le nom du sénateur Mascuraud est devenu synonyme du trafic électoral de la croix d’honneur. Ni l’armée ni la patrie ne gagnaient grand’chose à ces compromis du chef du gouvernement. Pourtant il ne faudrait pas croire que les sentiments ou les tendances intimes d’un républicain modéré fussent beaucoup contrariés par l’idée d’un hommage ainsi rendu à la corruption et à la destruction. Les deux hommes que nous pouvons traiter, pièces en mains, de corrupteurs ou de destructeurs de la France ont pris part à la fondation ou à la défense de la République, et, de ce chef, tout haut dignitaire républicain doit estimer que leur œuvre est, à quelque degré, positive, utile, bienfaisante, Mais la contradiction de l’idée républicaine et de l’idée française n’en apparaît que plus vivace, étant réalisée au fond du même esprit : elle est faite pour dérouter l’homme d’État qui la porte en lui, ébranler, inquiéter et dérouter sa marche, comme elle inquiète, ébranle et déroute aussi le public qui regarde et qui voudrait suivre…

Il est bien d’autres mauvais tours que l’esprit ou le fait des institutions jouèrent alors à leur personnel.

De par le texte des lois constitutionnelles, un moment critique approchait. Au fort de ces dures crises orientales, que l’Italie avait si savamment tirées de la Tripolitaine, on devait nous élire un nouveau président. Il aurait mieux valu l’élire à un autre moment. En monarchie, le mauvais hasard ou le crime peut seul créer des coïncidences de cette malignité. En République, la concordance pernicieuse naît de la loi écrite. La date, parfaitement connue à l’avance, de nos déménagements et transferts de pouvoir fournit une indication précieuse à l’Étranger, dont elle autorise, provoque et facilite les entreprises — comme il est déjà arrivé à la veille de l’élection Fallières, en 1905.

Quelque rôle qu’ait tenu l’Étranger dans les intrigues présidentielles de 1912-1913, la renaissance nationale républicaine y a souffert d’une vive déconsidération par la facilité avec laquelle ses plus grands chefs ont immolé tout au désir de leur promotion personnelle. On disait, par exemple, que M. Delcassé s’était indissolublement marié à notre Marine, et cette chaste épouse de sa pensée semblait devoir suffire à son bonheur en ce monde. Les esprits simples comme le mien s’en réjouissaient, parce que, malgré tout, ce ministre avait paru finir par réussir, en somme. Cependant, plusieurs occasions s’étant présentées à lui pour accéder, de la Marine, à la présidence de la Chambre des députés, réputée l’un des postes qui conduisent à l’Élysée, M. Delcassé avait répondu sans hésitation qu’il était prêt à tout quitter, bureaux, directions, commissions, arsenaux et escadres, pour se jucher un peu plus haut sur le degré de nos fonctions publiques.

Des remarques de même nature ont un peu dénimbé M. Poincaré quand il a délaissé, après une année d’exercice, dans une heure fort délicate, la direction personnelle des Affaires étrangères pour un poste de présidence où la décoration l’emporte sur l’action et sur les responsabilités. Déjà sa perspicacité avait été mise en doute quand il avait pris pour second aux Affaires étrangères un Paléologue, métèque étourneau, bavard et sans consistance. Un certain nombre d’autres illusions s’envolèrent en le voyant quitter la partie difficile, et qui se compliquait, pour une affaire d’avancement personnel. Tant de fierté française, tant de calme lorrain n’étaient-ils que littérature ? On le crut, on le dit. Voilà ce que notre cursus honorum fait penser. Voilà ce que la République fait de la réputation des républicains.

Dans le même remue-ménage, M. le ministre de la Guerre Millerand disparut, emporté, balayé sur la simple apparence du soupçon de ne pas pratiquer tous les rites de la religion dreyfusienne : un cas de conscience véritablement byzantin posé par le seul nom du lieutenant-colonel du Paty de Clam sut primer et couvrir tout souci d’intérêt public. Si d’autres raisons mystérieuses se sont jointes au prétexte invoqué, il restera que ce prétexte aura suffi à justifier la retraite, Or, le scandale est là surtout ! Une fois de plus, la poussée du parti domina sans difficulté, ni discussion, ni résistance, domina sans effort l’intérêt du pays.

La même préséance se fit remarquer peu de jours après dans le débat sur la réforme électorale qui suffit à déterminer la crise mimistérielle et rejeta du Cabinet les derniers chefs du « ministère national ». Après le départ de Millerand, l’élection de M. Poincaré à la Présidence avait fait nommer, le 21 janvier, un nouveau ministre des Affaires étrangères, M. Jonnart : M. Jonnart fut en fonction jusqu’au 18 mars, date du nouveau remaniement. Cinquante-six jours au quai d’Orsay ! Ce fut presque trop long. Un passage de vingt-quatre heures, comme celui de M. Lebrun à la Guerre, n’eût dérangé personne ni rien. M. Jonnart n’était pas au courant des Affaires, mais il allait sans doute y être mis quand il quitta la place à M. Stéphen Pichon, surtout connu pour ses anciennes concessions à la Triple Alliance. En même temps, M. Delcassé, malheureux au Palais-Bourbon, malheureux à l’Élysée, abandonnait sans qu’on sût pourquoi sa fidèle et chère Marine pour une ambassade à Saint-Pétersbourg.

Le cabinet suivant, présidé par M. Barthou, qui tutoie M. Poincaré, fournit, à son avènement, un signe manifeste de ses volontés patriotiques : le dépôt de la loi du service militaire de trois ans, demandée par le Conseil supérieur de la Guerre[3]. Le nouveau ministère donna un signe non moins clair de sa faiblesse constitutionnelle par son incapacité d’aboutir au vote rapide qu’imposaient alors les nécessités diplomatiques tout autant que l’intérêt militaire. Il eût fallu montrer à l’Europe belliqueuse la résolution et l’énergie du peuple français. L’opinion s’y prêtait de tout cœur. L’antimilitarisme se mourait, même dans le journal de M. Hervé ; le socialisme international n’osa point se montrer durant les premières semaines. Le champ était libre et ouvert, on pouvait marcher. Mais il eut fallu le vouloir ! Quelque tiraillement interministériel retarda cette volonté. Et, dès qu’on eût commis la faute de traîner et que la résistance eut été rendue possible, tout put résister à la fois : le formalisme parlementaire si lent, parce qu’il est timoré, inintelligent et paresseux ; puis les partis électoraux appuyant les partis révolutionnaires.

Au nom de la doctrine de la Démocratie, de son formulaire mystique, Jaurès et Sangnier[4] s’unirent sur le principe : pas d’action gouvernementale, sans discussion dans le pays. Jaurès et Sangnier avaient raison de penser qu’il n’y a pas de gouvernement démocratique sans un contrôle appesanti sur les compétences par les incompétences. Et puis, l’on est en République ou l’on n’y est pas ! À Berlin, le gouvernement de l’action agit et réalise parfois sans attendre les votes du parlement. À Paris, le régime du bavardage a tous les moyens d’entraver et d’annihiler l’activité. Le Cabinet dut se laisser gagner de vitesse. L’opposition antimilitaire se sentait aussi bien approvisionnée et armée que le Gouvernement était démuni par l’égoïsme et la fatuité des individus, l’intérêt des élus à réélire, la peur de compliquer, de défier, même de paraître pousser à la guerre…

Pendant ces curieuses semaines qui coururent de février à mai 1913, les partis dominants, les idées régnantes, une portion du haut personnel universitaire se sont appliqués à décomposer point par point la bonne volonté d’un pouvoir éphémère et les élans de l’enthousiasme public. Les forces exhalées du fond de la Nature et de l’Histoire de la France se heurtaient à ce qu’il y a de plus stable ou de mieux lié dans le régime et, là contre, s’exténuait l’effort isolé de la fraction ministérielle mise pour une heure au service de notre intérêt national.

Un parlementaire radical, ancien ministre, le comte de Lanessan, a résumé la situation assez spirituellement[5] en disant que ceux qui avaient tenté de rapprocher tous les Français, « d’unir tous les républicains dans le Parlement », et de « rallier autour d’un même drapeau les citoyens », devaient reconnaître qu’ils s’étaient trompés, n’ayant « fait que créer des éléments nouveaux de divisions et des luttes » : « le seul rapprochement qu’ils aient opéré est celui des radicaux socialistes et des socialistes unifiés ». L’Essai loyal aboutissait à un nouvel effort vers le Bloc radical et réveillait tous les démons d’anarchie enfermés dans la démocratie. Comme Kiel et Tanger le fait entrevoir, « la défense nationale » en République, fournit « un nouveau sujet de guerre civile[6] ».

Dès avril, les délibérations des Conseils généraux ont mis au jour l’influence croissante de la volonté révolutionnaire, la faiblesse croissante des réactions patriotiques. L’incertitude politique commença et passa bientôt du gouvernement dans le pays même. Un incident de Nancy, soulevé entre quelques noctambules français et des voyageurs allemands, surexcita les pangermanistes, mais ne stimula point le patriotisme français autant qu’on l’aurait pu prévoir et désirer. Le Cabinet lui-même dut se laisser gagner par le fléchissement général : il eût pu se plaindre à Berlin des outrages gratuits de la presse allemande, il a préféré fournir une réparation aussi exagérée que hâtive d’offenses dont il était parfaitement innocent. Cependant les injures pangermanistes n’étaient pas négligeables et pouvaient être relevées. « Dira-t-on », objectait un écrivain républicain, M. Jean Herbette, « que, si la France avait interprété ainsi la situation, des difficultés se seraient produites ? La réponse serait facile : Je sais bien, disait l’honorable M. Pichon, à la tribune du Sénat le 8 février 1912, en refusant de signer le traité franco-allemand, je sais bien que certaines difficultés sont venues du fait que l’Allemagne a eu une autre interprétation que celle-là : mais alors, il fallait lui résister. »[7]

Reste à savoir si M. Jean Herbette, aussitôt qu’il aura remplacé M. Stephen Pichon aux Affaires étrangères de la République, ne sera pas contraint de l’imiter au gouvernement dans cette docile faiblesse, après avoir suivi ses fiers exemples de fermeté dans l’opposition. Quel changement de personnel changerait rien à la débilité du centre de tout le système ?


  1. Naval and Military Record du 13 septembre 1911.
  2. On peut voir ce que nous en disions, il y a trois ans, page 298 de ce livre.
  3. Le Conseil supérieur de la Guerre n’avait pas été consulté pour la réduction du service à deux ans en 1905.
  4. Il importe de rappeler ici l’enquête scandaleuse menée sur l’opinion des simples soldats par La Démocratie de Marc Sangnier. La Critique du libéralisme écrivait le 1er mai :

    « Déjà les bons esprits déploraient que l’adoption d’une mesure de salut national, définie comme telle par les autorités compétentes, réclamée comme telle par les hommes qui ont la responsabilité du gouvernement, dépendit des mille influences qui dominent la volonté des parlementaires : Marc Sangnier a trouvé le moyen d’étendre encore ce péril en conviant les officiers et les soldats en activité de service à joindre leurs voix à la cacophonie générale. Il ne nous manquait plus que cela, en vérité ! Et l’on se demande où s’arrêtera la contagion du morbus comitialis, maintenant que le sillonisme a pu ainsi pénétrer impunément dans l’armée. Et il faut voir comme lui-même triomphe de l’« originalité » de son entreprise :

    « Originale, écrit M. Georges Hoog, qui le contesterait ? Aucun journal, aucune revue n’a jusqu’ici, en effet, songé à demander à tous les militaires, officiers aussi bien que soldats, — les plus directement, les plus immédiatement intéressés dans la question, en définitive — leur opinion sur la réforme proposée par le gouvernement. »

    « Eh ! non, certes, « aucun journal, aucune revue » n’y aurait songé, et il fallait la perversion intellectuelle de Marc Sangnier et de sa cohorte pour concevoir une idée aussi saugrenue, aussi diamétralement opposée à toutes les données de la logique et du bon sens. Les adversaires du parlementarisme, tel qu’il fonctionne sur la base du suffrage universel purement numérique, lui reprochent communément de n’assurer aucune représentation compétente et efficace aux intérêts légitimes ; mais encore, quand ils réclament cette représentation des intérêts, jamais il ne leur viendrait à l’esprit de comprendre, dans la nomenclature des intérêts à faire représenter, les intérêts militaires, dont le sort, par définition, se doit régler d’office par la volonté supérieure de l’autorité publique, sans adjonction d’un appoint représentatif quelconque. Marc Sangnier, lui, pour une fois qu’il donne à une consultation une base objective et réelle, portant sur un « intérêt » défini, va précisément choisir l’intérêt militaire : ainsi éclate l’aberration flagrante de son incurable démocratisme

    « … Mais, nous y songeons, le sophisme dont nous plaisantons de la sorte, et dont nous ne savons s’il ne mérite pas plutôt la pitié ou l’indignation, a été réfuté avec une autorité souveraine par Pie X lui-même, précisément dans sa magnifique et toujours triomphante Encyclique du 25 août 1910 sur le Sillon. De quoi s’agit-il, en effet, dans l’enquête dont nous dénonçons le contresens foncier, sinon d’une application nouvelle, et particulièrement funeste, du système, cher à Marc Sangnier, de l’« autorité consentie » ? Le service de trois ans, nous dit-on, ne vaudra que si les soldats l’acceptent de bon gré : c’est bien là, n’est-il pas vrai ? la subordination de la loi, c’est-à-dire de ce que saint Thomas nomme ordinatio rationis, non pas à l’autorité de celui qui curam communitatis habet, et qui se détermine en vue du bonum commune, mais bien au consentement de ceux à qui elle doit s’appliquer, et c’est là que M. Georges Hoog voit « la force et la beauté du régime démocratique », tout en concédant qu’il y voit aussi « la délicatesse » de ce régime. »

    Et la Critique du Libéralisme cite le passage de l’Encyclique où sont analysées les « notions erronées et funestes » qui continuent de fournir un principe aux agitations de Marc Sangnier. On a pu voir l’effet pratique de ces agitations dans nos casernes.

  5. Siècle du 21 mai 1913.
  6. Voir page 192.
  7. Écho de Paris, 19 avril 1913.