L’Encyclopédie/1re édition/ALLIANCE

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 1p. 284-285).
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ALLIANCE, dans les Saintes Ecritures ; on employe souvent le nom de testamentum, & en Grec diathiké, pour exprimer la valeur du mot Hébreu berith, qui signifie alliance ; d’où viennent les noms d’ancien & de nouveau testament, pour marquer l’ancienne & la nouvelle alliance. La premiere alliance de Dieu avec les hommes, est celle qu’il fit avec Adam au moment de sa création, & lorsqu’il lui défendit l’usage du fruit défendu. Le Seigneur mit l’homme dans le Paradis terrestre, & lui fit ce commandement : Vous mangerez de tous les fruits du Paradis ou du jardin : mais ne mangez point du fruit de l’arbre de la science du bien & du mal ; car aussi-tôt que vous en aurez mangé, vous mourrez, ou vous deviendrez mortels. C’est-là, dit saint Augustin, la premiere alliance de Dieu avec l’homme : testamentum autem primum quod factum est ad hominem primum, profecto illud est : quâ die ederitis, morte moriemini ; d’où vient qu’il est écrit : testamentum à soeculo : morte morieris. Genes. II. xvj. Aug. de civit. Dei, lib. XVI. cap. xxvij. Eccli. XIV. xviij.

La seconde alliance est celle que Dieu fit avec l’homme après son péché, en lui promettant, non-seulement le pardon, pourvû qu’il fît penitence, mais aussi la venue du Messie, qui le racheteroit & toute sa race, de la mort du péché, & de la seconde mort, qui est celle de l’éternité. Saint Paul, en plusieurs endroits, nous parle de ce pacte, par lequel le second Adam a racheté & délivré de la mort ceux que le premier Adam avoit fait condamner à mourir. Sicut in Adam omnes moriuntur, ita in Christo omnes vivisicabuntur : & ailleurs : Sicut per hominem peccatum in hunc mundum introivit, & per peccatum mors...... Sicut per inobedientiam unius hominis peccatores constituti sunt multi, ita & per unius obeditionem justi constituentur multi. Et le Seigneur parlant au serpent, dit : Je mettrai une inimitié entre toi & la femme, entre ta race & la sienne ; elle te brisera la tête, & tu l’attaqueras en secret par le talon. La postérité de la femme qui doit briser la tête du serpent est le Messie ; par sa mort il a fait périr le diable, qui avoit l’empire de la mort : Ut per mortem destrueret eum qui habebat mortis imperium, id est diabolum. 1. Cor. xv. 22. Rom. v. 12. 19. Genes. iij. 15. Hebr. ij. 14.

Une troisieme alliance est celle que le Seigneur fit avec Noé, lorsqu’il lui dit de bâtir une arche ou un grand vaisseau pour y sauver les animaux de la terre, & pour y retirer avec lui un certain nombre d’hommes, afin que par leur moyen il pût repeupler la terre après le déluge. Genes. vj. 18.

Cette alliance fut renouvellée cent vingt-un ans après ; lorsque les eaux du Déluge s’étant retirées, & Noé étant sorti de l’arche avec sa femme & ses enfans, Dieu lui dit : Je vais faire alliance avec vous & avec vos enfans après vous, & avec tous les animaux qui sont sortis de l’arche, ensorte que je ne ferai plus périr toute chair par les eaux du Déluge ; & l’arc-en-ciel que je mettrai dans les nues sera le gage de l’alliance que je ferai aujourd’hui avec vous. Genes. IX. viij. jx. x. xj.

Toutes ces alliances ont été générales entre Adam & Noé, & toute leur postérité : mais celle que Dieu fit dans la suite avec Abraham, fut plus limitée ; elle ne regardoit que ce Patriarche & sa race, qui devoit naître de lui par Isaac. Les autres descendans d’Abraham par Ismael & par les enfans de Cethura, n’y devoient point avoir de part. La ma que ou le sceau de cette alliance fut la circoncision ; que tous les mâles de la famille d’Abraham devoient recevoir le huitieme jour après leur naissance ; les effets & les suites de ce pacte sont sensibles dans toute l’histoire de l’ancien Testament : la venue du Messie en est la consommation & la fin. L’alliance de Dieu avec Adam forme ce que nous appellons l’état de nature ; l’alliance avec Abraham expliquée dans la loi de Moyse, forme la loi de rigueur ; l’alliance de Dieu avec tous les hommes par la médiation de Jesus-Christ, fait la loi de grace. Genes. xij. 1. 2. xvij. 10. 11. 12.

Dans le discours ordinaire nous ne parlons guere que de l’ancien & du nouveau Testament ; de l’alliance du Seigneur avec la race d’Abraham, & de celle qu’il a faite avec tous les hommes par Jesus-Christ, parce que ces deux alliances contiennent éminemment toutes les autres qui en sont des suites, des émanations & des explications : par exemple, lorsque Dieu renouvelle ses promesses à Isaac & à Jacob, & qu’il fait alliance à Sinaï avec les Israëlites, & leur donne sa loi : lorsque Moyse peu de tems avant sa mort, renouvelle l’alliance que le Seigneur a faite avec son peuple, & qu’il rappelle devant leurs yeux tous les prodiges qu’il a faits en leur faveur : lorsque Josué se sentant prêt de sa fin, jure avec les anciens du peuple une fidélité inviolable au Dieu de leurs peres, tout cela n’est qu’une suite de la premiere alliance faite avec Abraham. Josias, Esdras, Néhemie, renouvellerent de même en différens tems leurs engagemens & leur alliance avec le Seigneur ; mais ce n’est qu’un renouvellement de ferveur, & une promesse d’une fidélité nouvelle à observer les lois données à leurs peres. Exod. xj. 24. vj. 47. xix. 5. Deuter. xxix. Jos. xxiij & xxiv. Reg. xviij. Paral. II. xxij.

La plus grande, la plus solennelle, la plus excellente, & la plus parfaite de toutes les alliances de Dieu avec les hommes, est celle qu’il fait avec nous par la médiation de Jesus-Christ : alliance éternelle qui doit subsister jusqu’à la fin des siecles, dont le fils de Dieu est le garant, qui est cimentée & affermie par son sang, qui a pour fin & pour objet la vie éternelle, dont le sacerdoce, le sacrifice, & les lois sont infiniment plus relevées que celles de l’ancien Testament. Voyez Saint Paul, dans les épitres aux Galates & aux Hébreux. (G)

Alliance, s. f. (Jurisprud. & Hist. anc.) union ou liaison de deux personnes ou de deux familles par le mariage ; qu’on appelle autrement affinité. Voyez Affinité. Ce mot vient de la préposition latine ad, & de ligare, lier.

La loi des douze tables défendoit les alliances entre les personnes d’un rang & d’une condition inégale ; & l’on dit qu’en Portugal les filles de qualité ne sauroient s’allier à des gens qui n’aient jamais été à la guerre.

Alliance se dit aussi des ligues & des traités qui se font entre des Souverains, & des Etats, pour leur sûreté & leur défense commune. V. Traité, Ligue. &c.

La triple alliance entre l’Angleterre, la Hollande & la Suede, est très-fameuse. La quadruple alliance entre la France, l’Empire, l’Angleterre & la Hollande, ne l’est pas moins.

Alliés dans ce même sens est synonyme à confédérés : ainsi l’on dit le Roi & ses alliés. Voyez Confédération.

Quoique le titre d’allié des Romains fût une espece de servitude, il étoit pourtant fort recherché. Polybe raconte qu’Ariarathes offrit un sacrifice d’action de graces aux Dieux pour l’avoir obtenu. La raison en étoit, que dès-lors ces alliés n’avoient plus rien à craindre d’aucun autre peuple.

Les Romains avoient différentes sortes d’alliés : quelques-uns participoient avec eux aux priviléges des citoyens, comme les Latins & les Herniques ; d’autres leur étoient unis en conséquence de leur fondation, comme les colonies sorties de Rome ; d’autres y tenoient par les bienfaits qu’ils en avoient reçûs, comme Massinissa, Eumenes & Attale, qui leur étoient redevables de leurs Etats ; d’autres l’étoient en conséquence de traités libres, mais qui aboutissoient toûjours à la fin à les rendre sujets de Rome, comme les Rois de Bithynie, de Cappadoce, d’Egypte, & la plûpart des villes de Grece ; d’autres enfin l’étoient par des traités forcés & en qualité de vaincus : car les Romains n’accordoient jamais la paix à un ennemi qu’ils ne fissent une alliance avec lui, c’est-à-dire, qu’ils ne subjuguoient jamais aucun peuple qui ne lui servît à en subjuguer d’autres. Voyez Consid. sur les caus. de la grand. des Rom. c. vj. p. 62. & seq. (H).

Alliance, marchandise d’Orfévre, bague ou jonc que l’accordé donne à son accordée ; elle est faite d’un fil d’or & d’un fil d’argent en lacs.