L’Encyclopédie/1re édition/APSIDE

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 1p. 561-562).
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APSIDE, s. f. se dit en Astronomie de deux points de l’orbite des planetes, où ces corps se trouvent soit à la plus grande, soit à la plus petite distance possible ou de la terre ou du soleil. Voyez Orbite, Planete, Distance & Ligne.

A la plus grande distance, l’apside s’appelle la grande apside, summa apsis ; à la plus petite distance, l’apside s’appelle la petite apside, infima ou ima apsis.

Les deux apsides ensemble s’appellent auges. Voyez Auges.

La grande apside se nomme plus communément l’aphélie ou l’apogée ; & la petite apside, le perihélie, ou le perigée. Voyez Apogée & Périgée.

La droite qui passe par le centre de l’orbite de la planete, & qui joint ces deux points, s’appelle la ligne des apsides de la planete. Dans l’Astronomie nouvelle, la ligne des apsides est le grand axe d’un orbite elliptique ; telle est la ligne A P, Planche d’Astronomie, fig. 1. tirée de l’aphélie A, au périhélie P. Voyez Orbite & Planete.

On estime l’excentricité sur la ligne des apsides ; car c’est la distance du centre C de l’orbite de la planete, au foyer S de l’orbite. Voyez Foyer & Ellipse. Cette excentricité est différente dans chacune des orbites des planetes. Voyez Excentricité.

Quelques Philosophes méchaniciens considerent le mouvement d’une planete, d’une apside à l’autre, par exemple, le mouvement de la Lune, du perigée à l’apogée, & de l’apogée au périgée, comme des oscillations d’un pendule ; & ils appliquent à ce mouvement les lois de l’oscillation d’un pendule ; d’où ils inferent que l’équilibre venant un jour à se rétablir, ces oscillations des corps célestes cesseront. Voyez Horreb. Clar. Astron. c. xx. Voyez Oscillation & Pendule.

D’autres crovent appercevoir dans ce mouvement, quelque chose qui n’est point méchanique ; & ils demandent : pourquoi l’équilibre s’est-il rompu & les oscillations de ces corps ont-elles commencé ? pourquoi l’équilibre ne renaît-il pas ? quelle est la cause qui continue de le rompre ? Voyez Mém. de Trév. Avril 1730. p. 709. & suivantes. Ils regardent toutes ces questions comme insolubles ; ce qui prouve que la Philosophie Neutonienne leur est inconnue. Voyez Newt. princip. Math. Lib. I. sect. 9. Herman. Phoron. Lib. I. c. iv. Voyez encore Gravitation, Planete, Orbite, Distance, Période, Lune, &c.

Parmi les Auteurs qui ont comparé ces oscillations à celle d’un pendule, un des plus célebres est M. Jean Bernoulli, Professeur de Mathématique à Bâle, dans une piece intitulée, Nouvelles pensées sur le système de Descartes, avec la maniere d’en déduire les orbites & les aphélies des planetes ; piece qui remporta en 1730 le prix proposé par l’Académie royale des Sciences de Paris. Il tâche d’y expliquer comment il peut arriver que dans le système des tourbillons une planete ne soit pas toûjours à la même distance du soleil, mais qu’elle s’en approche & s’en éloigne alternativement. Mais en Physique il ne suffit pas de donner une explication plausible d’un phénomene particulier, il faut encore que l’hypothèse d’où l’on part pour expliquer ce phénomene, puisse s’accorder avec tous les autres qui l’accompagnent, ou qui en dépendent. Or si on examine l’explication donnée par M. Bernoulli, nous croyons qu’il seroit difficile de faire voir comment dans cette explication la planete pourroit décrire une ellipse autour du soleil, de maniere que cet astre en occupât le foyer, & que les aires décrites autour de cet astre fussent proportionnelles aux tems, ainsi que les observations l’apprennent. Voyez sur ce sujet un Mém. de M. Bouguer, Mém. Acad. 1731. sur le mouvement curviligne des corps dans des milieux qui se meuvent.

Si la ligne de la plus grande distance d’une planete, & celle de la plus petite distance, ne sont pas situées précisément en ligne droite, mais qu’elles fassent un angle plus grand ou plus petit que 180 degrés, la différence de cet angle à 180 degrés est appellée le mouvement de la ligne des apsides, ou le mouvement des apsides ; & si l’angle est plus petit que 180 degrés, on dit que le mouvement des apsides est contre l’ordre des signes : au contraire, si l’angle est plus grand, on dit que le mouvement des apsides est suivant l’ordre des signes.

A l’égard de la méthode pour déterminer la position des apsides mêmes, on s’est servi pour y parvenir de différens moyens. Les Anciens qui croyoient que les planetes décrivoient des cercles parfaits dont le soleil n’occupoit pas le centre, ont employé pour déterminer les apsides, une méthode expliquée par Keill dans ses Institutions astronomiques. Depuis, comme on s’est apperçû que les planetes décrivoient des ellipses dont le soleil occupoit le foyer, on a été obligé de chercher d’autres moyens pour déterminer le lieu des apsides dans les orbites. M. Halley a donné pour cela une méthode qui ne suppose de connu que le tems de la révolution de la planete : Sethus Wardus en a aussi donné une, qui suppose qu’on ait trois observations différentes d’une planete, en trois endroits quelconques de son orbite : mais la méthode qu’il donne pour cela, est fondée sur une hypothese qui n’est pas exactement vraie ; & le célebre M. Euler en a donné une beaucoup plus exacte dans le Tome VII. des Mémoires de l’Académie de Petersbourg. On peut voir ces différentes méthodes, excepté la derniere, dans l’Astronomie de Keill ; ou plûtôt dans les Institutions astronomiques de M. le Monnier.

M. Newton a donné dans son livre des Principes une très-belle méthode pour déterminer le mouvement des apsides, en supposant que l’orbite décrite par la planete soit peu différente d’un cercle, comme le sont presque toutes les orbites planétaires. Ce grand Philosophe a fait voir que si le soleil étoit immobile, & que toutes les planetes pesassent vers lui en raison inverse du quarré de leurs distances, le mouvement des apsides seroit nul, c’est-à-dire, que la ligne de la plus grande distance & la ligne de la plus petite distance seroient éloignées de 180 degrés l’une de l’autre, & ne formeroient qu’une seule ligne droite. Ce qui fait donc que les deux points des apsides ne sont pas toûjours exactement en ligne droite avec le soleil, c’est que par la tendance mutuelle des planetes les unes vers les autres, leur gravitation vers le Soleil n’est pas précisément en raison inverse du quarré de la distance. M. Newton donne une méthode très-élégante, pour déterminer le mouvement des apsides, en supposant qu’on connoisse la force qui est ajoûtée à la gravitation de la planete vers le soleil, & que cette force ajoûtée ait toûjours sa direction vers le soleil.

Cependant quelque belle que soit cette méthode, il faut avoüer qu’elle a besoin d’être perfectionnée ; parce que dans toutes les planetes tant premieres que secondaires, la force ajoûtée à la gravitation vers le foyer de l’orbite, n’a presque jamais sa direction vers ce foyer. Aussi M. Newton ne s’en est-il point servi, du moins d’une maniere bien nette, pour déterminer le mouvement des apsides de l’orbite lunaire ; la théorie exacte de ce mouvement est très-difficile. Voyez Apogée & Lune. (O)