L’Encyclopédie/1re édition/DEMOISELLE
Demoiselle, julis Rond. Italis donzellina & zigurella, (Hist. nat. Ichthyol.) petit poisson de mer. Toute la face supérieure du corps est poire depuis le bec jusqu’à la queue ; une bande bleue s’étend sur le milieu des côtes du corps, depuis la tête jusqu’à la queue, & il y a au-dessous de cette bande une ligne parallele de couleur jaune ; le bas-ventre est d’un blanc sale ou bleuâtre ; les yeux sont petits ; l’iris est d’un roux ardent, ou de couleur de feu. La bouche est petite & pointue à l’extrémité : chaque mâchoire a un rang de dents, dont les premieres sont les plus grosses & les plus longues, sur-tout dans la mâchoire inférieure. Il n’y a qu’une nageoire sur le dos, qui commence près de la tête, & qui se prolonge presque jusqu’à la queue : cette nageoire a vingt-un piquans ; elle est jaune à sa racine, bleue à l’extrémité, & rouge dans le milieu. La queue n’est pas fourchue ; elle a une couleur jaune, mêlée d’une teinte de rouge. La nageoire de l’anus est composée de quatorze piquans, & a la même couleur que la nageoire du dos. Celles des oüies sont molles & composées de quatorze piquans ; les nageoires du ventre sont petites, & n’ont que six piquans.
Les poissons mâles de cette espece ont de plus belles couleurs que les femelles ; le dos est d’un verd foncé : il y a une bande qui s’étend depuis le bec jusque sur les côtés, en passant sur les yeux ; elle est jaune jusqu’à l’angle que forment les oüies, & noire dans le reste de sa longueur : cette couleur noire est terminée de chaque côté par une ligne bleue ; ensuite il y a un trait qui se prolonge jusqu’à la queue, & qui est dentelé des deux côtés, & de couleur jaune. Il se trouve vers l’extrémité des trois premiers piquans de la nageoire du dos, une tache d’une belle couleur rouge, & une autre tache noire entre le second & le troisieme piquant.
Ce poisson est fort commun sur la côte d’Antibes & sur celle de Genes ; il n’est guere plus grand que le doigt, au rapport de Rondelet qui lui donne le nom de girella. La chair en est tendre & cassante. Les poissons de cette espece que l’on pêche en plaine mer, sont meilleurs que ceux qui se trouvent sur les côtes. Willug. de pisc. Rondelet, hist. pisc. Voyez Poisson (I)
Demoiselle, libella, perla, mordella ; (Hist. nat. Insectologie.) insecte du genre des mouches à quatre ailes ; son corps est très-long & très-délié : on y compte aisément onze anneaux. Les ailes sont transparentes & brillantes comme du talc ; lorsqu’on les regarde à certains aspects, elles paroissent dorées ou argentées ; elles ont aussi dans quelques especes des taches colorées, mais les plus belles couleurs sont sur la tête, le corcelet, & le corps : on y voit différentes teintes de bleu, du verd, du jaune, du rouge ; quelquefois ces couleurs sont disposées par raies & par taches sur des fonds bruns ou noirs : il y a aussi des endroits qui paroissent dorés ; mais on rencontre de ces insectes, dont les couleurs brunes ou grises sont moins apparentes. Ces mouches se trouvent dans les jardins, dans les campagnes, le long des haies, & sur-tout dans les prairies près des ruisseaux, des petites rivieres, des étangs, & des grandes mares. Elles vivent d’autres especes de mouches, de moucherons, de papillons, & c.
On distingue plusieurs especes de ces insectes, & en général on peut les diviser en terrestres & en aquatiques. Les premiers ne sont connus que des naturalistes ; ils viennent de la transformation des vers, que l’on appelle petits lions ou lions des pucerons parce qu’ils s’en nourrissent, & de la transformation des fourmis-lions. Quoique les demoiselles aquatiques ayent les ailes moins grandes que les autres, cependant elles volent avec plus de facilité. Il y en a de trois genres différens : celles du premier ont le corps court & applati en comparaison des autres : celles du second genre ont la tête grosse & arrondie ; enfin celles du troisieme ont la tête plus menue, mais courte & large. Les demoiselles du premier & du second genre portent leurs ailes dans une direction perpendiculaire au corps ; elles sont toutes situées à la même hauteur, deux en-avant & deux en-arriere ; au contraire les ailes des demoiselles du troisieme sont les unes au-dessus des autres, deux en-haut & deux en-bas, & leur direction varie dans les différentes especes de ce genre.
Tous ces insectes naissent dans l’eau, & y prennent leur accroissement. Ils paroissent d’abord sous la forme de vers qui ont six jambes, & qui deviennent bien-tôt des nymphes, quoique très-petits ; ce changement n’est marqué que par quatre petits corps plats & oblongs qui sont sur le dos, & qui renferment des ailes. La plûpart de ces nymphes sont d’un verd-brun, & quelques-unes ont des taches blanchâtres ou verdâtres. Elles ont toutes une tête, un cou, un corselet, un corps composé de dix anneaux, & six jambes attachées au corselet. Elles vivent dans l’eau, y nagent, & la respirent à-travers une ouverture qui est au bout du corps, & qui a au moins une demi-ligne de diametre dans des nymphes de médiocre grandeur ; il en sort deux jets d’eau qui la remplissent quelquefois entierement, & qui sont poussés à deux ou trois pouces de distance. Ces insectes ont aussi des stigmates pour respirer l’air ; il y en a quatre sur le corselet, & d’autres sur les anneaux du corps ; mais les plus apparens sont placés sur la face supérieure du corselet près du corps : l’insecte ne meurt pas lorsqu’on huile ces stigmates. Les nymphes ont quatre dents solides, larges, & longues, qui se rencontrent deux à deux sur le devant d’une grande bouche : mais la bouche & les dents sont recouvertes par des pieces cartilagineuses, & même écailleuses, qui sont mobiles en différens sens, & qui par leur réunion forment dans les différentes especes différentes figures auxquelles on a donné le nom de masques, pour quelques rapports de conformation ou de position ; mais ces pieces servent comme de serres pour saisir & pour arrêter les insectes dont les nymphes se nourrissent ; aussi en voit-on qui mangent des testards assez gros, dont une partie du corps est engagée entre les serres.
La plûpart de ces nymphes, & peut-être toutes, vivent dix à onze mois sous l’eau avant de se transformer ; & tous les jours depuis le mois d’Avril jusqu’à la fin de Septembre, il y a de ces insectes qui se métamorphosent. Ce changement est annoncé non seulement par l’accroissement de la nymphe, mais encore par la position des fourreaux des ailes, qui se détachent les uns des autres & se redressent sur le corps. Dès qu’une de ces nymphes s’éloigne de l’eau à la distance de quelques piés, ou se crampone sur une plante la tête en-haut, le tems de sa transformation approche ; il arrive quelquefois une heure ou deux après que la nymphe est sortie de l’eau, d’autres fois ce n’est qu’après un jour entier. Un quart-d’heure ou une demi-heure avant que la demoiselle ne paroisse, les yeux de la nymphe cessent d’être ternes & opaques, & deviennent brillans & transparens ; ensuite le fourreau se fend sur la partie supérieure du corselet ; cette fente s’étend jusques sur la tête, & bien-tôt le corselet & la tête de la demoiselle sortent de la dépouille, & se renversent en-arriere pour tirer les jambes de leurs étuis. Dès qu’elles sont dégagées, l’insecte les agite pendant deux ou trois minutes, après lesquelles il tombe dans une inaction totale qui dure un quart-d’heure ou une demi-heure. Pendant ce tems les parties nouvellement découvertes prennent assez de solidité pour que l’insecte puisse porter en-avant les parties de son corps qui étoient renversées en-arriere, appuyer les jambes sur sa dépouille, & faire un effort pour en tirer toute la partie postérieure du corps qui y étoit encore engagée. Alors quoique la demoiselle paroisse en entier, & que son corps soit déjà plus long que la dépouille & la tête plus grosse, il s’en faut bien que les ailes ni le corps ayent toute l’étendue qu’ils doivent avoir, surtout les ailes, qui ne paroissent que comme des plaques courtes, épaisses, étroites, & plissées en long & en travers ; mais en moins d’un quart-d’heure tous les plis s’affaissent, & elles s’amincissent en s’étendant tant en longueur qu’en largeur. En se développant ainsi elles sont plus fléxibles & plus molles qu’un papier mouillé, le moindre obstacle qui se rencontreroit les rendroit difformes ; aussi l’insecte les tient éloignées les unes des autres, & quelquefois ne les meut pour les ranger que deux heures après qu’elles ont été développées, & les laisse encore s’affermir pendant deux ou trois heures de plus avant que de prendre son vol. Le corps ne s’allonge qu’après les ailes, les anneaux s’étendent, se déboitent en entier ; & pendant que le corps prend du volume, les couleurs qui sont d’abord très-foibles, deviennent plus foncées & plus belles. C’est ainsi que se transforment les nymphes du premier & du second genre : la métamorphose de celles du troisieme genre n’a rien de remarquable, si ce n’est qu’elle se fait plus promptement.
Ces insectes s’accouplent depuis le printems jusques vers le milieu de l’automne. On les voit voler par paires dans les prairies, & se poser sur des plantes au bord des ruisseaux & des rivieres. Leur accouplement se fait d’une maniere fort singuliere : le mâle poursuit la femelle en l’air dès que la chaleur du jour commence à se faire sentir ; il la saisit par le cou au moyen de deux crochets, qui sortent du dernier anneau de son corps : étant ainsi accrochés l’un à l’autre, ils volent de compagnie ; le mâle est en-avant ayant le corps étendu en ligne droite ; il entraîne la femelle, dont la tête & le cou sont sous la partie postérieure du corps du mâle, le reste de celui de la femelle suit dans la même direction ; tous les deux s’aident de leurs ailes & volent de concert : quelquefois aussi le mâle trouve la femelle posée sur des plantes, & l’accroche dans cette situation. Ceci n’est qu’un prélude de l’accouplement ; car dans cette position les parties de la génération de chaque sexe sont bien éloignées, celles du mâle étant sous son corps près du corcelet, & celles de la femelle au dessous de l’anus. Si le mâle ayant accroché la femelle en l’air ils cessent bien-tôt de voler & se posent sur des plantes, ils ne restent que deux ou trois minutes sur chacune, & changent trois ou quatre fois de place sans s’éloigner beaucoup, ensuite le mâle se courbe en arc, fait un effort pour attirer la femelle sous son corps ; mais ce n’est qu’après plusieurs mouvemens réitérés de la part du mâle, qu’elle en fait elle-même à différentes fois pour s’approcher ; enfin, au bout d’une heure ou d’une heure & demie elle se replie en-dessous, & au point que l’extrémité de son corps touche à la partie inférieure des premiers anneaux du corps du mâle. Alors ils forment l’un avec l’autre une sorte de boucle ; car la partie postérieure du mâle tient au cou de la femelle, & la partie postérieure de la femelle est unie à l’extrémité antérieure du corps du mâle ; c’est dans cette attitude singuliere que se fait l’accouplement : il dure plus ou moins de tems, de même que le prélude, à proportion de la chaleur qu’il fait. On a vû de ces insectes rester accouplés pendant plus d’une demi-heure, & ne se séparer que par accident. Il arrive souvent que durant l’accouplement ils sont forcés à changer de place, dans ce cas le mâle emporte la femelle ; car elle est dans une situation si gênée, qu’elle ne peut pas se servir de ses ailes ; mais le mâle est assez fort pour la soûtenir en l’air, & il est le plus gros dans plusieurs especes de ces insectes. On a fait les observations précédentes sur deux especes, dans l’une desquelles les mâles étoient au moins aussi grands que les femelles. Dans la plûpart des especes, les femelles ont des couleurs différentes de celles des mâles. La ponte suit de près l’accouplement ; on croit qu’elle se fait le même jour, & que les œufs sortent tous à la fois rassemblés en grappe : ils sont blancs, leur figure varie dans différentes especes ; on soupçonne aussi que dans quelques-unes ils ne sortent qu’un à un, &c. Mém. pour servir à l’hist. des Insect. tom. VI. Voyez Insecte, (I)
Demoiselles. (Marine.) Voyez Lisses de porte-haubans. (Z)
Demoiselle, en terme d’Epinglier, est une brosse avec laquelle on étend le vermillon sur les marques pour imprimer le nom & le sceau, qu’on me permette le terme, de l’ouvrier. Voyez la fig. 18. Pl. I. de l’Epinglier. V, est la demoiselle, composée de même que les balles des Imprimeurs ; S, le billot sur lequel on marque les paquets d’épingles ; I, les planches gravées qui font les empreintes. Voyez Planc. en bois.
Demoiselles, (Lutherie.) dans l’orgue, sont de petits morceaux de fil de fer d’environ trois pouces de long, qui ont un anneau à chacune de leurs extrémités. L’anneau inférieur est passé dans l’anneau de la touche du clavier inférieur ; le corps de la demoiselle passe dans la mortoise de la touche du clavier supérieur, & l’anneau supérieur de la demoiselle reçoit le fil de fer de la targette, qui va du clavier à l’abrégé. Les demoiselles m, (fig. 17.) attachées au clavier inférieur, doivent être d’un pouce plus long que les deux claviers ne sont ensemble d’épaisseur. Il y a des orgues où les demoiselles du premier clavier en traversent deux ; ainsi elles doivent être plus longues à proportion. On fait les anneaux avec des pincettes rondes, les mêmes qui sont représentées dans les planches d’Orfévrerie.
Lorsqu’il n’y a point de pédale à un orgue, on met une tirasse, c’est-à-dire un clavier de pédale qui tire le grand orgue ; pour cela il faut que le clavier du positif, qui est le premier clavier, soit entaillé. On fait passer des demoiselles par ces entailles, qui vont s’attacher par leur anneau supérieur aux anneaux qui sont au-dessous des touches du clavier du grand orgue, qui est le second, & par leur anneau inférieur elles vont s’attacher aux targettes de l’abrégé du clavier de pédale, sur les touches duquel en posant le pié on fait baisser les touches correspondantes du clavier du grand orgue, & même aussi celles du clavier du positif, si le clavier du grand orgue est tiré dessus. Voyez Talon.
Demoiselle (à la Monnoie), espece de verge de fer en espadon, qui sert à empêcher que les charbons ne coulent avec la matiere, de la cuillere dans les moules.
Demoiselle, terme de Paveur. Voyez Paveur.