L’Encyclopédie/1re édition/IGNITION

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Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 548).
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IGNITION, s. f. (Chimie.) état d’un corps quelconque, échauffé par un degré de chaleur qui le rend éclatant & brûlant, c’est-à-dire capable de porter l’incendie dans plusieurs matieres combustibles.

On emploie quelquefois aussi le mot d’ignition, pour désigner l’action de porter un corps à l’état que nous venons de décrire.

Le mot latin candefactio exprime assez bien le degré extrème d’ignition, car la plûpart des corps qui sont échauffés par le plus grand degré de chaleur qu’on puisse leur communiquer sont véritablement éblouissans, jettent une lumiere très-vive & très abondante, & par conséquent paroissent blancs. Le degré moyen d’ignition qui fait paroître les corps rouges, pourroit s’appeller en françois rougissement.

L’usage ordinaire du mot d’ignition exclut la flamme de l’idée du phénomene qu’il exprime. Cette acception est assez arbitraire ; le mot ignition pourroit très-bien exprimer l’état générique de tout corps en feu, ensorte qu’il est une ignition avec flamme, & une ignition sans flamme ; mais c’est toûjours la derniere espece que cette expression désigne, & la premiere est toûjours nommée inflammation.

L’ignition proprement ou communément dite peut résider ou dans un corps combustible, ou dans un corps incombustible ; dans le premier cas elle s’appelle aussi embrasement, & elle ne subsiste dans l’air libre qu’aux dépens du corps même dans lequel elle existe, elle y consume un des principes de ce corps, sa matiere combustible ; le même degré de chaleur peut y être entretenu long-tems par le dégagement & l’ignition successive de cette substance, qui fournit, ce qu’on appelle dans le langage vulgaire des écoles, un aliment au feu ; & selon la théorie de ce phénomene, que j’ai proposée à l’art. Calcination, (Voyez Calcination.) la matiere d’une flamme sensible ou insensible. L’ignition des corps combustibles n’a pas besoin par conséquent, pour être excitée, de l’application d’un feu extérieure aussi fort que celui qui la constitue elle-même, & encore moins de l’application continuelle d’une chaleur extérieure quelconque. L’ignition des corps incombustibles peut subsister au contraire très-long-tems, même à l’air libre, sans altération du corps qu’elle échauffe, & demande nécessairement pour être excitée & entretenue dans ces corps, l’application antécédente & continuelle d’une chaleur extérieure, au moins égale à celle du corps mis en ignition, que l’usage ne permet pas encore d’appeller igné.

Ces deux phénomenes sont si réellement distincts, & cependant si généralement confondus par les plus grands Physiciens, par Newton lui-même, (voyez son idée sur l’ignition ou sur le feu, rapportée & réfutée, art. Chimie, p. 419, col. ij.) qu’il me paroît nécessaire de les désigner par deux noms différens ; de consacrer le mot d’ignition pour les corps incombustibles, & de n’employer que celui d’embrasement pour les combustibles.

La consommation ou consomption de l’aliment du feu, ou du principe combustible par l’ignition, demande le concours de l’air, du moins n’a point lieu lorsque ces matieres sont à l’abri de l’abord libre de l’air de l’atmosphere. Voyez Calcination & Charbon. L’espece de soufre formé par l’union de l’acide nitreux & du phlogistique, paroît seul excepté de cette loi. Voyez Nitre. Les matieres combustibles mises en ignition dans les vaisseaux fermés, sont donc exactement alors dans le cas des corps incombustibles. Toutes ces notions qui sont vraiment fondamentales dans la théorie du feu combiné, ou du phlogistique, seront ultérieurement développées à l’art. Phlogistique. Il faut encore consulter les articles déja cités, Chimie, Charbon & Calcination, & les articles Chaux métallique, Cendres, Chimie, Combustion, Feu, Flamme, Incombustible. (b)