La Cité de Dieu (Augustin)/Livre XII/Chapitre XVI

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La Cité de Dieu
Texte établi par RaulxL. Guérin & Cie (Œuvres complètes de Saint Augustin, tome XIIIp. 258).
CHAPITRE XVI.
COMMENT ON DOIT ENTENDRE QUE DIEU A PROMIS À L’HOMME LA VIE ÉTERNELLE AVANT LES TEMPS ÉTERNELS.

Quels sont ces siècles écoulés avant la création du genre humain ? j’avoue que je l’ignore, mais je suis certain du moins que rien de créé n’est coéternel au Créateur. L’Apôtre parle même des temps éternels, non de ceux qui sont à venir, mais, ce qui est plus étonnant, de ceux qui sont passés. Voici comment il s’exprime : « Nous sommes appelés à l’espérance de la vie éternelle, que Dieu, qui ne ment pas, a promise avant les temps éternels[1], et il a manifesté son Verbe aux temps convenables[2] ». C’est dire clairement qu’il y a eu dans le passé des temps éternels, lesquels pourtant ne sont pas coéternels à Dieu. Or, avant ces temps éternels, Dieu non-seulement était, mais il avait promis la vie éternelle qu’il a manifestée depuis aux temps convenables, et cette vie éternelle n’est autre chose que son Verbe. Maintenant, en quel sens faut-il entendre cette promesse faite avant les temps éternels à des hommes qui n’étaient pas encore ? c’est sans doute que ce qui devait arriver en son temps était déjà arrêté dans l’éternité de Dieu et dans son Verbe qui lui est coéternel.

  1. Il est bon de remarquer ici que saint Augustin suit la version de saint Jérôme (tempora œterna) de préférence à la Vulgate (tempora sœcularia). Voyez, sur ce point de l’Épître à Tite, la remarque de saint Jérôme et le livre de saint Augustin Contra Priscil., n. 6.
  2. Tit. I, 2, 3.