La saoulerie américaine/06

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Traduction par Louis Postif.
L’Œuvre (p. 38-50).

CHAPITRE VI

Scotty et le harponneur

Cependant l’époque approchait où j’allais entreprendre ma seconde série de débauches en compagnie de John Barleycorn.

À l’âge de quatorze ans, la tête bourrée de récits d’anciens voyageurs, de visions d’îles tropicales et de rives lointaines, je passais mes loisirs à côtoyer la baie de San Francisco et l’estuaire d’Oakland sur un léger canot à dérive centrale[1].

Je voulais me faire marin, je voulais me libérer de la monotonie et des platitudes quotidiennes. J’étais dans la fleur de mon adolescence, l’esprit enfiévré de romans et d’aventures, rêvant de vie sauvage dans un monde inculte. J’étais loin de me douter du rôle prépondérant que joue précisément l’alcool dans un pareil milieu.

Un jour, tandis que je hissais la voile de mon bateau, je fis la connaissance de Scotty. C’était un solide gars de dix-sept ans. Il venait de déserter, me dit-il, en Australie, d’un vaisseau anglais, sur le quel il était mousse. Revenu à San-Francisco sur un autre bâtiment, il cherchait à s’embaucher maintenant à bord d’un baleinier.

De l’autre côté de l’estuaire, près des baleiniers, était amarré le sloop-yacht Idler. Le surveillant, un harponneur, avait l’intention de s’embarquer pour son prochain voyage sur le baleinier Bonanza. Voudrais-je bien le prendre, lui, Scotty, sur mon canot, et le conduire auprès de cet homme-là ?

Si je le voulais ! N’avais-je pas entendu toutes les histoires, vraies ou fausses, qui circulaient à propos de l’Idler, cet énorme sloop qui revenait des îles Sandwich, où il faisait là contrebande de l’opium ? Et le harponneur qui en avait la garde, combien de fois, en le voyant, j’avais envié sa liberté ! Rien ne l’obligeait à mettre pied à terre ; il dormait à bord toutes les nuits, tandis qu’il me fallait, moi, rentrer en ville pour me coucher. Ce harponneur (personne autre ne m’avait renseigné sur sa qualité) n’avait que dix-neuf ans ; mais c’était, à mes yeux, une personnalité trop brillante pour que j’eusse osé le questionner lorsque, à distance respectueuse, je pagayais autour de son yacht.

Voulais-je bien emmener Scotty, le mousse déserteur, rendre visite au harponneur, sur l’Idler, navire qui faisait la contrebande de l’opium ? Et on me le demandait !

Le harponneur parut sur le pont en réponse à notre appel, et nous invita à monter à bord. Je jouai au marin et à l’homme, écartant suffisamment mon youyou du yacht pour ne pas endommager la peinture blanche, le laissant filer à l’arrière au bout de son amarre, et nouant nonchalamment celle-ci par une double-clef.

Nous descendîmes. Pour la première fois je voyais l’intérieur d’un bateau. Les vêtements, sur les murs, sentaient le moisi. Mais qu’importait ? C’était l’attirail de matelots : vestes en cuir doublées de velours à côtes, paletots de drap bleu marine, bottes de caoutchouc, suroîts et surtouts de toile cirée.

L’économie, de place se manifestait dans les couchettes étroites, les tables à bascule, les tiroirs ménagés dans les endroits les plus invraisemblables. Je remarquai l’axiomètre du gouvernail, les lampes marines dans leurs cardans, les cartes au revers bleu roulées négligemment et rangées dans un coin, les signaux en ordre alphabétique et un compas de marinier piqué dans la cloison pour tenir un calendrier.

Enfin, je vivais, je me trouvais là sur mon premier bateau, un bateau de contrebandier, et traité en camarade par un harponneur et un marin déserteur anglais qui disait s’appeler Scotty.

La première chose que firent le harponneur de dix-neuf ans et le marin de dix-sept, pour prouver qu’ils étaient des hommes, fut de se conduire comme tels. Le harponneur suggéra qu’il serait éminemment désirable de prendre quelque chose, et Scotty chercha dans ses poches des pièces d’argent et de nickel. Puis l’autre s’éloigna avec un flacon rose pour le faire emplir dans quelque maison louche, car il n’y avait pas de débit autorisé aux environs. Nous absorbâmes l’immonde tord-boyaux dans des gobelets. Devais-je paraître moins fort, moins brave, que le harponneur et le marin ?

Ils étaient des hommes et en témoignaient par leur façon de boire, indice infaillible de virilité. Je bus donc avec eux, coup sur coup, sans hésiter, bien que la sale drogue ne pût se comparer avec une tablette de caramel ou un délicieux « boulet de canon ». À chaque lampée, je frémissais et je m’emportais la gorge, mais je dissimulais, comme un homme, symptôme de répugnance.

Le flacon fut rempli et vidé plusieus fois cet après-midi-là. Je possédais, en tout et pour tout, vingt cents, mais je les alignai bravement, regrettant au fond" l’énorme quantité de sucreries que représentait une telle somme.

L’alcool nous montait au cerveau. Scotty et le harponneur parlaient de tenir tête aux alizés, des tempêtes du Cap Horn, des pamperos[2] au large de La Plata, de brises à amener les perroquets, de coups de chien du Sud, d’ouragans du Pacifique nord et de baleinières fracassées dans les glaces arctiques.

— Impossible de nager dans cette eau glacée, me confiait le harponneur. En une minute, tu te replies en deux et tu coules. Quand une baleine démolit ton bateau, la seule chose à faire est de te plaquer le ventre le long d’un aviron, de façon que tu puisses flotter lorsque le froid t’enroule.

— Pour sûr, dis-je, remerciant de la tête d’un air assuré, que moi aussi je chasserais la baleine et verrais ma barque fracassée dans l’Océan Arctique.

De fait, j’enregistrai ce conseil comme un renseignement précieux et le classai dans mon cerveau, où il est resté jusqu’à ce jour.

Cependant je n’osais placer un mot… au début tout au moins. Grands dieux ! Je n’avais que quatorze ans et de ma vie je ne m’étais aventuré sur l’Océan. Je me contentais d’écouter les deux loups de mer et de démontrer ma virilité en levant le coude avec eux, rondement et crânement, coup sur coup.

L’alcool produisait son effet sur moi. Les paroles de mes deux compagnons emplissaient l’étroite cabine de l’Idler et passaient à travers mon cerveau comme de grandes rafales de vent frais ; en imagination je vivais mes années à venir et me laissais bercer aux flots de l’aventure dans un monde superbe, insensé et sauvage.

Nous devenions expansifs. Toutes contraintes et réserves s’évanouissaient. On aurait dit que nous nous connaissions de tout temps et nous nous jurâmes de voyager ensemble pendant des années. Le harponneur nous fit part de ses mésaventures et misères innombrables. Scotty fondit en larmes en parlant de sa pauvre vieille maman, à Edimbourg : une grande dame, insistait-il, de haute naissance, qui avait eu des revers de fortune, s’était privée afin de payer en une fois la somme exigée par les armateurs pour son apprentissage, et dont le rêve avait été de se sacrifier pour faire de lui un officier de marine marchande et un monsieur. Elle avait eu le cœur brisé en apprenant qu’il avait déserté son bateau en Australie et repris du service comme simple matelot. Et Scotty nous le prouva par une lettre qu’il sortit de sa poche, la dernière lettre de sa mère, tout empreinte de tristesse, et ses pleurs redoublèrent lorsqu’il la lut à haute voix.

Le harponneur et moi joignîmes nos larmes aux siennes, et nous jurâmes tous trois de nous embarquer sur la baleinière Bonanza, de rapporter une grosse paye et, toujours ensemble, d’accomplir un pèlerinage jusqu’à Edimbourg pour déposer notre trésor dans le giron de la vénérable dame.

À mesure que John Barleycorn s’insinuait dans mon cerveau et commençait à l’échauffer, il faisait fondre en moi toute réticence et s’évaporer toute modestie. De venu mon frère jumeau et mon alter ego, il m’inspirait les paroles qui sortaient de mes lèvres. J’élevai la voix, moi aussi, pour faire voir que j’étais un homme et un aventurier. Je me vantai, avec force détails, d’avoir traversé la baie de San-Francisco, dans un effroyable coup de suroît, sur mon esquif découvert, à l’ébahissement des matelots mêmes de la goélette-vigie.

Mieux encore : moi ou John Barleycorn — car nous ne faisions qu’un, — nous disions à Scotty qu’il pouvait bien être un marin de haute mer et connaître jusqu’à la moindre ficelle des grands navires, mais, pour ce qui était de la manœuvre d’un petit bateau, je me chargeais de le battre haut la main et de décrire des cercles autour de lui dans mon canot.

Le mieux est que mes affirmations et mes fanfaronnades étaient sincères. À l’état normal, je n’eusse jamais osé exprimer à Scotty le dédain que m’inspirait son ignorance en fait de petits bateaux. Mais John Barleycorn s’arrange toujours pour vous délier la langue et vous faire dégoiser vos pensées les plus secrètes.

Scotty ou John Barleycorn, ou tous les deux, se montrèrent naturellement fort offensés de mes remarques. Cela ne ne fit pas baisser le ton. Je me sentais capable de rosser d’importance un matelot déserteur de dix-sept ans. Scotty et moi fumions et ragions comme deux jeunes coqs ; heureusement, le harponneur versa une autre rasade pour nous faire oublier notre querelle.

Nous nous réconciliâmes sur-le-champ. Enlacés par le cou, nous échangeâmes des vœux d’amitié éternelle, tout comme Black Matt et Tom Morrisey, qu’il me semblait revoir dans la cuisine de San-Mateo. Ce souvenir me convainquit que j’étais enfin un homme — malgré mes piètres quatorze ans — un homme découplé et brave comme ces deux géants qui s’étaient chamaillés puis raccommodés en ce mémorable dimanche d’antan.

À ce moment, nous atteignions la phase lyrique de l’ivresse, Je joignis ma voix à celle de Scotty et du harponneur dans des bribes de romances et de chansons de matelots. C’est là, dans la cabine de l’Idler, que j’entendis pour la première fois « Blow the man down », « Flying Cloud » et « Whisky, Johnny, whisky ». Oh ! c’était superbe. Je commençais à saisir le sens de la vie. Ceci faisait oublier la banalité quotidienne, l’estuaire d’Oakland, la distribution fastidieuse de journaux aux portes, la livraison de la glace et le relèvement des quilles.

Le monde entier m’appartenait, j’en foulais toutes les routes, et John Barleycorn, se jouant de mon imagination, me permettait de devancer la vie aventureuse après laquelle je soupirais.

Nous n’étions pas des types ordinaires, mais trois jeunes dieux ivres, d’une sagesse incroyable, d’une félicité rayonnante, d’une puissance illimitée. Ah ! je l’affirme aujourd’hui après toutes ces années — si John Barleycorn pouvait vous maintenir à un tel pinacle, jamais plus on ne m’aurait vu sobre. Hélas ! tout se paye ici-bas, suivant une loi rigide ; toute force s’équilibre d’une faiblesse, toute ascension d’une descente. À chaque minute factice passée en compagnie des dieux correspond une autre minute où l’on patauge dans fange avec les reptiles ; et, lorsqu’on parvient par un tour de force à comprimer de longs jours et d’interminables semaines en des instants de folie magnifique, il faut les racheter par une vie abrégée, souvent avec une impitoyable usure.

L’intensité et la durée sont des ennemis aussi vieux que le feu et l’eau. Ils s’entre-détruisent et ne peuvent coexister. John Barleycorn, tout puissant nécromancien qu’il est, demeure esclave de la chimie organique tout comme nous autres mortel. Nous payons pour chaque surmenage posé à nos nerfs, et John Barleycorn ne peut intervenir pour nous éviter la juste échéance. Capable de nous transporter au sommets, il ne saurait nous y maintenir autrement, nous deviendrions tous ses modèles. Or, il n’en existe pas qui n’expient les folles sarabandes dansées au son de sa flûte.

L’enfant de quatorze ans que j’étais alors, assis dans la cabine de l’Idler, entre le harponneur et le matelot, ignorait toute cette sagesse acquise après coup. Ses narines palpitaient à l’odeur moisie des vêtements de marins, et il chantait en chœur avec les autres :

Un bateau yankee descend la rivière.
Hardi ! les petits, hardi !

Nous pleurions comme des Madeleines, nous parlions et nous criions tous à la fois. J’avais une constitution splendide, un estomac qui eût digéré de la ferraille, et j’étais encore en pleine possession de moi-même quand Scotty se mit à donner des signes d’épuisement dans cette course de Marathon. Sa conversation devint incohérente. Il cherchait des mots sans les trouver et ne pouvait articuler ceux qui arrivaient sur ses lèvres. Sa conscience commençait à lui faire défaut. L’éclat de ses yeux se ternissait et leur expression devenait aussi stupide que ses tentatives pour parler. Son corps s’affaissait, tout comme sa raison, car on ne peut se tenir droit que par un effort de volonté. Le cerveau vacillant de Scotty ne pouvait plus contrôler ses muscles. Toutes les coordinations de ses mouvements se détraquaient. Il essaya de boire encore, mais le gobelet échappa à sa main débile. Alors, je le vis, à ma grande surprise, pleurer amèrement, rouler sur le dos dans une couchette et, aussitôt, s’endormir en ronflant.

Le harponneur et moi, nous continuâmes à boire avec un ricanement d’êtres supérieurs, en regardant Scotty étalé devant nous.

Le dernier flacon fut vidé par nous deux aux sons des ronflements du vaincu. Puis ce fut au tour du harponneur de disparaître dans sa couchette, et je restai seul debout sur le champ de bataille.

J’étais très fier, et John Barleycorn aussi. Je pouvais supporter ma boisson. ; j’étais un homme. J’en avais enivré deux, verre pour verre, jusqu’à complet abrutissement. Et je tenais toujours sur mes jambes, bien droit, en gagnant le pont pour donner de l’air à mes poumons en feu.

C’est au cours de cette orgie sur l’Idler que me fut révélée l’endurance de mon estomac et de ma tête — petite découverte qui devait être une source d’orgueil pour les années à venir, mais que j’en suis venu à considérer, en fin de compte, comme une calamité. L’homme heureux est celui qui est incapable d’avaler deux verres sans être ivre ; le pauvre bougre à plaindre est celui qui peut en absorber beaucoup, avant de trahir les moindres symptômes d’ébriété et qui doit en boire des quantités pour être « mûr ».

Le soleil disparaissait quand je mis le pied sur le pont de l’Idler. Il ne manquait pas de couchettes en bas, je n’étais nullement obligé de m’en retourner chez moi. Mais je voulais me prouver à quel point j’étais un homme.

Mon bateau était amarré à l’arrière. Le jusant s’écoulait dans le chenal à la rencontre d’une brise de mer de quarante milles à l’heure. Je pouvais voir d’énormes moutons et distinguer la vitesse et la succion du courant sur le front et dans les intervalles des grosses vagues.

Je hissai la voile, je démarrai et pris ma place au gouvernail, l’écoute en main, puis je manœuvrai pour traverser le chenal. L’esquif se souleva et plongea furieusement. L’écume commença à voltiger au tour de moi. Je me sentais au paroxysme de l’exaltation. Je chantais « Blow the man down » en larguant la toile. Je n’étais plus le gosse de quatorze ans, vivant la vie insipide de la ville morte appelée Oakland. J’étais un homme, un dieu, et les éléments eux-mêmes me rendaient hommage tandis que je les matais à mon gré.

C’était la basse mer. Une distance d’au moins cent mètres de vase séparait l’eau de l’appontement. Je remontai ma quille mobile, courus grand’erre en plein dans la boue, amenai la voile et, debout à l’arrière, comme je l’avais fait souvent à marée basse, je me mis à godiller. C’est à ce moment que les rapports entre mon cerveau et mes muscles me firent faux-bond. Je perdis l’équilibre et plongeai, la tête en avant, dans la purée. Alors, pour la première fois, tandis que je me débat tais pour me remettre sur pied, couvert de boue, le sang coulant le long de mes bras écorchés contre un pieu incrusté de bernicles, je m’aperçus que j’étais ivre. Mais qu’importait ? De l’autre côté du chenal, deux solides matelots restaient étendus, sans connaissance, dans leurs couchettes où je les avais enivrés. J’étais un homme. Je tenais toujours sur mes jambes, même avec de la vase jusqu’aux genoux. Je repoussai dédaigneusement l’idée de remonter dans mon canot. Je me mis à patauger à travers la boue, poussant mon esquif devant moi et entonnant au monde l’hymne de ma virilité.

Je devais payer cette folie. Je restai deux jours malade, abominablement malade, et j’eus les deux bras infectés par les égratignures de bernicles. Ils me faisaient si mal que, pendant une semaine, je ne pus m’en servir, et j’éprouvais une torture à mettre et ôter mes habits.

Jamais plus on ne m’y reprendrait, j’en faisais le serment. Le jeu n’en valait pas la chandelle. Le prix était exorbitant. Cependant, je n’avais pas de nausées morales ; ma répulsion était purement physique. Les moments d’exaltation auxquels j’avais goûté ne compensaient nullement ces heures de misère et de souffrance.

Lorsque je retournai à mon canot, j’évitai l’Idler. Je faisais un détour de l’autre côté du chenal. Scotty avait disparu. Le harponneur se trouvait toujours dans les parages, mais je me gardais de le rencontrer. Une fois, il descendit sur le quai, je me cachai dans un hangar. Je craignais qu’il ne me proposât encore à boire, peut-être même avait-il une bouteille de whisky dans sa poche.

Et pourtant — ici entre en jeu la sorcellerie de John Barleycorn — cette beuverie à bord de l’Idler demeurait comme un jour marqué de rouge dans mon existence monotone. C’était un événement mémorable. Je ne faisais qu’y songer. J’en repassais tous les détails, sans me lasser. Entre autres choses, j’avais pu pénétrer les mobiles et ressorts cachés des actions humaines. J’avais vu Scotty verser des larmes sur son indignité et sur la pitoyable situation de sa mère, la dame d’Edimbouig. Le harponneur m’avait confié de terribles choses sur son propre compte. J’avais entrevu en foule les réalités séduisantes et passionnantes d’un monde au delà du mien et pour lequel je me sentais aussi apte que les deux jeunes gens avec qui je m’étais enivré. J’avais pu lire dans l’âme des hommes, j’avais fait le tour de la mienne et j’y découvrais des forces et des possibilités inouïes.

Oui, ce jour-là tranchait sur tous les autres. Aujourd’hui encore, il garde même relief à mes yeux. Le souvenir m’en reste gravé au cerveau. Mais cela coûtait trop cher. Je refusai de continuer ce jeu-là et j’en revins à mes boulets de canon et à mes plaques de caramel.

Le fait est toute la chimie de mon corps sain et normal m’éloignait de l’abominable alcool, qui ne convenait pas à mon organisme. Malgré cela, l’occasion devait me ramener vers John Baleycorn, m’y ramener sans cesse, jusqu’à ce que, après de longues années, l’heure vint où je le chercherais dans tous les lieux fréquentés par les hommes — je le chercherais et le saluerais joyeusement, comme un bienfaiteur et un ami. Et en même temps, je le détestais et haïssait de toute mon âme. Ah ! c’est un étrange ami, ce John Baleycorn !

  1. Quille mobile qu’on relève ou qu’on abaisse selon la profondeur de l’eau. (N.D.T.)
  2. Vent violent et froid de l’ouest ou du sud-ouest qui balaye les pampas de l’Amérique du Sud depuis les Andes. — N. D. T.