Le Livre d’un inconnu/24

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XXIV


Depuis bientôt six mois que je ne l’ai pas vue
Je vis, portant en moi le poison qui me tue,
Je vis, si respirer est vivre et s’il suffit
De marcher pour pouvoir affirmer que l’on vit.
Les yeux ouverts, tragique et morne somnambule,
Dans le fourmillement des foules je circule,
Ou bien des jours entiers, par des quartiers perdus,
Je refais les chemins autrefois parcourus :

Je longe le rempart, son talus de luzernes,
Je compte les bastions et les postes-casernes,
Et le soir, je vais voir dans la cité des morts
Le Soleil s’abîmer sanglant dans des flots d’ors.