Le Pantcha-Tantra ou les cinq ruses/Conte 5

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Vichnou-Sarma 
Traduction par Jean-Antoine Dubois.
J.-S. Merlin (p. 378-393).

CONTE CINQUIÈME.

Séparateur

Appadjy, premier Ministre du Roi Krichna-Raya.

Avant les invasions musulmanes, du temps où les peuples de l’Inde jouissaient encore du bonheur de vivre sous des chefs de leur nation, une des plus riches provinces de ce vaste pays était gouvernée par un prince nommé Krichna-Raya. Ce bon roi mettait toute sa sollicitude à se concilier l’amour et le respect de son peuple, en s’appliquant à le rendre heureux. Pour y parvenir, il apportait le plus grand soin dans le choix de ses ministres et de ses confidens, et ne s’entourait que d’hommes dont la prudence et l’expérience connues lui étaient garans de leurs sages conseils. Appadjy, son premier ministre, jouissait particulièrement de sa confiance, parce qu’il avait l’art de lui présenter la vérité sous le voile d’allégories fines et agréables.

Un jour que dans le conseil il n’y avait pas d’affaire importante à discuter, le roi s’adressant à son ministre favori. Appadjy ! lui dit-il, je veux te soumettre une question : j’entends dire partout que les hommes, dans leurs usages religieux et civils, ne se conduisent que machinalement et par routine, et qu’une religion ou une coutume, une fois établie, ou mise en vogue, est aveuglément suivie par la multitude, quelque ridicule ou quelque absurde qu’elle soit. Je désirerais vérifier la justesse de cette assertion, pour connaître si le ridicule appartient aux usages ou aux hommes qui les suivent[1].

Appadjy, avec sa modestie ordinaire, promit au roi de s’occuper de cette question et de lui donner réponse dans peu de jours.

Le roi congédia l’assemblée, et Appadjy se retira, l’esprit tout occupé de la question que son maître lui avait proposée. De retour chez lui, il fit appeler le berger qui veillait à la garde de ses troupeaux ; c’était un homme d’un esprit lourd et grossier, comme le sont ordinairement les gens de cette classe : Berger, lui dit-il, il faut à l’instant quitter tes vêtemens de pâtre, et prendre le costume d’un pénitent ; car tu vas jouer le rôle de sanniassy pour quelque temps. Commence donc par te barbouiller le corps avec des cendres ; prends ensuite d’une main le bâton à sept nœuds, de l’autre, le vase dont se servent les gens de cette profession pour mettre leur eau[2], et porte sous ton bras la peau de gazelle, sur laquelle un sanniassy doit toujours s’asseoir[3]. Dans cet équipage, tu te rendras sans délai à la montagne voisine : là, tu entreras dans la caverne qui se trouve au milieu de la montagne, et étendant par terre la peau de gazelle, tu t’asseoiras dessus dans la posture d’un pénitent, les yeux fixés sur la terre, les narines bouchées d’une main, et l’autre main appuyée sur le sommet de la tête : sois attentif à bien jouer ton rôle, et prends garde sur-tout de me trahir. Il peut se faire que le roi, accompagné de toute sa cour et d’une nombreuse suite, vienne te visiter dans cette caverne ; mais qui que ce soit qui se présente, fût-ce moi, fût-ce le roi lui-même, sache que tu dois rester immobile dans la posture que je viens de te prescrire ; et quelque tourment qu’on te fasse endurer, quand bien même on t’arracherait tous les poils du corps les uns après les autres, souviens-toi de paraître entièrement insensible ; de ne laisser échapper aucun signe de douleur, de ne pas prononcer une seule parole, de ne détourner tes regards sur personne, en un mot de présenter l’apparence d’un homme entièrement absorbé dans la méditation. Berger, tu as entendu mes ordres : si tu as le malheur de t’en écarter un instant, il y va de ta vie ; si au contraire tu les exécutes fidèlement, une généreuse récompense t’est réservée.

Le berger d’Appadjy, accoutumé toute sa vie à faire paître les moutons, ne se sentait nullement tenté de changer sa condition pour celle de sanniassy ; cependant le ton de son maître était si impératif, qu’il vit bien que toutes les représentations seraient inutiles ; il fallut donc obéir, et se préparer à jouer le rôle de pénitent. Tous ses préparatifs faits, il se rendit à la caverne indiquée ; et bien résolu d’exécuter les ordres de son maître, il y attendit l’événement.

Cependant Appadjy s’était rendu au palais : il y trouva le roi environné de tous ses courtisans, et s’étant approché d’un air grave et sérieux : Grand Roi ! lui dit-il, pendant qu’environné de vos sages conseillers, vous vous occupez des moyens d’assurer le bonheur de vos peuples, pardonnez à mon zèle si je vous interromps pour vous annoncer que le jour est venu où, satisfaits de vos vertus, les Dieux ont voulu vous donner une preuve éclatante de leur protection et de leur faveur. Au moment où je vous parle, une grande merveille est cachée dans votre royaume, non loin de votre résidence. Au milieu de la montagne qui s’élève à peu de distance de votre capitale, se trouve une caverne : là, un pénitent, descendu sans doute du séjour du grand Vichnou, a daigné venir établir sa demeure ; absorbé dans la contemplation des perfections de Para-Brahma, il est entièrement insensible à toutes les choses d’ici-bas ; il n’a d’autre nourriture que l’air qu’il respire : et aucun des objets qui frappent les sens ne fait sur lui la moindre impression ; en un mot, on peut dire que le corps seul de ce grand personnage habite ce monde terrestre, tandis que son âme, ses pensées et toutes ses affections sont étroitement unies à la divinité, et je ne doute pas que les Dieux, en l’envoyant visiter votre royaume, n’aient voulu vous donner une preuve éclatante de leur faveur et de leur Bienveillance pour vous et pour vos peuples.

Le roi et ses favoris, qui avaient écouté avec le plus vif intérêt le discours d’Appadjy, furent tous saisis d’admiration et d’étonnement en entendant un récit si extraordinaire ; et le prince, de l’avis unanime de tous ses courtisans, résolut d’aller sans délai rendre visite au prétendu pénitent pour obtenir la faveur de sa bénédiction. Il voulut faire cette visite dans tout l’éclat et avec toute la pompe de la royauté, accompagné de sa cour et escorté de ses troupes. Il fit en même temps sonner de la trompette dans sa ville royale pour annoncer aux habitans le sujet de sa visite et les inviter tous à le suivre. On ne tarda pas à se mettre en marche. Jamais cortège aussi brillant n’avait accompagné le roi ; jamais multitude aussi innombrable ne s’était vue rassemblée. Le plaisir et la joie étaient peints sur tous les visages, et chacun se félicitait d’avoir vécu jusqu’à ce jour pour avoir le bonheur de contempler un des plus grands personnages qui eût jamais paru sur la terre.

Le roi arriva enfin avec son escorte à la montagne : aux approches de la caverne où il savait que le saint personnage, séparé de tout commerce avec le monde, vivait dans une union intime avec la divinité, il se sentit déjà saisi d’une crainte religieuse, et il ne loucha le seuil de ce lieu sacré qu’avec les marques du plus profond respect : bientôt il aperçut l’objet qu’il cherchait avec tant d’empressement ; il s’arrêta quelque temps pour le contempler en silence ; il vit une forme humaine assise sur une peau de gazelle, d’un côté une courge remplie d’eau, et de l’autre un bâton de bambou à sept nœuds. La tête inclinée et les yeux fixes dirigés vers la terre, les narines bouchées d’une main, le sommet de la tête couvert par l’autre main, le pénitent entièrement absorbé dans la méditation, avait le corps aussi immobile que le rocher sous lequel il avait trouvé un asile. À cette vue, le roi s’approcha dans un saint recueillement, et pénétré du plus profond respect, il se prosterna trois fois aux pieds du sanniassy et lui adressa la parole en ces termes :

« Grand pénitent, béni soit le destin qui m’a fait vivre jusqu’à ce jour pour me permettre de jouir du bonheur ineffable de voir vos pieds sacrés. Je ne sais d’où peut me venir une pareille félicité. Le peu de bonnes œuvres que j’ai pratiquées durant cette génération, ne peuvent pas me l’avoir méritée, et je ne saurais l’attribuer qu’aux vertus de mes ancêtres ou à quelques œuvres d’éclat que j’ai peut-être pratiquées dans une génération précédente, et dont je n’ai pas le souvenir dans celle-ci. Quoi qu’il en soit, le jour où j’ai vu vos pieds sacrés est assurément le plus beau et le plus heureux jour de ma vie. Désormais je n’ai plus rien à désirer dans le monde, j’ai reçu la plus grande faveur qui puisse être accordée à un mortel : par cette vue, tous les péchés que j’ai commis dans cette génération et dans les générations précédentes me sont remis, et je suis désormais aussi pur que l’eau même du Gange. »

Le prétendu sanniassy entendit ce discours flatteur sans témoigner la moindre sensibilité et sans changer de contenance ni de posture. Cette impassibilité ne fit qu’accroître l’étonnement et l’admiration de la multitude qui l’entourait. Quel grand personnage, disait-on tout bas, qui ne daigne ni répondre à un si grand roi, ni même jeter sur lui un seul de ses regards ! On a bien raison de dire que le corps seul de ce saint pénitent habite ce bas monde, et que son âme, ses pensées et toutes ses affections sont intimement unies à Para-Brahma.

Le roi Krichna-Raya ne pouvait se lasser d’admirer ce grand sanniassy ; il lui adressa encore quelques complimens aussi exagérés que celui qu’on vient de rapporter. Il espérait fixer sur lui au moins un des regards du saint homme ; mais tout fut inutile. Le pénitent continua de rester immobile dans la même posture, comme un homme absorbé tout entier dans la contemplation.

Le prince se disposait à reprendre la route de son palais, lorsque son ministre, auteur de cette comédie, l’arrêta : Grand roi, lui dit-il, après être venu si loin pour visiter le saint personnage qui va désormais devenir à juste titre l’objet de la vénération publique, le quitterez-vous sans avoir reçu de lui sa bénédiction ou quelque autre don qui puisse amener le bonheur sur le reste de vos jours ? Ce pénitent, plongé dans la méditation, ne peut vous adresser la parole ; cependant vous devez tâcher d’obtenir de lui quelque don, ne fût-ce qu’un des poils dont il a le corps tout couvert.

Le roi goûta l’avis de son premier ministre ; il s’approcha du sanniassy, et lui arracha adroitement un des poils qui lui couvraient la poitrine. Je veux le conserver toute ma vie, dit-il ; je le ferai enchâsser dans une boîte d’or que je porterai toujours suspendue à mon cou, comme le plus précieux de tous mes joyaux, ne doutant point qu’une pareille relique ne soit pour moi un talisman contre tous les accidens, et la garantie d’un bonheur certain pour le reste de ma vie.

Les ministres et les autres courtisans qui environnaient le roi voulurent l’imiter : ils s’approchèrent du pénitent l’un après l’autre, et chacun d’eux lui arracha un des poils de la poitrine, promettant, tous, de le conserver le reste de leur vie, et d’en faire le plus précieux de leurs ornemens. Dès qu’on sut ce que venaient de faire le roi et ses courtisans, l’escorte du prince et toute cette multitude presque innombrable qui l’avait accompagné voulut suivre cet exemple. Chacun prétendit emporter une relique du sanniassy. Ce pauvre homme se trouva bientôt environné par la foule, qui lui arracha l’un après l’autre tous les poils qu’il avait sur le corps. Mais il soutint cet horrible supplice sans proférer la moindre plainte, sans changer de posture et sans détourner les regards.

De retour dans son palais, le roi s’empressa de raconter à ses femmes la merveille dont il venait d’être témoin et leur montra la relique qu’il avait apportée, c’est-à-dire le poil qu’il avait arraché de la poitrine du sanniassy. Les reines considérèrent long-temps avec admiration la précieuse relique et témoignèrent le plus vif regret de ce que les lois rigoureuses imposées à leur sexe ne leur eussent pas permis d’accompagner leur mari à la caverne ; elles sollicitèrent, comme la plus grande des faveurs, la grâce de faire transporter ce pénitent dans le palais, pour avoir aussi le bonheur de le contempler et de choisir de leurs propres mains un des poils qui couvraient le corps de ce saint personnage.

Il fallut de grandes instances pour fléchir le roi ; enfin il consentit aux désirs de ses femmes, et voulant, dans cette circonstance, honorer le sanniassy autant qu’il était en lui, il envoya sa cour et toutes ses troupes, infanterie et cavalerie, pour l’escorter. Quand on fut arrivé à la caverne, encore environnée de la multitude, qui se disputait les poils du sanniassy, quatre personnes des plus distinguées s’approchèrent de lui, et après lui avoir exposé le sujet de leur mission, prirent entre leurs bras le pénitent immobile et le placèrent dans un superbe palanquin, dans la même posture où il était dans sa caverne. Le berger fut ainsi emmené et promené avec pompe dans les rues de la ville, au milieu d’une foule innombrable, qui poussait des cris de joie et faisait retentir l’air des louanges du saint personnage.

Le pauvre pâtre était à jeun depuis deux jours ; il avait enduré un supplice cruel ; il s’était senti arracher, les uns après les autres, tous les poils qu’il avait sur le corps. On pense bien qu’il était loin d’être satisfait de toute cette comédie ; il ne fallait rien moins que la crainte de la colère de son maître, et l’espoir que cette farce jouée à ses dépens allait bientôt finir, pour le contenir et l’empêcher de déclarer ce qu’il était réellement. Qu’avais-je à faire, se disait-il en lui-même, de me charger d’un rôle qui m’expose à tant de souffrances ? J’aimerais cent fois mieux, au milieu de mon troupeau, entendre les rugissemens des tigres des forêts, que d’entendre les cris de joie et les acclamations de cette multitude insensée. Auprès de mes moutons, à l’heure qu’il est, j’aurais déjà fait mes deux repas, et depuis deux jours je suis à jeun, ignorant encore quand et comment se terminera cette scène.

Pendant que le prétendu sanniassy s’abandonnait à ces tristes réflexions, on arriva au palais du roi, et il fut transporté dans un superbe appartement, où il ne tarda pas à recevoir la visite des princesses. Elles vinrent d’abord se prosterner à ses pieds les unes après les autres, et après l’avoir admiré quelque temps en silence, chacune d’elles désira posséder un de ses poils pour l’enchâsser dans une boîte d’or et le placer parmi ses plus précieux joyaux. Vainement en cherchèrent-elles sur les parties visibles de son corps ; la multitude presque infinie de dévots qui les avaient précédées, les avaient tous arrachés. Enfin, après avoir regardé sur toute l’étendue de son corps, elles en découvrirent par-ci par-là, dans les replis de sa peau, quelques-uns qui avaient échappé aux yeux de la foule. Leur dévotion satisfaite, elles admirèrent encore quelque temps le pénitent, toujours immobile et absorbé dans la méditation, et quand enfin elles se furent retirées, le roi ordonna que le sanniassy fût laissé seul pendant la nuit, pour jouir tranquillement du repos dont il devait avoir besoin après tant de fatigues et de souffrances.

Cependant Appadjy ne tarda pas à trouver les moyens de s’introduire, sans être vu, dans l’appartement où son pauvre berger avait été laissé, accablé de faim et de souffrances. Il se hâta de le consoler : Berger, lui dit-il, ton temps d’épreuve est fini ; tu as bien joué le rôle que je t’avais prescrit, et je suis content de toi. Je t’ai promis une récompense, tu peux être certain que je tiendrai ma parole ; en attendant, quitte cet extérieur de sanniassy pour reprendre tes vêtemens de berger, et va chercher le repos et la nourriture dont tu dois avoir un si grand besoin ; demain matin, tu retourneras aux soins de ton troupeau. Le berger ne se le fit pas répéter ; il partit sur-le-champ par le passage dérobé que son maître lui montra, bien résolu de ne plus jamais être la dupe de pareilles jongleries.

Le lendemain matin, le roi, croyant retrouver le prétendu pénitent dans le lieu où on l’avait laissé la veille, se rendit avec les principaux de ses officiers pour lui réitérer les hommages de son profond respect. Quel fut leur étonnement lorsqu’ils trouvèrent qu’il avait disparu ! Cependant ce dénouement inattendu ne fit qu’augmenter leur foi et leur dévotion. Dès-lors ils ne doutèrent plus que ce ne fût une divinité bienfaisante, qui, sous une forme humaine, avait daigné faire une visite passagère en ces lieux pour donner au roi et à ses peuples une marque particulière de protection, et qui, dans le silence de la nuit, était retournée dans le séjour de félicité d’où elle était descendue. L’histoire de son apparition et de sa disparition fit, durant quelques jours, le sujet de toutes les conversations à la cour, à la ville et dans tout le royaume. À la fin on s’ennuya de répéter toujours la même histoire, et elle paraissait oubliée, ou du moins ne s’en entretenait-on plus que comme de tout autre événement extraordinaire.

Un jour, Appadjy se trouvait à la cour, le roi lui rappela la question qu’il lui avait auparavant proposée. Appadjy, lui dit-il, eh ! bien, qu’as-tu décidé ? Qui doit-on accuser de ridicule, les usages ou les hommes ? Est-il vrai que, dans leurs pratiques religieuses et civiles, les hommes ne suivent que la routine, qu’ils ne font que ce qu’ils voient faire aux autres ? Et pourrais-tu me prouver qu’il suffit que quelqu’un donne le ton pour que la multitude suive aveuglément et sans réflexion la route qui lui a été tracée ?

Appadjy n’attendait que l’occasion de parler ; il entendit avec plaisir le roi lui rappeler cette question, et quand il eut reçu la permission de s’exprimer sans déguisement : Grand roi ! lui dit-il, cette question est jugée sans retour, c’est vous-même qui l’avez résolue. Vous souvient-il d’une visite que vous n’avez pas dédaigné de faire, il y a quelques jours, à la caverne de la montagne voisine pour y voir le grand pénitent qui était venu y faire sa demeure ? Eh ! bien, ce saint homme, ce personnage illustre n’est rien de plus que le berger qui, depuis bien des années, est occupé à faire paître mes troupeaux, un rustre qui, par ses manières grossières et dégoûtantes, ne peut inspirer que du mépris pour sa personne. C’est pourtant à un pareil être que vous et toute votre cour avez rendu des honneurs divins, et cela sur mon seul témoignage. La multitude, sans autre examen, s’est décidée aveuglément d’après votre exemple ; et sans rien connaître de l’objet de sa dévotion, elle s’est livrée à tous les excès d’un zèle fanatique envers un pâtre et un homme sans naissance, sans éducation et presque sans raison. Reconnaissez, par cet exemple frappant, que la conduite des hommes, dans leurs pratiques religieuses et civiles, n’est en effet qu’une pure routine, et pardonnez-moi, si, par mon artifice, votre propre exemple a justifié la vérité de cet ancien proverbe : « Quelque ridicules que puissent paraître les coutumes et les usages, les hommes qui les suivent le sont encore davantage. »

Le roi Krichna-Raya, loin de s’offenser de la liberté dont son ministre avait usé pour lui découvrir la vérité d’une manière frappante sur un point aussi important, l’avança davantage dans son affection et sa confiance, et continua toujours de le regarder comme le plus fidèle de ses sujets et le meilleur de ses amis.

FIN DU CONTE CINQUIÈME.
  1. Question proverbiale fort en usage dans le pays et connue de tout le monde : Djatra-maroulo ? Djéna-maroulo ? Sont-ce les usages qui sont ridicules ou bien les hommes qui les suivent ? À quoi l’on répond : Djéna-maroulo, ce sont les hommes qui sont ridicules.
  2. Ce vase est d’ordinaire une courge desséchée.
  3. Ces trois articles : un bâton de bambou à sept nœuds, une courge desséchée, et une peau de gazelle forment tout l’équipage d’un sanniassy indien.