Le Testament de Jean Meslier/Édition 1864/Chapitre c

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Texte établi par Rudolf Charles MeijerLibrairie étrangère (Tome 1p. xxxv-lii).
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c. JEAN MESLIER ET SON OEUVRE.

La petite histoire du grand homme, dont il m’est réservé d’exécuter le Testament, est bientôt racontée[1].

Jean Meslier, ou proprement Mellier, comme portent les régistres baptistaires[2], naquit en 1678, d’après Voltaire, ou le 15 Juin 1664, d’après Bouilliot, au village de Mazerny[3], dépendant du Duché de Réthel en Champagne. Il était fils de Gérard Mellier, ouvrier en serge[4], ou propriétaire et fabriquant en laine[5] et de Symphorienne Braidy.

Un curé du voisinage lui enseigna les humanités, et le plaça ensuite au séminaire de Châlons-sur-Marne, où il vécut avec beaucoup de régularité, et où il s’attacha au système de Descartes. Après les études nécessaires au sacerdoce, il y fut initié en 1688, à l’âge de 24 ans[6].

Il vicaria à la campagne jusqu’au mois de Janvier 1692, époque où il fut pourvu de la cure d’Étrépigny[7] et de But[8], sa succursale[9]. Le premier acte, revêtu de sa signature, inscrit dans les registres d’Étrépigny, porte la date du 6 Janvier 1692. Comme curé d’Étrépigny, il se fit remarquer par l’austérité de ses mœurs ; la retraite absolue dans laquelle il vivait, augmenta ses dispositions naturelles à la mélancolie ; sensible et charitable d’ailleurs, il employait en aumônes la presque totalité de son revenu, et il se fit aimer de ses paroissiens, à qui il ne communiqua jamais les doutes que de longues rêveries et une lecture assidue de Bayle et de Montaigne avaient fait naître dans son esprit[10]. Quelques biographes disent qu’il s’acquitta de ses fonctions ecclésiastiques avec zèle et exactitude. M.M. Voiri et Delavaux, l’un curé de Varq[11], l’autre curé de Boulzicourt[12], étaient ses confesseurs et les seules personnes qu’il fréquentait. Il passait son temps à relire le petit nombre d’ouvrages qui composaient sa bibliothèque.

Dans un voyage que Meslier fit à Paris, vers 1723, il se trouva un jour à dîner chez le Père Bassier, jésuite, son ami. La conversation roula sur le Traité de la Religion, publié par Houteville en 1722. Un jeune homme, esprit fort plutôt par vanité que par principes, et qui sans doute était du nombre de ces incrédules, que Boileau caractérisait si bien en disant, que Dieu avait en eux de sots ennemis, s’abandonna à des sorties malignes. Le curé lui répliqua avec un grand sang-froid : "qu’il ne fallait pas beaucoup d’esprit pour se railler de la religion ; mais qu’il en fallait beaucoup plus pour la sountenir et la défendre."

Le curé Meslier était sévère partisan de la justice, et poussait quelquefois son zèle un peu trop loin. Le seigneur de son village ayant maltraité quelques paysans, il ne voulut pas le recommander au prône ; mais le cardinal de Mailly, alors archevêque de Reims, devant qui la contestation fut portée, l’y contraignit ; le dimanche qui suivit cet ordre, le curé monta en chaire, se plaignit de la sentence du cardinal, et dit : "Voilà le sort ordinaire des pauvres curés de campagne ; les archevêques, qui sont de grands seigneurs, les méprisent et ne les écoutent pas ; ils n’ont des oreilles que pour la noblesse. Recommandons donc le seigneur de ce lieu et prions Dieu pour M. de Clairy[13]. Demandons à Dieu sa conversion, et qu’il lui fasse la grâce de ne point maltraiter le pauvre et de ne point dépouiller l’orphelin."

Le seigneur d’Étrépigny, qui avait été présent à cette mortifiante recommandation, en porta de nouveau plainte au même archevêque, qui fit venir le curé Meslier à Donchery, où il le maltraita en paroles.

À dater de ce moment le curé et son seigneur semblent avoir vécu en guerre ouverte. "La tradition du pays est, qu’ayant eu des difficultés avec M. de Clairy, seigneur de sa paroisse, concernant des droits honorifiques que ce dernier prétendait et qui n’avaient point été accordés à ses prédécesseurs, il en fut reprimandé à l’archevêché de Reims ; que cette reprimande, qu’il ne croyait pas mériter, et quelques outrages particuliers qu’il recevait du Seigneur, dont les jardins étaient contigus à l’église, outrages qui furent poussés si loin, que M. de Clairy venait donner du cor sous les fenêtres de l’église, où le curé officiait ou prêchait, son esprit s’était aigri au point de lui rendre insulte pour insulte ; que sur les plaintes du Seigneur, M. de Rohan-Guemené, archevêque de Reims, crut devoir faire venir Meslier au séminaire ; qu’irrité de ce traitement, il s’était laissé mourir de faim en 1729[14]), après avoir pris des mesures pour qu’un testament, où il abjurait sa foi religieuse, fût en même temps porté au greffe de Sainte-Ménéhould, lieu de la juridiction, à l’archevêché de Reims, et à Mézières. Cette affaire ayant éclaté, M. Lavaux, curé de Boulzicourt et M. Voiry, curé de Guignicourt, se rendirent à Étrépigny, et inhumèrent le corps de leur confrère dans la sacristie, sans inscrire son acte mortuaire sur les registres de la paroisse. En effet, on n’y trouve rien qui constate le décès de Meslier. Le dernier acte, revêtu de sa signature, est du 7 Mai 1729, et le premier qui ait été signé par l’abbé Guillotin, son successeur immédiat, est du 27 Août suivant".[15]

"À sa mort," dit Voltaire, "il donna tout ce qu’il possédait (ce qui n’était pas considérable) à ces paroissiens, et pria qu’on l’enterrât dans son jardin".

Quoiqu’il ne soit ici question que de deux exemplaires du fameux Testament du Curé Meslier, tous les biographes de ce grand penseur s’accordent à raconter qu’après sa mort on en trouva chez lui deux exemplaires, écrits de sa main, tandis qu’un troisième avait été déposé par lui-même de son vivant au greffe de la justice de Sainte-Ménéhould. Ces trois exemplaires de trois cent soixante six feuillets chacun, étaient tous trois écrits de sa main et signés par lui. Ils portaient pour titre : "Mon Testament" et étaient adressés à ses paroissiens et à M. Leroux, procureur et avocat au parlement à Mézières. Des deux exemplaires qu’on trouva dans sa demeure, l’un fut retenu par le grand vicaire de Reims, et l’autre fut envoyé à M. Chauvelin, garde des Sceaux. Le Comte de Caylus eut quelque temps entre les mains une de ces trois copies, et bientôt après il y en eut plus de cent dans Paris, que l’on vendait dix louis la pièce[16].

Le Curé Meslier avait écrit sur un papier gris qui enveloppait l’exemplaire destiné à ses paroissiens, ces paroles remarquables : "J’ai vu et reconnu les erreurs, les abus, les vanités, les folies et les méchancetés des hommes ; je les ai haïs et détestés ; je ne l’ai osé dire pendant ma vie, mais je le dirai au moins en mourant et après ma mort, et c’est afin qu’on le sache que je fais et écris le présent mémoire, afin qu’il puisse servir de témoignage de vérité à tous ceux qui le verront et qui le liront, si bon leur semble."

La bibliothèque du vénérable curé était pauvrement pourvue. La Bible, Moreri, Montaigne, quelques Pères, voilà les principales sources où il puisait ses idées libres sur le Christianisme et sur Dieu. Parmi ces livres, on a trouvé un exemplaire des Traités de Fénélon, archevêque de Cambrai, sur l’existence de Dieu et sur ses attributs, (Paris, Delaulni 1718, in-12, reliure fauve ancien,) suivi des Réflexions du Jésuite Tournemine, sur l’athéisme, avec des annotations en marge signées de sa main. L’exemplaire original était dans la riche bibliothèque de St. Martin de Laon, ordre de Prémontré. Monsieur Ch. Nodier[17] parle de quatre autres exemplaires de cet ouvrage annoté : le premier est porté sous le No 758 au Catalogue de Mirabeau ; le second est indiqué à la page 106 du Tome I du Catalogue de Mr. Renouard, qui ne supposait pas qu’il y en existât d’autres. Le troisième est inscrit, sous le No 935, au cabinet des livres précieux de la Bibliothèque de l’Arsenal. Le quatrième, ou si l’exemplaire de Mirabeau figure en double dans ce compte, le troisième, était en la possession de M. Ch Nodier lui-même ; tous les quatre reliés en veau fauve, le second et le troisième terminés par cette note : Ex libris Joannis Meslier.

Voici ce que Monsieur Nodier dit du dernier Exemplaire : "L’écriture de mon exemplaire paraît un peu plus ancienne ; elle est d’une finesse presque microscopique et d’une telle perfection que j’ai vu peu de chefs-d’oeuvre de calligraphie à lui comparer, ce qui s’accorde à merveille avec la réputation du Curé Meslier, célèbre par les productions de ce genre, dont il parait ses autels, et à qui il ne restait guère, de toutes les qualités requises dans un ecclésiastique par les saints canons du moyen âge, qu’une singulière aptitude à la transcription des manuscrits. Une autre remarque à faire, c’est que cette écriture, beaucoup plus soignée que celle des deux autres exemplaires, et dont la régularité, digne du burin, atteste un travail fait, comme on dit, avec amour, est cependant moins nette, et que des surcharges qui n’ont été rendues nécessaires que par la modification même de l’idée ou du mot, semblent y montrer çà et là la plume de l’auteur, qui se corrige en se copiant.

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

Je n’ai pas besoin d’ajouter que l’intérêt de cette petite discussion ne repose pas du tout sur le mérite des notes de Meslier ; c’est dans toute sa hideuse sécheresse le matérialisme lourd, diffus, inintelligible de cette coterie d’Holbach, une des plus nulles en talent, et des plus pernicieuses en doctrines, qui aient influé sur le sort du monde. Certainement, le Curé Meslier ne se revoltait pas sans raison contre l’immortalité ; il ne pouvait pas même ambitionner celle d’Erostrate. Je me proposais d’en citer quelque chose ; mais la plume m’est tombée des mains, moins encore de dégoût et d’indignation que d’ennui."

Je laisse pour compte de M. Nodier cette déclamation contre le Curé Meslier et ses oeuvres, contre les Encyclopédistes et le matérialisme. On ne peut pas attendre d’un croyant qu’il fasse grand cas des œuvres de penseurs de la trempe de notre ami le curé. Mais je constate, par cette tirade, ainsi que par tout ce que la foule innombrable des biographes ennemis a dit de désobligeant pour l’auteur et de défavorable pour ses œuvres, que pas un d’eux n’a jamais démenti les éloges de probité, de simplicité, de désintéressement, de sobriété et de charité, que font de lui les libres penseurs du XVIIIe siècle.

Il existe de la main du Curé Meslier, outre le Testament et les annotations du Traité de Fénélon :

1o. Une liasse de Prônes manuscrits, "que nous avons vus dans la bibliothèque de St. Martin de Laon ; ils sont parsemés de traits hardis ; du reste, ce sont des instructions ordinaires, écrites d’un style rude et incorrect[18]."

2o. La Traduction du Cantique des Cantiques, trouvée dans ses papiers, Manuscrit curieux[19].

Sous le règne de la Convention, le 17 Novembre 1793, Anacharsis Clootz[20], le fougeux démocrate matérialiste, proposa d’ériger une statue à Meslier, qu’il nomma l’Intrépide, le Généreux, l’Exemplaire, comme au premier prêtre qui avait abjuré les idées religieuses ; la proposition fut renvoyée au comité d’instruction publique, mais on ne lui donna pas de suite.




Il parait que l’Histoire du Testament laissé par le vénérable curé d’Etrépigny, bien que très-populaire en Champagne, eut de la peine à percer jusqu’à Paris, et à y faire quelque sensation. Ce fut Thiériot qui le premier parla de Meslier à

Voltaire[21] ; celui-ci n’attacha d’abord aucune importance à cette communication ; vingt-sept ans après seulement, il se décida à publier un extrait de la première partie du fameux Testament, le courage ou la franchise lui manquant pour rendre en peu de mots ce que, dans la seconde partie, l’humble curé, dont il sauva le nom de l’oubli, avait démontré largement et distinctement et ce que lui n’a jamais osé avouer. L’extrait de Voltaire parut au commencement de 1762, avec la date de 1742, sous le titre de "Sentiments du Curé Meslier[22]" ; il formait 63 pages in-8o . Six mois après, cette édition étant epuisée, Voltaire en fit tirer une seconde, de 64 pages in-8o , à cinq mille exemplaires, qu’il fit précéder d’un avant-propos de sa façon.

On trouve l’Extrait du Testament du Curé Meslier dans l’Évangile de la Raison,[23] 1766 in-8o  et 1768 in-18o ; il figure également dans le Recueil nécessaire, Londres (Paris) 1768, 2 vol. in-12o, tome II, p. 209–300 ; Naigeon l’a fait imprimer en 1791 dans l’Encyclopédie méthodique[24]. Il fut joint pour la première fois aux œuvres de Voltaire dans une édition in-12o, publiée en 1817. M. Beuchot l’a reproduit dans l’édition qu’il a donnée en 1830.[25] De nombreuses réimpressions ont été faites depuis, surtout de 1828 à 1835, presque toutes imprimées sur du papier d’une qualité très inférieure. Les éditeurs ont généralement ajouté l’extrait de Voltaire à la suite d’un autre extrait du Testament, fait par le Baron d’Holbach, sous le titre de "Bon Sens du Curé Meslier, et publié pour la première fois en 1772, chez M. Rey à Amsterdam, in-12o." En 1789, parut le Catéchisme du Curé Meslier, de la main de Sylvain Maréchal[26]. L’Extrait du Testament de J. Meslier fut, par arrêt du parlement de Paris, condamné à être brûlé et, par decret du 8 Février 1775, la cour de Rome le mit à l’index. La destruction du Bon Sens du Curé Meslier, pour cause d’Outrage à la morale publique et religieuse, fut ordonnée : 1o. par jugement du tribunal correctionnel de la Seine, du 20 Août 1824 ; 2o. par arrêt de la cour d’assises du Nord, du 22 février 1835 ; 3o. par arrêt de la cour royale de Douai, du 1er Septembre 1837 ; et 4o. par arrêt de la cour d’assises de la Vienne, du 12 Décembre 1838.




Malgré les cent copies manuscrites du Testament du Curé Meslier, qui existaient à Paris vers la fin du XVIIIe siècle, malgré les trois extraits que Voltaire, d’Holbach et S. Maréchal en avaient fait et dont plusieurs éditions avaient été successivement mises en vente, l’ouvrage original, manquant d’éditeur, commençait à devenir de plus en plus rare, lorsque le hasard me fit trouver chez un antiquaire de la Hollande un exemplaire du précieux document. Cette trouvaille fut pour moi une bonne fortune, et, bien que les publications rationalistes que j’avais faites jusqu’à ce jour m’eussent causé des pertes considérables et eussent exércé sur mon commerce une influence des plus funestes, je résolus immédiatement d’exécuter la volonté du vénérable défunt, et de publier, bien qu’un peu tard, le Testament qu’il avait laissé. Cependant, comme le passé m’avait appris d’une manière si onéreuse, qu’en fait de secours je n’avais rien à attendre de cette foule insouciante qui a l’impudence de s’arroger le titre honorifique de Libre-penseur, et qui ne sait que battre des mains au spectacle d’un apôtre de la vérité qui sacrifie infructueusement sa vie et ses biens pour procurer aux enfants de ces mêmes insouciants un avenir plus radieux, une existence plus normale, et que mes calculs me prouvaient que dans l’intéret de ma cause, je devais permettre à ma prudence de brider mon enthousiasme tant que mes moyens ne me permettraient pas de lui laisser un libre cours, je résolus de publier l’ouvrage de façon à ce que, même sans la moindre marque de sympathie et malgré l’antipathie la plus active, je pusse l’achever sans achever en même temps ma ruine. C’est à cette considération qu’on doit le prospectus que je lançai au 1er  Septembre 1860, peu de temps après que la copie-manuscrite fût tombée en ma possession. Voici ce qu’après avoir donné une rapide esquisse de la vie de Meslier et des extraits de son oeuvre, publiés par Voltaire et par d’Holbach, je disais dans ce prospectus et ce que je ne crois pas hors de saison de répéter ici.

"Un siècle à peu près s’est écoulé depuis que Voltaire a révélé au monde l’existence de l’auteur, et celle de son œuvre. L’humble curé de village, immortalisé par cette volonté toute-puissante, a atteint les dimensions d’un athlète de première force. Son nom, vénéré par tout ce qui pense, abhorré par tout ce qui croit, est connu jusqu’aux recoins les plus obscurs, jusqu’aux confins les plus éloignes du monde civilisé. Les deux extraits de son œuvre, anathématisés par les Christicoles, le second supprimé et confisqué même par les Tyrans, sont lus avidement… et le manuscrit, le précieux Testament, écrit de sa main, est encore là dans sa demi-obscurité, sans avoir trouvé un éditeur, — au risque de devenir un jour pour les savants et les érudits un sujet de discussion et de recherches laborieuses, afin de déterminer s’il a réellement existé, ou bien si le Curé Meslier n’a été qu’un prête-nom à Voltaire et à d’Holbach.

Parmi les causes de cette négligence des éditeurs, on peut mettre sur la première ligne la peur des poursuites qu’avait subies l’extrait du baron d’Holbach, et qui ne manqueraient pas d’être renouvelées d’une manière plus acharnée encore à la publication de l’œuvre originale. Aussi, est-il naïf dans ses raisonnemens, le bon curé d’Étrépigny. Il dit tout bonnement tout ce qu’il pense, et encore le dit-il comme il le pense, simplement, crûment même, sans se soucier de l’impression que produiront ses paroles. Il ne serait donc pas étonnant, que les gouvernements et les sacerdoces, jaloux de leur monopole de la vérité, pussent bien encore ne pas trouver à leur gré la publication d’un pareil écrit, et en témoigner leur dépit au malencontreux éditeur, d’une manière par trop significative. C’est pourquoi j’absous pleinement tous ceux qui ont eu une copie du manuscrit en leur possession, et qui n’ont pas osé le publier ; mais je ne m’absoudrais jamais moi-même, si, une fois que j’en tiens une copie manuscrite, vivant dans un pays libre, étant éditeur par dessus le marché, j’avais la lâcheté de ne pas la publier. Je la publie donc et je la publierai jusqu’au bout, dussé-je n’en vendre pas un seul exemplaire. — Je la terminerai comme j’ai terminé la "France Mystique", qui elle aussi courait risque d’être perdue à jamais.

Je sais d’avance que des milliers de croyants crieront au scandale, quand ils apprendront ce nouvel acte de témérité de ma part ; mais que me fait le mépris de tout un monde, si je marche dans la route, que m’a tracée mon amour de la justice et de la vérité ? Je reconnais à chacun le droit de dire son opinion, je sais respecter toutes les convictions, c’est pourquoi je prétends avoir le droit de dire tout ce que je pense, c’est pourquoi je demande voix au chapitre pour l’honnête curé d’Étrépigny. Loin de vouloir prôner mon auteur, comme arbitre souverain de la vérité, je ne demande pour lui que l’attention respectueuse que réclame et que mérite tout penseur sérieux. S’il a tort, qu’on le réfute, moi-même j’ai trouvé dans son ouvrage des endroits que je pense réfuter ; mais s’il a raison, — quelle que soit la clarté de la lumière, qui émane de ses écrits, qu’on ne craigne pas alors de la mettre en évidence, et de reconnaître, en face d’un monde hostile, que cette lumière — c’est la vérité.

Vous savez donc maintenant ce que c’est que le testament du curé meslier, mais il me reste encore à vous parler de mon édition.

Je vais reproduire consciencieusement le manuscrit en ma possession, sans altération aucune dans l’orthographe ou dans le style, sans autre correction même que celle des fautes qui ne peuvent être imputées qu’aux copistes.

L’ouvrage paraîtra en livraisons de 12 feuilles environ, formulant chacune un demi-volume. La première livraison paraîtra dans le courant de l’année 1861. Tant que le nombre des souscripteurs ne sera pas assez élevé pour couvrir les frais de publication, les livraisons paraîtront de six mois en six mois ; mais aussitôt que ce chiffre sera atteint, elles se suivront avec autant de célérité qu’une impression soignée peut le permettre."

Quatre années se sont écoulées depuis que ces lignes furent écrites, la publication du Testament a continué sans interruption, bien qu’ait eu lieu ce que j’avais prévu et que le petit nombre de libéraux, qui m’ont prouvé leur sympathie en me prêtant l’appui de leur souscription, ne m’ait pas permis d’accélérer la mise en vente des livraisons au delà du semestre d’intervalle que d’avance j’avais fixé tant que la publication continuerait d’être un nouveau sacrifice à apporter au progrès. L’amour de la vérité et de la justice ne m’a pas abandonné, la conviction et le courage ne m’ont pas fait défaut, la vie m’a été épargnée, et j’ai maintenant la douce satisfaction, que, grâce à tout cela, le monument le plus précieux du bon sens français avant le temps des Encyclopédistes, a été mis au jour d’une manière durable, — que l’impression du Testament du Curé Meslier a été terminée par mes soins, et que par-là j’ai conservé à l’Histoire de la pensée humaine un document non moins précieux, que ne l’est la célèbre France mystique de mon ami erdan, dont j’ai publié précédemment une nouvelle édition.

Pour ce qui regarde l’édition de l’oeuvre éminente que je livre actuellement à la publicité, — j’ai fait ce que j’ai pu pour la rendre telle que je l’avais promise. Mainte heure de sommeil a été sacrifié à la correction des épreuves, chaque fois que les occupations journalières de ma profession ne pouvaient m’accorder le temps nécessaire pour m’en occuper. Très souvent aussi, la correction s’est faite au milieu de ces occupations, et si un certain nombre d’erreurs défigurent encore mon édition, c’est aux nombreuses interruptions imposées par les affaires, qu’on doit les imputer. J’aurais aimé faire mieux, mais une idée me console, c’est que, dans les circonstances données, je n’aie pas fait pis. La tâche que je m’étais imposée, n’était d’ailleurs pas des plus faciles ; je m’étais engagé à conserver toute l’originalité du style et le caractère de l’orthographe de mon auteur, à ne corriger que les fautes de ses copistes. Or, l’orthographe n’étant pas régulière et les fautes des copistes étant par-là très difficiles à reconnaître, il m’a souvent fallu beaucoup réfléchir avant de me permettre la moindre correction. J’avoue volontiers qu’au début surtout j’ai été un peu trop scrupuleux peut-être, craignant quelquefois de rétablir un nom propre évidemment erronné ou respectant en général une ponctuation extrêmement négligée, qui pour sûr ne pouvait être du fait de l’auteur, mais qui devait plutôt être attribuée à la nonchalance du copiste ; qu’on me pardonne ce scrupule, il est dû à mon respect de la forme choisie par le profond penseur dont j’ai le bonheur de reproduire l’œuvre.

Une seule chose me reste encore à faire, un seul engagement à remplir. J’ai dit dans mon prospectus que, tout en souscrivant généralement aux raisonnements du Curé Meslier, je ne désirais pas prôner mon auteur comme arbitre souverain de la vérité, mais que moi-même j’avais trouvé dans son ouvrage des endroits que je pensais réfuter ; je ne veux pas terminer cette préface avant d’avoir éclairci ces paroles.

Si en général on doit considérer l’homme et ses œuvres comme le produit de leur temps et du cercle d’idées au milieu duquel ils se sont développés, Meslier et son Testament demandent spécialement à être jugés de ce point de vue. Les isoler serait une acte d’injustice, si ce n’est de démence.

Meslier fut fait curé au temps des dragonnades, six ans après que Louis XIV eût rendu son fameux édit contre les magiciens, et trois ans après l’infâme révocation de l’édit de Nantes par le même monarque. Jeune, il avait pris des engagements dont il ne connaissait pas la portée ; depuis ce temps, il était resté cloué pour sa vie au bagne du monde intellectuel ; il avait dû cesser d’être homme pour ne devenir que machine ; ses actions, ses paroles, ses pensées ne lui apartenaient plus ; — l’Église, le droit du plus fort par le mensonge et l’hypocrisie, avait à vivre en lui, à parler de lui, à agir par lui ; sa conscience ? — il était sommé de ne connaître que la volonté de ses supérieurs ! sa volonté ? — la volonté de ses supérieurs ! ses amours, ses amitiés, ses aspirations, ses sentimens généreux, son intelligence ? — la volonté de ses supérieurs ! — tout était là ; il était rivé sur le banc des condamnés à perpétuité. Malheur à lui si, au contact de l’avilissement, sa conscience avait éclaté ; malheur à lui si, en face de l’opprobre, sa bouche avait dénoncé sa pensée secrète ; malheur à lui si, au moment de la souillure, son cœur avait repoussé l’obéissance aveugle ! Honnête, noble, sublime, il avait souvent à flétrir ce qui est honnête, noble et sublime ; juste, il avait à fouler aux pieds la justice ; véridique, il avait à prôner le mensonge, — ses supérieurs étaient là pour le tancer, pour l’humilier, pour le briser, s’il avait osé un instant oublier en public qu’il n’était que leur créature, et portait leur stygmate. Mais alors si, au milieu de la tyrannie et de l’injustice, au milieu du mensonge et de l’hypocrisie, dont il est victime s’il refuse d’en être complice, son cœur s’enflamme et qu’un cri d’indignation et d’angoisse, refoulé dans sa poitrine durant de longues années, se fasse jour enfin dans son souffle suprême, oh ! n’allez pas alors lui reprocher ce cri si long-temps refoulé. Et si les paroles de son Testament sont âpres et rudes, et si les pensées qu’il y énonce sont sauvages et cruelles, n’allez pas les mesurer d’après vos pensées et vos paroles et lui imputer comme un forfait ou une ignominie, ce qui n’est que l’écho fidèle des forfaits et de l’ignominie des autres, qui ont déchiré son âme de juste, et qui en ont chassé la sérénité pour y porter le délire.

Bonheur à vous si du fond du cœur vous n’avez jamais senti s’éveiller que des pensées douces et suaves, pleines d’amour et de pardon, parce que vous n’avez jamais connu l’esclavage de l’esprit sous la main despotique du prêtre ou du législateur ; mille fois bonheur à vous si, après la lutte contre le mensonge et la tyranie, vous avez su dominer votre esprit et recouvrer la sérénité de votre âme au point de pouvoir aimer et pardonner de nouveau, de ce divin amour, de ce sublime pardon du juste éprouvé. Vous tous dont le calme ne s’est jamais démenti, et vous surtout dont la sérénité est comme le couronnement de la lutte, vous saurez pardonner la véhémence de l’homme qui essaie en vain de briser le joug qui l’oppresse, vous saurez comprendre l’indignation bouillante du juste aux prises avec une carrière qui le dégrade à ses yeux, avec une destinée qui lui impose la prostitution de la pensée et l’avilissement du cœur.

Et vous qui voudriez jeter la pierre au lutteur que l’indignation aveugle, gardez-vous de l’insulter. Commencez par le comprendre avant de lever la pierre, qui pourrait retomber sur vous ; car l’insulte une fois lancée, témoignerait du froid qui règne en votre cœur et de l’absence chez vous de cet amour de la justice et de la vérité qui engendre les justes colères, mais que parfois une impuissante indignation porte aux âpres paroles et aux pensées sauvages et cruelles.

N’allez pas croire cependant qu’en défendant la cause de l’homme, je veuille par là sanctionner ses arrêts, prononcés dans un moment d’indignation délirante. Non, je condamne avec vous ses jugements partiaux, ses pensées cruelles ; je regrette avec vous que son indignation l’ait porté à parler de Jésus le Nazaréen comme d’un misérable pendard et à exalter le régicide. Moi qui jouis d’une liberté complète de dire tout ce que je pense et chez qui l’indignation par conséquent ne va pas jusqu’à la fureur, à l’aveuglement et à la partialité, — je puis et je dois blâmer l’injustice de l’insulte et l’excès de la passion chez le Curé d’Étrépigny, mais en comprenant les causes de son égarement et en pardonnant des fautes involontaires qui en ont été les résultats. Défendre et pardonner Meslier, l’honnête prêtre exaspéré, c’est faire acte de justice ; me taire lorsqu’il s’oublie et qu’il devient injuste à force de souffrance et d’indignation ce serait manquer au devoir.

Meslier a tort, grand tort, d’insulter la mémoire du Dieu incarné des Chrétiens, en parlant de lui comme d’un "misérable pendard." Je ne crois pas, il est vrai, à l’existence corporelle d’un Jésus dit le Christ ; c’est-à-dire que le résultat de mes recherches sur ce sujet a été : que plusieurs traits historiques de différentes personnes, que des paroles de différents penseurs et que des légendes indiennes, élaborées par un ou plusieurs auteurs, pénétrés des théories philosophiques de leur siècle et des dogmes de leur entourage, ont servi à former ce type que les Chrétiens nomment Jésus le Christ. Mais à part quelques côtés accessoires assez faibles, je trouve que le type a réellement de la majesté. — Je ne suis pas de ceux qui prononcent avec mépris les noms de Zoroastre, de Kong-Fou-Tseu, de Bouddha, de Jésus. Mais supposons même pour un instant que le prophète de Nazareth, dont les Evangiles des Chrétiens contiennent l’histoire, ait véritablement existé et qu’en effet il ait été crucifié, sa mort ne jetterait aucune ignominie sur sa vie, et l’œuvre humanitaire qu’il aurait rêvé élèverait le fanatique au rang des bienfaiteurs de l’humanité. Il n’est pas à contester que, sa vie ne nous étant connue que par des opuscules peu authentiques et rédigés longtemps après la date assignée à sa mort, — tous les écrits anti-chrétiens des premiers siècles de notre ère ayant été soigneusement détruits, — la biographie que nous possédons n’a aucune valeur historique, et que même en acceptant l’existence réelle du héros, elle ne nous offre qu’un tableau très-incomplet et très-partial de ses mœurs et de ses actions. Mais l’absence de documents contemporains, reconnus indubitablement authentiques, la perte d’écrits contradictoires que nous savons avoir existé, ne nous donnent pas le droit d’insulter un homme, auquel nous ne pouvons imputer avec certitude, ni crimes, ni vices, ni méchanceté, ni mauvaise foi ; un homme qui après tout ne pourait être responsable des crimes commis en son nom, de la dépravation des prêtres et de l’effet démoralisateur des dogmes d’un culte qu’il n’a pas même institué.

Pour ce qui regarde le régicide, tout républicain que je suis, je suis loin de partager les idées de Meslier à ce sujet.

Je ne regrette pas, comme lui, le temps des Jacques Clément et des Ravaillac, parce que j’ai en horreur le meurtre, et que je déteste tout acte de violence sauvage et barbare. Sanctionner le meurtre du tyran le plus sanguinaire, de même que sanctionner l’acte du juge qui signe l’arrêt de mort du meurtrier, ce serait pousser à la démoralisation de l’homme, ce serait travailler à la retrogradation du progrès. La civilisation demande de l’homme qu’il s’éloigne toujours de plus en plus de son état primitif de bête féroce et qu’au lieu de continuer à détruire, il s’humanise graduellement en apprenant à conserver et à produire. L’instinct du bipède pousse à l’animosité, à la rancune, à la vengeance ; la raison de l’homme se manifeste par l’amour fraternel, le pardon, l’assistance. Nous tous, tant que nous sommes, nous tenons encore du bipède par l’instinct, presqu’autant que nous nous développons à l’état d’homme par la raison. La raison, c’est l’instinct perfectionné au moyen des organes de la pensée et de la parole ; l’homme c’est le bipède parvenu à un degré supérieur de développement, parvenu à l’état d’Etre conscient. Tout acte qui se fait spontanément est un acte instinctif, comme tout acte qui est le résultat d’un choix fait après délibération sur les effets à attendre des causes à produire, est un acte raisonnable. L’ivrognerie qui abrutit, la passion qui aveugle, la colère qui paralyse la raison replongent momentanément l’homme en plein état de bipède, et c’est dans cet état que l’être humain redevient sanguinaire, en même temps qu’il cesse d’être responsable de ses actions.

RUDOLF CHARLES.
(R. C D’ABLAING VAN GIESSENBURG).




    nom de Légion vandale ; il publia un petit traité intitulé République universelle, et se déclara hautement l’ennemi personnel de Jésus-Christ. Clootz aurait été un excellent apôtre du progrès, si malheureusement ce caractère fougeux n’avait eu à se développer dans un centre d’idées exaltées et de haines farouches tel que dut l’être Paris dans les années qui précédèrent la grande révolution et à se manifester au millieu de l’agition fiévreuse d’un cataclysme social. Il ne fut alors qu’un fanatique pétulant, ridicule, parfois coupable, par un amour aveugle de la justice ; il eût été un tiran cruel à force de principes humanitaires, s’il eût eu à gouverner. Malgré tous ses défauts, Clootz est cependant une de ces grandes figures, de ces hommes d’une pièce, qui ne se développent que par exception et qui sont le produit de puissantes influences extérieures agissant sur des constitutions d’élite. Sa mort rachète une grande partie des extravagances de sa vie. Au moment suprême, il montra ce qu’il valait, il sut être sublime Arrêté comme hébertiste et traduit devant le tribunal révolutionnaire avec Hébert, Montmoro, Ronsin et douze autres, il fut condamné à mort, avec ses compagnons. "À l’exception de Marie-Anne Latreille, femme Quétineau, qui déclara être enceinte et obtint un sursis, ils furent tous immédiatement exécutés, le 4 Germinal, an II (23 Mars 1794). En allant au supplice, Clootz prêchait le matérialisme à Hébert ; il voulut même être exécuté le dernier, afin, disait-il, d’avoir le temps de constater certains principes, pendant que l’on ferait tomber les têtes des autres condamnés. Il mourut avec beaucoup de courage ; on assure qu’au moment suprême il en appela au genre humain du supplice injuste qu’il allait subir. (Dufey, de l’Yonne)"

  1. Voir Voltaire, "la Vie de J. Meslier" ; Bouilliot. Biographie ardennaise ; Quérard. Superchéries littéraires ; Michaud. Biographie universelle ; S. Maréchal. Dictionnaire des Athées ; Lalande. Supplément au Dictionnaire des Athées ; Encyclopédie méthodique de Panckoucke, philosophie t. III ; Dictionnaire de la Conversation et de la Lecture ; Chaudon et Delandine. Nouveau Dict. historique. etc. etc. etc.
  2. Il signait cependant Meslier. — Bouilliot.
  3. Mazerny, dernier village (nord) du Canton de Tourteron, arrondissement de Vouziers, département des Ardennes, est situé sur la route de Paris à Stenay par Pierrepont, aux sources d’une petite rivière, qui se jette dans l’Aisne à Attigny.
  4. Voltaire.
  5. Bouilliot.
  6. Bouilliot.
  7. Étrépigny est à deux lieues de Mazerny, au canton de Flize, arrondissement de Mézières, département des Ardennes, à une demi-lieue à droite de la nouvelle route de Mézières à Sedan.
  8. But ou Butz, village du même canton que le précédent, à une lieue et demie du chef-lieu, est situé à la naissance d’un ruisseau qui se jette dans la Meuse à Flize. La forêt de Mazarin couvre au sud Étrépigny et But. Entre ces deux villages, on trouve celui de Balèvre. — Le bon sens du Curé Meslier. Bruxelles in-12.
  9. Voltaire a tort en parlant ici de Butz comme de la succursale d’Étrépigny ; c’était Balaives ; Butz étant alors la succursale de Villers-le-Tilleul. — Bouilliot.
  10. Biographie générale, pages 144–146.
  11. Varq est à une lieue de Mézières et à deux lieues d’Étrépigny.
  12. Boulzicourt n’est qu’à trois quarts de lieue d’Étrépigny.
  13. Voltaire nomme ce seigneur, Antoine de Touilly.
  14. Voltaire prétend que le Curé Meslier ne mourut qu’en 1733. J’ai maintenu cette date sur le titre du présent ouvrage, comme le plus généralement acceptée. — R. C.
  15. Renseignements pris sur les lieux par M. l’Eguy, général de l’ordre de Prémontré.
  16. La Bibliothèque de l’Arsenal en possède deux, sous les No. 129 et 130.
  17. Ch. Nodier, Mélanges tirés d’une petite bibliothèque ou variétés littéraires et philosophiques. 1829, pages 178–182.
  18. Bouilliot, Biographie Ardennaise.
  19. Catalogue de Boutdurlin No 1918. Paris 1805, in-8o.
  20. Jean Baptiste de Clootz, baron prussien, naquit à Clèves, le 24 Juin 1755. Il était neveu du savant Chanoine Cornelius Paw, qu’il paraît avoir voulu surpasser par la hardiesse et l’originalité de ses plans de réformation universelle. Devenu, jeune encore, maître d’une fortune considérable, il parcourut successivement l’Allemagne, l’Italie, et l’Angleterre. À Londres, il se lia intimement avec Ed. Burke, un des chefs de l’opposition parlementaire. De retour en France, (où il avait fait ses études) au commencement de la revolution de 1789, il changea ses prénoms contre celui d’Anacharsis et ne tarda pas à se faire remarquer par ses idées republicaines, et par les diverses pétitions que sous le titre d’Orateur du genre humain, il adressait à l’assemblée constituante. Il figura dans l’immense cortège de la fédération de 1790, avec la députation du genre humain, qu’il avait organisée. Il vota la mort de Louis XVI, au nom du genre humain, il fit l’éloge d’Ankerström, et demanda qu’on mît à prix la tête du roi de Prusse ; il offrit de lever à ses frais une légion prussienne, qui prendrait le
  21. Lettre du 30 Novembre 1735.
  22. Barbier, Diction. des livres anonymes et pseudonymes.
  23. Sous la direction de Voltaire selon les uns et de l’abbé du Laurens selon les autres.
  24. Philosophie. Tome III, p. 218.
  25. Tome XL, p. 390.
  26. Voir le Dictionnaire des honnêtes gens. in-12o. Paris 1791, pag. 73 et 126.