Le Voyage des princes fortunez de Beroalde/En faveur du Sr de Beroalde

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EN FAVEUR DV

SR DE BEROALDE.



SOrtez des monumens, Philoſophes antiques,
Qui giſez endormis ſous le faix du tombeau,
Ouurez vos yeux aux rais de cet aſtre nouueau,
Qui comme un beau ſoleil eſclaire à uos reliques.


Admirable flambeau qui parmi la nuict ſombre,
De uos uieilles erreurs, eſclaire à nos eſprits,
Et perçant le broüillas qui couure uos eſcrits
Tire un iour d'une nuict, la lumiere de l'ombre.


Sous le silence obſcur des choſes retenues,
Que le temps reſeruoit à la posterité,
Paroiſſent aux rayons de la belle clarté,
Comme aux rais du ſoleil les choses ſont cognues.


Fleur ſur le printemps de ſa ſaison premiere,
Plus de flammeux rayons, que uous en uoſtre eſté,
Et au point de son iour, plus de uiue clarté
Qu'au midy de uos ans uous n'auiez de lumiere.


Dans l’abiſme profond des œuures de Nature,
Vos yeux bien que ſubtils, se trouuoient empeſchés.
Mais les points plus ſecrets qui uous eſtoient cachez.
Les deſtins les gardoient pour ſa gloire future.


Tous les traits plus parfais de la Philoſophie.
De uostre âge ignorez, ou du noſtre oubliez ;
En ce ſiecle par luy, ſont au iour publiez,
ſiecle qui d’un tel bien sur uöus ſe glorifie.


O ! des uieux temps l’enuie, & du noſtre la gloire ;
Les delices du ciel, du monde l’ornement,
Eſprit dont la grandeur excede infiniment
L’eſpoir de l’auenir, du paſsé la memoire :


Vous deuiez luire au ciel, non parmi la pouſſiere
Naiſtre comme une fleur en ces terreſtres lieux,
La terre y euſt perdu, mais il ualloit bien mieux,
La terre eſtre ſans fleur, que le ciel ſans lumiere.


N. Chavvet, Blaiſois.