Manuel-Roret du relieur/II-VIII

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CHAPITRE VIII

Reliures diverses.


§ 1. — reliure dite arraphique.

Tandis que de nombreux et importants perfectionnements ont successivement amélioré plusieurs branches de la reliure, la partie spécialement relative à la réunion des feuilles, à la confection du dos et à l’ouverture des livres et des registres, est restée stationnaire. En effet, dans la reliure, même la mieux soignée, les livres et les registres, en s’ouvrant, forment une sorte de gouttière au milieu, et ont besoin d’être fortement retenus pour rester ouverts. Cela provient de ce que jusqu’à présent les feuilles étant réunies par cahiers, il faut de toute nécessité les coudre ensemble. Ces cahiers étant réunis entre eux et attachés au dos du livre, empêchent celui-ci de s’ouvrir.

Par la nouvelle méthode proposée, tous ces inconvénients disparaissent, puisque les livres et les registres, même les plus épais et du plus grand format s’ouvrent sur une surface tellement plane, que l’on peut écrire sur un grand livre d’un côté à l’autre avec autant de facilité que l’on écrirait sur une simple feuille. On conçoit, en effet, que chaque feuille étant réunie séparément une à une, on obtient un seul plan pour les deux pages, et comme le dos est fait sans fil ni couture, on évite la gouttière formée par la marge intérieure de toute espèce de livres ou de registres reliés d’après l’ancien système.

Ce procédé de reliure convient, d’après l’inventeur, aux albums de dessins, aux atlas de géographie ou à ceux qui accompagnent des volumes, aux volumes ou aux partitions de musique, enfin aux collections de lettres, de journaux, de manuscrits, même en feuillets séparés, qui n’auraient pas de marges intérieures, et à tous les documents qu’il faudrait rogner pour les relier d’après la méthode ordinaire.

La matière employée a, en outre, l’avantage de détruire les insectes produits par l’humidité et les changements de température, bien différente en cela de la colle, qui engendre les vers. Dans les latitudes les plus élevées, on parvient ainsi, suivant l’inventeur, à préserver les registres et les livres des ravages auxquels ils sont sujets. Enfin, les changements de température n’ayant aucun effet sur cette matière, on ne craindra pas de déformer un livre en lisant près du feu.

Dans ce mode de reliure, les feuillets ne sont pas réunis par cahiers au moyen d’une couture appropriée, suivant la reliure ordinaire ; ils sont collés l’un à l’autre par la tranche à l’aide d’une dissolution de gomme élastique ou caoutchouc, on en forme une couche fort tenace et assez épaisse par des applications successives.

On conçoit dès lors que les deux feuillets ainsi collés ne forment aucune gouttière et s’étendent à volonté sur une surface plane. On conçoit aussi que la matière agglutineuse ne soit pas du tout susceptible d’engendrer des insectes et des vers.

On conçoit également que cette méthode est excellente pour relier ainsi des cartes ou des gravures, qu’elle a le grand avantage de ne pas exiger qu’on les unisse par cahiers au moyen d’un surjet, que la marge se conserve, de cette façon, bien large, bien nette, et que toutes les tranches étant bien saisies par la matière agglutinative, il y a en même temps solidité, propreté, élasticité complètes.

Mais il se présente une importante difficulté quand il s’agit d’appliquer le procédé arraphique à un livre ordinaire. En effet, les feuilles dont il devra se composer, sont pliées en cahiers, et ce sont ces cahiers qu’il faut réunir par la gomme élastique. Il est clair qu’alors le centre du cahier ne serait pas fixé ou le serait du moins d’une manière très-imparfaite. Pour obvier à ce grave inconvénient, il n’est qu’une ressource qui est elle-même une sujétion et un nouvel inconvénient. En effet, il est indispensable de couper la feuille d’impression en feuillets pour réunir ceux-ci deux à deux à l’aide du caoutchouc, tenu en dissolution. Or, cette disposition qui oblige à mettre ainsi les feuilles en morceaux, a quelque chose d’étrange et d’extrêmement désagréable, quoiqu’en définitive dans la reliure ordinaire, la feuille soit bien coupée forcément sur toutes les tranches, excepté celle qui est cousue, et qu’il importe peu qu’elle soit aussi coupée sur cette tranche s’il est, impossible de le soupçonner, et si ce sacrifice ajoute à la solidité et à l’agrément de la reliure.

Les procédés à l’aide desquels on dissout le caoutchouc sont trop connus pour qu’il soit nécessaire de les décrire ici. Nous terminerons donc en disant que le froid doit donner une espèce de raideur aux reliures arraphiques, ainsi qu’il rend raides et dures toutes les préparations en gomme élastique. Nous ajouterons enfin qu’un livre relié par cette méthode, d’ailleurs assez ingénieuse, ne peut plus être relié par les anciens procédés, et que Lesné, si fort indigné contre Delorme, qui rognait les livres par le dos, et remplaçait la couture par la colle forte, aurait tonné contre la reliure arraphique, laquelle, quoiqu’en dise l’inventeur, est un véritable vandalisme et n’a été, que nous sachions, pratiquée par aucun relieur intelligent.

§ 2. — appareil de reliure, par m. girard, de bordeaux.

« La boîte en métal 1, fig. 105, peut être faite en toile mince ou tout autre métal ; sa profondeur est de 11 millimètres.

« Les deux coulisses 2 servent à presser les écrous en cuivre 6.

« Deux arbres ronds, en fer ou en cuivre 3, sont maintenus à leurs extrémités par un épaulement, et rivés à un trou pratiqué dans le bord de la boîte ; ils sont percés dans leur épaisseur d’une coulisse assez longue pour laisser mouvoir la bascule en fer qui les traverse et garnis chacun d’un ressort à pompe formé d’un fil en acier trempé. Ces deux ressorts servent de moteurs à tout la machine.

« Les deux bascules en fer 4 ont 1 millimètre d’épaisseur ; elles sont tenues à la boîte par les vis 5, et s’appuient en glissant à l’autre extrémité dans la rainure pratiquée sur les écrous 6.

« Les écrous 6 sont en cuivre ou épaulés carrément, de manière à entrer juste dans les coulisses 2, jusqu’à la face extérieure de la boîte ; une rainure y est aussi pratiquée pour recevoir le bec des bascules 4 ; les mêmes écrous reçoivent aussi les vis 22 et 23, fig. 106.

« Le ressort à paillette 7 est coudé carrément à son extrémité supérieure, de manière à former un mentonnet qui sort au dehors de la boîte par la mortaise 15, fig. 106. Il est aussi percé pour recevoir le pied-de-biche de la détente ; il est tenu à sa base, au corps de la boîte, par deux rivures.

« Le coulisseau 8 est sondé au bord de la boîte, et sert à empêcher la tête de la détente de dévier de sa mortaise.

« La détente 9 forme à sa base un pied-de-biche qui remplit juste la fente pratiquée dans le ressort à paillette où elle est tenue par son extrémité ; sa queue s’élève jusqu’à la surface du bord de la boîte où elle se termine par une tête carrée de la grandeur de l’intérieur du coulisseau.

« L’intérieur de la boite est parfaitement uni et d’équerre en tous sens ; il n’a qu’un seul rebord indiqué par 16.

« Le mentonnet 15 sert à agrafer la tringle mouvante 20, en entrant dans la mortaise 23.

« Le rebord extérieur 16 est adhérent à la boîte ; sa largeur est de 10 millimètres ; il est percé de deux trous pour recevoir les deux vis 19.

« La tringle en fer 17 a 9 millimètres de largeur ; elle est percée de sept trous dont neuf servent à la tenir au rebord 16, par le moyen des deux vis 19, et les autres servent à y fixer les cinq broches 18.

« Les broches 18 servent à coudre le papier ; elles sont percées sur le côté, à leur extrémité supérieure, de manière que les trous se trouvent placés horizontalement vis-à-vis l’un de l’autre, pour recevoir l’épingle 25 qui sert à clore le volume achevé.

« La tringle mouvante 20 est en fer plat et coudée d’équerre dans sa longueur ; elle a deux trous à sa partie supérieure, pour la fixer à la boite par les deux vis 22 qui se vissent dans l’écrou en cuivre 6. Le rebord intérieur de cette tringle est percé de cinq trous, dans lesquels passent les broches 18 ; les deux bouts 21 sont placés à ses extrémités pour servir à la soulever.

« Les six trous indiques par 24 sont ainsi pratiqués à chaque bord dans la longueur de la boite, et servent à coudre et à fixer le mécanisme entier au dos du livre.

« L’enveloppe du livre est conforme à celle des registres ordinaires, à l’exception que le dos intérieur est en bois mince et non en carton, et que les bords de la boîte à mécanisme s’y placent dans une rainure pratiquée à cet effet ; ladite boîte y est, en outre, cousue par les trous 24, à deux bandes en toile qui sont collées moitié sur le dos en bois, et moitié au carton qui forme la couverture.

« Pour se servir de cet appareil, il faut le placer, fermé sur une table, de manière que le dessous du livre soit en dessus, le dos devant soi, et e haut du livre à droite ; appuyant ensuite les deux pouces sur les extrémités du côté du dos, qui est en dessus, on place l’index de chaque main sous les deux bouts en cuivre de la tringle mouvante ; on élève ainsi ladite tringle jusqu’à ce qu’elle s’agrafe, par sa mortaise 23, au mentonnet du ressort à paillette 15. On relève ensuite devers soi la couverture de manière que le livre reste ouvert ; prenant le papier que l’on veut relier, on met le commencement de l’écriture en dessous et le haut à droite, et on place ainsi le bord dans l’espace qui se trouve entre le bout des broches 18 et le dessous de la tringle mouvante, en ayant soin d’en faire toucher le haut au talon du bout en cuivre de droite, afin que chaque papier soit toujours à la même hauteur. Pesant ensuite légèrement avec le pouce sur la tête de la détente 14, la tringle, chassée par les ressorts à pompe, descend alors avec force, entraînant avec elle le papier qu’elle coud, par le moyen des broches qui passent dans les cinq trous de ladite tringle.

« Plaçant ensuite le livre dans sa position naturelle, on peut numéroter l’écrit que l’on vient de coudre, et le classer au répertoire qui est au commencement dudit livre.

« On continue à l’occasion, comme il vient d’être expliqué, jusqu’à ce que le nombre de feuilles garnisse entièrement les broches. Pour clore alors le volume, il suffit d’agrafer la tringle mouvante, de passer dans les trous des broches l’épingle 23, de relever, sur le côté non couvert dudit volume, le deuxième côté de sa couverture qui, déjà, est placée la première dans les broches, et après l’avoir piquée par le bout des broches, en laissant libres les trous qui y sont placés, d’y passer de nouveau l’épingle 25, et tout est terminé pour un volume.

« Pour en recommencer un autre les tringles à broches, conformes à 17-18, seraient disposées à bien peu de frais, avec couverture et répertoire, et se replaceraient comme la première par les deux vis 19 ; ces nouveaux volumes se feraient comme le premier.

§ 3. — reliure mobile, par madame frichet.

Cette reliure, où tout le mécanisme se trouve dans le dos, permet de relier provisoirement toute espèce de recueils périodiques, journaux, musique, etc., et même des livres brochés ou réunion de gravures, qu’on voudrait lire ou feuilleter avant de les faire relier définitivement. On évitera ainsi le froissement de ces recueils, dont la couverture en simple papier n’offre jamais aux feuilles qui les composent un soutien capable d’empêcher qu’elles ne soient bientôt cassées ou chiffonnées.

Le dos se compose de deux baguettes en fer méplat : les angles du côté intérieur sont abattus en chanfrein, et diminuent d’autant, surtout vers le milieu, la largeur de la baguette, qui présente alors un angle ; ces deux baguettes retiennent ainsi plus facilement les feuillets qu’elles sont destinées à serrer ; l’action de ces baguettes sur le bord de ces feuillets en fait même relever un peu la partie, qui dépasse et va se loger dans le dos, de sorte que cette partie, en buttant contre les baguettes, donne une solidité de plus à la reliure en retenant davantage les feuillets qui composent le recueil. Les baguettes tiennent à chacune des deux feuilles de carton qui complètent la reliure par des toiles formant charnières, et collées sur le papier qui recouvre la baguette de fer, lequel papier est préparé de manière à pouvoir adhérer à ladite baguette ; ces toiles permettent ainsi aux baguettes d’avoir un mouvement qui produit le même effet qu’un dos brisé. La toile peut aisément se remplacer par du parchemin, de la peau, etc.

Chaque baguette est arrondie à ses extrémités, dont l’une porte un canon en cuivre fraisé dans toute sa longueur, et l’autre est percée d’un œil fraisé à demi-épaisseur pour recevoir le collet de la vis de pression ; cette vis sert à diminuer ou à augmenter l’écartement ou la largeur du dos, selon la nécessité imposée par la plus ou moins grande épaisseur du recueil qu’on veut introduire dans cette reliure. Toutefois, comme la longueur du canon pourrait être un obstacle à ce qu’on pût employer cette reliure pour des quantités peu considérables de feuillets, l’addition d’une ou de deux baguettes en bois, évidées de manière à pouvoir s’appuyer sur les baguettes en fer, vient remplir l’espace non occupé par les feuillets.

Pour garantir le dos des feuillets introduits, une bande de papier, de peau, etc., est collée il l’une des baguettes de fer ; elle vient rabattre sur le dos des feuillets, qu’elle garantit du frottement, et se trouve ainsi fixée par la même pression que celle qui agit sur les feuillets pour les retenir.

La tête des deux vis se trouve évidée pour l’introduction d’une clef destinée au service de pression ; ces évidements peuvent être remplacés par des trous, ainsi que cela se pratique aux têtes des compas.

La clef dont il est question est faite comme celles qui servent à ce dernier objet.

Les baguettes, ainsi que la couverture, les canons, les vis, etc., peuvent subir des modifications, soit dans le choix de la matière, soit dans leur coupe ou leurs entailles, selon les différentes applications de cette reliure qui peut s’appliquer à tous les formats de n’importe quel genre de publication imprimée, gravée, lithographiée et même aux manuscrits ; mais l’économie de l’invention sera toujours la même puisqu’elle réside dans l’emploi des baguettes, ainsi qu’il vient d’être dit, dans leur réunion par un canon traversé par une vis de pression, et dans l’assemblage de ces pièces à une couverture.

§ 4. — reliure de m. gaget.

Cette reliure se compose :

1o D’une suite de réglettes, dont on peut augmenter ou diminuer le nombre à volonté ;

2o De crampons, dont une partie, traversant la feuille qu’il s’agit de fixer, va s’accrocher dans les réglettes ;

3o De deux feuilles de carton fixées par une bande de toile, l’une à la réglette de tête et l’autre à la réglette de queue, et qui sont destinées à former couverture.

Des réglettes. — Toutes les réglettes s’adaptent l’une à l’autre sur leur longueur, au moyen d’une coulisse : chaque réglette porte avec elle, par conséquent et dans toute sa longueur, moins l’extrémité supérieure, d’un côté, une partie saillante dite la queue, et de l’autre côté une partie creuse dite la rainure. La queue, la rainure et la partie pleine, en tête de chaque réglette, sont disposées de telle façon que, si l’on glisse de bas en haut, la queue de la seconde réglette, dans la rainure de la première, et ainsi de suite jusqu’à la fin, toutes les réglettes se tiennent ensemble par leur largeur et butent l’une contre l’autre par le même bout, dans leur hauteur.

La partie droite et pleine, qui existe à l’extrémité supérieure de chaque réglette, est munie d’un crochet qui, se tournant à volonté pour s’engager d’une réglette dans l’autre, en commençant par la première, empêche les réglettes de se séparer, en glissant dans leur longueur de tête en bas.

Ces réglettes, ainsi réunies et assujetties de manière à ne pouvoir se déranger, si l’on ne tourne pas les crochets, forment le dos de la reliure mobile.

La réglette de tête n’a qu’une rainure et celle de queue qu’une queue ; ni l’une ni l’autre n’ont de crochets. La première réglette est fixée à celle de tête par une vis, et le crochet de la dernière réglette s’engage dans la réglette de queue au moyen d’une entaille pratiquée dans celle-ci.

Entailles des réglettes. — Toutes les réglettes moins celles de tête et de queue, ont, sur champ et dans la partie intérieure du dos qu’elles forment par leur réunion, une, deux ou trois entailles destinées à recevoir la partie saillante ou queue des crampons qui vont être décrits, Le nombre de ces entailles à chaque réglette est subordonné au nombre de crampons nécessaires pour fixer solidement chaque feuille au dos de la reliure, et le nombre de ces crampons dépend lui-même de la grandeur du format, dans lequel la reliure mobile peut être exécutée. Chaque entaille est faite en forme de queue d’aronde ; elle est garnie, d’un côté, d’une joue en métal fixée à demeure, et, de l’autre côté, d’un crochet mobile, de façon que la queue des crampons passés dans les feuilles, étant placée dans l’entaille et le crochet fermé, ces queues ne puissent plus sortir, même lorsque chaque réglette serait isolée.

Des crampons. — Chaque crampon, fait en métal ou autre matière résistante, est droit dans toute sa longueur, pour bien plaquer sur le pli des feuilles qu’il doit fixer. Il est armé au milieu, et d’un seul côté, d’une partie saillante, ou queue, découpée en queue d’aronde.

Cette partie, qui traverse les feuilles, est destinée à se loger dans les entailles ci-dessus décrites de chaque réglette.

De la couverture. — Une moitié de la couverture est attachée à la réglette de tête et l’autre moitié à la réglette de queue ; elle est faite dans la forme ordinaire des couvertures des livres.

Indications pour l’usage de la reliure. — Toutes les réglettes étant déplacées, moins la première, qui doit rester fixée à celle de tête, on pose devant les entailles de cette première réglette les feuilles qu’on veut fixer, et on les marque avec un poinçon ou la pointe d’un canif en face du milieu des entailles : on fait ceci de façon que la piqûre pénètre jusqu’au milieu du cahier. On ouvre ensuite les feuilles ou le cahier, puis on les perce dans le pli avec un canif, à l’endroit indiqué par la première piqûre, et l’on introduit dans cette couverture la partie saillante, ou queue des crampons.

On place enfin la queue des crampons dans les entailles des réglettes, puis, quand les entailles d’une réglette sont suffisamment remplies par la superposition des crampons, on ferme le crochet, qui empêche les queues des crampons de s’échapper, et l’on continue de procéder de même avec une seconde réglette et une troisième, selon le besoin, et d’après le nombre de feuilles ou cahiers qu’on veut fixer de suite.

En dernier lieu, et quand on n’a plus de feuilles à poser, on glisse, sur la dernière réglette employée, la réglette de queue, portant la seconde partie de la couverture, et l’on tourne les crochets de tête pour assujettir le tout ensemble.

Lorsqu’au lieu d’un cahier, ou d’une simple feuille, on n’a que des demi-feuilles, ou dos gravures à réunir, on fait à la première un onglet dans un sens, à la seconde un autre onglet en sens inverse, puis on met les deux onglets l’un dans l’autre, et l’on place ensuite le crampon dans le double pli, comme s’il s’agissait de deux feuilles entières mises l’une sur l’autre, ou d’un cahier plié in-4o.

Quand plusieurs réglettes sont réunies et portent des feuilles, on peut détacher l’une, d’elles et en ôter les feuilles, sans être obligé de tout démonter : pour ce faire, il suffit de tourner les deux crochets de tête qui lient la réglette à ôter avec les réglettes voisines de droite et de gauche, puis à faire glisser cette réglette dans sa longueur de haut en bas.

§ 5. — reluire des livres, par m. nickels.

Le mode dont il s’agit consiste dans l’emploi de la gutta-percha sous différents états, au lieu des matières dont on se sert ordinairement pour cet objet. Il y a cinq moyens différents de faire entrer la gutta-percha dans l’art du brocheur et dans celui du relieur.

1o On s’en sert en solution, au lieu de colle, pour réunir les feuilles des ouvrages imprimés, au lieu de coudre et endosser, en opérant comme on le fait déjà avec le caoutchouc. Pour cela, on coupe les feuilles en pages ou bien on impose par demi ou par quart de feuille ; on bat, on passe une râpe sur le dos, et l’on donne une ou plusieurs couches d’une solution de gutta-percha, en ajoutant, si cela est nécessaire, une bande de toile collée également à la gutta-percha, ou enfin opérant comme dans la reliure ordinaire.

La solution de gutta-percha est, dans la plupart des cas, appliquée chaude, et l’on n’ajoute une nouvelle couche que lorsque la précédente est sèche ou qu’on a interposé une substance.

2o On fait usage de la solution de gutta-percha au lieu de colle, de blanc d’œuf, de, gomme, etc., toutes les fois qu’on emploie ces dernières substances dans la reliure.

3o La solution de gutta-percha est également employée comme véhicule des couleurs, pour marbrer les tranches, colorer les couvertures, etc.

4o On se sert encore de la gutta-percha en feuilles, au lieu de vélin, basane, veau, toile, etc., dans la reliure des livres, en imprimant dessus des ornements ou en coulant une solution de cette substance sur des surfaces gravées en creux ou en relief. On peut aussi grainer les feuilles ou les étendre en une couche mince à l’état plastique sur des tissus, des matières quelconques, ou enfin en faire un enduit en la faisant dissoudre.

5o Enfin, on substitue au carton, pour relier et couvrir, des lames formées d’un mélange de gutta-percha et de pulpe de papier, de tontisse de laine, de coton ou de toute autre matière fibreuse.

Si l’on désire un degré de flexibilité un peu plus grand que celui que possède la gutta-percha, on peut y mélanger une petite quantité de caoutchouc dans la proportion d’une partie de ce dernier pour quatre de la première.

Nous n’avons pas besoin d’ajouter que le procédé de reliure du § 1 est aussi barbare que la reliure arraphique décrite plus haut et ne doit pas être pratiqué.

§ 6. — reliure de m. levys.

M. Levys a indiqué une reliure métallique, ou en partie métallique, et qui s’applique au livre, soit fixée comme les reliures ordinaires, soit indépendante du livre ; dans ce dernier cas, c’est une boîte dans laquelle on enferme le livre.

Les reliures métalliques ou en partie métalliques sont du reste fort anciennes, et elles sont appliquées encore aujourd’hui pour certains livres d’église ou de prières d’un haut prix, pour des registres, etc.

§ 7. — reliures mobiles de m. weber.

La mobilité de la reliure de M. Weber ne consiste que dans la disposition de certaines pièces de l’intérieur, toute la partie extérieure étant fixe et ayant l’avantage de pouvoir être assimilée, tant pour la forme que pour la solidité, aux reliures ordinaires.

On monte d’abord, sur les onglets d’un papier mince et nerveux, les feuilles simples et doubles que l’on veut collectionner, puis on les assemble et l’on serre la masse des onglets entre deux languettes placées à l’intérieur et contre le dos de la reliure. La première de ces languettes, taillée à gorge, est fixée à demeure ; la seconde, dont la face comprimante se trouve légèrement arrondie, est entièrement libre. On les serre l’une contre l’autre au moyen de vis tournant dans des écrous métalliques et qui traversent les onglets entaillés préalablement à des distances convenables.

La simplicité de cette opération permet, comme on peut le voir, de mettre aisément en reliure telle quantité de feuilles qu’on voudra depuis une seule jusqu’à une limite marquée par la grosseur du volume.

On voit combien il est facile d’en ajouter, d’en ôter, d’en déplacer, sans dommage ni perte sensible de temps. On comprend surtout combien ce genre de reliure est utilement applicable aux collections destinées à être chaque jour examinées, feuilletées, étudiées et augmentées.


Nous terminons ici ce chapitre sans avoir épuisé le sujet que nous avons entrepris de traiter ; il est tellement vaste qu’il pourrait fournir à lui seul la matière d’un volume spécial accompagné de nombreuses figures. Le cadre de ce Manuel nous impose l’obligation de ne parler que des machines principales ; quant aux autres, nous sommes forcé de renvoyer nos lecteurs aux Albums illustrés des constructeurs-mécaniciens, dans lesquels ils en trouveront un choix considérable.