Page:Émile Faguet - L'Art de lire.djvu/101

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Le métier qu’a fait Boileau ne se justifie que quand il s’agit d’un mauvais auteur qui jouit de la faveur générale, et par conséquent d’une funeste erreur publique à rectifier ; mais attaquer Pinchène et Bonnecorse, c’est s’accuser soi-même ; car c’est avouer qu’on les a lus, et qui vous forçait à les lire si ce n’est le désir d’y trouver matière à des épigrammes ? Et ce désir n’est pas charitable, et le genre littéraire qui en dérive est le plus méprisable des genres littéraires.

On remarque parmi les enfants beaucoup de petits moqueurs qui saisissent bien les ridicules des grandes personnes et de leurs camarades et qui se font par là une petite royauté, comme d’autres par la force ou par l’instinct et les qualités du commandement. La Bruyère les a bien connus : « Il n’y a nuls vices extérieurs et nuls défauts du corps [de l’esprit aussi, quoique moins] qui ne soient aperçus par les enfants ; ils les saisissent d’une première vue et ils savent les exprimer par des mots convenables : on ne nomme point plus heureusement. Devenus hommes, ils sont chargés, à leur tour, de toutes les imperfections dont ils se sont moqués. »

Vous reconnaissez certainement quelques-uns des petits garçons qui furent vos camarades de classe. Rappelez-vous maintenant ce qu’ils sont devenus. Leurs parents, tout en croyant devoir les gronder et en faisant mine, en étaient très fiers. Ils sont devenus des imbéciles. Rien ne révèle la débi-