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Page:Étude militaire, géographique, historique et politique sur l'Afghanistan.pdf/55

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« Le lit de la rivière lui-même est jonché de galets mouvants entre lesquels les chevaux enfoncent leurs pieds jusqu’au boulet ; de nombreux squelettes de chameaux, de bœufs ou de chevaux témoignent de la fatigue et de l’épuisement que cause la circulation par ce chemin.

« De loin en loin croissent quelques bouquets d’ajoncs poussant dans les rares endroits où les flots de la saison des pluies n’ont pas enlevé toute trace de terre végétale. Quelquefois le chemin abandonne le lit de la rivière et grimpe le long de ses berges, mais cela arrive rarement, par suite de la rapidité extrême des pentes de la montagne. »

En approchant du sommet des passes le chemin se hérisse de rochers ; ce sont des montées, des descentes, des obstacles à chaque pas ; on ne voit bientôt plus aucune trace de végétation, l’eau fait complétement défaut, tout est aride, mort et désolé ; enfin, suivant les saisons ou même l’heure, la chaleur ou le froid sont excessifs.

L’altitude des passes est d’environ 300 mètres à Dadar, de 500 mètres à Bibinani, et de 1,800 mètres vers Sir-i-Bolan.

Le correspondant du journal anglais le Standard, lui adressait, le 24 décembre dernier, les quelques lignes ci-après[1], relatives aux difficultés qu’eut à surmonter l’artillerie de la colonne expéditionnaire anglo-indienne pour traverser ces montagnes :

« Sur ma route, je dépassai l’un après l’autre des fourgons abandonnés, appartenant à la batterie de gros calibre ; les bœufs qui les avaient traînés étaient étendus morts sur le flanc du défilé. En continuant, je rejoignis un canon de siège de 40, que deux éléphants et une centaine de soldats traînaient péniblement, s’arrêtant de dix en dix mètres. Plus loin, des soldats traînaient des fourgons dont tous les bœufs avaient péri. Cette batterie[2] a eu un temps affreux depuis le 13 décembre 1878, jour de son entrée dans le défilé, d’où elle n’est pas encore sortie au moment où j’écris. À la fin de la troisième journée de marche, tous les bœufs étaient absolument hors de service, et ceux qui n’ont pas péri ne serviront à rien pendant nombre de mois. Les cailloux tranchants avaient coupé leurs sabots et avaient littéralement enlevé leurs fanons. C’est pitié de les voir se traîner en vacillant le long de la route, presque incapables de se soutenir eux-mêmes, alors qu’ils sont harnachés pour traîner des fourgons. Deux éléphants sont morts en route.

« Le major Collingwood (commandant la 5e batterie de la 11e brigade) s’est décidé à retenir toutes les troupes qui passaient pour les

  1. Publiées par la Revue militaire de l’étranger, no 437.
  2. 5e batterie de la 11e brigade.