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LETTRES PARISIENNES (1837).

Là, vous n’avez plus de caprices, ils sont tous prévenus ; là, votre serviteur négligent n’a plus de défauts, ils sont tous prévus d’avance. Là, tout est facile, tout est simplifié, modifié, de telle sorte que les choses marchent d’elles-mêmes. C’est une belle mécanique dont tous les rouages sont d’accord. On lui donne l’impulsion, cela suffit. N’osant nous servir de cette vieille expression si vulgaire, nous ne dirons pas qu’on a su joindre l’utile à l’agréable, nous dirons que là, l’utile est agréable, et que l’élégance exquise de ce riant séjour s’embellit de la facilité de vivre que l’on y trouve et de l’absence de ces mille contrariétés partout inévitables, et que là on ne rencontre jamais. Ô gracieux chalet simple et hypocrite, chaumière coquette, si modeste au dehors et si richement parfaite au dedans ; fantaisie raisonnée, caprice irréprochable, retraite de grande dame, parc modèle, jouet d’un grand administrateur désœuvré ; en vain, au pied de ta verte montagne, tu te caches sous tes berceaux fleuris, tout le monde ira te voir et t’admirer, et c’est toi sans doute que rêvait la reine de Suède, quand elle s’écriait avec amour : « Une chaumière et Bernadotte ! »

Dans nos courses nous sommes retourné à Versailles, mais nous en sommes revenu indigné ; notre prochain feuilleton sera une longue pétition au roi des Français. Nous lui dirons que, ne lui ayant jamais rien demandé, nous nous croyons le droit de lui adresser cette prière, savoir : de laisser le public jouir en paix de la vue du musée de Versailles depuis midi jusqu’à six heures du soir. L’autre jour, à quatre heures moins cinq minutes, on nous a chassé honteusement, non pas par la grande porte, comme nous y avions droit ; on ne nous a pas même laissé continuer notre route et sortir naturellement ; on nous a poussé vers un petit escalier dérobé et dégradé, sans nous donner même le temps de dire adieu au tableau que nous avions commencé de regarder. Aussi, dans notre fureur, nous avons rejoint notre voiture à l’instant même, et nous sommes allé dîner à Saint-Cloud, chez Legriel. C’est un grand bonheur pour Saint-Cloud que l’on ait fondé un musée à Versailles ; il serait désirable maintenant pour Versailles que l’on pensât à fonder une galerie quelconque à Saint-Cloud. Ainsi voilà l’his-