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LETTRES PARISIENNES (1836).

toires ! C’est bien connaître son pays que de le prendre ainsi par son orgueil et de lui faire un tel présent ! Aujourd’hui, vivent les rois pour savoir flatter ! Cette grande nouvelle, la voici :

LE MUSÉE DE VERSAILLES SERA OUVERT LE 1er JANVIER 1837.


LETTRE CINQUIÈME.

Charles X. — Il voulait régner sous prétexte qu’il était roi. — La cour ne porte point le deuil.
23 novembre 1836.

Quand un palmier tombe au désert frappé de la foudre, toute la tribu le regrette ; chacun pleure en lui ce qu’il aimait, chacun lui rend l’hommage d’un souvenir, et ces regrets, d’accord dans leur ensemble, sont différents dans leur sujet ; l’un s’écrie : C’était l’orgueil de la montagne ; l’autre dit : Son ombre venait jusqu’à nous ! Celui-ci reprend : Il abritait l’eau de la source ; celui-là : Il servait de guide au voyageur perdu ! Et chacun explique sa douleur par une plainte motivée, tandis que les petits enfants, sans comprendre l’étendue de la perte qu’on apprécie, ignorants de leurs propres regrets, cherchent en vain sur le sable stérile les dattes savoureuses qui n’y tombent plus. Ainsi, tandis que les partis politiques qui divisent la France, proclamant la mort de Charles X, déplorent leurs prétentions évanouies et calculent les résultats de cet événement, nous, enfants de l’élégance et de l’harmonie, que les querelles fatiguent et que la politique endort, nous pleurons pour nous-mêmes et sans prétention le roi de la vieille France, de la France chevaleresque, brillante et poétique, de la France dame de qualité, de la France enfin qui n’est plus ; et, comme les enfants qui ne savent pas si le palmier tombé était utile par sa hauteur ou par son ombre, nous regrettons ses fruits ; et nous cherchons en vain dans la France bourgeoise cette fleur de courtoisie, ce parfum de royauté, cette majestueuse bienveillance, qui tombaient de l’arbre monarchique et que nous ne retrouverons plus.

Les bonnes actions ont, dit-on, remplacé les bonnes ma-