cluait que les mêmes autans devaient amener les mêmes catastrophes. On faisait de la foudre un présage et de la grêle un avertissement.
Nous écoutions ces belles phrases avec calme ; nous restions indifférent à ces folles conjectures. Quand on a le secret de la vérité, on sourit de pitié en écoutant les commentaires de l’erreur. Que sont les vains calculs de la superstition auprès des infaillibles souvenirs de l’expérience ? Que pouvions-nous répondre à ces raisonnements absurdes, nous qui seul connaissons la cause des caprices de l’atmosphère ? Eh ! mon Dieu, si nous avions su résister à des conseils perfides, il ferait encore aujourd’hui un temps superbe, le soleil sans nuages embraserait la cité ; vous auriez un ciel d’azur, au lieu de ce ciel noir et gris qui vous attriste ; vous verriez dans les rues des ombrelles, au lieu de voir des parapluies ; vous iriez ce soir vous promener en calèche aux Champs-Élysées, vous iriez aux concerts Dufresne respirer le-parfum des orangers, au lieu de rester at home à gémir sur le temps qu’il fait ; vous iriez prendre des glaces à Tortoni ou au café de Paris avec des élégantes et des merveilleuses, au lieu de rester en famille à prendre du thé ; vous auriez enfin pour refrain de conversation ce cri joyeux : « Ah ! qu’il fait chaud ! » au lieu de cette plainte pauvre et amère : « Dieu, qu’il fait froid ! »
Il y a huit jours encore l’été régnait dans la capitale, l’air était enflammé, la poussière était blanche et brillante, les femmes portaient des robes légères qu’une brise timide faisait à peine frissonner ; et maintenant l’hiver nous enveloppe, les trottoirs en deuil se voilent de boue ; et la mousseline de laine, tissu vertueux et modeste, lutte avec indignation contre un vent du nord sans respect. Ô changement subit ! ô changement maudit ! hier les ardeurs de la canicule, aujourd’hui la grêle monstrueuse et la pluie froide, et tout cela est notre ouvrage. Oui, de tous ces désastres, le coupable, c’est nous !
Cet aveu vous étonne… vous ne devinez point quels rapports il peut y avoir entre nous et les orages ; vous nous accusez de présomption, vous nous trouvez orgueilleux de prétendre ainsi faire la pluie et le beau temps, et changer le cours des saisons. Qu’avez-vous fait, direz-vous, pour attirer les nuages,