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Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 6.djvu/484

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Tiens, c’est trop long ! va voir les enfants et laisse-moi mourir !… Qu’est-ce que je suis ?… un poltron qui se cache quand tous ses amis sont morts… Je ne fais rien… je passe de la cave au grenier, d’un trou dans une niche, comme un voleur ; je ne peux pas travailler… pas agir… je n’ose pas même respirer… À quoi bon me sauver ? pourquoi faire ? pour défendre quoi ? les victimes ne sentent même pas le besoin d’être défendues !

Julie.

Il se croit à la tribune.

De Langeais.

Comment ! moi, qui suis dans la force de l’âge, qui ai du talent, de l’autorité, qui défends la plus sainte des causes : le règne de la conscience ; moi qui aime mon pays, comme un cœur breton aime tout ce qu’il aime… sans arrière-pensée et sans partage… parce que c’est mon instinct et parce que c’est mon devoir… moi qui n’ai pas une heure de ma vie à me reprocher… moi qui n’ai pas eu peur du pistolet de Legendre appliqué sur ma poitrine… j’ai peur du bruit comme un coupable !… je n’ose pas me montrer dans cette ville de Rennes où je suis né, où ma famille est honorée depuis cent ans… où moi-même j’ai l’estime de tout ce qui est droit et honnête… je n’ose pas aller chez ma mère pour embrasser mes enfants, et cela, parce qu’une poignée de lâches, poussés par une centaine de fous, un beau matin se sont dit : « Cet homme nous gêne, il faut qu’il meure ! »

Julie.

Prends garde, on peut t’entendre… tu me fais frémir !

De Langeais.

Qu’ils m’entendent, tant mieux ! je suis las d’avoir peur !…

(On frappe à la porte de la rue.)
Julie.

Ah ! mon Dieu… on frappe à la porte de la rue… c’est lui… c’est le citoyen Rosette… Cache-toi !…

De Langeais.

J’en ai assez, de tes caches !

Julie.

Mon ami !

De Langeais.

Je n’y tiens plus ; j’ai besoin d’avoir du courage à tout