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Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/442

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Le Président : Avez-vous connaissance que les pays étrangers, en s’imposant des droits d’entrée, ont été entraînés par l’exemple de l’Angleterre ? — Je crois que notre système a fortement impressionné tous les étrangers ; ils s’imaginent que nous nous sommes élevés à notre état présent de prospérité par le régime de la protection, et qu’il leur suffit d’adopter ce régime pour progresser comme nous.

Lorsque vous parlez de donner l’exemple à l’Europe, pensez-vous que, si l’Angleterre retirait toute protection aux étoffes de coton et autres objets manufacturés, cela pourrait conduire les autres peuples à adopter un système plus libéral, et, par conséquent, à recevoir une plus grande proportion de produits fabriqués anglais ? — Je crois que très-probablement cet effet serait obtenu, même par cet abandon partiel, de notre part, du régime protecteur ; mais j’ai la conviction la plus forte que si nous l’abandonnions en entier, il serait impossible aux autres nations de le maintenir chez elles.

Voulez-vous dire que nous devions abandonner la protection sans que l’étranger en fasse autant ? — Très-certainement, et sans même le lui demander. J’ai la plus entière confiance que, si nous renversions le régime protecteur, chacun des autres pays voudrait être le premier, ou du moins ne pas être le dernier, à venir profiter des avantages du commerce que nous leur aurions ouvert.

M. Villiers : Regardez-vous les représailles comme un dommage ajouté à celui que nous font les restrictions adoptées par les étrangers ? — Je les ai toujours considérées ainsi. Je répugne à tous traités en cette matière ; je voudrais acheter ce dont j’ai besoin, et laisser aux autres le soin d’apprécier la valeur de notre clientèle.

Le Président : Ainsi, vous voudriez appliquer ce principe à l’ensemble des relations commerciales de ce pays ? — Oui, d’une manière absolue ; je voudrais que nos lois fussent faites en considération de nos intérêts, qui sont certainement de laisser la plus grande liberté à l’introduction des marchandises étrangères, abandonnant aux autres le soin de profiter ou de ne pas profiter de cet avantage, selon qu’ils le jugeraient convenable. Il ne peut pas y avoir de doute que si nous retirions une quantité notable de marchandises d’un pays qui protégerait ses fabriques, les producteurs de ces marchandises éprouveraient bientôt la difficulté d’en opérer les retours ; et, au lieu de solliciter nous-mêmes ces gouvernements d’admettre nos produits, nos avocats, pour cette admission, seraient dans leur propre pays. Il surgirait là des industries qui donneraient lieu, chez nous, à des exportations.

M. Chapman : Êtes-vous d’opinion que l’Angleterre prospérerait davantage en l’absence de traités de commerce avec les autres nations ? — Je