Page:Œuvres complètes de Maximilien de Robespierre, tome 1.djvu/189

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voir entouré de ses jeunes enfans, contempler avec complaisance sa vertueuse épouse dont la sollicitude maternelle est sans cesse occupée à écarter loin d’eux les dangers qui menacent la faiblesse de leur âge, partager avec elle les soins de leur éducation, afin qu’ils soient dignes de servir un jour la patrie[1], sourire à leurs jeux innocens, applaudir à leurs progrès, les prendre dans ses bras, faire des vœux au ciel pour lui demander, non qu’ils soient riches et puissans, mais bienfaisans et justes. C’est ainsi qu’en remplissant les devoirs de citoyen et de père, il se consolait de l’injustice des hommes et de la haine des méchans.

Chéri et respecté de sa famille dont il fait le bonheur, honoré par le suffrage de tous les gens de bien, admiré des étrangers qui veulent le voir et le connaître, son nom est mis à côté de celui des bienfaicteurs du genre humain. Les malheureux ne le prononcent qu’avec attendrissement. Il jouit déjà de cette gloire sur laquelle l’envie ne peut rien, et à peine il est parvenu au milieu de sa carrière.

L’humanité le regardait comme son soutien et son vengeur. Cet ordre le plus nombreux de citoyens, sur lequel les états s’appuyent, et que l’on cherche toujours à opprimer, fondait les plus grandes espérances sur son courage et son amour pour la justice. Déjà il fixait ses regards sur lui, comme sur le défenseur éclairé de ses droits. La magistrature espérait jouir longtemps encore de ses lumières et de ses vertus ; lorsqu’il est tout-à-coup atteint d’une maladie

  1. Il y a long-temps que l’on a demandé si l’éducation domestique est préférable à l’éducation publique. Quintillien chez les anciens, et Rollin chez nous, se sont décidés pour la seconde. Malgré leur autorité qu’il respectait, M. Dupaty, avait adopté l’éducation particulière. On ne peut nier qu’avec quelques inconvénients pour les mœurs, faciles à prévenir, l’éducation publique n’ait de grands avantages du côté de l’émulation, du développement des caractères et de l’égalité qu’elle met entre les jeunes citoyens de toutes les conditions. Il faut convenir aussi que l’éducation, privée, par la difficulté de trouver d’excellens maîtres, et de les conserver quand on les a, n’a que trop souvent les dangers de l’éducation publique sans en réunir les avantages. Mais M. Dupaty, et sa vertueuse épouse, étaient les premiers instituteurs de leurs enfans ; et cela fait disparaître toutes les difficultés.