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Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/101

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craignaient de paraître approuver les prévarications et tous les crimes dénonces par les tribuns. Mais indirectement, par le moyen de leurs amis, surtout d’un grand nombre de citoyens du Latium et d’alliés italiens, ils firent naître mille obstacles. On ne saurait croire avec quelle force, quelle persévérance de volonté, le peuple décréta cette mesure (26), moins, il est vrai, par zèle pour la république, qu’en haine de la noblesse, à qui elle préparait bien des maux : tant la fureur des partis est extrême !

Tandis que tous les nobles sont frappés de terreur, Marcus Scaurus, que nous avons vu lieutenant de Bestia, parvient, au milieu de la joie du peuple, de la déroute de son parti et de l’agitation qui règne dans la ville entière, à se faire nommer l’un des trois commissaires dont la loi de Mamilius provoquait la création. Les enquêtes ne s’en firent pas moins avec dureté (27), avec violence, d’après des ouï-dire et le caprice du peuple. Ainsi l’exemple souvent donné par la noblesse fut imité par le peuple dans cette circonstance : la prospérité la rendit insolent.

XLI. L’usage de se diviser en parti populaire et en faction du sénat, puis tous les excès résultant de cette distinction, avaient pris naissance à Rome peu d’années auparavant (28) au sein même du repos et de l’abondance (29), que les mortels regardent comme les plus précieux des biens. Avant la destruction de Carthage, le peuple et le sénat romain gouvernaient de concert la république avec douceur et modération. Les honneurs et la puissance n’étaient le sujet d’aucun débat entre les citoyens : la crainte des ennemis maintenait les bons principes dans l’É-