Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/17

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L’Histoire de la conjuration de Catilina fut, nous le savons, le coup d’essai de Salluste ; aussi la critique a-t-elle pu justement y relever quelques défauts, soit pour la composition, soit même pour le style. Je ne parle pas de la préface, sur laquelle nous reviendrons, mais du lieu commun fort long qui suit la préface et forme comme un second avant-propos. Sans doute il n’était pas hors de raison que Salluste, ayant à nous raconter la tentative audacieuse de Catilina, remontât aux causes qui avaient pu la rendre possible ; mais il le devait faire avec beaucoup plus de rapidité. Tacite, lui aussi, se proposant d’écrire l’histoire des empereurs, veut d’abord expliquer comment la république avait pu être remplacée par l’empire ; mais avec quelle précision et quelle exactitude tout ensemble il le fait ! Une page lui suffit à retracer toutes les phases politiques de Rome, depuis son origine jusqu’à Auguste : c’est là le modèle, trop souvent oublié, qu’il faut suivre. Ce préambule est donc un défaut dans la composition de Catilina. On a fait à Salluste de plus graves reproches : on l’a accusé d’injustice envers Cicéron ; d’une espèce de connivence à l’égard de César ; et, qui le croirait ? d’un excès de sévérité à l’égard de Catilina.

L’antiquité nous a légué un monument de cette haine de Cicéron et de Salluste, dans deux déclamations que chacun d’eux est censé adresser au sénat contre son adversaire. S’il est prouvé que ces deux pièces furent composées dans le temps même où vécurent ces deux personnages, il n’est pas moins certain qu’ils n’en sont pas les auteurs. Ouvrage d’un rhéteur, on les attribue communément, à Vibius Crispus, et, avec plus de vraisemblance, à Marcus Porcius Latro, qui fut l’un des maîtres d’Ovide. Mais, tout apocryphes qu’elles sont, elles n’en attestent pas moins l’inimitié réciproque de ces deux personnages.

Salluste n’aimait donc pas Cicéron ; cette haine a-t-elle