Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/170

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CII. Dès lors assuré de la victoire, le consul gagne enfin Cirta, premier but de sa marche. Cinq jours après la seconde défaite des Barbares, arrivent dans cette ville des députés de Bocchus, d’après les instructions de leur roi, ils demandent à Marius d’envoyer auprès de lui deux hommes investis de toute sa confiance, et avec lesquels Bocchus discutera ses intérêts et ceux du peuple romain. Marius fait aussitôt partir L. Sylla (127) et A. Manlius. Quoique venus sur la demande du roi, ils crurent cependant devoir lui faire les premières ouvertures, soit pour changer ses dispositions hostiles, s’il pensait à rester ennemi, soit, dans le cas où il souhaiterait la paix, pour la lui faire désirer plus ardemment. Cédant à l’éloquence le privilège que l’âge lui donnait, Manlius laissa la parole à Sylla, qui adressa au roi ce peu de paroles :

« O roi Bocchus ! notre joie est grande de voir que les dieux aient inspiré à un homme tel que vous la résolution de préférer enfin la paix à la guerre, de ne pas souiller la noblesse de son caractère en s’associant au plus détestable des hommes, à un Jugurtha, et en même temps de nous épargner la dure nécessité de punir également votre erreur et sa profonde scélératesse. Le peuple romain, d’ailleurs, a mieux aimé, dès sa plus faible origine, se faire des amis qu’enchaîner des esclaves, et il a trouvé plus sûr de régner par l’affection que par la force. Quant à vous, aucune alliance ne vous est plus favorable que la nôtre ; d’abord l’éloignement préviendra entre nous tout motif de mésintelligence, sans nous empêcher de vous servir comme si nous étions proches voisins ; ensuite, si nous avons