Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/176

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dans ses pieds, qui sont sans armes, et de tourner à l’ennemi, par l’excès de la crainte, la partie du corps qui ne peut ni voir ni parer les coups ! » Ensuite, après avoir pris le grand Jupiter à témoin du crime et de la perfidie de Bocchus, il ordonne à Volux, puisqu’il a agi en ennemi, de sortir du camp. Volux le conjure, les larmes aux yeux, « de renoncer à une telle pensée, il lui proteste qu’il ne l’a trahi en rien : il faut tout imputer à la sagacité de Jugurtha, qui, par ses espions, avait eu sans doute connaissance de sa marche. Il ajoute que Jugurtha, qui n’a point une troupe considérable, et qui n’a de ressource et d’espoir que dans Bocchus, n’osera rien ouvertement en présence du fils de son protecteur : le meilleur parti lui semble donc de passer hardiment au milieu du camp de Jugurtha. Quant à lui, soit qu’on détache en avant, soit qu’on laisse en arrière l’escorte de ses Maures, il ira seul avec Sylla ». Un tel expédient, dans l’embarras où l’on se trouve, est adopté. Les Romains se mettent en marche à l’instant. Surpris de leur arrivée imprévue, Jugurtha hésite, reste en suspens ; ils passent sans obstacle, et arrivent en peu de jours à leur destination.

CVIII. Auprès de Bocchus était alors un Numide, nommé Aspar, admis dans son intime familiarité. Jugurtha l’avait envoyé pour défendre ses intérêts et pour épier avec adresse les desseins du roi maure, sitôt qu’il avait appris que Sylla avait été mandé par ce prince. Près de Bocchus était aussi Dabar, fils de Massugrada, de la famille de Masinissa (129), mais illégitime du côté maternel, car son père était né d’une concubine. Les agré-