Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/222

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ce biographe traduit par Amyot, s’alla mettre en très-grand danger, en commettant, sa personne à la foi d’un roi barbare pour en prendre un autre,, attendu mêmemeut que celui en qui il se fiait usait de si grande déloyauté envers ses plus proches alliés ; toutesfois Bocchus ayant les deux en sa puissance, et s’étant lui-même rangé à ce point de nécessité, qu’il était force qu’il trahît ou l’un ou l’autre, après avoir longuement disputé en lui-même lequel il ferait plus tôt, à la fin exécuta le dessein de la première trahison, et délivra Jugurtha entre les mains de Sylla. »

(132). Homme irréprochable.

On ne peut, en vérité, trop s’étonner de voir Salluste qualifier d’une épithète si honorable, sanctus vir, un homme mêlé à une si honteuse négociation.

(133). Livré à Sylla, qui le mène à Marius.

« Il est bien vrai, dit Plutarque, que celui qui triompha de cette prise fut Marius ; mais l’envie qu’on lui portait faisait qu’on attribuait la gloire du fait à Sylla, ce qui secrètement fâchait fort Marius ; mêmement que Sylla, qui, de sa nature, était hautain, et qui lors commençait, d une vie basse, obscure et inconnue, à venir pour la première fois en quelque lumière entre ses citoyens, et à goûter les prémices des honneurs, en devint si ambitieux et si convoiteux de gloire, qu’il en fit graver l’histoire en un anneau qu’il porta toujours depuis, et s’en servit de cachet. La gravure était le roi Bocchus qui livrait, et Sylla qui recevait Jugurtha prisonnier. Ces choses déplaisaient fort à Marius... Voilà, continue le même historien, la première source de celte pestilente et mortelle inimitié qui, depuis, fut toujours entre Marius et Sylla, laquelle pensa perdre et ruiner la ville de Rome et son empire de fond en comble : d’autant que plusieurs, portant envie à la gloire de Marius, allaient disant que cet acte de la prise de Jugurtha appartenait à Sylla ;... et attribuaient le commencement et les principaux exploits de cette guerre à Metellus, et les derniers, avec la consommation finale, à Sylla ; afin que le peuple ne l’eût plus en si grande estime, ni en telle recommandation, qu’il l’avait eu auparavant... Davantage l’inimitié commencée entre lui et Marius se ralluma par une occasion nouvelle de l’ambition du roi Bocchus, lequel, en partie pour s’insinuer de plus en plus eu la bonne grâce du peuple romain, et en partie aussi pour