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Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/29

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J’ai excusé les préfaces de Salluste et cherche à imputer à bonne intention l’éloge qu’il y fait des vertus antiques ; je ne m’en dédis pas, mais si quelque chose pouvait me faire changer d’opinion, ce seraient les deux Lettres sur le gouvernement adressées à César. Salluste n’est plus ici cet historien austère que nous avons vu ; c’est un flatteur habile, un partisan de la tyrannie. Il y a toutefois entre ces deux lettres, composées, nous l’avons dit, à un certain intervalle l’une de l’autre, une différence qu’il est bon de remarquer. Quand la première fut écrite, la lutte entre César et la république était encore indécise ; aussi Salluste y conseille-t-il la modération. Dans la seconde, il tient un tout autre langage ; il y appelle la rigueur des lois au secours de la reforme des mœurs du peuple romain ; il veut faire de César l’oppresseur du parti vaincu ; on y sent l’emportement de la victoire. De ces deux lettres, la première semble avoir pour but d’assurer la domination de César ; la seconde, de l’organiser : l’une est politique, l’autre est morale ; toutes deux contiennent d’ailleurs de belles idées, un sens profond, une connaissance parfaite des causes qui ont amené la chute de la république, et même quelques conseils auxquels le dictateur ne dédaigna pas de conformer sa conduite. Ces lettres sont donc comme la première assise de cet édifice dont César jetait les fondements : l’empire commençait. La république était-elle condamnée à périr ; et, en admettant qu’elle fut incapable de vivre, un citoyen, si grand qu’il fût, avait-il le droit de la renverser ? Cette révolution a-t-elle été un bienfait, une satisfaction et un soulagement pour l’univers sur lequel pesait une aristocratie insolente, puissante pour le mal, impuissante pour le bien ; faut-il saluer dans l’avènement de l’empire la naissance d’un pouvoir dont l’action unique et supérieure assurait aux peuples le repos avec l’égalité, et qui, étendant à toutes les nations ce droit de cité aupara-