Page:Œuvres complètes du Marquis de Sade, tome 13, édition définitive (extrait), 1973.djvu/6

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NOTES.

(1)

On évalue à plus de cinquante millions d’individus les pertes occasionnées par les guerres ou massacres de religion. En est-il une seule d’entre elles qui vaille seulement le sang d’un oiseau ? et la philosophie ne doit-elle pas s’armer de toutes pièces pour exterminer un Dieu en faveur duquel on immole tant d’êtres qui valent mieux que lui, n’y ayant assurément rien de plus détestable qu’un Dieu, aucune idée plus bête, plus dangereuse et plus extravagante ?

(2)

L’idée d’un Dieu ne naquit jamais chez les hommes que quand ils craignirent ou qu’ils espérèrent ; c’est à cela seul qu’il faut attribuer la presque unanimité des hommes sur cette chimère. L’homme, universellement malheureux, eut dans tous les lieux et dans tous les temps des motifs de crainte et d’espoir, et partout il invoqua la cause qui le tourmentait, comme partout il espéra la fin de ses maux. En invoquant l’être qu’il en supposait la cause, trop ignorant ou trop crédule pour sentir que le malheur inévitablement annexé à son existence n’avait d’autre cause que la nature même de cette existence, il créa des chimères auxquelles il renonça dès que l’étude et l’expérience lui en eurent fait sentir l’inutilité.

La crainte fit les dieux et l’espoir les soutint.

(3)

La plus légère étude de la nature nous convainc de l’éternité du mouvement chez elle, et cet examen attentif de ses lois nous fait voir que rien ne périt dans elle et qu’elle se régénère sans cesse par le seul effet de ce que nous croyons qui l’offense ou qui paraît détruire ses ouvrages. Or si les destructions lui sont nécessaires, la mort devient un mot vide de sens : il n’y a plus