Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/231

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donnait abondamment des perles rares et des gemmes. Les conques sonnaient, plus discordantes, et une grande joie, à travers la foule, éclatait.

Mais tout à coup, parvenu dans une salle reculée, une salle basse qui servirait sans doute d’office ou de cellier, le duc Tarquin poussa un grand cri d’indignation. Impudemment un sculpteur avait orné cette salle d’une insolite statue : c’était une belle vierge demi-nue, frissonnant d’ineffable espoir et jetant des fleurs merveilleuses vers les chemins où sans doute surgirait l’amant. Une main puissante avait animé le marbre ; on croyait respirer dans l’air le parfum des cheveux épars sur les froides épaules blanches, et la vierge resplendissait, victorieusement vivante.

Le duc Tarquin, bien qu’il fût d’humeur débonnaire (il avait gracié le matin des incendiaires et des parricides), ne put contenir sa colère. Certainement la statue était coupable de lèse-majesté, et celui qui avait oublié ainsi le respect dû à la grande laideur sacrée méritait un châtiment sévère. Vite on chercha l’insolent artiste ; il fut amené, poings liés, devant le duc Tarquin, et tout de suite il fut jugé devant le