Page:Œuvres de Bacon, II.djvu/243

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paix ? Qu’y a-t-il de commun entre la paix et toi ? Viens et suis moi. » La paix n’est rien moins que le but des hommes de ce caractère ; il ne s’agit pour eux que de faire prédominer telle opinion et telle secte qui la soutient. D’autres, au contraire, semblables aux Laodicéens, plus tièdes sur l’article de la religion et s’imaginant qu’on pourrait, à l’aide de certains tempéraments, de certaines propositions moyennes et participant des opinions contraires, concilier avec dextérité les points en apparence les plus contradictoires, semblent ainsi vouloir se porter pour arbitres entre Dieu et homme. Mais il faut éviter également ces deux extrêmes, but auquel on parviendrait en expliquant, en déterminant d’une manière nette et in- telligible pour tous en quoi précisément consiste cette alliance dont le Sauveur a stipulé lui-même les conditions par ces deux sentences ou clauses, qui à la première vue semblent contradictoires : « Celui qui n’est pas avec nous est contre nous, celui qui n’est pas contre nous est avec nous, » c’est-à-dire si l’on avait soin de séparer et de bien distinguer les points fondamentaux et essentiels de la religion d’avec ceux qui ne doivent être regardés que comme des opinions vraisemblables et de simples vues ayant pour objet l’ordre et la discipline de l’Église. Tel de nos lecteurs sera tenté de croire que nous ne faisons ici que remanier un sujet trivial, rebattu, et proposer inutilement des choses déjà exécutées ; mais ce serait une erreur : car, ces distinctions si nécessaires, si on les eût faites avec plus d’impartialité, elle auraient été plus généralement adoptées. J’essaierai seulement de donner sur cet important sujet quelques vues proportionnées à ma faible intelligence. Il est doux espèces de controverses qui peuvent déchirer le sein de l’Église et qu’il faut éviter également ; l’une a lieu lorsque le point qui est le sujet de la dispute, étant frivole et de peu d’importance, ne mérite pas qu’on s’échauffe comme on le fait en le discutant, la dispute n’ayant alors pour principe que l’esprit de contradiction ; car, à la vérité, comme l’un des pères de l’Église l’a observé, la tunique du Christ était sans couture, mais le vêtement de l’Église était bigarré de différentes couleurs ; et il donne à ce sujet le précepte suivant : « Qu’il y ait de la variété dans ce vêtement, mais sans déchirure ; car l’unité et l’uniformité sont deux choses trés-différentes. » L’autre genre de controverse a lieu lorsque . le point qui est le sujet de la discussion étant de plus grande importance, on l’obscurcit à force de subtilités, en sorte que dans les arguments allégués de part et d’autre on trouve plus d’esprit et d’adresse que de substance et de solidité. Souvent un homme qui a de la pénétration et du jugement, entendant deux ignorants disputer avec chaleur, s’aperçoit