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point d’estre heretique en vous servant de la proposition condamnée. Elle n’est mauvaise que dans la seconde lettre de M. Arnauld. Ne vous en voulez vous pas fier 1 à ma parole, croyez en M. le Moyne le plus ardent des Examinateurs, qui 2 a dit encore ce matin à un Docteur de mes amis 3 sur ce qu’il luy demandoit, en quoy consiste cette difference dont il s’agit, et s’il ne seroit plus permis de dire ce qu’ont dit les Peres. Cette proposition, luy a t’il excellemment répondu, seroit catholique dans une autre bouche. Ce n’est que dans M. Arnauld que la Sorbonne l’a condamnée 4 . Et ainsi admirez les machines du Molinisme, qui font dans l’Eglise de si prodigieux renversemens : Que ce qui est catholique dans les Peres, devient heretique dans M. Arnauld: Que ce qui estoit heretique dans les Semipelagiens, devient orthodoxe dans les escrits des Jesuites : Que la doctrine si ancienne de S. Augustin est une nouveauté insupportable, et que les inventions nouvelles qu’on fabrique tous les jours à nostre veuë, passent pour l’ancienne foy de l’Eglise. Sur cela il me quitta.
Cette instruction m’a 5 ouvert les yeux. J’y ay compris que c’est icy une heresie d’une nouvelle
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1. P’. [en].
2. A 2 B. [en parlant] encore.
3. A 2 B. [qui] luy demandoit.
4. Cf. cette note de Pascal (Pensées, fr. 925, T. III, p. 358) : « Une proposition est bonne dans un autheur et meschante dans un autre. Ouy ; mais il y a donc d’autres mauvaises propositions. »
5. A 2 B. [servi].