Page:Œuvres de Blaise Pascal, VII.djvu/205

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LETTRE D'UN AVOCAT. — INTRODUCTION iU

demeuroient d'accord encore que cette doctrine étoit contraire à celle de l'Eglise, et ils soutenoient en même tems qu'elle étoit orthodoxe, et que celle de l'Eglise étoit erronée ; il s'agissoit donc des principaux points de la foi, tenus de tous tems dans l'Eglise universelle. Et cependant quelque schisme qu'il y eut dans l'Eglise où l'on avoit élevé autel contre autel ; quelque terrible que fut cette hérésie par le nombre et la fureur des adherans ; quelque feu qu'elle eut allumé dans toute l'Eu- rope et même dans ce Royaume, où elle étoit jointe à la révolte ; quelque expresse que fut la Bulle de Léon X. contre Luther ; et quelque solemnité qu'on y eut apportée en la faisant passer par l'avis des cardinaux, le Parlement ne pensa pas seulement à la recevoir ni à la faire souscrire par qui que ce fut ; et bien loin de reconnoître l'infaillibilité du Pape qu'il vouloit s'y attribuer, le Parlement ne voulut qu'on reconnut aucune chose, sinon qu'à la vérité la primauté du Pape étoit de droit divin, et qu'il peut donner des indulgences, mais que l'infail- libilité est dans l'Eglise universelle et dans le Concile gênerai qui la représente ; qu'il y a un purgatoire, et les autres arti- cles de foi, qui ont toujours été tenus sans contestation dans l'Eglise, et qui avoient été dressés par le consentement una- nime des Docteurs de Sorbonne, et qu'enfin quoiqu'il n'y eut rien de plus juste, que de faire signer à tout le monde ces ar- ticles, neantmoins pour éviter toute image d inquisition, le Parlement ne les fit signer qu'à ceux de son corps, et sans parler non plus des livres de Luther et de Calvin, que s'ils n'eussent point été. Voilà comment on en agit alors, parce qu'on n'en vouloit qu'aux hérésies, et non aux personnes.

Qu'on compare l'image sanglante de ce siècle là, avec la contestation ridicule d'aujourd'hui : sçavoir si 5. propositions que tout le monde condamne, sont dans un livre; et qu'on regarde tout ensemble la modération dont on usa alors, et les rigueurs qu'on exerce maintenant : et l'on verra la différence qui se trouve entre ceux qui ne cherchent qu'à s'opposer à l'heresie, et ceux qui ne tendent qu'à établir une inquisition sous prétexte de la foi.

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