Page:Œuvres de Blaise Pascal, XII.djvu/95

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met de « découvrir la manière la plus conforme aux gens qu’il fréquente ». Il plaît sans qu’il ait paru chercher à plaire, il semble qu’il s’efface toujours devant les autres, et d’autant plus irrésistiblement il attache les autres à soi. Telle est l’impression que produisit sur Pascal le chevalier de Méré ; elle survit aux années de vie mon daine. Si l’homme est purement homme, il est vrai de dire avec Méré, sinon qu’ « on doit principalement s’étudier à devenir honnête homme », — car l’honnêteté n’est pas objet d’étude ni d’artifice, — du moins que l’honnêteté est « la quintessence de toutes les vertus ». Méré ajoutait : « Vous ne songez pas qu’il est bien rare de trouver un honnête homme. J’ai un ami, qui ferait le voyage des Indes pour en voir un seulement. » En 1660 Pascal écrit à Fermat : « Si j’étais en santé, je serais volé à Toulouse… Quoique vous soyez celui de toute l’Europe que je tiens pour le plus grand géomètre, ce ne serait pas cette qua lité-là qui m’aurait attiré ; mais., , , je me figure tant d’esprit et d’honnêteté en votre conversation que c’est pour cela que je vous rechercherais. » Quand les hommes se rencontrent les uns les autres, du dehors pour ainsi dire et sans communiquer par leurs « pensées de derrière », sans confronter leurs âmes, c’est sur le terrain de l’honnêteté qu’ils se rejoignent et qu’ils s’accordent. Aussi faut-il que le chrétien connaisse et pratique les règles de l’honnêteté ; il le faut surtout s’il obéit à l’élan de la charité, s’il travaille à la conversion totale de ceux qui se com plaisent dans les jouissances du monde ; l’honnêteté seule lui donnera les armes qui le rendront capable de la com battre en la dépassant. Les conversations de Méré ne revivent pas seulement dans la mémoire de Pascal, dans son expérience générale de la vie ; il les transcrit sur le papier, il les rédige comme pour en tirer une « Rhéto-