Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome V.djvu/257

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cause de l’agitation de ses vagues, ce qui augmente beaucoup la force du vent, et, retardant la descente de la nue, fait durer l’orage d’autant plus long-temps. Puis aussi qu’il y a d’ordinaire des exhalaisons mêlées parmi ces vapeurs, qui, ne pouvant être chassées si loin qu’elles par la nue, à cause que leurs parties sont moins solides et ont des figures plus irrégulières, en sont séparées par l’agitation de l’air, en même façon que, comme il a été dit ci-dessus, en battant la crème on sépare le beurre du petit-lait, et que par ce moyen elles s’assemblent par-ci par-là en divers tas, qui, flottant toujours le plus haut qu’il se peut contre la nue, viennent enfin s’attacher aux cordes et aux mâts des navires, lorsqu’elle achève de descendre ; et là étant embrassés par cette violente agitation, ils composent ces feux nommés de Saint-Elme, qui consolent les matelots, et leur font espérer le beau temps. Il est vrai que souvent ces tempêtes sont en leur plus grande force vers la fin, et qu’il peut y avoir plusieurs nues l’une sur l’autre, sous chacune desquelles il se trouve de tels feux, ce qui a peut-être été la cause pourquoi les anciens n’en voyant qu’un, qu’ils nommoient l’astre d’Hélène, ils l’estimoient de mauvais augure, comme s’ils eussent encore attendu alors le plus fort de la tempête ; au lieu que lorsqu’ils en voyoient deux, qu’ils nommoient Castor et Pollux, ils les prenoient