Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/346

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imagination ne soit remplie d’un nombre infini d’idées fausses, avant que sa raison ait pu prendre l’empire sur elle ; en sorte que par la suite il a besoin d’un bon naturel ou des leçons fréquentes d’un homme sage, tant pour secouer les fausses doctrines dont son esprit est prévenu, que pour jeter les premiers fondements d’une science solide, et découvrir tous les moyens par lesquels il peut porter ses connoissances au plus haut point qu’elles puissent atteindre.

J’ai dessein dans cet ouvrage d’enseigner quels sont ces moyens, et de mettre au jour les véritables richesses de notre nature, en ouvrant à chacun la voie par laquelle il peut trouver en lui-même, sans rien emprunter à un autre, la science qui lui est nécessaire pour diriger sa vie, et ensuite acquérir, en s’exerçant, les sciences les plus curieuses que la raison humaine puisse posséder.

Mais, pour que la grandeur de mon dessein ne saisisse pas en commençant votre esprit d’un étonnement tel que la foi en mes paroles ne puisse plus y trouver place, je vous avertis que ce que j’entreprends n’est pas aussi difficile qu’on pourroit se l’imaginer. En effet les connoissances qui ne dépassent pas la portée de l’esprit humain sont unies entre elles par un lien si merveilleux, et peuvent se déduire l’une de l’autre par des conséquences si nécessaires, qu’il n’est pas besoin de