Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/348

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pour les lire il faudrait plus de temps que la vie humaine ne nous en donne, et pour y reconnoître ce qui est utile, plus de talent que pour le trouver nous-mêmes.

C’est ce qui me fait espérer que le lecteur ne sera pas fâché de trouver ici une voie plus abrégée, et que les vérités que j’avancerai lui agréeront, quoique je ne les emprunte pas à Platon ou à Aristote, mais qu’elles auront par elles-mêmes de la valeur, comme l’argent qui a tout autant de prix qu’il sorte de la bourse d’un paysan ou de la trésorerie. J’ai même fait en sorte de les rendre également utiles à tous les hommes. Je n’ai donc pas pu trouver de style plus conforme à ce dessein que celui dont on se sert dans les conversations, où chacun expose familièrement à ses amis ce qu’il croit savoir le mieux. Je suppose donc, sous les noms d’Eudoxe, de Polyandre et d’Épistémon, un homme doué d’un esprit ordinaire, mais dont le jugement n’est gâté par aucune fausse opinion, et qui possède toute sa raison intacte, telle qu’il l’a reçue de la nature ; et qui, dans sa maison de campagne, où il habite, reçoit la visite de deux hommes du plus grand esprit, et des plus distingués du siècle, dont l’un n’a jamais rien étudié, tandis que l’autre sait très bien tout ce qu’on peut apprendre dans les écoles. Et là, entre autres discours que chacun peut imaginer à son gré, ainsi