talière ; vous la connaissez, ma sœur. » Mon cœur, dit-il encore :
Mon cœur, ivre à seize ans de volupté céleste,
S’emplit d’un chaste amour dont le parfum lui reste.
J’ai rêvé le bonheur, mais le rêve fut court.
Il y eut en ces années un Hégésippe Moreau primitif, pur, naturel, adolescent, non irrité, point irréligieux, dans toute sa fleur de sensibilité et de bonté, animé de tous les instincts généreux et non encore atteint des maladies du siècle. Moment unique et rapide qu’il a essayé de ressaisir plus d’une fois, de retracer dans ses vers, et qui nous en marque aujourd’hui les plus doux passages. Il y a ainsi en chacun de nous, pour peu que notre fonds originel soit bon, un être primitif, idéal, que la nature a dessiné de sa main la plus légère et la plus maternelle, mais que l’homme trop souvent recouvre, étouffe ou corrompt. Ceux qui nous ont connu et qui nous ont aimé sous cette forme première continuent de nous voir ainsi ; et, si l’on a le bonheur d’avoir une sœur qui ait continué elle-même de vivre d’une vie simple et uniforme, d’une vie fidèle aux souvenirs, elle nous conserve à jamais présent dans cette pureté adolescente, elle nous garde un culte dans son