— Vous ne vous trompez pas, mon père : Hercule n’eut que trois enfants de Déjanire ; mais sa dernière épouse, Iole…
— C’est juste ! interrompit le vieillard, se frappant le front du doigt en signe de réminiscence : Philoctète m’a vingt fois raconté ces détails, mais… deux siècles en tombant sur une tête y peuvent bien ébranler la mémoire… Oui, je me rappelle parfaitement à cette heure qu’une fille est née de ce mariage…
— Une fille et un garçon, mon père », prononça une voix douce derrière le vieux roi.
Il tourna la tête, et vit un adolescent pâle et frêle qui portait le costume de l’Argolide.
« Une fille et un garçon, répéta l’interrupteur en rougissant : Ixus et Macaria ».
Et le vieillard sourit : « Voyez, dit-il au prêtre ; on admire ma science à Pylos, et voilà maintenant qu’Argos m’envoie ses écoliers pour m’instruire.
— Qui vous a si bien appris, et comment vous appelez-vous, mon bel enfant ? »
Mais l’adolescent, sans répondre, glissa sous une caresse de Nestor, car c’était lui, et se perdit dans la foule.
La même louange y bourdonnait sans variantes : « Dieux ! qu’ils sont grands et forts ! »
En France, ce compliment vous paraît sans doute bien étrange et presque ironique ; mais songez que vous êtes ici dans un pays que les caprices du terrain et de l’ambition découpaient en vingt petits états, dont les roitelets fiers et hargneux étaient serrés les uns contre les autres et se coudoyaient en grondant, et où l’usage commun à toute l’antiquité de combattre homme à homme et corps à corps, faisait de la force physique la seule puissance, je dirai presque la