Page:Œuvres de Spinoza, trad. Appuhn, tome I.djvu/269

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tinguent des fausses ; et nous devons maintenant diriger notre enquête sur ce point afin d’avoir la meilleure norme de vérité (nous avons dit en effet qu’il nous fallait déterminer nos pensées selon la norme donnée de l’idée vraie et que la méthode est la connaissance réflexive) et de connaître les propriétés de l’entendement. Il ne faut pas dire d’ailleurs que la différence provient de ce que la pensée vraie consiste à connaître les choses par leurs premières causes (en quoi elle différerait beaucoup à la vérité d’une fausse, la nature de la pensée fausse étant telle que je l’ai expliquée ci-dessus) ; car on appelle aussi pensée vraie celle qui enveloppe objectivement l’essence d’un principe qui n’a pas de cause et est connu en soi et par soi. La forme de la pensée vraie doit donc être contenue dans cette pensée même sans relation à d’autres, et elle ne reconnaît pas comme cause un objet, mais doit dépendre de la puissance même et de la nature de l’entendement. Si nous supposions en effet que l’entendement eût perçu quelque être nouveau n’ayant jamais existé, comme le faisait, selon certains, l’entendement de Dieu avant qu’il eût créé les choses (et cette perception ne peut assurément provenir d’aucun objet) et que de cette perception il en eût déduit légitimement d’autres, toutes ces pensées seraient vraies et ne seraient déterminées par aucun objet extérieur ; mais dépendraient seulement de la puissance et de la nature de l’entendement. Pour diriger donc notre enquête, posons-nous devant les yeux quelque idée vraie dont nous sachions avec la plus haute certitude que l’objet dépend de notre pouvoir de penser et n’a pas d’objet dans la Nature ; c’est dans une idée de cette sorte que nous pourrons plus facilement, comme il suit clairement de ce qui précède, faire notre