Page:Œuvres de Spinoza, trad. Appuhn, tome I.djvu/279

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

autre et beaucoup d’autres opinions de même sorte qui sont toutes entièrement contraires à la vérité comme nous le montrerons en son lieu.

(47) Ensuite, comme les mots sont une partie de l’imagination, c’est-à-dire comme nous forgeons beaucoup de concepts suivant que, par une disposition quelconque du corps, les mots s’assemblent sans ordre déterminé dans la mémoire, il ne faut pas douter qu’ils ne puissent, autant que l’imagination, être cause de nombreuses et grandes erreurs, si nous ne nous mettons pas fortement en garde contre eux. Ajoutez qu’ils sont formés au gré du vulgaire et selon sa manière de voir ; de sorte qu’ils sont des signes des choses, telles qu’elles sont dans l’imagination et non telles qu’elles sont dans l’entendement, comme il se voit clairement de ce que l’on a souvent appliqué à toutes les choses qui sont seulement dans l’entendement et ne sont pas dans l’imagination des noms négatifs, par exemple : incorporel, infini, etc., et aussi de ce que l’on exprime négativement beaucoup de choses qui sont en réalité affirmatives et inversement comme : incréé, indépendant, infini, immortel, parce qu’effectivement nous imaginons avec beaucoup plus de facilité leurs contraires et que ces dernières se sont ainsi offertes les premières aux premiers hommes et ont accaparé les termes affirmatifs. Beaucoup d’affirmations et de négations prennent naissance parce que la nature des mots s’y prête, et non la nature des choses ; c’est pourquoi. si nous ignorions cela nous prendrions facilement le faux pour le vrai[N 1].


Erreur de référence : Des balises <ref> existent pour un groupe nommé « N », mais aucune balise <references group="N"/> correspondante n’a été trouvée