Page:Œuvres de Spinoza, trad. Appuhn, tome I.djvu/280

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(48) Nous évitons, en outre, une autre grande cause de confusion qui empêche que l’entendement ne réfléchisse sur lui-même : en effet, quand nous ne distinguons pas entre l’imagination et l’entendement, nous croyons que ce qui est plus facilement imaginé est aussi plus clair pour nous, et ce que nous imaginons nous croyons le connaître. Par suite nous mettons devant ce qui doit venir après, l’ordre vrai suivant lequel il nous faut avancer est renversé et aucune conclusion légitime n’est possible.

(49) Pour arriver maintenant à la Deuxième Partie de cette Méthode[1], j’indiquerai d’abord le but que nous nous proposons dans cette Méthode, puis les moyens de l’atteindre. Le but est d’avoir des idées claires et distinctes, c’est-à-dire des idées telles qu’elles proviennent de la pensée pure et non des mouvements fortuits du corps. Ensuite, pour ramener toutes ces idées à l’unité, nous nous efforcerons de les enchaîner et de les ordonner de telle façon que notre esprit, autant qu’il se peut faire, reproduise objectivement ce qui est formellement dans la nature, prise dans sa totalité aussi bien que dans ses parties.

(50) Touchant le premier point, il est comme nous l’avons déjà dit, requis pour notre fin qu’une chose soit conçue ou bien par sa seule essence ou par sa cause prochaine : à savoir, si une chose existe en soi ou, comme on dit communément, est cause de soi, elle de-

  1. La Règle principale de cette partie est, comme il suit de la première, de passer en revue toutes les idées que nous trouvons en nous qui sont de l’entendement pur, afin de les distinguer de celles que nous formons par l’imagination. Distinction qui se tirera des propriétés tant de l’imagination que de la connaissance.