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XXIX
la vie de spinoza.

PLUSIEURS AUTEURS RÉFUTENT SES OUVRAGES.

Ses ouvrages ont à peine été publiés que Dieu, en même temps, a suscité à sa gloire, et pour la défense de la religion chrétienne, divers champions qui les ont combattus avec tout le succès qu’ils en devaient espérer. Le docteur Théoph. Spitzelius, dans son livre qui a pour titre Infelix litterator, en nomme deux : savoir, François Kuyper, de Rotterdam, dont le livre, imprimé à Rotterdam en 1676, est intitulé Arcana atheismi revelata, etc., les Mystères profonds de l’athéisme découverts ; le second est Régnier de Mansveld, professeur à Utrecht, qui, dès l’année 1674, fit imprimer dans la même ville un écrit sur le même sujet.

L’année suivante, à savoir 1675, on vit sortir de dessous la presse d’Isaac Næranus, sous le titre d’Enervatio, Tractatus theologico-politici, une réfutation de ce Traité de Spinoza composée par Jean Bredenbourg, dont le père avait été ancien de l’Église luthérienne à Rotterdam. Le sieur George-Mathias Kœnig, dans sa Bibliothèque d’Auteurs anciens et modernes, a trouvé à propos de nommer celui-ci, p. 770, un certain tisserand de Rotterdam : textorem quemdam roterodamensem. S’il a exercé un art si mécanique, je puis assurer avec vérité que jamais homme de sa profession n’a travaillé si habilement ni produit un pareil ouvrage ; car il démontre géométriquement, en cet écrit, d’une manière claire et qui ne souffre point de réplique, que la nature n’est et ne saurait être Dieu même, comme l’enseigne Spinoza. Comme il ne possédait pas parfaitement la langue latine, il fut obligé de composer son traité en flamand et de se servir de la plume d’un autre pour le traduire en latin. Il en usa ainsi, comme il le déclare lui-même dans la préface de son livre, afin de ne laisser ni excuse ni prétexte à Spinoza, qui vivait encore, au cas qu’il lui arrivât de ne rien répliquer.

Cependant, je ne trouve pas que tous les raisonnements de ce savant homme portent coup. Il semble d’ailleurs que, dans le corps de son ouvrage, il penche beaucoup vers le socinianisme en quelques endroits ; c’est au moins le jugement que j’en fais, et je ne crois pas qu’en cela il diffère de celui des personnes éclairées, à qui j’en laisse la décision. Il est toujours certain que François Kuyper et Bredenbourg firent imprimer divers écrits l’un contre