Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

besoin pour son boire et manger, aussi bien que les remèdes qu’il prenait de temps en temps. Il n’est pas non plus fait mention de cette drogue dans le mémoire de l’apothicaire, qui pourtant fut le même chez qui le médecin d’Amsterdam envoya prendre les remèdes dont Spinoza eut besoin les derniers jours de sa vie.

Après la mort de Spinoza, son hôte prit soin de le faire enterrer. Jean Rieuwertz, imprimeur de la ville à Amsterdam, l’en avait prié, et lui avait promis en même temps de le faire rembourser de toute la dépense, dont il voulait bien être caution. La lettre qu’il lui écrivit fort au long à ce sujet est datée d’Amsterdam, du 6 mars 1678. Il n’oublie pas d’y faire mention de cet ami de Schiedam dont nous avons parlé ci-dessus, qui, pour montrer combien la mémoire de Spinoza lui était chère et précieuse, payait exactement tout ce que Van der Spyck pouvait encore prétendre de son défunt hôte. La somme à quoi ses prétentions pouvaient monter lui en était en même temps remise comme Rieuwertz lui-même l’avait touchée par l’ordre de son ami.

Comme on se disposait à mettre le corps de Spinoza en terre, un apothicaire nommé Schroder y mit opposition et prétendit auparavant être payé de quelques médicaments qu’il avait fournis au défunt pendant sa maladie. Son mémoire se montait à seize florins et deux sous ; je trouve qu’on y porte en compte de la teinture de safran, du baume, des poudres, etc. ; mais on n’y fait aucune mention ni d’opium, ni de mandragore. L’opposition fut levée aussitôt, et le compte payé par le sieur Van der Spyck.

Le corps fut porté en terre le 25 février, accompagné de plusieurs personnes illustres et suivi de six carrosses. Au retour de l’enterrement, qui se fit dans la nouvelle église sur le Spuy, les amis particuliers ou voisins furent régalés de quelques bouteilles de vin, selon la coutume du pays, dans la maison de l’hôte du défunt.

Je remarquerai, en passant, que le barbier de Spinoza donna, après sa mort, un mémoire conçu en ces termes : M. Spinoza, de bienheureuse mémoire, doit à Abraham Kervel, chirurgien, pour l’avoir rasé pendant le dernier quartier, la somme d’un florin dix-huit sous. Le prieur d’enterrement et deux taillandiers firent au défunt un pareil compliment dans leurs mémoires, aussi bien que le mercier qui fournit des gants pour le deuil de l’enterrement.

Si ces bonnes gens avaient su quels étaient les principes de Spinoza