Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/175

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XI
Pourquoi donc ces sourcils qui tremblent et se plissent ?
Ces longs cils noirs baissés où quelques larmes glissent,
Qui palpitent jetant sur le satin des chairs
Une auréole brune, une ombre veloutée,
Comme Lawrence en peint ? — Cette gorge agitée
Dans sa prison de crêpe et sous les réseaux clairs
Ondant comme la neige au vent d’une tempête ?
Quelle pensée étrange à cette folle tête
Donne un air si rêveur ? — Est-ce le souvenir
De son premier amour et de ses jours d’enfance ?
— Regret d’avoir perdu cette belle innocence ?
— Est-ce la peur de l’avenir ?


XLI
Ce n’est pas cela, non ; — elle est trop corrompue
Pour ne pas oublier, et la chaîne est rompue
Qui liait son présent à son passé. — D’ailleurs,
Je ne crois pas qu’elle ait dans un pli de son âme
Un de ces souvenirs qui, dans tout cœur de femme,
Si dépravé qu’il soit, restent des jours meilleurs,
Et se gardent sans tache au fond de sa mémoire,
Comme fait une perle au creux d’une onde noire.
— Ce n’est qu’une coquette, elle n’a pas aimé :
Le bal, un souper fin, quelque soirée à rendre,
Le plaisir l’étourdit, et l’empêche d’entendre
La voix de son cœur comprimé.