Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/177

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XLIV
Seul un homme debout auprès d’une colonne,
Sans que ce grand fracas le dérange ou l’étonne,
À la scène oubliée attachant son regard,
Dans une extase sainte enivre ses oreilles.
De ces accords profonds, de ces hautes merveilles
Qui font luire ton nom entre tous, — ô Mozart ! —
Ton génie avait pris le sien, et de ses ailes
Le poussait par delà les sphères éternelles.
L’heure, le lieu, le monde, il ne savait plus rien,
Il s’était fait musique, et son cœur en mesure
Palpitait et chantait avec une voix pure,
Et lui seul te comprenait bien.


XLV
Tout au plus dans l’entr’acte avait-il sur la belle
Jeté l’œil, froidement, et sans que sa prunelle
S’allumât, comme si le regard contre un mur
Eût été se briser. — Pourtant, comme une balle,
Cette œillade d’un bout à l’autre de la salle,
Au cœur de Véronique arrivant d’un vol sûr,
Y fit sans le vouloir une blessure grave,
— Une blessure à mort. — Ainsi l’on voit un brave
Être tué sans gloire à l’angle d’un buisson
Par le coup de fusil tiré sur quelque lièvre,
Par la tuile qui tombe, ou mourir de la fièvre
En revenant dans sa maison.